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critique - Page 48

  • La critique en avant-première de "Public Enemies" de Michael Mann avec Johnny Depp, Marion Cotillard, Christian Bale

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    Ce matin avait lieu l’unique projection presse du très attendu « Public Enemies » de Michael Mann qui sera également présenté en avant-première (et en présence de l’’équipe du film) au Festival Paris Cinéma 2009 (le 2 juillet, à  20H, à l’UGC Normandie, uniquement sur invitation). Un film attendu pour son sujet,  l’utilisation de la caméra numérique HD, mais évidemment surtout pour ses acteurs principaux (Johnny Depp et Marion Cotillard dans son premier grand rôle américain, auréolée de son Oscar de la meilleure actrice pour « La Môme ») et pour son réalisateur, Michael Mann, qui a multiplié les nominations aux Oscars ces dernières années (notamment celles du meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur scénario pour « Révélations »).

     

    « Public Enemies » est le onzième long-métrage de Michael Mann et  l’adaptation du roman éponyme de Bryan Burrough inspiré de l’histoire de John Dillinger (Johnny Depp), un braqueur de banques qui a réellement existé et qui a déjà inspiré de nombreux cinéastes (Johnny Depp est ainsi le dixième acteur à l’incarner) et a fortiori l’époque dans laquelle il évolua, celle de la Grande Dépression. Considéré comme « l’ennemi public n°1 » par le patron du FBI, John Edgar Hoover (Billy Crudup), il sera traqué inlassablement par l’agent fédéral Melvin Purvis (Christian Bale).

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    Ce qui marque d’abord c’est le dépouillement, l’élégance et la noirceur : de la mise en scène, du personnage principal, de l’atmosphère.  En résulte une sensation immédiate d’immersion, de réalisme et d’intemporalité, cette dernière étant renforcée par le sujet terriblement actuel : des citoyens dépouillés par les banques, victimes de la Grande Dépression. Un braqueur va, en dévalisant ces banques, d’une certaine manière, les venger.  Ce braqueur c’est donc John Dillinger, mélange de dureté et d’audace,  d’élégance et d’insolence, incarné par Johnny Depp dont cela va devenir un pléonasme de dire qu’il est parfait dans un rôle, mais il l’est ,encore, dans celui de  ce charismatique personnage.

     

    Ce dépouillement et ce réalisme (essentiellement lié à l’utilisation de la caméra numérique HD, et du recours aux longues focales) s’ils décontenancent d’abord contribuent à l’originalité de ce nouveau long-métrage de Michael Mann, à impliquer le spectateur et à accroître son empathie pour John Dillinger que le film s’attache essentiellement à suivre, délaissant un peu les personnages secondaires (mais les esquissant suffisamment pour que l’intrigue soit limpide). Se crée alors une sorte de miroir entre l’acteur, mythe cinématographique, et celui qu’il incarne, devenu un héros  pour une population en quête de vengeance et de repères.

     

    John Dillinger s’érige et est érigé en héros, et nargue les autorités avec une audace jouissive pour le spectateur, un aspect jubilatoire renforcé par une musique trépidante et réjouissante (signée Elliot Goldenthal) et des scènes lyriques filmées avec emphase et virtuosité et comme celles d’un western.

     

     Dans une société, la nôtre, avide de modèles et de renommée, à tout prix, un tel héros pourrait évidemment émerger, et la sensation d’intemporalité, de réalisme que crée la mise en scène est encore renforcée par cette idée finalement très contemporaine.  En 13 mois, le vrai John Dillinger parvint à fasciner les Américains, à tel point qu’il se montrait sans crainte en public.

     

    L’ambitieuse Billie Frechette (Marion Cotillard), Indienne d’origine française, elle aussi, est fascinée, par cet homme qui veut tout, tout de suite, par ce personnage d’une troublante et séduisante insolence, épris de liberté, de célébrité. Elle aussi a une revanche à prendre. Du couple qu’elle forme avec John Dillinger émane un romantisme fatal et ténébreux qui renforce la mélancolie, mais aussi la force et la beauté sombre de l’ensemble.  Là encore, elle n’est  pas filmée comme une femme fatale et lointaine comme c’est souvent le cas dans les films noirs qui relatent cette période, mais avec réalisme, renforçant la sensation de contemporanéité.

     

    Et puis comme dans tout western il faut un duel, une confrontation obstinée,  ici c’est celle qui oppose Dillinger à Purvis (et à travers ce dernier à Hoover). C’est d’ailleurs pour vaincre des gangsters tels que Dillinger que sera créée la première police fédérale aux Etats-Unis : un certain… FBI. C’est un duel impitoyable qui, évidemment, ne peut que se terminer dans la tragédie, je vous laisse découvrir pour qui.

     

    Et pour ceux qui, comme moi, trouveraient que la fin est exagérée en coïncidences troublantes, sachez que l’anecdote du film « Ennemi public n°1 »  ( « Manhattan Melodrama ») que va voir Dillinger est réelle. C’est aussi l’occasion d’un nouveau duel, entre l’image qui figure sur l’écran (de Clark Gable) et celle de Dillinger qui la regarde avec fierté, voyant en ce dernier son propre reflet, son incarnation mythique.

     

    Je vous laisse juge de la fin, peut-être un peu expéditive (à l’image de la psychologie des personnages) au regard de ce film qui nous tient en haleine et crée une tension sans cesse croissante et nous laissait espérer un final paroxystique mais après tout c’est aussi à l’image de ce personnage pour qui tout devait aller vite, et donc finir vite.

     

    Un divertissement de haute qualité dans lequel la singularité de la forme enrichit le fond, contribuant au plaisir et à l’immersion du spectateur :  vous auriez donc tort de vous priver de ces « Public Enemies »  à la rencontre explosive desquels Inthemoodforcinema.com vous recommande vivement d’aller… 

  • "Raisons d'Etat"de Robert De Niro: critique du film (disponible en DVD)

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    Deuxième réalisation de Robert De Niro ( treize ans après son premier film en tant que réalisateur  « Il était une fois le Bronx ») sortie en juillet 2007, produit par Coppola,  « Raisons d’Etat » ( The Good Sheperd) est un film d’une étonnante maîtrise aussi bien visuelle que scénaristique (pour un second film, certes de quelqu’un qui a tourné sous la direction des plus grands, mais nous en avons vu d’autres passer derrière la caméra qui n’avaient pas pour autant assimilé les leçons de leurs maîtres)  que j’ai vu pour la première fois la semaine dernière et pour lequel je voulais vous faire partager mon enthousiasme. Son Ours d’Argent récompensant l’ensemble du casting reçu à la Berlinale 2007 était amplement mérité pour un film dont l’interprétation est une des qualités majeures mais loin d’être la seule...

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  • "Je vais te manquer"d'Amanda Sthers

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    Un aéroport. Là  où tant de destins se frôlent, s’esquivent, fuient, se retrouvent, échouent, s’envolent, se cherchent,  s’égarent. Là où finiront par se croiser six destinées : celles d'Olivier (Patrick Mille) et Lila (Anne Marivin),  Julia (Carole Bouquet) et Marcel (Pierre Arditi), Fanny (Monique Chomette) et Max (Michael Lonsdale). Soit un père célibataire et une jeune femme en quête du prince charmant. Une femme qui part mourir de l’autre côté de l’Atlantique et un écrivain irascible en mal d’inspiration. Et enfin un vieux psy et son amour de jeunesse.

     

     Un aéroport donc.  Là où nous finirons par nous égarer nous aussi… Là où s’achève le film (ou presque) et où il aurait pu commencer. Non, il commence bien avant, avec un enfant qui joue avec un ballon comme dans « M.Le Maudit » mais Amanda Sthers n’est pas Fritz Lang et on ne lui demande pas non plus. J’avais d’ailleurs beaucoup aimé son roman « Chicken street ». Sans doute ma déception est-elle à la hauteur de mon attente même s’il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit d’un premier film avec ses inéluctables maladresses et ses excès ( de sujets qu’on veut brasser à tout prix, de personnages, de bons mots que l’on souhaite placer, d’effets, d’intentions ). La vie, la mort, l’amour, la maladie, les petits plaisirs de l’existence, la maternité, l’immigration, les rêves, les regrets, le destin, la création... Beaucoup trop pour un seul film. Pour un seul film et pour trois tons.

     

    Amanda Sthers oscille ainsi constamment entre comédie outrancière, comédie romantique mièvre et drame. C’est à mon avis dans le troisième qu’elle est la meilleure et dans les deux premiers qu’elle s’est complètement fourvoyée. Comment concilier un film où les commissariats ressemblent à des clubs de vacances avec l’histoire d’une femme qui part  se suicider à l’étranger parce qu’elle ne veut pas affronter son cancer ? Comment concilier l’histoire fleur bleue d’une rencontre improbable dans un aéroport et celle d’un clandestin qui lutte pour sa vie ? C’est quasiment impossible… à moins d’être Woody Allen. C’est en tout cas beaucoup pour un premier film qui frôle malgré lui l’indécence, malgré les bonnes intentions de son auteur que je ne mets pas en cause mais qui clignotent comme les panneaux d’un hall d’aéroport. Ou comment contenir le journal intime de toute une vie dans un mince carnet de quelques pages ? C’est un détail me direz-vous… Mais c’est dans les détails qu’on reconnaît les grands films et que se révèlent les failles dévastratrices des autres.

     

    L’histoire d’Olivier et Lila, sa fraîcheur et sa fantaisie auraient pu la rendre drôle et touchante, elle est malheureusement d’une naïveté confondante. Il faut saisir sa chance, donner une chance à ses rêves nous dit-on.  Certes, encore faut-il qu’ils soient ancrés dans leur époque, dans une réalité et qu’ils ne soient pas portés par des personnages aussi stéréotypés qui édictent des vérités.

     

    Pourquoi ne pas avoir osé le drame ou carrément, à l’inverse, la comédie romantique à la Richard  Curtis ?

     

    Restent les personnages de Julia et Marcel interprétés par Carole Bouquet et Pierre Arditi, sauvés par leurs deux acteurs, et dont l’histoire aurait pu m’emporter si elle n'avait explosé en plein vol. Il faudra m’expliquer pourquoi elle choisit le Québec pour mettre fin à ses jours et malheureusement la musique (signée Sinclair), rend pathétique ce qui aurait permis à l'émotion d'affleurer sans elle.

     

    J’aurais aimé être emballée par ce premier film, j’aurai aimé croire en ces deuxièmes chances, ces rencontres improbables et magiques, mais la magie n’opère pas, entravée de surcroît par de nombreuses invraisemblances (dont on peut s’accommoder dans la comédie mais pas dans le drame, d’où le caractère inconciliable des différents tons). J’étais déjà prête à défendre férocement ce film face aux cyniques habituels qui ne croient ni aux destins ni aux rêves ni que le cinéma peut leur donner  des ailes mais malheureusement je suis constamment restée à distance de ces personnages insaisissables, de leurs trajectoires invraisemblables.

     

    Le film choral est à la mode, mais sa réussite implique un travail d’orfèvre pour que tout s’imbrique. L’été dernier, Rémi Bezançon nous avait touchés avec « Le premier jour du reste de ta vie ». Pour Amanda Sthers qui pourtant manie les mots avec habileté  c’est sans doute le premier jour du reste de sa vie de cinéaste, elle a encore le temps de faire du cinéma et de nous toucher  comme elle l’avait fait  en tant qu’auteur. Au suivant donc.

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