Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

cinema - Page 196

  • Interview de Bong Joon-ho ( réalisateur de « The Host », « Memories of murder », « Mother »)

    bongjoonho2.jpg
    mother.jpg

    Première (enrichissante) expérience d'intervieweuse "en live" avec le charmant et très loquace Bong Joon-Ho (réalisateur de « The Host », « Memories of Murder »...) hier soir, dans le cadre tamisé et chaleureux d'un hôtel du 6ème arrondissement. 

    Le film « Mother » dont il nous a essentiellement parlé sort en salles le 27 janvier 2010. Je vous le recommande vivement et vous pouvez lire ma critique en cliquant ici. « Mother » a été présenté dans la section « Un Certain Regard » du Festival de Cannes 2009 et vient d'être élu meilleur film au 30ème trophée « The Blue Dragon Awards » à Séoul (équivalent de nos César) . En 4 films, Bong Joon-Ho, au même titre par exemple que Park Chan-wook, a réussi à s'imposer comme une référence incontournable de cette nouvelle vague coréenne particulièrement inventive. Il connaîtra ainsi son premier succès (auprès du public comme de la critique et au-delà des frontières coréennes) avec "Memories of murder". "The Host" sera présenté à la Quizaine des Réalisateurs et récoltera une estime internationale. En 2008, il participe au triptyque "Tokyo" avec Leos Carax et Michel Gondry. Il adapte actuellement la bd "La Transperceneige" avec Park Chan-wook comme producteur.

    Merci à Diaphana ainsi qu'à Florian et à Jérôme de Cinefriends d'avoir instigué cette passionnante et instructive rencontre. En attendant la vidéo, voici un résumé de ses réponses. 

     Ma première question concernait la critique de la société coréenne, un aspect commun à ses différents films, celui-ci stigmatisant ainsi ici l'inefficacité de la police et la corruption de la justice, déjà brocardées de manière plus ou moins métaphorique dans ses précédents films. Je lui ai ainsi demandé dans quelle mesure réaliser était pour lui un acte politique.

    Selon lui en tant qu'être humain il est évidemment, par essence, amené à avoir une conscience politique mais il ne le fait pas forcément exprès. Pour Bong Joon-Ho, dans ce film en particulier, les policiers sont plus « mignons » qu'incompétents et s'ils commettent des fautes irréparables, ils le font comme tout être humain peut en commettre.

    Il a ajouté aimer "montrer des gens ordinaires dans des situations exceptionnelles".

    Pour lui « The Host » est une vitrine de la satire et dans « Mother », il voulait ainsi prendre le contrepied avec un film « plus intimiste ». Il voulait ainsi « mettre les individus dans une situation extrême pour montrer l'instinct de l'être humain » et voulait ainsi faire l'autoportrait de la société coréenne à travers eux.

    Je lui ai ensuite parlé de Kim Hye-Ja qui interprète brillamment le rôle de la mère, sidérante dans l'intensité de son jeu et sa diversité d'expressions. Je lui ai demandé si elle  avait été à la base du projet, si elle avait dicté son choix du sujet principal ou s'il avait dès le départ envie de traiter de cet amour fusionnel et obsessionnel et dans ce cas pour quelle raison il avait choisi ce sujet.

    Bong Joon-Ho a répondu qu'elle avait été à l'origine du film. En Corée c'est une sorte d'icône mais il voyait en elle presque une « sorte de folie dans son jeu », une « sorte de psychopathe » alors qu'elle incarne toujours les mères vertueuses et généreuses. Avec beaucoup d'humour il a répondu qu'elle était aussi folle dans la vie que dans le film.

    Je lui ai ensuite demandé s'il souhaitait renouveler l'expérience de « Tokyo » et tourner ainsi à l'étranger, pourquoi pas en France.

    Pourquoi pas a-t-il répondu à condition de pouvoir garder le contrôle à 100%, et d'avoir le final cut comme c'est le cas pour lui en Corée.  L'expérience à Tokyo a ainsi été pour lui « très satisfaisante ». Quant au cinéma français, sa rencontre avec Laurent Cantet la veille de cette interview avec lequel il a évoqué vaguement un projet lui a apparemment donné quelques idées. 

    Bong  Joon-ho est ensuite revenu sur le personnage de la mère, sur lequel il voulait « vraiment se concentrer », la « regarder en gros plan. » Il faisait entièrement confiance à son interprète. Dans certains plans, très larges, elle ressemble ainsi à un grain de sable afin de montrer le caractère « acharné » de sa lutte.

    Concernant le caractère très soigné de sa réalisation, Bong Joon-Ho a précisé avoir écrit le scénario et le storyboard et avoir toujours une idée précise des plans quand il va sur le tournage  tout en se demandant ensuite comment se détacher du story-board une fois sur le tournage. Tout ce qui est technique respecte ainsi le story-board.

    Je lui ai enfin demandé de parler du  thème de la culpabilité autour duquel son film s'articule notamment. Ainsi « Memories of murder » traitait déjà du thème d'un serial killer qui ne fut jamais arrêté, dans « Mother », Do-joon sera finalement aussi relâché, et sa mère jamais jugé pour le meurtre qu'elle a commis, ma question consistait donc à savoir s'il avait une tendresse particulière pour les coupables innocentés ou s'il s'agissait pour lui avant tout d'un moyen de traiter du thème de la culpabilité.

     Bong Joon-Ho a répondu que pour lui le sentiment de culpabilité était très important, ainsi que la notion de châtiment, se demandant ainsi si on est toujours condamné pour un crime qu'on a commis, trop d'innocents étaient jugés coupables. La mère se retrouve ainsi confrontée à un dilemme moral face à un innocent accusé.

    J'aurais eu encore beaucoup de questions à lui poser... une demi-heure étant forcément trop courte pour aborder tous les aspects  d'un film aussi hybride, d'une réjouissante complexité, à la fois teinté d'humour noir, de poésie, mais créant aussi un véritable suspense pour aboutir à un film indéfinissable mêlant les genres (policier, mélodrame, comédie...)  avec énormément d'habileté.

    thehost.jpg
    memories2.jpg
  • Inthemoodforcinema.com vous offre 50 places pour "Arthur et la vengeance de Maltazard" de Luc Besson!

    C'est déjà noël sur Inthemoodforcinema.com puisque j'ai la chance de pouvoir vous offrir 50 places pour "Arthur et la vengeance de Maltazard", un film pour petits et grands, cadeau idéal en cette période de fêtes. Dépêchez-vous, les premiers à s'inscrire seront les premiers servis! Les places vous seront envoyées directement à votre domicile. Cliquez ci-dessous pour obtenir vos places. Bonne chance et bon film! Vous trouverez la bande annonce en bas de cette note.

     

    arthur.jpg
    Lien permanent Imprimer Catégories : CONCOURS Pin it! 6 commentaires
  • Robert Guédiguian, invité d'honneur du 13ème Festival International des Scénaristes

    arméeducrime2.jpgAprès Pascale Ferran en 2009, Robert Guédiguian sera l'invité d'honneur du 13e Festival International des Scénaristes qui se déroulera à Bourges du 24 au 28 mars 2010, après avoir présidé le jury de ce même festival.

    Cliquez ici pour lire ma critique de "L'armée du crime" le dernier film de Robert Guédiguian

  • Valérie Lemercier et Gad Elmaleh présenteront la cérémonie des César 2010

    césar23.jpgComme chaque année, Inthemoodforcinema.com essaiera de vous apporter une information aussi exhaustive que possible concernant les César.

    Après vous avoir communiqué la liste des Espoirs 2010 potentiels en avant-première, ici, je vous informe aujourd'hui que la cérémonie des César 2010 sera présentée par Valérie Lemercier et Gad Elmaleh, un duo de choc pour présenter en tandem la 35ème cérémonie des César.

    L'un et l'autre ont déjà présenté les César en 2004 et 2005 pour Gad Elmaleh et, en 2006 et 2007 pour Valérie Lemercier.

    En attendant la cérémonie le 27 février, vous pourrez connaître la liste définitive des nominations le 22 janvier.

    Cliquez ici pour accéder à tous mes articles concernant les éditions précédentes des César (de 2005 à 2009)

    Lien permanent Imprimer Catégories : CESAR 2010 Pin it! 2 commentaires
  • Critique de "Casino Royale" de Martin Campbell avec Daniel Craig, Eva Green, Simon Abkarian ...

    casino1.jpg

    Hier soir France 2 diffusait « Casino royale » de Martin Campbell. L'ayant déjà vu deux fois,  cette troisième immersion dans l'univers de James Bond pour la première fois incarné par Daniel Craig, n'en a pas été moins palpitante. Et que n'a-t-on pourtant pas entendu lors de ce choix et lorsqu'il a été annoncé qu'il succèderait à Pierce Brosnan, un choix (après plus de 200 comédiens auditionnés !), il est vrai, plutôt osé tant son physique et son jeu contrastent voire tranchent avec ceux de ses prédécesseurs : Pierce Brosnan, Sean Connery, Roger Moore, Timothy Dalton, George Lazenby. Sixième à incarner James Bond depuis 1962, Daniel Craig est le premier à sortir du personnage du svelte dandy au sourire ravageur et carnassier, aussi collectionneur des gadgets dernier cri que des James Bond girls.

    James Bond (Daniel Craig donc) qui vient d'obtenir le double zéro, c'est-à-dire le permis de tuer, doit ici affronter le puissant banquier privé du terrorisme international, surnommé Le Chiffre (Mads Mikkelsen). Pour le ruiner et démanteler son immense réseau criminel, James Bond doit le battre lors d'une partie de poker au Casino Royale.  C'est la très mystérieuse et sublime Vesper (Eva Green), attachée au Trésor britannique qui l'accompagne afin de veiller à ce qu'il prenne soin de l'argent britannique avec lequel il va jouer. Mais rien ne va se passer comme prévu, James Bond va en effet devoir faire face à une situation qui va le rendre inhabituellement vulnérable...

    Ce 21ème James Bond est l'adaptation du premier opus écrit par Ian Fleming en 1953 et son adaptation signe aussi le vrai retour à l'univers de Fleming. Rien à voir donc ici avec la version parodique de 1967 également intitulée « Casino Royale ».

    Dès les premiers plans nous sommes plongés dans un univers brutal, au rythme effréné, aux scènes aussi spectaculaires que trépidantes avec dès le départ une course poursuite avec paroxysme sur grue vertigineuse puis une seconde dans un aéroport. Changement de décor avec l'arrivée au Casino Royale du Montenegro après une jouissive joute verbale entre Bond et Vesper.

    Ce film est une réjouissance et une surprise continuelles d'abord avant tout dues au scénario de Robert Wade et Neal Purvis magistralement réécrit par Paul Haggis (notamment scénariste de « Million Dollar baby » et « Mémoires de nos pères », réalisateur de « Collision » et « Dans la vallée d'Elah ») alternant intelligemment les scènes d'action pure, de suspense (aussi bien dans les scènes d'action que celles de poker, véritable combat intellectuel), de romance mais aussi les décors aussi exotiques les uns que les autres des Bahamas à Venise.

    C'est un Bond, à la fois amoureux et donc vulnérable mais aussi plus violent, viril et glacial, plus sombre et plus musclé qui use de son « permis de tuer ». Daniel Craig lui apporte une dureté, une intensité, une classe inédites et à côté de lui les précédents acteurs l'ayant incarné font bien pâle figure.    Certains seront sans doute décontenancés par ce James Bond qui a perdu certaines caractéristiques qui contribuaient à sa spécificité : il n'utilise (temporairement) plus ou si peu de gadgets, a perdu une partie son flegme et son humour britanniques (même si les dialogues et le détachement dont il sait toujours faire preuve dans les situations les plus dramatiques ou face à M sont particulièrement savoureux), et se rapproche davantage de Jason Bourne que du héros de Ian Fleming dans ses précédentes adaptations même si la situation le fera évoluer vers davantage de raffinement. Il a aussi su s'adapter à l'époque complexe dans laquelle il vit, l'ennemi n'étant plus le bloc soviétique, fin de la guerre froide oblige, mais les financiers du terrorisme international. On assiste ainsi à une véritable surenchère : dans les scènes d'action (leur nombre et leur aspect spectaculaire), dans leur violence (Bond est soumis à la torture), dans le nombre de plans, mais aussi dans le nombre de lieux, James Bond nous embarquant ainsi aux Bahamas, en République Tchèque, à Venise, à Madagascar, en Ouganda, au Montenegro. C'est aussi d'ailleurs pour cela qu'on se rue dans les salles à chaque nouveau volet : pour ce  voyage auquel il nous invite, il nous emmène ailleurs dans tous les sens du terme et de ce point de vue aussi ce James Bond est particulièrement réussi.

    Mais le principal atout qui sans doute ralliera ceux qui juste-là étaient allergiques à son univers, c'est le duo qu'il forme avec Vesper, un duel sensuel qui apporte beaucoup de piquant à l'intrigue, et plus d'humanité au personnage de Bond, aussi brutal soit-il.  Mystérieuse, impertinente, voire arrogante mais aussi vulnérable, Vesper lui ressemble trop pour qu'il lui reste insensible. Certaines scènes rappellent ainsi certains drames romantiques parmi les meilleurs ( la musique rappelle celle d' « Out of Africa » et les dernières scènes à Venise font penser à « Titanic » ) et contrebalancent ainsi cette nouvelle brutalité.  Et cette alliance du romanesque avec l'univers sombre et brutal de ce James Bond  donne un résultat aussi étonnant que détonant, à la fois moderne et complexe à l'image de Bond et Vesper, un film au rythme haletant qui sait aussi prendre le temps des dialogues et de l'émotion.

    Eva Green est aussi pour beaucoup dans cette réussite, incarnant à la perfection et avec beaucoup de classe ce premier amour de Bond à l'esprit vif, à la vulnérabilité touchante et à l'arrogance mystérieuse. Face à eux Le Chiffre incarne « le méchant » qui ne cherche plus à dominer le monde.

    La réalisation de Martin Campbell( qui avait déjà réalisé Golden Eye) est d'une efficacité redoutable et la musique du chanteur américain Chriss Cornell (ancien leader du groupe « Soundgarden ») qui interprète « You know my name », la chanson-phare de Casino Royale achève d'en faire une réussite totale.

    Ajoutez à cela un brillant retournement final, et vous obtiendrez un film sombre, spectaculaire, réjouissant, haletant dont vous avez l'impression que le terme jubilatoire a été inventé pour le qualifier.  2H20 dont je vous garantis que vous ne les verrez pas passer et après lesquelles vous n'aurez qu'une envie : refaire le voyage ou voir la suite des aventures de ce Bond écorché vif, trahi, et avide de vengeance.

    James Bond confirmera ensuite son entrée dans cette nouvelle ère avec  « Quantum of Solace » que je vous recommande également même s'il n'a pas atteint la perfection du genre que représente « Casino Royale ».

    A noter: la présence remarquée et remarquable de Simon Abkarian que vous pouvez actuellement retrouver dans la série "Pigalle la nuit" sur Canal plus.

    Lien permanent Imprimer Catégories : CRITIQUES DE CLASSIQUES DU SEPTIEME ART Pin it! 0 commentaire
  • "La Sainte Victoire" de François Favrat avec Christian Clavier, Clovis Cornillac...

    sainte.jpg

    Voilà un film dont je redoutais le pire ! La politique est un sujet finalement assez rarement abordé dans le cinéma français postérieur aux années 1970 où il a culminé et, quand il l'est, c'est toujours de manière caricaturale mettant en scène des hommes politiques arrivistes, prêts à tout pour accéder au pouvoir dont la quête, forcément effrénée, est en général uniquement guidée par l'ambition personnelle, le paroxysme d'absurdité et de manichéisme ayant été atteint avec « Président » de Lionel Delplanque même si, avec « Le Promeneur du champ de mars », Robert Guédiguian nous avait proposé un passionnant portrait tout en nuances d'une emblématique figure politique du 20ème siècle. Mes craintes furent renforcées par la présence de Christian Clavier, redoutant qu'il ne soit seulement là pour un contre-emploi et comme deuxième caution « bankable » du projet.

    Ce n'est pas sous les ors de l'Elysée que nous embarque François Favrat mais en Provence, là où Xavier Alvarez (Clovis Cornillac) un petit architecte avide de reconnaissance sociale (ou de la fameuse montre que selon un célèbre publicitaire pour avoir réussi sa vie, il faut avoir avant 50 ans) et parti de rien n'a plus qu'une ambition pour que sa réussite soit - à ses propres yeux- complète : décrocher un gros marché public. Il voit alors en Vincent Cluzel (Christian Clavier), candidat outsider à la mairie le moyen idéal de décrocher ce projet. Pendant ce temps des écologistes se battent contre une entreprise de téléphonie mobile et les effets néfastes de l'implantation des antennes relais sur la santé. Les deux histoires vont se rejoindre et chacun va devoir confronter ses rêves, ses idéaux, ses combats au principe de réalité...

    Pour une fois, au moins pas de « tous pourris » simplificateur, caricatural et démagogique. Sans doute est-ce aussi la raison qui, malgré toutes ses faiblesses, me donne envie de défendre ce film, le personnage de Christian Clavier (ici d'une sobriété rare et étonnamment crédible dans ce rôle)  pour une fois nous montrant un homme politique intègre, humain, et pas un calculateur froid prêt à tout pour réussir et satisfaire ses ambitions personnelles. Avec beaucoup d'habileté François Favrat nous montre comment, malgré son intégrité, pour gravir les échelons et donc appliquer sa politique, Cluzel va devoir faire des compromis avec ses principes, va être confronté à des dilemmes moraux, va devoir renoncer à certaines de ses idées pour en défendre d'autres et pour conserver le pouvoir.

    Face à lui Xavier Alvarez, fébrile, sanguin, aveuglé par sa dévorante ambition, sa rage de réussir et  surtout de reconnaissance, ou encore par son désir de posséder tous les signes extérieures de richesse, va  pousser Cluzel, au nom de l'amitié, dans l'abus de bien social. On pense évidemment à des affaires médiatiques comme l'affaire Noir /Botton mais cette histoire, finalement éternelle, pourrait sans doute s'appliquer à bien d'autres et même à d'autres domaines.

    Qu'êtes-vous prêt à perdre pour gagner ?  Question passionnante... qui ne s'applique d'ailleurs pas qu'au domaine politique. La vraie réussite est sans doute d'accéder à ses ambitions tout en restant intègre, fidèle à ses idéaux de jeunesse mais ici, malgré son idéalisme, Cluzel se heurte au principe de réalité. Ou de la nécessité parfois d'être machiavélien sans pour autant être forcément machiavélique... Comment rester intègre quand la conservation du pouvoir pour appliquer ses idées (ou même parfois les évènements inextricables ou comme ici des amitiés) nécessite d'en bafouer quelques unes ? Comment distinguer l'amitié sincère  de celle fallacieuse et intéressée ? La Victoire est elle si « sainte » ou si nécessaire qu'il faille y sacrifier certains idéaux pour en défendre et appliquer d'autres ? Accéder à ses ambitions nécessite-t-il de vendre son âme au diable ?  Aider les autres se fait-il au mépris de certains autres ? La politique par essence pour être appliquée n'implique-t-elle pas de faire des entorses à ses idéaux ? Si le film n'apporte pas forcément de réponses, il montre en tout cas que rien n'est blanc ou noir mais que la politique étant faîte par des humains et non des machines, ceux qui la conduisent  sont forcément faillibles.

    Ce film pose aussi la question de l'image, et là encore des compromis qu'il faut faire pour qu'elle soit attractive, parfois au mépris du fond qui n'en devient alors que secondaire : star du football comme caution médiatique, look à la George Clooney, phrases accrocheuses, alliance avec les écologistes -qui feront partie de ce qu'il devra perdre pour gagner- mises à mal par les pressions financières, dangereuses connivences, pressions lobbyistes...

    Avec ce deuxième long-métrage, François Favrat explore de nouveau le thème de la fascination qu'un personnage exerce sur un autre, passant du domaine du cinéma avec « Le rôle de sa vie » à celui de la politique, deux domaines dans lesquels les enjeux, de pouvoir ou de notoriété, ont finalement des conséquences (trahisons etc) similaires.

    Alors évidemment le film n'est pas exempt de faiblesses : une musique omniprésente, des raccourcis scénaristiques (l'histoire d'amour entre Alvarez et la fille de Cluzel est un peu vite expédiée ; le père d'Alvarez réapparaît deux fois de manière opportune sans aucune logique entre ces deux apparitions ; le revirement de caractère du personnage de la journaliste incarnée par Marianne Denicourt est peu crédible), un mélange des genres parfois dommageable même si l'idée de passer de la légèreté à la noirceur (aussi bien dans le fond que dans la forme) est intéressante en ce qu'elle montre comment la proximité du pouvoir change finalement davantage ceux qui l'approchent que ceux qui le détiennent forçant ainsi les seconds également à se composer un personnage.

     Pour la complexité de son analyse psychologique du personnage principal, son refus du manichéisme, et la décortication des mécanismes du pouvoir et de ses compromissions mais aussi de la solitude du pouvoir, le tout incarné par un Christian Clavier surprenant  lequel est accompagné par une excellente distribution (Sami Bouajila, Marilyne Canto,  Marianne Denicourt...), cette Saint Victoire mérite vraiment le détour... ne serait-ce que parce qu'elle réhabilite et interroge une notion souvent mise à mal, en politique et ailleurs : l'intégrité... en laquelle l'idéaliste que je suis ne peut s'empêcher de continuer à croire, et à croire qu'il en existe encore des représentants... François Favrat nous donne en tout cas envie de « garder la foi » en cette sainte victoire-là...malgré tout.

  • Avant-première - Critique de « Mother » de Bong Joon-ho

    mother.jpg

    Mother. Voilà un titre bien ambitieux mais de la part de Bong Joon-ho dont c'est le quatrième long-métrage et qui avait, avec « Memories of murder », affirmé sa marque et son talent, on pouvait (légitimement) s'attendre à un film à la hauteur de cette ambition.

    Mother (Kim Hye-Ja) est ici une veuve qui élève seule son fils unique Do-joon (Won Bin), sa raison d'être mais aussi son inquiétude perpétuelle, ce dernier étant intellectuellement déficient et particulièrement naïf. Lorsqu'une jeune fille est retrouvée morte, Do-joon est immédiatement accusé. Sa mère décide de mener l'enquête pour prouver son innocence.

    Dès le premier plan qui met en scène la mother du titre éponyme, Joon-ho Bong nous envoûte, nous intrigue, nous charme, nous provoque, nous inquiète.  La mère danse de manière languissante, poétique et décalée, dans un champ de blé. La caméra, fluide et presque sensuelle, se rapproche et tournoie. Joon-ho Bong nous annonce qu'il va mener la danse, à n'en pas douter peu conventionnelle, et qu'au centre de cette danse se trouvera la mère. Valse visuelle et des genres que Joon-ho Bong ne cessera de conduire avec brio jusqu'au dernier plan.

    Oubliant cette scène qui aurait dû résonner comme un avertissement, comme une promesse d'inattendu,  Bong Joon-ho nous oriente d'abord vers la comédie. Teintée d'humour noir certes. Et puis c'est le meurtre. Et la comédie dévie vers le thriller, progressivement,  Bong Joon-ho instillant intelligemment de l'étrangeté menaçante dans des scènes quotidiennes alors à la tonalité décalée, par l'effet d'un savant sens du montage, de l'ellipse, du gros plan, du cadrage et par des plans d'une beauté redoutable.

    Là où souvent les ruptures de ton et le mélange des genres ralentissent et alourdissent une intrigue, ici, ils la densifient au contraire, marques du style unique de leur auteur. Comme la mère dans le premier plan, Jonn-ho Bong nous enserre dans son univers nous embarquant avec elle dans son sentiment maternel, inconditionnel, qui se heurtera à la folie de la vulgarité ordinaire. Celle de la justice. Ou de la police incompétente. Avant, elle-même, de sombrer dans sa folie maternelle synonyme d'amour inconditionnel.    Bong Joo-ho relativise ainsi cette  folie, les scènes de folie étant cadrées avec plus d'inquiétante fantaisie que les scènes quotidiennes, ce qui est folie aux yeux du monde étant normalité dans le regard d'une mère prête à tout pour sauver son fils.

    Pour parvenir à ce film captivant, il fallait aussi une actrice exceptionnelle comme l'est Kim Hye-Ja, avec son regard tantôt compatissant, tantôt inquiétant, tantôt déterminé, tantôt coupable souvent tout à la fois, mais aussi un sens aigu du suspense que le « simple » écoulement d'eau d'une bouteille parvient à faire culminer par la minutie de la mise en scène et l'ingéniosité  du découpage.

     Bong Joon-ho fait ainsi danser et s'entrelacer subtilement tragédie du souvenir et bonheur de l'oubli, violence et amour inconditionnel, humour noir et folie,  culpabilité suffocante et soleil rédempteur symbolisé par la beauté vertigineuse du dernier plan qui  achève de nous emporter nous rappelant la promesse envoûtante et poétique de la danse initiale. Promesse tenue au-delà de nos espérances pour ce film hybride, palpitant, étonnant, poignant qui n'épargne ni les travers de la société coréenne ni les ombres et forfaits d'un inconditionnel amour maternel (pléonasme ?) pour mieux encore en exalter la force renversante.

    « Mother » a été présenté dans la section « Un Certain Regard » du Festival de Cannes 2009 et vient d'être élu meilleur film au 30ème trophée « The Blue Dragon Awards » à Séoul.

    Sortie en salles : le  27 janvier 2010.

     Merci à Florian et Jérôme de Cinefriends pour l'invitation et l'organisation.  

    Lien permanent Imprimer Catégories : AVANT-PREMIERES, CRITIQUES DES FILMS A L'AFFICHE EN 2010 Pin it! 3 commentaires