49ème Festival du Cinéma Américain de Deauville - Critique de Frémont de Babak Jalali (compétition officielle)
Comme chaque année, l’édition 2023 du Festival du Cinéma Américain de Deauville, à travers ses films en compétition, nous dressé le tableau de l’état (souvent délabré, et en quête de second souffle) des États d’Amérique.
Anaita Wali Zada y incarne Donya, une jeune réfugiée afghane de 20 ans, qui travaille pour une fabrique de fortune cookies à San Francisco. Ancienne traductrice pour l’armée américaine en Afghanistan, elle a du mal à dormir et se sent seule. Sa routine est bouleversée lorsque son patron lui confie la rédaction des messages et prédictions. Son désir s’éveille et elle décide d’envoyer un message spécial dans un des biscuits en laissant le destin agir…
Le réalisateur, Bakak Jalali, est né dans le nord de l'Iran et a grandi principalement à Londres. C’est en un troisième lieu que nous embarque ce film, à Fremont, ville de la baie de San Francisco qui abrite la plus grande communauté afghane des Etats-Unis. Là vivent notamment des interprètes ou traducteurs pour l’armée américaine en Afghanistan. Avec Carolina Cavalli, le cinéaste a rencontré de nombreuses personnes de cette communauté avant de s’atteler au scénario.
Ils nous dressent le portrait d’une femme immigrée et solitaire, qui exerce un métier en-deçà de ses qualifications mais jamais regardée avec misérabilisme ou pitié. Elle apparaît fière, combattive, déterminée, indépendante, rêveuse, et comme les fortune cookies dont elle écrit les textes, le film ne lui promet pas non plus un destin idyllique mais illumine son avenir d’un éclair d’espoir, et de nouveaux possibles. Autour d’elles gravitent des personnages de différentes communautés, et ses relations avec ces derniers permettent de parfaire son portrait, par petites touches.
Le mode de filmage, en 4/3, en plans fixes et en noir et blanc, poétise la mélancolie intemporelle qui émane de son personnage principal, lui procure de l’élégance, une douceur qui rassérène. On ressort de ce film salutairement lent et délicat, aux accents kaurismäkiens et jarmuschiens, le cœur illuminé de possibles et, comme l'est Donya, tournée vers l’avenir.