Vincent Delerm - Teaser du spectacle "Memory" par totoutard
Ce soir, Vincent Delerm sera à l'Olympia. Je n'y serai malheureusement pas. A cette occasion, retrouvez, ci-dessous, "l'article" que je lui avais consacré suite à son concert à La Cigale en 2006 et bon concert à ceux qui auront le plaisir et la chance d'y aller! Egalement, ci-dessus, un petit teaser et le résumé de ce concert, ci-dessous, histoire de regretter un peu plus...
"Memory", spectacle de et avec Vincent Delerm.
Mise en scène de Vincent Delerm, avec la complicité artistique de Macha Makeïeff.
Textes et chansons de Vincent Delerm.
Musicien Nicolas Mathuriau.
Lumières Nicolas Maisonneuve.
Il y a toujours eu du théâtre dans les spectacles de Vincent Delerm.
Depuis dix ans, ses 4 albums ont été l’occasion de mettre en scène les déambulations d'un personnage noir et blanc, ses pensées intérieures, son cinéma muet.
C'est l'inverse cette fois-ci.
Memory est un spectacle de théâtre, prétexte à présenter des chansons, écrites pour
ce projet et ne figurant sur aucun album.
Elles accompagnent la vie et les questionnements de Simon que Vincent Delerm
interprète, accompagné du multi-instrumentiste Nicolas Mathuriau.
Simon s'interroge sur le temps qui passe, sur la façon dont les modes se démodent,
sur ce que nous attendons d'une existence, sur ce qui permettrait de ne pas se
retrouver un beau soir « blanchi comme un cheval fourbu et glacé dans un lit de
hasard ».
« Avec le temps » est sa chanson préférée mais elle lui fait tellement d'effet qu'il ne
supporte de l'écouter que dans sa version italienne, en été, sur un radio-cassette de
voiture qui fait passer la bande un peu au ralenti.
Memory parle de notre rapport au temps, aux âges de la vie et à la disparition.
Avec la participation vocale et amicale de Woody Allen.
Un soir de 29 novembre 2006 à La Cigale
C’était un soir de novembre à la Cigale,
D’ailleurs cela a commencé par leurs voix si musicales
Avec aussi le charme suranné d’images un peu jaunies
Sur un rideau blanc quand même un peu décrépi
Puis, l’un s’évanouit, l’autre apparut à nos yeux attendris, tout ouïe aussi
Dans une salle qui aurait pu être de Chatenay Malabry
Ou recevoir l’archevêque de Canterbury
Mais c’était dans mon impitoyablement belle ville de Paris
Là où le faux pas n’est pas permis
Où, pour presque rien,
Cela peut s’achever en dénouement shakespearien
Et puis des piqûres d’araignées
Au doux présent nous ont ramenés
A la poésie d’une époque un peu désenchantée
Alors, son regard aiguisé il a baladé
Avec son allure élégamment dégingandée
Sur son époque passée enchantée
Qu’il sait si joliment nous faire partager, regretter
Sur son époque actuelle
Sur laquelle il pose et ose son regard faussement cruel
Avec sa voix devenue mélodieuse
Sublimée par les notes de son piano, langoureuses
Comme de belles et filmiques histoires
Qu’il conterait à d’éternels enfants dans le noir
Toujours l’ironie au bord des lèvres
La pudeur de celui qui ne renonce pas aux rêves
Qui sait que l’enfance est à jamais révolue
Celle qui ne l’a jamais autant ému
Qu’il nous appartient d’en garder toujours la folie
De la raviver par notre goût immodéré d’envies, en vie,
Qui cache sa nostalgie derrière une douce ironie
Raillant Renaud, les capricornes, les koalas, juste la vie, surtout lui
Hitchcock Truffaut les entretiens
Ca aussi, nous avons en commun
Cela ressemblait à un film de Fellini
Avec lui, nous sommes allés en Italie
Cela ressemblait à du Woody Allen
L’humour pour si bien cacher ses peines
Cela ressemblait à du Chaplin, simplement finalement à Delerm
Qui, de sa plume, a capturé les plaies des temps modernes
Empreint de toute la nostalgie de Truffaut
Cela ressemblait à un film avec Jean-Pierre Léaud
Qui se regarde et s’écoute comme un film d’antan
Aussi captivant que la voix suave de Fanny Ardant
On aurait dit ce film avec Charles Denner
Dont il aurait pu composer l’air
Cela ressemblait à du cinéma
Il devrait passer derrière la caméra
Et puis son air quelque peu distant
Peut-être intimidé par la présence de son Philippe de parent
Ou simplement l’humilité maladroite du talent
Lecteurs du Figaro Madame ou de Libé
A sa place le public l’a trop timidement entonné
Par des diapos pourtant bien aidé
Pour, avec lui, se retrouver en natation synchronisée
Il a pourtant finalement si bien su l’envoûter, l’électriser
Malgré l’air un peu blasé
De certains Parisiens bobos par Renaud raillés
Ou de provinciaux qui ont Sardou manqué
Et se sont à La Cigale égarés
Disant Delerm c’est bien mais faut aimer Delerm
A moins qu’ils n’aient eu la déveine
De dîner auparavant avec Anita Pettersen
Réveillés quand même par le duo avec Fersen
Qui nous a entraînés dans sa rengaine
La salle a enfin trouvé son entrain
Enchaînant les rappels, tapant dans les mains
Pour oublier le petit matin, en vain
Car, forcément, il succèderait, chagrin
A ce soir qu’on aurait cru sans lendemain
J’aurais aimé faire la peau
Aux maudits qui remettaient trop tôt leurs manteaux
Avant même le rideau, le dernier écho
Habitués à zapper, passer, décrier, éluder
Prisonniers encore de leurs piètres et opiniâtres réalités
Si pressés toujours de la retrouver
Métro Boulot Dodo
Finalement des amateurs égarés de la dame au chapeau
Surtout ne pas rater le dernier métro
Finalement d’autres admirateurs de Truffaut
Pourtant le repos arrive bien assez tôt
Pour se priver de celui des maux
Engloutis dans cette avalanche de jolies nostalgies
Pas seulement de Chatenay Malabry
Déjà, encore, j’étais ailleurs, sur le quai des Grands Augustins,
Avec peut-être un livre de Modiano à la main
Et tant de rêves dans ma tête
Qui plus que jamais chantaient à tue-tête
Quelque chose comme un air de fête
Et puis, il le fallait alors je suis sortie
Avec une image improbable de mariachis
Enveloppée aussi d’un voile d’une réconfortante mélancolie
Suscitée par son enchanteresse poésie
Moi et mes rêves à la folie
Qui crois aux quatrièmes de couverture
Qui peuvent effacer toutes les blessures
Qui sais les soirs d’été à Ambroise Paré
Mais aussi que tout peut en un jour changer, révéler, réveiller
Ignorant la chaleur ou le froid ou la pluie
Ignorant si j’étais à Paris ou Chatenay Malabry
En rentrant, j’ai admiré plus que jamais l'incomparable charme germanopratin
Tiens, tiens le quai des Grands Augustins
Après être passée devant le Carrousel illuminé
De son incomparable beauté auréolé
Comme une chanson de Delerm un soir d’été
Insatiable esthète acharnée
Si seulement c’était un métier
Je dois avouer avoir quelques chansons absentes regretté
Ainsi, j’aurais aimé savourer sa délicieuse heure du thé
Entendre la voix de Jean-Louis
Voir le visage de Fanny, aussi
C’était un soir à La Cigale
Avec celui que j’ai découvert par son imitateur intarissable
Dans le Deauville de Trintignant, subrepticement ensorcelant
Celui qui n’est jamais décevant
Le mien celui qui suspend le vol du temps,
Je vous écris dans le silence qui s’installe
Le silence lénifiant après un doux soir à la Cigale,
Dé(i)fiant le temps, la réalité, l’ennui
Un moment de poésie, un beau moment de vie, de nostalgie, de mélancolie, de rêveries
Juste envie de dire merci. Allez-y. Courrez-y.
Malgré la ville normale
Malgré les voitures banales
Il y aura toujours le chant des cigales
C’était juste et tellement un soir de novembre inoubliable à La Cigale