Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

CRITIQUES DES FILMS A L'AFFICHE(2004 à 2007) - Page 2

  • "Le rêve de Cassandre" et la « trilogie » londonienne de Woody Allen

    « Le rêve de Cassandre » est le troisième film de Woody Allen tourné à  Londres, après "Match point", qui reste selon moi le meilleur scénario de Woody Allen, et après "Scoop" dont vous pouvez également retrouver mes critiques ci-dessous. Si on peut dénombrer de nombreuses similitudes entre « Match point » et « « Le rêve de Cassandre », la légèreté de « Scoop », le place un peu à part de ces deux films noirs dans lesquels Woody Allen n’est d’ailleurs pas présent à la différence de « Scoop ».

    Le rêve de Cassandre : crime et châtiments

    6f104c5868d07f78fadc2a6bd204a063.jpg

    Deux frères désargentés mais ambitieux, surtout l’un d’eux, Ian, incarné par Ewan McGregor, s'offrent un voilier au-dessus de leurs modestes moyens, ils le baptisent "Cassandra's Dream", titre aussi prémonitoire que les prophéties tragiques de ladite Cassandre dans l’Antiquité.  Ian travaille dans le restaurant de leurs parents tandis que son frère Terry travaille dans un garage. Ian tombe amoureux d’Angela, comédienne de son état et surtout ambitieuse. Pour satisfaire leurs ambitions, Terry va s’endetter considérablement au jeu et Ian va se donner des airs de riche investisseur pour la séduire. Leur seul moyen de s’en sortir c’est l’oncle Howard (Tom Wilkinson) qui a fait fortune en Californie, l’emblème de la réussite sociale de la famille que leur mère ne cesse de citer en exemple. En contrepartie de son aide financière il leur propose un macabre marché : tuer un homme...

     Aller voir un film de Woody Allen c’est un peu comme pour Cécilia (non pas celle-là, mais celle incarnée par Mia Farrow…) qui revoit inlassablement "La Rose Pourpre du Caire" dans le film éponyme, c’est y aller les yeux fermés avec la promesse d’un voyage cynique ou comique, léger ou grave, parfois tout cela  à la fois, mais un voyage en tout cas surprenant et captivant. Ce « Rêve de Cassandre » qui apporte encore une nouvelle pierre à l’édifice qu’est la filmographie fascinante et hétéroclite de Woody Allen, ne déroge pas à la règle. Il s’inscrit dans la lignée des films les plus noirs du cinéaste et apporte encore quelque chose de nouveau.

    D’abord, il y excelle dans l’art de l’ellipse. Là où chez d’autres cinéastes cela constituerait une faiblesse scénaristique frustrante pour le spectateur, cela rend ici la logique machiavélique encore plus implacable et le récit encore plus limpide. Rien n’est superflu. En un plan,  en un geste filmé avec une apparente désinvolture (le père qui trébuche, dans un coin de l’écran, comme ça, mine de rien mais quand même, un regard désarçonné ou appuyé etc) il dépeint magnifiquement un personnage et surtout ses faiblesses. Si Woody Allen s’est toujours intéressé aux travers humains, il ne se cache plus derrière le masque de l’humour. C’est ici un film sombre qui se revendique comme tel.

    Woody Allen est toujours un virtuose de la réalisation : ici, pas de mouvements de caméras démonstratifs mais une composition du cadre qui sert admirablement l’intrigue et qui, sans avoir l’élégance revendiquée et signifiante de « Match point »,  n’en est pas moins soignée. La réalisation, les indices scénaristiques sont moins tonitruants que dans « Match point » mais ils s’enchaînent avec une évidence édifiante.  Pas de tonitruance non plus dans les références antiques (Médée, Cassandre) judicieusement distillées.

    Le propos est tout aussi cruel, cynique, voire lucide que dans « Match point ». Le moteur est aussi le même : l’ambition, l’ascension sociale, l’amoralité, savoureuse pour le spectateur. Et si Woody Allen n’est pas Ken Loach il place ce film dans un milieu social moins favorisé que celui dans lequel se situent habituellement ses films, et cela sonne tout aussi juste. Les règles du jeu social, les désirs irrépressibles de revanche sociale et les multiples ressources scénaristiques de leurs conséquences l’intéressent toujours autant, quel que soit le pays ou le milieu social.

    Comme dans « Match point », il est question de chance, de malchance surtout ici, de culpabilité, d’ambition dévastatrice. « Match point » était un crime sans châtiment, c’est d’ailleurs ce qui le rendait en partie si passionnant et jubilatoire, c’est l’inverse qui rend « Le rêve de Cassandre » prenant: c’est un crime avec châtiments. Ajoutez à cela un Ewan McGregor aveuglé par son ambition avec un air faussement irréprochable et un Colin Farrell que la nervosité, l’emprise du jeu –dans les deux sens du terme d’ailleurs-, rendent presque méconnaissable, faillible  et crédible en être faillible (pas de super héros chez Woody ) en proie aux remords et aux doutes, tous deux parfaits dans leurs rôles respectifs, une musique lancinante (de Philip Glass) suffisamment inquiétante, et vous obtiendrez un « Rêve de Cassandre » délicieusement cauchemardesque. Embarquez sans  plus attendre !

    Scoop

    medium_scoop.jpgAprès Match point, perfection du genre, film délicieusement immoral au scénario virtuose totalement et magnifiquement scénarisé en fonction de son dénouement et de la balle de match finale, quel film pouvait donc bien  ensuite réaliser Woody Allen ? Evidemment pas un film noir qui aurait inévitablement souffert de la comparaison. Si, à l’image de Match point, Woody Allen a de nouveau délaissé New York -qu’il a tellement sublimée et immortalisée- pour Londres, si comme dans Match point, il a de nouveau eu recours à Scarlett Johansson comme interprète principale,  il a donc néanmoins délaissé le film noir pour retourner à la comédie policière à l’image d’Escrocs mais pas trop ou du Sortilège du scorpion de Jade. Si le principal atout de Match point était son scénario impeccable, c’est ailleurs qu’il faut aller chercher l’intérêt de ce Scoop.

    L’intrigue est ainsi délibérément abracadabrantesque et improbable. Le célèbre journaliste d'investigation Joe Strombel, arrivé au Purgatoire, y rencontre la secrétaire de l’aristocrate Peter Lyman, également politicien à l’image irréprochable de son état. Elle lui révèle qu’elle aurait été empoisonnée par ce dernier après avoir découvert que Peter serait en réalité le tueur en série surnommé « le Tueur au Tarot » qui terrorise Londres. Professionnel et avide de scoops jusqu’à la mort et même après, Joe Strombel, va se matérialiser à une jeune étudiante en journalisme (et accessoirement en orthodontie), la jeune Sondra (Scarlett Johansson) lorsqu’elle est enfermée dans une boîte lors du tour de magie de l’Américain Splendini (Woody Allen). Croyant avoir trouvé le scoop du siècle elle décide de faire la connaissance de Peter Lyman (charismatique et mystérieux Hugh Jackman) pour le démasquer, avec, comme « perspicace » collaborateur, Splendini. Evidemment elle va tomber amoureuse (de Peter Lyman, pas de Woody, celui-ci ayant ici renoncé au rôle de l’amoureux, dans un souci de crédibilité, ou dans un sursaut de lucidité, pour jouer celui du protecteur). Elle n’aurait peut-être pas dû…

    Woody Allen est donc passé de la noirceur à la légèreté. C’est agréable la légèreté, aussi, surtout après la noirceur, aussi parfaite soit-elle. Woody Allen nous revient aussi en tant qu’acteur, fidèle à lui-même, balbutiant, maladroit, chaplinesque, woodyallenesque plutôt, adepte de l’ironie et de l’autodérision, et narcissique de religion (si, si, vous verrez, ça existe). Intrigue abracadabrantesque donc mais c’est aussi ce qui fait le charme de ce scoop. Preuve que légèreté et noirceur ne sont pas totalement incompatibles, Woody Allen a saupoudré son scoop d’humour exquisément noir avec notamment une mort presque sympathique en  grande faucheuse embarquant ses défunts et bavards voyageurs. Woody Allen lui aussi nous embarque, dans un jeu, dans son jeu. Il ne nous trompe pas. Nous en connaissons les règles, les codes du genre : la désinvolture et la loufoquerie sont de mise.

    La mise en scène reste cependant particulièrement soignée, Scarlett Johansson est de nouveau parfaite, cette fois en étudiante naïve  et obstinée. Comme la plupart des bonnes comédies, ce Scoop  fonctionne sur les contrastes  d’un duo impossible, celui de la journaliste écervelée et obstinée et de son protecteur farfelu. Certes, vous n’explosez pas de rire mais vous avez constamment le sourire aux lèvres entraînés par l’entrain communicatif et l’humour décalé de Woody Allen qui montre à nouveau que l’on peut être un réalisateur particulièrement prolifique sans rien perdre de son enthousiasme et de sa fraîcheur. Une bonne humeur tenace et contagieuse vaut après tout mieux qu’un rire explosif, non ?

    Un film rythmé, léger, burlesque, ludique à la mise en scène soignée avec une touche d’humour noir même si on peut regretter que la morale soit sauve et même si on peut donc regretter l’immoralité jubilatoire de Match point. Ce scoop-là n’est ni sidérant, ni inoubliable, mais néanmoins il vaut la peine d’être connu.

    Match point

    match.jpg

    Un film de Woody Allen comme le sont ceux de la plupart des grands cinéastes est habituellement immédiatement reconnaissable, notamment par le ton, un humour noir corrosif, par la façon dont il (se) met en scène, par la musique jazz, par le lieu (en général New York).

    Cette fois il ne s'agit pas d'un Juif New Yorkais en proie à des questions existentielles mais d'un jeune irlandais d'origine modeste, Chris  Wilton   (Jonathan Rhys-Meyer), qui se fait employer comme professeur de tennis dans un club huppé londonien. C'est là qu'il sympathise avec Tom Hewett (Matthew Goode), jeune homme de la haute société britannique avec qui il partage une passion pour l'opéra. Chris fréquente alors régulièrement les Hewett et fait la connaissance de Chloe (Emily Mortimer), la sœur de Tom, qui tombe immédiatement sous son charme. Alors qu'il s'apprête à l'épouser et donc à gravir l'échelle sociale, il rencontre Nola Rice (Scarlett Johansson), la pulpeuse fiancée de Tom venue tenter sa chance comme comédienne en Angleterre et, comme lui, d'origine modeste. Il éprouve pour elle une attirance immédiate, réciproque. Va alors commencer entre eux une relation torride...

    match6.jpg

    Je mets au défi quiconque n'ayant pas vu le nom du réalisateur au préalable de deviner qu'il s'agit là d'un film de Woody Allen, si ce n'est qu'il y prouve  son génie, dans la mise en scène, le choix et la direction d'acteurs, dans les dialogues et dans le scénario, « Match point » atteignant d'ailleurs pour moi la perfection scénaristique.

    Woody Allen réussit ainsi à nous surprendre, en s'affranchissant des quelques « règles » qui le distinguent habituellement : d'abord en ne se mettant pas en scène, ou en ne mettant pas en scène un acteur mimétique de ses tergiversations existentielles, ensuite en quittant New York qu'il a tant sublimée. Cette fois, il a en effet quitté Manhattan pour Londres, Londres d'une luminosité obscure ou d'une obscurité lumineuse, en tout cas ambiguë,  à l'image du personnage principal, indéfinissable.

    Dès la métaphore initiale, Woody Allen nous prévient (en annonçant le thème de la chance) et nous manipule (pour une raison que je vous laisse découvrir), cette métaphore faisant écho à un rebondissement (dans les deux sens du terme) clé du film. Une métaphore sportive qu'il ne cessera ensuite de filer : Chris et Nola Rice se rencontrent ainsi autour d'une table de ping pong et cette dernière qualifie son jeu de « très agressif »...

    « Match point » contrairement à ce que son synopsis pourrait laisser entendre n'est pas une histoire de passion parmi d'autres (passion dont il filme d'ailleurs et néanmoins brillamment l'irrationalité et  la frénésie suffocante que sa caméra épouse) et encore moins une comédie romantique (rien à voir avec « Tout le monde dit I love you » pour lequel Woody Allen avait également quitté les Etats-Unis) ; ainsi dès le début s'immisce une fausse note presque imperceptible, sous la forme d'une récurrente thématique pécuniaire, symbole du mépris insidieux, souvent inconscient, que la situation sociale inférieure du jeune professeur de tennis suscite chez sa nouvelle famille,  du sentiment d'infériorité que cela suscite chez lui mais aussi de sa rageuse ambition que cela accentue ; fausse note qui va aller crescendo jusqu'à la dissonance paroxystique, dénouement empruntant autant à l'opéra qu'à la tragédie grecque. La musique, notamment de Verdi et de Bizet, exacerbe ainsi encore cette beauté lyrique et tragique.

    match5.jpg



    C'est aussi le film des choix cornéliens, d'une balle qui hésite entre deux camps : celui de la passion d'un côté, et de l'amour, voire du devoir, de l'autre croit-on d'abord ; celui de la passion amoureuse d'un côté et d'un autre désir, celui  de réussite sociale, de l'autre (Chris dit vouloir  « apporter sa contribution à la société ») réalise-t-on progressivement. C'est aussi donc le match de la raison et de la certitude sociale contre la déraison et l'incertitude amoureuse.

     A travers le regard de l'étranger à ce monde, Woody Allen dresse le portrait acide de la « bonne » société londonienne avec un cynisme chabrolien auquel il emprunte d'ailleurs une certaine noirceur et une critique de la bourgeoisie digne de  La cérémonie que le dénouement rappelle d'ailleurs.

    Le talent du metteur en scène réside également dans l'identification du spectateur au (anti)héros et à son malaise croissant qui trouve finalement la résolution du choix cornélien inéluctable, aussi odieuse soit-elle. En ne le condamnant pas, en mettant la chance de son côté, la balle dans son camp, c'est finalement notre propre aveuglement ou celui d'une société éblouie par l'arrivisme que Woody Allen stigmatise. Parce-que s'il aime (et d'ailleurs surtout désire) la jeune actrice, Chris aime plus encore l'image de lui-même que lui renvoie son épouse : celle de son ascension.

    Il y a aussi du Renoir dans ce Woody Allen là qui y dissèque les règles d'un jeu social, d'un match fatalement cruel ou même du Balzac car rarement le ballet de la comédie humaine aura été aussi bien orchestré.

     Woody Allen signe un film d'une férocité jubilatoire, un film cynique sur l'ironie du destin, l'implication du hasard et  de la chance. Un thème que l'on pouvait notamment trouver dans « La Fille sur le pont » de Patrice Leconte. Le fossé qui sépare le traitement de ce thème dans les deux films est néanmoins immense : le hiatus est ici celui de la morale puisque dans le film de Leconte cette chance était en quelque sorte juste alors qu'elle est ici amorale, voire immorale, ...pour notre plus grand plaisir. C'est donc l'histoire d'un crime sans châtiment dont le héros, sorte de double de Raskolnikov, est d'ailleurs un lecteur assidu de Dostoïevski (mais aussi d'un livre sur Dostoïevski, raison pour laquelle il épatera son futur beau-père sur le sujet), tout comme Woody Allen à en croire une partie la trame du récit qu'il lui « emprunte ».

    Quel soin du détail pour caractériser ses personnages, aussi bien dans la tenue de Nola Rice la première fois que Chris la voit que dans la manière de Chloé de jeter négligemment un disque que Chris vient de lui offrir, sans même le remercier . Les dialogues sont tantôt le reflet du thème récurrent de la chance, tantôt d'une savoureuse noirceur (« Celui qui a dit je préfère la chance au talent avait un regard pénétrant sur la vie », ou citant Sophocle : « n'être jamais venu au monde est peut-être le plus grand bienfait »...). Il y montre aussi on génie de l'ellipse (en quelques détails il nous montre l'évolution de la situation de Chris...).

    match3.jpg

    Cette réussite doit aussi beaucoup au choix des interprètes principaux : Jonathan Rhys-Meyer qui interprète  Chris, par la profondeur et la nuance de son jeu, nous donnant l'impression de jouer un rôle différent avec chacun de ses interlocuteurs et d'être constamment en proie à un conflit intérieur ; Scarlett Johansson d'une sensualité à fleur de peau qui laisse affleurer une certaine fragilité (celle d'une actrice en apparence sûre d'elle mais en proie aux doutes quant à son avenir de comédienne)  pour le rôle de Nola Rice qui devait être pourtant initialement dévolu à Kate Winslet ; Emily Mortimer absolument parfaite en jeune fille de la bourgeoisie londonienne, naïve, désinvolte et snob qui prononce avec la plus grande candeur des répliques inconsciemment cruelles(« je veux mes propres enfants » quand Chris lui parle d'adoption ...). Le couple que forment Chris et Nola s'enrichit ainsi de la fougue, du charme électrique, lascif et sensuel de ses deux interprètes principaux.

    match2.jpg



    La réalisation de Woody Allen a ici l'élégance perfide de son personnage principal, et la photographie une blancheur glaciale semble le reflet de son permanent conflit intérieur.

     Le film, d'une noirceur, d'un cynisme, d'une amoralité inhabituels chez le cinéaste, s'achève par une balle de match grandiose au dénouement d'un rebondissement magistral qui par tout autre serait apparu téléphoné mais qui, par le talent de Woody Allen et de son scénario ciselé, apparaît comme une issue d'une implacable et sinistre logique  et qui montre avec quelle habileté le cinéaste a manipulé le spectateur (donc à l'image de Chris qui manipule son entourage, dans une sorte de mise en abyme). Un match palpitant, incontournable, inoubliable.  Un film audacieux, sombre et sensuel qui mêle et transcende les genres et ne dévoile réellement son jeu qu'à la dernière minute, après une intensité et un suspense rares allant crescendo. Le témoignage d'un regard désabusé et d'une grande acuité sur les travers et les blessures de notre époque. Un chef d'œuvre à voir et à revoir !

    « Match point » est le premier film de la trilogie londonienne de Woody Allen avant « Scoop » et « Le rêve de Cassandre ».

    Autres critiques de films (à voir également) de Woody Allen à lire sur inthemoodforcinema.com :  « Vicky Cristina Barcelona » et « Whatever works » .

    Suivez également les autres blogs in the mood : In the mood for Cannes, In the mood for Deauville, In the mood for luxe.

  • In the mood for news 9 : l’actualité cinématographique de la semaine du 14 novembre 2007

    L’actualité bloguesque

    Comme promis dans le carnet de bord (dernière nouveauté du blog, dans la colonne de droite de ce blog, pour vous tenir régulièrement informés des infos à venir ou  pour lire de brèves infos exclusives, ou non, en direct, ou non,  essentielles ou dérisoires, mes billets d’humeur, mauvaise ou bonne…)

    Les films de la semaine recommandés par « In the mood for cinema »

    7cfc05aee2d9dfe41975401bb51c0d6e.jpg

    Je vous recommande tout d’abord, « Once » de John Carney qui a reçu la mention spéciale du jury au dernier Festival du Film Britannique de Dinard. Extrait de mon compte-rendu du Festival :

    …Les voix comme des complaintes mélancoliques des deux acteurs principaux de « Once » de John Carney, un film dans lequel la musique cristallise les sentiments des deux personnages principaux (interprétés par Glen Hansard et Marketa  Irglova, dont les voix sont aussi justes que leur jeu), un film où la musique prend le pas sur les paroles et le scénario, mais qu’importe, ce film agit comme un argumentaire mélodieux  et irréfutable, et nous conquiert progressivement pour nous charmer totalement lors de sa dernière scène. Le cœur l’emporte sur la raison, là encore, sa sincérité, sa « passion et son courage » pour reprendre les mots de Josiane Balasko lors de la clôture lorsqu’elle leur a remis une « mention spéciale »  (tout en précisant qu’elle n’avait rien à leur offrir si ce n’était l’« amitié et l'admiration » du jury, cette mention spéciale créée pour l’occasion étant avant tout honorifique, et venant à point nommé pour ce film musical inclassable) l’emportant finalement sur ses faiblesses cinématographiques. Avant la projection, le toujours discret, passionné et dynamique   directeur du festival, Hussam Hindi, nous avait prévenus : après la projection nous serions enfermés dans la salle pour une surprise, déplorant malicieusement l’absence de l’équipe pour présenter le film. A peine la projection terminée, des notes de musique s’élèvent dans un silence recueilli et admiratif. Mes deux voisines, que je n’ai pas la malchance de connaître, donneuses de leçon, ayant bavardé pendant tout le début du film,  après avoir ponctué de leurs soupirs de lassitude la projection, de désabusés « et en plus ça marche » au regard de l’enthousiasme qui s’empare peu à peu du public faisant bientôt ressembler la salle de cinéma à une salle de concert et se terminant par une ovation mémorable, mes deux voisines donc, exhibant leur cynisme et leur indifférence comme une médaille, méprisant l’émotion des autres qui n’ont probablement pas compris ce qu’elles ont visiblement compris. Je me laisse emporter par mes émotions, par ce petit moment de magie fugace et délectable, faisant fi des sarcasmes de mes clairvoyantes voisines, me glorifiant de leur mépris, de leur  pseudo snobisme intellectuel, heureuse de n’être pas encore imperméable aux choix du cœur, et d’écouter parfois plus les sentiments que la raison, toute cinématographique soit-elle. Je vous laisse juges, pour voir la vidéo de ce mini concert, cliquez ici -un peu de partience, cette vidéo sera disponible ici demain-: (désolée pour la mauvaise qualité du son et des images…).

    87ebe9adfb185c02dc530db3dee00813.jpg

    L’autre film recommandé par « In the mood for cinema" cette semaine : « De l’autre côté » de Fatih Akin, prix du scénario au dernier Festival de Cannes, quête d’identité, double culture, deuil, autant de thèmes forts et fragiles qui sont au centre de ce film  poignant et captivant au scénario d’une densité et d’une précision rares.

    J’attends également avec impatience le déjanté dernier Noémie Lvovsky « Faut que ça danse »  après l’enchanteur « Les sentiments ». Je vous en parle bientôt, ici, ainsi que du dernier film de Francis Ford Coppola « L’homme sans âge ».

    L’actualité box-office de la semaine

     « Les promesses de l’ombre » de David Cronenberg est en tête du box-office cette semaine avec 262572 spectateurs sur 256 salles  alors que Marc Esposito est arrivé à 1236873 spectateurs avec Le cœur des hommes 2.

    L’actualité générale

    -Les caméras subjectives organisées par les étudiants du Master Ciné Création de la Sorbonne reprennent avec, de nouveau, un générique prestigieux et éclectique (Alain Corneau, Luc Besson, Benoît Poelvoorde, Jan Kounen et Jean-Jacques Rousseau, Raoul Ruiz) et pour thème étrange cette année « Qu’est-ce qu’une star? ».

    db7e2eb32a245dd6bcb3560f41178921.gif

     C’est toujours au Centre Saint-Charles, 47 rue des Bergers dans le 15ème arrondissement, et c’est toujours le mardi de 19H à 21H, entre le 27 novembre et le 8 janvier 2008. Programme détaillé, ici : http://cinecreation.paris1.free.fr/camera_programme0708.php

    -J’en profite pour signaler la sortie d’un ouvrage consacré aux Caméras subjectives organisées par la 1ère promotion du Master professionnel autour de la question des films à petit budget, avec Alain Cavalier, Pierre Chevalier, Raoul Coutard, Marin Karmitz, Claude Miller, Benoît Peeters et Gilles Sandoz.  Ces Caméras Subjectives sont publiées aux éditions du Rocher, en partenariat avec Arte, Ciné-Cinéma, France Culture, Les Inrockuptibles, Le Monde2. 

    -Les scénaristes de cinéma et de télévision américains poursuivent leur grève réclamant notamment plus de droits d’auteur quand leur œuvre est diffusée sur les téléphones portables ou les baladeurs numériques. Ils souhaitent également un pourcentage plus élevé de leurs droits d’auteurs sur les vidéos DVD et l’extension des tarifs syndicaux et des avantages sociaux. La grève intervient après plus de trois mois de négociations infructueuses. Ces revendications ont été rejetées par le puissant syndicat des producteurs américains. En 1988 les scénaristes s’étaient mis en grève pendant 22 semaines et ce conflit avait coûté environ 500 millions de dollars aux studios (source AFP) A quand une grève en France pour un cinéma moins formaté, pas forcément destiné à une diffusion à 20H30 sur une chaîne généraliste potentiellement frileuse ?

    A la semaine prochaine pour un nouveau numéro d’In the mood for news et en attendant retrouvez de nombreuses critiques inédites, avec demain, « Le rêve de Cassandre » de Woody Allen.

    Sandra.M

  • In the mood for news 8 : l’actualité cinématographique de la semaine du 7 novembre

    Les sorties de la semaine

    Cette semaine du 7 novembre est assez pauvre en sorties cinématographiques, du moins il n'y a pas vraiment de coup de cœur d’ « In the mood for cinema » cette semaine. Je précise néanmoins que je n’ai vu qu’un film dont la sortie est programmée demain, à savoir « Dans la vallée d’Elah » de Paul Haggis, ( le réalisateur du pourtant excellent film choral « Collision » qui avait reçu le grand prix au Festival du Cinéma Américain de Deauville, en 2005) programmé en avant-première au dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville. Voici mon article à ce sujet publié sur « In the mood for Deauville », repris ci-dessous.

    b1974d2c1bc7d877998eecd4b704cf2b.jpg

    Chaque jour ou presque des images d’attentats suicides en Irak nous parviennent. Nous parviennent ou ne nous parviennent plus d’ailleurs car trop atroces pour sembler réelles, elles créent parfois une distance, elles nous paraissent parfois chimériques et factices comme les images d’un blockbuster outrancier.  La réalité ressemble parfois dramatiquement à du mauvais cinéma. La difficulté mais aussi la nécessité pour le cinéma de s’en emparer est donc d’autant plus grande. Plusieurs films de ce festival ont ainsi pour cadre le conflit irakien notamment « Dans la vallée d’Elah » de Paul Haggis et « Grace is gone » de James C.Strouse. Le premier était particulièrement attendu, étant le seul oscarisé deux années de suite, pour « Million dollar baby » mais surtout « Collision » qui avait également remporté le grand prix à Deauville en 2005. Ce film portait d’ailleurs déjà sur les répercussions du 11 septembre 2001 et la paranoïa qui s’était alors emparée de l’Amérique. « Dans la vallée d’Elah » raconte la quête d’un père dont le fils, de retour d’Irak pour sa première permission, disparaît mystérieusement et est alors signalé comme déserteur.  Quête de son fils puis de la vérité une fois ce dernier retrouvé mort et atrocement mutilé. Ce père, un ancien membre de la police militaire est interprété par Tommy Lee Jones. Il sera aidé dans ses recherches par Emily Sanders (Charlize Theron), officier de police de la juridiction du Nouveau Mexique où le jeune soldat a été aperçu pour la dernière fois… Paul Haggis avait visiblement un désir profond et violent d’évoquer ce sujet, de lutter et se révolter à sa manière. C’est un peu comme si les émotions, probablement sincères, s’étaient bousculées dans son esprit mais qu’il n’était pas parvenu à les canaliser, paralysé par l’enjeu, dépassant soudain le cinéma, et nous jetant ainsi en pleine figure sa révolte comme un magma incontrôlable et chaotique. Le but est tellement ouvertement affiché par le cinéaste, les moyens sont tellement flagrants qu’ils en perdent presque leur force. Plutôt que de nous montrer les images insoutenables du journal télévisé,  Paul Haggis égrène les images de la guerre par petites touches, par le prisme d’un écran de téléphone avec lequel le jeune soldat avait filmé la guerre. Et puis l’horreur surgit brutalement, s’immisçant dans la réalité américaine apparemment si loin de ces images de guerre, d’un pays pourtant en guerre, si loin, là-bas de l’autre côté de l’écran de télévision et finalement donc si irréelles. La bonne idée est donc d’évoquer les conséquences de la guerre dans la société américaine, de la faire passer de la virtualité à la réalité : chaque américain peut alors s’identifier à ce père qui recherche son fils et le retrouve mutilé… davantage qu’à ces images de massacres pourtant non moins tragiques. Paul Haggis s’est donc intéressé au comportement des soldats une fois de retour du front : leur comportement est anormal et déséquilibré, inhumain (ou justement trop humain ?) et animal. La guerre, les horreurs dont ils ont été témoins et parfois les auteurs les ont déshumanisés….ou peut-être l’inverse , c’est selon…  Ils ont le droit quasi divin de droit et de mort, ce droit qui n’appartenait auparavant qu’à ces fictions qu’ils regardaient probablement avec désinvolture, comme celles d’un ailleurs, d’une illusion impossibles, bref comme une fiction d’où la difficulté pour la fiction de s’emparer de ce qui apparaît déjà comme fictif. Ils ont perdu leurs repères et toute notion de normalité. Elah fut ainsi, selon la bible, le théâtre de l’affrontement de David et Goliath. Le titre évoque ainsi les suites tragiques d’une guerre qui semble perdue d’avance : le traumatisme des soldats de retour à la vie civile. Paul Haggis explique ainsi le titre : « Saül envoya David dans la vallée d’Elah avec seulement cinq pierres pour affronter Goliath. Je pose la question : Qui oserait cela aujourd’hui ? Qui demanderait à un enfant de se battre contre un géant ? Envoyer des jeunes hommes et des jeunes femmes faire la guerre engage notre responsabilité collective ».Si le dessein et le propos sont louables,  le film est selon moi néanmoins raté (mais cela n’engage que moi, le film a été longuement ovationné lors de son projection en avant-première au CID, voir vidéos ) pour les raisons évoquées ci-dessus (l’impossibilité pour Paul Haggis de contenir son émotion et de produire un film « ordonné ») mais aussi parce que certaines situations sont totalement improbables recréant la distance de l’écran de télévision, notamment parce que les personnages secondaires sont caricaturés : ainsi va-t-il de l’épouse et mère évidemment éplorée (Susan Sarandon) mais aussi de la relation entre le père du jeune soldat et l’officier de police (Charlize Theron, remarquable néanmoins) : comment croire qu’on laisse un père ainsi s’immiscer dans une enquête en cours, tout ancien militaire qu’il soit ? Comment peut-on trouver crédible que l’officier de police l’invite chez lui à bavarder autour d’un verre, à raconter une histoire à l’enfant de l’officier de police (un fils évidemment, l’histoire de David contre Goliath évidemment aussi) etc ? Premier des 7 films qui vont sortir prochainement concernant la guerre en Irak, l’intérêt  de ce film est donc son sujet davantage que le traitement de celui-ci. Reste l’image finale : celle d’un drapeau américain déchiquetée flottant dans l’air. Celle d’une Amérique blessée, coupable et victime, mais oui, blessée en tout cas, qui continue à se battre, aveugle ou aveuglée, malgré les stigmates de la guerre. Le combat de David contre Goliath. Mais ce n’est pas la vallée d’Elah.  Mais ce ne sont pas que des images, juste que des images, surtout atroces chaque soir, entre l’entrée et le plat de résistance. C’est l’Irak. Un combat  jusqu’à quand et jusqu’où… ?

    17a3eef36fc7a68275e5a870e0b79216.jpg
    L'avant-première de "Dans la vallée d'Elah" au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2007. Photo: Sandra.M

    Pour lire l’intégralité de cet article et voir mes vidéos exclusives de la présentation du film en avant-première au Festival du Cinéma Américain de Deauville, cliquez sur le lien suivant :

    http://inthemoodfordeauville.hautetfort.com/archive/2007/09/06/dans-la-vallee-d-elah-de-paul-haggis-et-grace-is-gone-de-ja.html

    En bonus, pour ne pas rester sur une note négative, ma critique de « Collision » publié lors de mon récit du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2005, ici : http://www.inthemoodforcinema.com/festival_du_cinema_americain_de_deauville_2005/

    646d316dae1efa8d27d3d1a06d267973.jpg

     Crash  (Collision) réalisé par Paul Haggis,  également auteur du dernier film de Clint Eastwood  Million dollar baby. Avant d’être celle des véhicules de ses protagonistes, cette collision est d’abord celle de destins qui s’entremêlent, s’entrechoquent : une femme au foyer et son mari procureur, deux inspecteurs de police, un réalisateur de télévision et sa femme, un serrurier mexicain, un voleur de voitures, une nouvelle recrue de la police, un couple de coréens.  En 36 heures, tous ces destins vont basculer. Vers l’ombre ou la lumière. L’effroi souvent, avant. A priori leur seul point commun est de vivre à Los Angeles, d’être confrontés à la même incommunicabilité, à la même angoisse dans cette ville tentaculaire, cité des Anges aux allures diaboliques. Le film choral est un genre périlleux, son scénario se doit donc d’être particulièrement ciselé pour que ce soit une réussite et « Crash » en est une, indéniablement, magistralement. Tous ces destins se croisent, se mêlent, se frôlent, se heurtent, se fracassent sans que cela ne semble improbable ou artificiel grâce à la virtuosité de la mise en scène et du scénario. Dès les premières secondes du film, le spectateur se retrouve plongé dans l’obscurité menaçante et impersonnelle d’une Los Angeles effrayée plus qu’effrayante ou effrayante parce qu’effrayée, dans un crash qui fait exploser les limites que chacun s’était fixées, les vitres symboliques de ces véhiculent qui les isolent, les enferment dans leur monde dont ils ne veulent surtout pas sortir. Frénésie de bruits, d’images, de nationalités, de lumières scintillantes et aveuglantes, regards perdus, angoissés, menaçants : dès les premières secondes la tension est palpable. Los Angeles : ville affolée, cosmopolite, paranoïaque,  en proie aux préjugés, ville emblématique des tensions exacerbées par l’après 11 septembre.  La collision est ici celle de l’étrangeté qui s’immisce dans chaque existence, qui conduit chaque personnage à quitter sa bulle protectrice, parfois ses préjugés, un heurt impromptu dont aucun ne peut ressortir indemne. Cette collision est celle d’univers qui n’auraient jamais dû se croiser et est aussi engendrée par la collision de ces univers qui n’auraient jamais dû se rencontrer. Collision entre les principes et leur application, les préjugés et leurs dérives. Cette collision est intelligemment mise en scène, parfois soulignée par une « collision musicale » : leitmotiv, musique dissonante etc. L’intelligence réside aussi dans la caractérisation des personnages, a priori manichéens, se révélant finalement beaucoup plus ambigus, humains donc, que ce qu’ils auraient pu paraître de prime abord (au premier rang desquels Matt Dillon qui interprète d’une manière époustouflante un personnage de policier a priori foncièrement antipathique), beaucoup plus ambigus que ce qu’ils sont trop souvent dans le cinéma américain, un cinéma parfois trop consensuel. Lors de la conférence de presse Paul Haggis déclare avoir été lui-même victime d’un car-jacking à L.A et s’être vu braquer un revolver sur la tempe, évènement déterminant pour le début de l’écriture du scénario, d’où peut-être cette impression de réalisme malgré les nombreux effets stylistiques auxquels il recourt. Chacun des personnages de « Crash » est à la frontière du gouffre, des larmes, du « crash », d’une inéluctable et fatale collision. En résulte un film bouleversant, poétique aussi, comme ces face-à-face se faisant étrangement écho du père avec sa petite fille, ou du policier sauvant la vie à celle qu’il avait humiliée. Sans tomber dans le pathos, cette scène reste judicieusement elliptique  et non moins intense. C’est encore un film intelligemment provocateur qui débusque les faux-semblants, l’absurdité de la peur irrationnelle de l’autre. Je ne vous en dis pas davantage pour qu’avec vous aussi la magie opère, pour que vous vous laissiez happer par les couloirs labyrinthiques et non moins limpides de ce film mosaïque et de ses hasards et coïncidences. Dans une société où l’on catégorise, classifie, range les individus à la vitesse de la lumière ou d’un simple regard, ce film devient salutaire. Peut-être pourrait-on reprocher à Paul Haggis des ralentis superflus mais son film n’en reste pas moins fascinant, fascination et poésie que ne suscitaient et ne possédaient pas les deux films desquels on peut rapprocher Crash : Magnolia  de Paul Anderson et Short cuts de Robert Altman. Il vous heurtera très certainement, un choc nécessaire … L’instant magique du festival, très certainement.

    3e458a4a1e9c6dcea80a8725f5037a90.jpg

    Je n’ai pas encore vu le dernier Woody Allen « Le rêve de Cassandre » sorti la semaine dernière et que je ne manquerai pas de critiquer ici  dès que ce sera fait ainsi que le dernier film de David Cronenberg, « Les promesses de l’ombre » qui sort demain que je ne manquerai également pas d’aller voir.

    4487ef9044f0e390765571e9762e1ea7.jpg

    L’actualité bloguesque de la semaine

    A moins d’avoir été totalement isolés du monde (bloguesque), vous avez certainement entendu parler de Facebook, la nouvelle plate-forme incontournable qui permet de créer des groupes et des réseaux sur internet, et sur laquelle les politiques, notamment, s’empressent de figurer dans la perspective des élections municipales, mais aussi les groupes et les idées les plus farfelus, et parfois intéressants.

    « In the mood for cinema » ne pouvait pas ne pas y être, parce que c'est farfelu ou intéressant, à vous de choisir:-). J’ai donc créé 3 groupes, je vous invite à vous y inscrire…

    Le premier est destiné aux lecteurs et lectrices d’ « In the mood for cinema » et/ou d’ « In the mood for Deauville » et « In the mood for Cannes ».

    Le deuxième est destiné aux inconditionnels du Festival du Cinéma Américain de Deauville . 

     Le troisième s’intitule « Pour la création d’un festival de cinéma digne de ce nom à Paris » et, comme son nom l’indique partiellement, vise à récolter soutiens et idées pour la création d’un festival de cinéma à Paris, en profitant de l’approche des Municipales pour transmettre ensuite ces idées soit à la mairie du 6ème où je souhaitais initialement suggérer la création de ce festival, soit à la mairie de Paris.  Nous avions déjà débattu de ce sujet sur "In the mood for cinema", ici: http://www.inthemoodforcinema.com/saint_germain_des_pres_creation_d_un_festival_/ .

    Par ailleurs, si vous avez un blog cinématographique, je vous recommande également de vous inscrire sur le groupe créé par Florian Lapotre du blog FilmGeek, intitulé « Blogs et cinéma » .

    A la semaine prochaine pour de nouvelles informations cinématographiques et en attendant retrouvez de nouvelles critiques sur « In the mood for cinema » et comme chaque semaine n’oubliez pas de « plonger in the mood for cinema »... sans modération!

    Sandra.M

  • Le deuxième souffle : Alain Corneau insuffle un « nouveau » souffle au cinéma policier

    2b4a7807aaa832423e836d06f1179277.jpg

    Le deuxième souffle. De vie. De liberté. Celui de Gustave Minda (dit Gu), interprété par Daniel Auteuil, condamné à la prison à vie pour grand banditisme, qui parvient à s’évader. Traqué par la police, il prévoit de s’enfuir à l’étranger avec Manouche (Monica Bellucci) la femme qu’il l’aime, qui l’aime. Pour financer leur départ, il accepte de participer à un braquage, normalement le dernier…

    Quel défi de réaliser une nouvelle adaptation du roman de José Giovanni, quarante et un an après celle de Jean-Pierre Melville, le maître du polar à la française. Quel défi pour Daniel Auteuil, Michel Blanc, Monica Bellucci, Eric Cantona, Jacques Dutronc de succéder à Lino Ventura, Paul Meurisse, Christine Fabréga, Michel Constantin, Pierre Zimmer…

    La comparaison est inéluctable. Dès le début Alain Corneau impose un nouveau style, se distingue de la première adaptation : par l’utilisation du ralenti, par le recours aux couleurs vives, magnétiques, poétiques, hypnotiques, fascinantes. Dès le début aussi, Alain Corneau nous replonge dans les codes des polars des années 60 : code d’honneur, borsalinos, silhouettes inimitables et gémellaires de flics et voyous, gueules « d’atmosphère »  jouant et se déjouant à la fois de la nostalgie des  films de ces années-là.

     D’abord on tâtonne, on peine à entrer dans cet univers théâtral, théâtralisé, coloré, grandiloquent, connu et inconnu, égarés entre nos repères du cinéma d’hier et ceux du cinéma d’aujourd’hui et, pourtant, peu à peu on se fond dans cet univers hybride et étrange : cet univers de rouge et vert clinquant, cet univers où chaque acteur judicieusement choisi incarne magnifiquement une typologie de personnage du film noir (Jacques Dutronc, le dandy, d’une sobriété et justesse irréprochables,  Nicolas Duvauchelle, le petit truand arrogant d’une insolence parfaitement dosée, Gilbert Melki, le tenancier à la gâchette facile et à la respectabilité douteuse etc) cet univers où Jean-Pierre Melville rencontre John Woo, Johnnie To et Wong Kar Waï (sublime photographie d’inspiration asiatique d’Yves Angelo), en embarquant Tarantino au passage, en chorégraphiant et stylisant  la violence. Un mélange détonant. De cinéma d’hier et d’aujourd’hui. De codes classiques (narratifs, de choix des acteurs, que Corneau avait d’ailleurs porté à leur paroxysme dans le très melvillien « Police python 357 ») et d’une esthétique moderne. Des codes du film noir, français et américain, des années 60 et ceux du film policier asiatique des années 2000.

     Il n’y a pas vraiment de suspense, le souffle est ici tragique et on sait qu’il n’en restera que de la poussière. Non, l’intérêt se situe ailleurs.  Dans la fragilité qui affleure de l’inspecteur Blot, interprété par Michel Blanc dont l’interprétation bluffante et nuancée rappelle celle de l’acteur dans "Monsieur Hire", qui nous fait aussi penser à Bourvil dans « Le cercle rouge », qui dans un plan séquence du début d’emblée s’impose et impose un personnage. Magistralement. Dans la droiture morale de Gu, Daniel Auteuil à la fois nous fait oublier Ventura et nous le rappelle dans un mimétisme physique sidérant.

     Entre Pigalle en vert et rouge et Marseille en couleur ocre on se laisse peu à peu embarquer dans ce deuxième souffle, ces personnages s’humanisent malgré l’inhumanité de leurs actes, et nous prenons fait et cause pour Gu, aussi fascinés que celui qui le traque, par cet homme obsédé et guidé par son sens sacré de l’honneur.

    Alors oui, parfois on ne comprend pas ce que disent Monica Bellucci, l’incontournable femme fatale du film noir (une actrice comme Emmanuelle Béart n’aurait-elle pas mieux convenu ?) ou Eric Cantona (qui disparaît d’ailleurs mystérieusement du scénario dans la seconde partie du film). Alors oui, on repense au chef d’œuvre de Melville, si hiératique, si implicite, là où celui de Corneau est si bavard au point parfois de ne pas sonner juste… mais voilà la nostalgie du cinéma d’hier qu’il nous rappelle malgré tout l’emporte finalement, surtout qu’Alain Corneau donne en même temps un nouveau souffle, lyrique, au roman noir de  José Giovanni, lui insufflant  aussi de la poésie, de la modernité, sa modernité.

     Avec "Gangsters" et "36 Quai des Orfèvres" Olivier Marshall avait inventé le polar français des années 2000,  Alain Corneau, lui, a le courage et l’audace cinématographique de lui donner un deuxième souffle, stylisé, déroutant mais progressivement envoûtant, en s’inspirant de son premier : celui, inégalable, du cinéma français des années 60 et 70.

     Avec cet exercice de style surprenant et néanmoins réussi, Alain Corneau prouve une  nouvelle fois l’étendue de sa palette dans de nombreux genres ( de « Tous les matins du monde » à « Stupeur et tremblements », de « La menace » à « Fort Saganne », en passant par « Le choix des armes ») mais surtout dans le genre dans lequel il excelle, le cinéma policier, un genre dont le cinéma français  qui l’a pourtant porté au plus haut est malheureusement avare et dans lequel il est désormais mal à l’aise, sans doute impressionné par son prestigieux passé, et maladroit. Merci M.Corneau pour cette madeleine de Proust. Savoureuse... quoiqu’on en dise.

    Sandra.M

  • In the mood for news 6: l'actualité de la semaine du 24 octobre

    Les films à l’affiche

    Les films de la semaines recommandés par "In the mood for cinema"

    3aa576c29cddbb3ebded495a93fa06b4.jpg

    Cette semaine du 24 octobre est particulièrement chargée en sorties cinématographiques de qualité ou du moins très attendues. Je vous recommande tout d’abord “Never forever” de Gina Kim, mon coup de cœur de la compétition officielle du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2007. Voici ma critique publiée lors du festival :

    Vient ensuite « Never Forever » mon grand favori de cette compétition 2007, très « in the mood for love », très « Wong Kar Waiesque »,  qui se démarque des deux comédies romantiques de cette compétition que j’évoquerai ensuite brièvement. Gina Kim parvient à instaurer une tension passionnelle par des détails et des gestes qui deviennent essentiels et déterminants, par la manière dont elle filme et magnifie Vera Farmiga (les nuances de son jeu sont remarquables) en proie aux doutes, écartelée entre deux hommes si semblables physiquement, si dissemblables dans leur histoire,  écartelée entre raison et passion, son altruisme et l'égoïsme de ses désirs, par l’intensité et presque la ferveur qu’elle met dans chaque plan. Le spectateur est hypnotisé, captivé et enserré  dans cette histoire apparemment insoluble.   La passion charnelle qui envahit les deux personnages principaux transpire et émane de l’écran. Le film aurait pu être scabreux (Afin de sauver à tout prix son couple son mari coréen ne pouvant pas avoir d’enfants, Sophie va payer un travailleur clandestin venu de Corée pour qu’il lui fasse un enfant…), il est envoûtant. Avec beaucoup de pudeur et de sensibilité, Gina Kim filme le malaise qui se transforme en désir puis en amour et dresse un magnifique portrait de femme amoureuse guidée par ses sentiments et en proie aux affres de la passion irrépressible. Dans un cinéma qui filme de plus en plus la vie en noir et blanc, ou simplement en rose, ce film d’un rouge éclatant est bouleversant, malgré (et à cause de) sa lumière crépusculaire, il   dépasse de loin les autres films la compétition. Gina Kim filme l’ambiguïté des sentiments, le désir amoureux -et le désir d’enfant-,  avec en toile de fond l’immigration clandestine. Son film est un « thriller amoureux ».  Gina Kim c’est le mariage de Truffaut et Wong Kar Wai.  Je vous invite donc à voir ce « Never forever » qui nous immerge dans la fragilité des sentiments. A jamais ou pour toujours. Never ou forever. Si on ne peut jamais dire toujours, l’important  c’est d’aimer… « Never forever » a reçu le prix du jury de ce 33ème Festival du Cinéma Américain pour son « mystère » et son « audace » qui a « touché » le jury comme l’a souligné André Téchiné.

    9b4c67bc5e8547b25033fc636b186fd2.jpg
    Vera Farmiga et Gina Kim lors de la cérémonie de clôture du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2007 (Voir mon blog: http://inthemoodfordeauville.hautetfort.com )

    Pour en savoir plus, rendez-vous sur mon blog consacré au Festival du Cinéma Américain de Deauville : http://inthemoodfordeauville.hautetfort.com .

    29748a5105c15d718526e75839e076eb.jpg

     Je vous recommande également  « Paranoïd park » de Gus Van Sant, une adaptation du roman de Blake Nelson projetée en compétition au dernier Festival de Cannes à l’occasion duquel le cinéaste a reçu le prix du 60ème anniversaire pour l’ensemble de son œuvre.( Je vous renvoie ainsi à mon blog consacré à ce festival : http://inthemoodforcannes.hautetfort.com). Gus Van Sant signe là une œuvre poétique sur la culpabilité qui nous immerge dans les pensées d’Alex, un adolescent fou de skate impliqué dans l’accident mortel d’un agent de sécurité. Un film à voir absolument pour les inconditionnels de Gus Van Sant (dont je suis) au sommet de son art et avec ses figures stylistiques et thèmes récurrents : thème de l’adolescence et sa fragilité, une bande son particulièrement réussi, un acteur amateur comme souvent chez Gus Van Sant –une vraie révélation, Gabe Nevins , découvert suite à l’annonce laissée par le cinéaste sur My space- aurait mérité le prix d’interprétation au dernier Festival de Cannes,  délitement et déconstruction du temps, ralentis, narration déstructurée, photographie particulièrement soignée grâce à Christopher Doyle, le chef opérateur de Wong Kar Waï, plans séquences, flash-backs et envoûtement du spectateur, mélange de 8 et 35 mm pour refléter le désordre mental. La magie opère, encore et toujours.  Pour les inconditionnels et ceux qui voudraient découvrir ce cinéaste majeur.

    05d629a351da1381f248a0f2c56aa9c6.jpg
     Les lauréats du Festival de Cannes 2007 dont Gus Van Sant qui a reçu le prix du 60ème anniversaire pour l'ensemble de son oeuvre (voir mon blog: http://inthemoodforcannes.hautetfort.com )
    Les autres films à l'affiche cette semaine
    aa8c2a70f3882839092d82aff81fd842.jpg

    Demain sortent également deux films très attendus (que je n’ai pas encore vus) « Le deuxième souffle », l’adaptation du livre de José Giovanni par Alain Corneau, plus de 40 ans après celle de Jean-Pierre Melville, une adaptation dans laquelle Daniel Auteuil reprend le rôle marquant de Lino Ventura.

    26d3f45a2c6dadea501f0940368fafac.jpg

    Demain sort également « Le cœur des hommes 2 », de Marc Esposito. Le premier avait engrangé 1, 5 millions d’entrées. Le second renouvellera-t-il l’exploit ?

    8db1037f085f998beda67ff382e0ec9c.jpg

    Demain sort également « La part animale » de Sébastien Jaudeau auquel notre jury avait décerné son prix (du jury donc) lors du Festival International du Premier Film d’Annonay 2007. Voici la critique que j’avais alors publiée :

    Deux autres films radicalement différents mais non moins intéressants ont émergé de cette compétition dont le niveau était d’ailleurs étonnamment élevé pour des premiers films n’ayant pas de distributeurs. C’est tout d’abord La part animale, le film français de Sébastien Jaudeau qui a obtenu le Prix spécial du jury, une adaptation du roman d’Yves Bichet. Etienne vient d’être embauché comme ouvrier dans une exploitation avicole moderne. Il est en charge de la reproduction des dindons. Peu à peu, au contact des bêtes, le regard qu’il porte sur l’humanité évolue. La part animale est une œuvre. Avec tout ce que cela peut impliquer. De radicalité. De point de vue. D’étrangeté. D’audace. Elle décontenance et malgré et à cause de cela force notre admiration. Le thème de l’animalité s’insinue dans le moindre fragment du film (jusqu’à l’excès : plans de sangliers, excès de références, notamment picturales, comme L’origine du monde de Courbet qui lui font frôler le didactisme et toujours en éviter l’écueil), se reflète dans le jeu des comédiens, dans leurs excès et leurs dérives. Tel le Rhinocéros de Ionesco, le dindon s’immisce partout.  L’animalité s’empare des comportements et les travestit, déteint sur l’existence et en fait ressortir la noirceur inavouable. En filigrane, un discours intéressant sur l’aliénation du travail, sur les effets pervers de la technique qui, si on n’y adhère pas forcément, n’en demeure pas moins intelligemment mise en scène malgré sa démonstration ostentatoire et revendicatrice. Une réalisation et un montage très maîtrisés, la photographie de Pierre Cottereau, des images qui vous hantent longtemps après la dernière minute du film contribuent à faire de cette part animale un film salutairement dérangeant. Pour ceux qui ne craignent pas de ne plus jamais voir les dindons et les petits pains de la même manière et de faire surgir la part animale qui est en eux.  A noter : Niels Arestrup, parfait en patron bourru et inquiétant, de même que Sava Lolov en employé effacé qui se laisse peu à peu envahir et submerger par sa part animale.

    (Pour en savoir plus sur le Festival d’Annonay 2007, voir ici : http://www.inthemoodforcinema.com/festival_international_du_1er_film_d_annonay/ ) .

    L’info Festivals de la semaine : 

    2ea707256f1a0553b3bcedac05f68841.jpg

    Le BNIC (Bureau National Interprofessionnel du Cognac) vient d’annoncer qu’il ne financerait pas le Festival du Film Policier de Cognac 2008, faute de « retour sur investissement, » un festival dont il représentait… 70% du budget ! Le Festival du Film Policier de Cognac 2008 est donc plus que compromis alors que le festival 2007 avait déjà failli ne pas avoir lieu, reporté d’avril à juin 2007. Dommage… Une sélection de qualité. Un festival convivial. Et accessoirement de si beaux souvenirs du  20ème  anniversaire, année où je faisais partie du jury Première…  Le Festival 2008 aura-t-il lieu ? Aura-t-il lieu à Nice comme il en fut déjà un moment question pour l’édition 2007 ? A suivre…

                                                           L’info rétrospective de la semaine :

    0975abd97589d50334a586728d81e00c.jpg

    La Cinémathèque depuis le 17 octobre, rend hommage à Sacha Guitry (expositions, visites guidées, rétrospective intégrale, table ronde, conférences, lectures…), pour les 50 ans de sa mort. A cette occasion, hier soir, à la mairie du 6ème arrondissement de Paris,  Pierre Arditi a lu quelques textes de Guitry qu’il avait lui-même choisis, le terme lire convient d’ailleurs mal tant cette « lecture » était vivante, une foule de personnages ayant ainsi pris vie sous mes yeux captivés qui découvrirent avec stupeur à l’issue d’une heure trente qu’il y avait juste sur scène, un bureau, quelques textes, et un acteur passionné tant l’enthousiasme qu’il mettait à lire m’a donné l’impression d'avoir vu défiler une galerie de personnages, de multiples décors, de traverser les vies, les époques. Le cynisme savoureux, l’esprit ironique et aiguisé de Guitry s’est animé sous nos yeux si bien qu’il semblait être là, dans cette salle à l’atmosphère tamisée, soudain plongée plus de cinquante ans en arrière par la simple voix d’un acteur aux multiples et subtiles nuances, à la fois admiratif et faussement choqué du cynisme jouissif, mais aussi la modernité de l’auteur, guettant la complicité du public ou de sa compagne. Un beau moment qui donne envie de redécouvrir Guitry…  Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de la Cinémathèque : http://www.cinematheque.fr . En guise de conclusion,

                                                   petit florilège de citations de Sacha Guitry:

    "Être parisien, ce n'est pas être né à Paris, c'est y renaître.

    On a dit de la beauté que c'était une promesse de bonheur. On n'a pas dit qu'elle fût tenue.

    Deux personnes mariées peuvent fort bien s'aimer, à condition de ne pas être mariées ensemble.

    Nous avons beau dire : "Mon temps... je perds mon temps... je prends mon temps..." - ce possessif est dérisoire : c'est toujours lui qui nous possède.

    En cherchant bien, l'on trouverait à la plupart des bonnes actions des circonstances atténuantes.

    Le monde est mal fait, certains deviennent cibles pour avoir été trop points de mire.

    Je n'ai vraiment l'impression que je suis libre que lorsque je suis enfermé. Lorsque je fais tourner la clef ce n'est pas moi qui suis bouclé ce sont les autres que j'enferme.

    Si vous êtes un jour traité de parvenu, tenez pour bien certain que vous serez arrivé.

    Il n'y a pas de gens modestes. Il y a des ratés qui ont la prétention d'être modestes et qui font les modestes pour faire croire qu'ils ne sont pas des ratés.

    Les femmes désirent ce qu'elles aiment, les hommes aiment ce qu'ils désirent." Sacha Guitry

    Sandra.M

  • In the mood for news (5) : semaine du 17 octobre

    Cette semaine  sortent 3 films dont je vous ai déjà parlé lors de divers festivals. 

    0775f60e552618377e07d91e981e4494.jpg
    0ae024e0dbba8f2105b74642e026bcc1.jpg

    79242ec6d7cf404f45d3a51eed0b1ca0.jpg Je vous recommande tout d’abord « Michael Clayton » premier film réalisé par le scénariste de la saga Jason Bourne, Tony Gilroy, un film présenté en avant-première au dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville, un polar sobre et rythmé (évidemment rien à voir avec « La vengeance dans la peau », modèle du genre, question rythme soutenu : ah la scène de la gare… !) sur les conflits entre morale et intérêts financiers. George Clooney y est impeccable en avocat charismatique et complexe, écartelé entre sa morale personnelle et son intérêt professionnel, (et rien que son personnage et son interprétation méritent le déplacement), avocat d’un des plus grands cabinets juridiques de New York qui arrange et par tous les moyens les affaires embarrassantes de ses clients et qui va découvrir que cette multinationale sans scrupules est prête à faire des millions de victimes pour s’enrichir, il ne peut alors plus échapper au choix qui s’impose à lui : étouffer la vérité ou la faire éclater, au péril de sa vie. Un film pour les amateurs de films américains des années 70, d’ailleurs Sidney Pollack est présent au générique. Bref, Tony Gilroy, scénariste reconnu est à suivre comme cinéaste ! 

     Vous pourrez voir des images et photos inédites de la conférence de presse et de l’avant-première de « Michael Clayton »  au Festival du Cinéma Américain de Deauville sur mon autre blog « In the mood for Deauville ». En cliquant sur le lien ci-après vous accéderez également à mon compte-rendu de la conférence de presse, mouvementée: http://inthemoodfordeauville.hautetfort.com/archive/2007/09/03/michael-clayton-de-tony-gilroy-conference-de-presse-et-avan.html#comments

    f126f0e994c0983c11ef2fc2c116ef5b.jpg Si vous avez envie d’un univers un peu moins sombre,  mais aussi plus conventionnel, vous pourrez toujours aller voir « Jane »  de Julian Jarrold (dont je vous ai récemment parlé, dans mon compte-rendu du denier Festival du Film Britannique de Dinard, voir mon compte-rendu et ma critique ici) qui relate la grande histoire d’amour de l’écrivain Jane Austen.

    Enfin,  si vous souhaitez un film carrément coloré (même si je ne vous le recommande pas…

    mais si vous y tenez…), allez voir  « For your consideration » de Christopher Guest, une comédie satirique sur le monde du cinéma, présenté en compétition officielle lors du dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville, un film qui comprend une foule de clichés sur le cinéma et ses travers, sur la soif de célébrité et le cynisme de ceux qui gravitent autour.  Le sujet est caricaturé et survolé, dommage : on sourit, parfois. ( voir mon article sur la compétition officielle du Festival du Cinéma Américain de Deauville df46d16f251dbc3190f800492e5ee4f4.jpghttp://inthemoodfordeauville.hautetfort.com/competition_officielle/ )

    ce5d109de66c715d676a8bacbbce6d4b.jpgA noter également : la sortie cette semaine de « Secret sunshine » (que je n’ai pas vu) de Lee Chang-dong qui a valu à l'actrice Jeon Do-Yeon le Prix d'interprétation féminine au dernier Festival de Cannes.

    24e1ad695fe0fa4ab0e962b8eecad8b2.jpg

    Et vous pouvez toujours allez voir « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » d’Andrew Dominik, le film de l’année selon « In the mood for cinema » (voir ma critique ici), et « Un secret » de Claude Miller, le film français de l’année  (, voir ma critique ici, bon d’accord cela fait deux films de l’année… mais je persiste et signe : je vous les recommande vraiment, vivement, inconditionnellement) qui connaît un démarrage assez spectaculaire mais justifié avec plus de 700 000 entrées alors que Jean-Jacques Annaud connaît un échec cuisant avec « Sa majesté Minor » et seulement 88000 entrées sur 497 salles. J’avoue que la bande annonce m’a quelque peu découragée d’y aller… Euh...des avis positifs pour m’y inciter ?

    Sandra.M

  • In the mood for news (4) : "L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford", le film de la semaine …et de l’année ?

    32d19be510e93294d80158c27ed036ed.jpg

    c87c08ab2d4c77af7d64a5dcf22cd22c.jpgCette semaine, « in the mood for news », le bulletin d’informations cinématographiques de “In the mood for cinema” sera entièrement consacré à "L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » d’Andrew Dominik, indéniablement le film de la semaine et peut-être de l’année, présenté en avant-première au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2007 où il a créé l’évènement et divisé le public, les uns criant au chef d’œuvre, les autres, s’ennuyant et partant avant la fin du film,  aveugles ou insensibles à sa beauté sidérante et ensorcelante.

    Voici ci-dessous le récit de la conférence de presse et ma critique du film repris de mon blog consacré à ce 33ème Festival du Cinéma Américain de Deauville « In the mood for Deauville » (http://inthemoodfordeauville.hautetfort.com ). Vous pourrez également retrouver des vidéos exclusives de cette présentation et de cette conférence de presse en cliquant sur le lien suivant : voir les vidéos de la présentation et la conférence de presse de "L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford" (en m'excusant pour leur mauvaise qualité et leur brièveté, celles-ci étant prises avec un appareil photo assez rudimentaire, la durée des vidéos étant de surcroît très limitée sur ce blog.)

    La conférence de presse de L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford au 33ème Festival du Cinéma Américain de Deauville

    6feae5086b3fb9d9c674c63be0acf1cc.jpg
    d54b2e2462da06af1ac90fb985f7dc9e.jpg

    L’assassinat de Jessie James par le lâche Robert Ford. Voilà qui résonne comme le titre d’un film de série B. Voilà qui est tout sauf un film de série B. Un film majeur, sublime, singulier, qui m’a enthousiasmée et captivée comme rarement je l’ai été cette année au cinéma. Mais avant d’en revenir au film et à sa projection :  petit flash back sur la conférence de presse qui s’est déroulée auparavant, du moins est-ce ainsi qu’on appelle ce curieux rituel  qui la veille avec George Clooney pour "Michael Clayton" avait eu des allures d’empoignade, qui cet après-midi avait des airs d’évènement. L’atmosphère est électrique dans la foule des journalistes, tous médias prestigieux qu’ils représentent, certains s’étant vus refusés la veille l’accès à la conférence pour «  Michael Clayton ». Le sésame indispensable  est apparemment cette fois gris. La hiérarchie festivalière qui ignore toute démocratie (la démocratie s’arrêterait-elle à l’entrée d’une salle de presse ?) est parfois obscure.  Nous entrons par quatre.   J’entre. Un garde du corps, épuisé, nous toise d’un regard méprisant. Les CRS entourent la salle de conférence. Allons-nous voir un lion en cage ? Nous voilà en tout cas enfermés avec lui dans le zoo. Un lion traqué plutôt. Après la décontraction et le professionnalisme de Michael Douglas, les excès d’enthousiasme du  non moins charismatique George Clooney, Brad Pitt est visiblement tendu, sur la défensive, (on le serait à moins…) distribuant ses sourires avec parcimonie. Exténué sans doute, la traque a paraît-il commencé dès le début de l’après-midi, dès l’aéroport, puis à l’hôtel Royal. Ne jamais baisser la garde. Comme Jessie James. Véritable métaphore de sa propre existence. Brad Pitt est parfois craint parce qu’admiré. Jessie James est admiré parce que craint. Mais leurs célébrités, certes si dissemblables dans leurs causes, les enferment dans une pareille solitude, méfiance, les condamne à être constamment aux aguets, à l’affût d’un regard perfide, d’une attaque imprévue, à être coupés de la vie. Ils sont deux victimes de personnes aspirant à la célébrité « sans savoir pourquoi, croyant qu’ils vont ainsi devenir de meilleurs humains » ajoute Brad Pitt. Ils provoquent tous deux des bagarres d’un genre certes différent, l’un entre des vautours d’un genre nouveau (à l’aéroport, donc), l’autre entre ceux qui veulent sa tête, d’une autre manière ( dans des plaines gigantesques).  Deux êtres, finalement et évidemment humains, dont on a voulu faire des légendes.  Et la même lassitude, alors compréhensible, semble s’être emparée d’eux. La conférence de presse débute par l’évocation de la complexité du film, à l’image des films des années 1970 qui « prenaient leur temps ». La première version faisait ainsi 4H30. Celle-ci fait 2H35. Rassurez-vous : vous ne les verrez pas passer.  Mais cette similitude entre sa propre existence et le personnage de Jessie James n’est certainement pas la seule raison pour laquelle Brad Pitt a choisi de produire ce film sur le célèbre hors-la-loi et de l’incarner.

    A une question sur « L’homme qui tua Liberty Valance » de John Ford, Andrew Dominik avoue qu’il ne l’a pas vu et Brad Pitt répond que lui l’a vu mais que, contrairement au film de Ford, celui d’Andrew Dominik, raconte davantage la véritable histoire de Jesse James  que la légende. Brad Pitt  précise que lorsqu’il choisit de s’investir dans un projet, il ne réfléchit évidemment pas pour savoir si le film aura du succès ou non. Ce qui compte surtout pour lui c’est « l’histoire et les gens qui travaillent sur un projet ». Il évoque aussi sa société de production « Plan B », dont il avoue que le nom n’est pas trop inspiré (inspiré par son prénom et celui de l’autre cofondateur qui s’appelait également Brad) parce que souvent il voyait des films qui n’aboutissaient pas comme il l’aurait souhaité.  A Casey Affleck, un journaliste demande s’il considère davantage son personnage comme un traitre ou une victime. Casey Affleck répond qu’il est « les deux et bien d’autres choses ». L’intérêt du film et leur implication dans celui-ci résulte selon eux avant tout de  son absence de manichéisme. Les films projetés depuis le début du festival ( à l’exception du film en compétition ce matin « For your consideration » qui a tenté de dire maladroitement ce que Marc Fitoussi a exprimé si justement avec « La vie d’artistes » mais revenons à  nos moutons, lions) dénotent d’ailleurs  une exigence scénaristique, une complexité, bien loin des standards caricaturaux hollywoodiens. Quelqu’un demande à Casey Affleck si c’est un avantage ou un inconvénient d’être le frère de Ben Affleck.  Il répond, visiblement agacé, que cela permet qu’on lui pose de telles questions… Probablement pour la énième fois. Puis, il répond avec humour qu’il a pu « le jeter au requin » et voir avant d’y être lui-même jeté, l’effet que cela produit. Pour l’équipe, ce film est un conte de fée, ce que reflètent les images floues et donc tordues de la réalité, comme vues par le prisme  d’un daguerréotype.  La conférence de presse s’achève et en entendant ces questions relativement banales, je ne me doute pas encore que je vais voir ce film inoubliable, captivant  et si novateur. Nous sommes enfermés dans la salle de conférence quelques minutes avant de pouvoir sortir pour que le public ne s’y engouffre pas et que Brad Pitt puisse repartir tranquillement pour se réfugier, se reposer loin des traqueurs carnassiers.

    La projection au CID du Festival de Deauville : un western psychologique

    b9b068e1f29e173c50523ba66e821dbb.jpg
    ec4c5b7c37954ce4a37a69a4a08b252c.jpg

    D’abord il est difficile de définir ce film qui reprend certes les codes du western mais qui les détourne majestueusement. Tout comme le titre nous donne une fausse piste. Evidemment il s’agit bien de l’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford. Mais au final, peut-on parler d’assassinat ? Ou d’une bête traquée qui, lasse ou provocante, défie la mort ? Peut-on parler de lâcheté à propos de Robert Ford ? Ce titre, finalement très brillant et loin d’être anodin, évacue d’emblée ce que nous savons déjà parce que l’intérêt est ailleurs. Et si ce film renouvelle le genre, c’est parce qu’il instille la psychologie, aux antipodes du manichéisme habituellement érigé en principe du western.  Les héros sont aussi vulnérables.  Ils ne sont pas invincibles. C’est en effet un duel psychologique palpitant. Une lutte entre deux hommes. Une lutte interne pour chacun d’eux aussi. Robert Ford partagé entre sa vénération pour Jesse James et son désir de gloire de cet homme érigé en héros qu’il vénère autant qu’il désirerait prendre sa place.  Entre l’adoration et la haine.  Entre l’innocence, l’arrogance et  l’ambition. Finalement si proches et peut-être si indissociables. Qui peut mieux haïr que celui qui a le plus adulé. La passion est versatile dans ses excès. Jesse James  est en proie  à ses démons. Robert Ford idolâtre Jesse James. Jesse James lui demande un jour s’il veut « être lui » ou « être comme lui ». La passion, elle aussi, elle surtout,  a des raisons que la raison ne connaît pas.

    Quelques plans font songer à « La prisonnière du désert » et pourtant ce film ne ressemble à aucun autre. La course des nuages que le réalisateur filme à l’envie et par lequel débute le film nous fait d’abord craindre un film caricatural. Il annonce simplement la poésie de ce film imprégné d’une lumière crépusculaire. De noirceur et de blancheur mêlées, contrastées, fascinantes. Les interprétations parfaites et même impressionnantes de Brad Pitt et Casey Affleck ajoutent à l’intensité de ce film magistral. Notre respiration est suspendue. Tout peut basculer d’un instant à l’autre. Le doute s’immisce dans les esprits. Le lion peut rugir à tout instant. Un regard qui se brouille. Une agitation inhabituelle. Rien ne lui échappe. C’est d’une intensité hitchcockienne. Voilà, c’est un western hitchcockien, un western d’auteur. Rien n’est superflu.

    Ce film est l’histoire d’une légende interprétée par une autre. Un film d’une grande modernité qui renouvelle le genre. Un western qui s’appréhende comme un thriller psychologique. Une œuvre sombrement poétique et mélancolique, lyrique. Un voyage dans des âmes tourmentées et complexes. Un grand film d’une rare richesse psychologique et d’une grande beauté formelle. Qui nous parle d’un monde qui a fait d’un criminel un héros. Qui nous parle aussi du nôtre. Qui fabrique des légendes.  Des lions en cage, celle de leur âme, celle que leur fabriquent ceux qui les traquent, impitoyablement, inlassablement. Un film unique, éblouissant, qui me donne finalement l’impression d’avoir accompagné la course des nuages dans leur voyage sombrement poétique d’une beauté et d’une profondeur indicibles  et tellement magique. Un film qui vous berce, ensorcelle et hypnotise de sa lueur incomparable bien après le générique de fin. Un film à ne manquer sous aucun prétexte et que je retournerai d'ailleurs voir dès demain, et dont il n'est pas exclu que je vous reparle... départie de l'agitation et l'effervescence deauvillaise.

    Remarques: -Ce film a été présenté en compétition lors de la dernière Mostra de Venise. Brad Pitt y a remporté la coupe Volpi du meilleur acteur...un prix amplement mérité.

    A suivre : mon compte-rendu du 18ème Festival du Film Britannique de Dinard…avec un peu de retard !

    Sandra.M