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  • Programme du Festival Cinéroman de Nice 2024

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    Chaque année, depuis sa création, il y a six ans, je vous parle ici du Festival Cinéroman de Nice qui a la judicieuse idée de relier et d'interroger ces deux arts, littérature et cinéma, et les liens nombreux qui les unissent. Un formidable évènement dont ce sera donc cette année (déjà !) la sixième édition, qui aura lieu du 30 septembre au 5 octobre 2024. Il met à l'honneur le travail des écrivains et scénaristes, et suffisamment rares sont les évènements à le faire, ainsi, pour ne pas mettre à nouveau en avant ce festival. Ils seront nombreux cette année, réalisateurs, scénaristes, compositeurs, acteurs, à évoquer leur travail et à partager leur passion, mais aussi  écrivains parmi lesquels le dernier prix Goncourt, Jean-Baptiste Andrea ou encore David Foenkinos, Marc Lambron...

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    Selon François Truffaut , « Qu'on écrive un roman ou un scénario, on organise des rencontres, on vit avec des personnages ; c'est le même plaisir, le même travail, on intensifie la vie. » Intensifier la vie, tel est un des nombreux points communs entre le cinéma et la littérature mais telle est aussi une des caractéristiques des festivals de cinéma. Bien que les œuvres cinématographiques adaptées de romans soient pléthoriques, peu nombreux sont finalement les festivals de cinéma consacrés au cinéma ET à la littérature.  Et seul le Festival du Film du Croisic (« festival d’adaptations littéraires sur grand écran ») bénéficiait d’une véritable renommée jusqu'à la création de ce festival qui a donc une véritable carte à jouer, se situant en plus dans une ville qui est un véritable décor de film, indissociable du septième art, entre les très nombreux tournages qui s’y déroulèrent (parmi lesquels La Baie des anges de Jacques Demy ou Magic in the moonlight de Woody Allen et plus récemment Mascarade de Nicolas Bedos) et la présence de la Cinémathèque de Nice mais aussi des mythiques Studios de la Victorine. Un festival d'autant plus nécessaire à une époque où le travail du scénariste n'est pas toujours reconnu à sa juste valeur (et une adaptation requiert tout autant une méticulosité et un travail d'orfèvre qu'un scénario original) qui, en 6 ans, a su s’imposer comme le « rendez-vous incontournable dédié aux romans et aux films ».

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    Le cinéma compte ainsi un nombre incroyable de chefs-d’œuvre parmi les adaptations littéraires : Hiroshima mon amour d’Alain Resnais (adapté de Duras), Le Temps de l’innocence de Martin Scorsese (adapté de Edith Wharton), Gatsby le magnifique de Jack Clayton (adapté de Francis Scott Fitzgerald), Lettre d’une inconnue d’Ophüls (adapté de Zweig), La Bête humaine de Renoir (adapté de Zola) sans compter plus récemment Illusions perdues de Giannoli (adapté de Balzac), et Le Comte de Monte-Cristo (adapté de Dumas) dont les réalisateurs Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière seront cette année les présidents du jury. Ils seront accompagnés de  Philippine Leroy-Beaulieu, Laetitia Dosch, Aurélie Saada, Enki Bilal, François Berléand, Jérémie Renier et,  Danièle Thompson, membre d'honneur.

    Pour les fondateurs du Festival Cinéroman de Nice, Nathalie et Daniel Benoin (aux côtés desquels se trouvent Christophe Barratier et Carole Chétiennot pour coprésident et vice-présidente), comme ils le soulignèrent dans l'édito 2022, ce festival est « un véritable rendez-vous entre soleil et salle obscure, entre professionnels et public, entre écrivains, réalisateurs, acteurs, producteurs et l’ensemble de la profession du cinéma».  En six ans seulement, ce festival a su devenir un des événements incontournables du cinéma en France.

    Le festival s'enrichit d'un futur marché professionnel de Cinéroman, inauguré au printemps de cette année avec, aussi, parmi les objectifs des fondateurs du festival  « l’espoir de redonner aux grands romans du XIXe siècle, trop souvent perçus comme un devoir par les jeunes, la place qu’ils méritent : celle d’un plaisir incommensurable »

    Au programme de cette année figurent plus de 48 projections, entre films en compétition, avant-premières et films cultes. Au Théâtre de l’Artistique vous pourrez également assister à des rencontres, des masterclasses, des débats, et des lectures. 

    Ci-dessous, je vous détaille le programme, et vous recommande d'emblée certains films, à ne manquer sous aucun prétexte. Retrouvez mes critiques des quatre premiers, en bas de cet article. Je vous en parlerai au moment de leur sortie en salles. Retrouvez également mes critiques du Comte de Monte-Cristo et de La Zone d'intérêt sur mon podcast In the mood for cinema :

    - La Zone d'intérêt de Jonathan Glazer (compétition)

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    - Bambi, l'histoire d'une vie dans les bois de Michel Fessler (avant-première, hors compétition)

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    - Le Comte de Monte-Cristo de Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte

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    Lien vers la critique complète en podcast ici

    - Plein soleil de René Clément (films cultes)

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    - Le Roman de Jim et Arnaud et Jean-Marie Larrieu (compétition)

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    Le Fil de Daniel Auteuil (compétition)

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    - Prodigieuses de Frédéric et Valentin Potier  (avant-première, hors compétition)

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    - La plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius (avant-première, hors compétition)

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    -En fanfare de Emmanuel Courcol (avant-première, hors compétition)

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     PROGRAMME COMPLET DU FESTIVAL CINEROMAN DE NICE 2024

    (Rendez-vous sur le site officiel du Festival Cinéroman de Nice 2024, ici, pour connaître les jours et heures de programmation des films.)

    FILMS EN COMPETITION

    La Zone d’Intérêt 

    Réalisé par Jonathan Glazer

    (retrouvez ma critique en bas de cet article et la version en podcast, ici)

    Le Royaume de Kensuke

    Réalisé par Neil Boyle et Kirk Hendry

    Quelques Jours Pas Plus

    Réalisé par Julie Navarro

    Juliette Au Printemps

    Réalisé par Blandine Lenoir

    Maria

    Réalisé par Jessica Palud

    L'Enfant Qui Mesurait Le Monde

    Réalisé par Takis Candilis

    Le Roman De Jim

    Réalisé par Arnaud et Jean-Marie Larrieu

    Emilia Perez

    Réalisé par Jacques Audiard

    Le Fil

    Réalisé par Daniel Auteuil

    Emmanuelle

    Réalisé par Audrey Diwan 

    FILMS EN AVANT-PREMIERE

    Leurs enfants après eux

    RÉALISÉ PAR ZORAN ET LUDOVIC BOUKHERMA

    Saint-Ex

    RÉALISÉ PAR PABLO AGUERO

    Le système Victoria

    RÉALISÉ PAR SYLVAIN DESCLOUS

    Bambi, l’histoire d’une vie dans les bois

    RÉALISÉ PAR MICHEL FESSLER

    (retrouvez ma critique en bas de cet article, et ici)

    En tongs au pied de l’Himalaya

    RÉALISÉ PAR JOHN WAX

    Louise Violet

    RÉALISÉ PAR ERIC BESNARD

    Limonov, la balade

    RÉALISÉ PAR KIRILL SEBRENNIKOV

    Angelo dans la forêt mystérieuse

    RÉALISÉ PAR VINCENT PARONNAUD ET ALEXIS DUCORD

    Prodigieuses

    RÉALISÉ PAR FRÉDÉRIC ET VALENTIN POTIER

    Sarah Bernhardt, La Divine

    RÉALISÉ PAR GUILLAUME NICLOUX

    Le panache

    RÉALISÉ PAR JENNIFER DEVOLDERE

    Seul

    RÉALISÉ PAR PIERRE ISOARD

    Un ours dans le Jura

    RÉALISÉ PAR FRANCK DUBOSC

    A bicyclette !

    RÉALISÉ PAR MATHIAS MLEKUZ

    La plus précieuse des marchandises

    RÉALISÉ PAR MICHEL HAZANAVICIUS

    En Fanfare

    RÉALISÉ PAR EMMANUEL COURCOL

    Niki

    RÉALISÉ PAR CÉLINE SALLETTE

    A toute allure

    RÉALISÉ PAR LUCAS BERNARD

    Monsieur Aznavour

    RÉALISÉ PAR MEHDI IDIR ET GRAND CORPS MALADE

    Hiver à Sokcho

    RÉALISÉ PAR KOYA KAMURA

    Le quatrième mur

    RÉALISÉ PAR DAVID OELHOFFEN

    FILMS CULTES

    L’Aveu

    RÉALISÉ PAR Costa-Gavras

    37.2 le matin

    RÉALISÉ PAR Jean-jacques Beineix

    Plein Soleil

    (retrouvez ma critique en bas de cet article, ici)

    RÉALISÉ PAR René Clément

    Trainspotting

    RÉALISÉ PAR Danny Boyle

    Un air de famille

    RÉALISÉ PAR Cédric Klapisch

    Le Comte de Monte-Cristo

    RÉALISÉ PAR MATHIEU DELAPORTE Et ALEXANDRE DE LA PATELLIERE

    (retrouvez ma critique en bas de cet article et la version en podcast, ici)

    La Reine Margot

    RÉALISÉ PAR PATRICE CHÉREAU

    MASTERCLASSES ET DEBATS

    L’interaction roman-cinéma en particulier pour la nouvelle génération

    Animée par Anne Michelet

    Mardi 1 octobre à 14h00

    Le cinéma est souvent un intermédiaire recherché pour la transmission des classiques de la littérature. Et effectivement on peut constater que le cinéma offre une seconde vie à beaucoup de romans classiques ou non ce qui souvent rend des œuvres littéraires accessibles à un public jeune parfois moins sensibilisés à la lecture. Et plus généralement est-ce que la réciproque est vraie ? Est-ce que voir un film peut amener le spectateur à devenir ou redevenir lecteur du roman dont il est adapté ?

    Avec Martin Bourboulon, réalisateur du dyptique les Trois Mousquetaires
    et Matthieu Delaporte et Alexandre De La Pattelière, co-présidents du jury et scénaristes et Réalisateurs
     

    Débat : les grands romans font-ils de grands films ?

    Animée par Charlotte Bouteloup

    Mardi 1 octobre à 16h00

    Réflexions sur le travail considérable et difficile qui est nécessaire pour s’attaquer aux grands textes de la littérature. Les romans dits « inadaptables » engendrent des films couteux et assez souvent peu réussi. Mais une nécessité sans doute pour faire découvrir à des spectateurs parfois mal informés de ces monuments qui font une grande partie de notre culture.

    Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière, co-présidents du jury
    ,et scénaristes et réalisateurs de Monte-Cristo
    Danièle Thompson, scénariste entre autre de la Reine Margot,
    Martin Bourboulon, réalisateur du diptyque des Trois Mousquetaires,
     

     

    Rencontre avec Marc Lambron (Académie française)

    Animée par Daniel Benoin

    Mercredi 2 octobre à 16h00

    Romancier, critique littéraire et grand amateur de cinéma, Marc Lambron se dévoilera un peu plus au cours de cette rencontre. Fascination garantie.

    Marc Lambron, académicien français 

     

    Rencontre avec Nicolas Seydoux et Jean-Marie Poiré

    Animée par Anne Michelet

    Mercredi 2 octobre à 18h00

    Nicolas Seydoux, Président de Gaumont, principal producteur du cinéma français vient nous parler de sa carrière et ses sentiments sur le cinéma d’aujourd’hui et de son ami réalisateur Jean-Marie Poiré qui l’accompagne.

    Nicolas Seydoux, producteur et président de Gaumont
    Jean-Marie Poiré, réalisateur et producteur

     

    Table ronde avec le jury de Cinéroman

    Jeudi 3 octobre à 16h00

    De l’importance du roman avant le film. Cela facilite la comCela compréhension, l’adaptation, préhension, la réalisation, l’interprétation ? Ecrivains, adaptateurs, réalisateurs, comédiens, membres du jury essayent de répondre à cette question.

    François Berléand
    Jérémie Renier
    Danièle Thompson
    Matthieu Delaporte
    Alexandre De La Patellière
    Laetitia Dosch
    Enki Bilal
    Philippine Leroy Beaulieu
    Aurélie Saada

     

    L’Intelligence Artificielle (IA) va-t-elle remplacer les créateurs de cinéma, de musique, d’arts plastiques et même du spectacle vivant ?

    Animée par Bruno Valentin

    Jeudi 3 octobre à 18h00

    Chaque année la question du bouleversement de la création artistique par l’IA se pose de manière renouvelée. En effet l’évolution de cette « technologie » est si rapide que chaque année le sujet est nouveau et ce phénomène va encore s’accélérer à l’avenir. La place prise par l’IA dans tous les arts de reproduction et non éphémères va-t-elle modifier en profondeur les métiers de ces arts dominants. Vont-ils perdre de leur authenticité et de leur originalité ? Qu’en est-il du spectacle vivant éphémère par nature ?

    Lawrence Valin, expert institut Europ’IA
    Alexandre Pachulski, expert en IA
    Laurent Perez Del Mar, musicien
    Remi Bezancon, réalisateur
    Paulo Correia, metteur en scène et vidéaste

     

    Débat : Les écrivains face à l’adaptation de leur roman

    Animée par Charlotte Bouteloup

    vendredi 4 octobre à 15h00

    Débat autour du rôle des écrivains dans l’adaptation de leurs propres œuvres au cinéma ; veulent-ils influencer le film ? Et si oui, jusqu’où ? Comment réagissent-ils face à l’interprétation de leur œuvre par d’autres ? Pourquoi un écrivain accepte-t-il de confier son œuvre, ses personnages à un autre créateur ? Est-il difficile de le voir s’emparer de ses personnages, leur donner des visages réels, leur faire dire, vivre parfois d’autres choses que ce qui est raconté dans le roman.

    Vanessa Schneider
    Camille Laurens
    David Foenkinos
    Christophe Ono-Dit-Biot, romancier journaliste

     

    Rencontre avec Jean-Baptiste Andrea

    Animée par Vanessa Schneider

    vendredi 4 octobre à 17h00

    Jean-Baptiste ANDREA est sans doute un cas unique. Autant on voit assez souvent des romanciers adapter leur livre au cinéma parfois même les réaliser autant notre auteur est un cas extrêmement rare de scénariste et réalisateur qui change de sensibilité artistique pour aller vers la littérature. Pour Jean-Baptiste ANDREA c’est 13 ans après ses débuts cinématographiques et peu de temps avant son prix Goncourt. Quelle belle histoire !

    Jean-Baptiste Andrea, prix Goncourt 2023

      

    Lecture de « Birmane » roman de Christophe Ono dit Biot en présence de l’auteur

    Animée par

    Samedi 5 octobre à 11h00

    Nadia Farès, comédienne et actrice
    Pascal Elbé, comédien et acteur
    Christophe Ono-Dit-Biot

     

    Masterclass : un cas exceptionnel de cinéroman avec Marie-Julie Baup

    Animée par Anne Michelet

    Samedi 5 octobre à 17h00

    Voilà un texte anglais « In other words » adapté au théâtre et traduit en français par Marie-Julie Baup et Thierry Lopez qui va devenir un film scénarisé et mis en scène par Marie-Julie. C’est un parcours presque symbolique pour Cinéroman, Marie-Julie viendra nous parler de la pièce et comment elle devient un film. Du texte au scénario nous pouvons comprendre une des tentatives –celle-ci en train de se faire- pour passer de la littérature au film.

    Marie-Julie Baup

     

    CRITIQUES DE 4 FILMS PRÉSENTÉS AU FESTIVAL CINÉROMAN DE NICE 2024

    CRITIQUE de LA ZONE D'INTÉRÊT de JONATHAN GLAZER  (compétition)

    Une critique à écouter aussi en podcast, ici.

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    Photo ci-dessus : présentation du film dans le cadre du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2023

    La Zone d’intérêt figurait parmi les films en compétition du dernier Festival de Cannes (d’où il est reparti avec le Grand Prix), fut présenté en avant-première au dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville, dans le cadre duquel je l’ai découvert, et le sera également la semaine prochaine au Dinard Festival du Film Britannique (dont je vous détaille le programme, ici).

    Rarement un film m’aura autant bousculée, de la première à la dernière seconde, et hantée, des jours après. Cela commence par un écran noir, interminable, tandis que des notes lancinantes et douloureuses viennent déjà heurter notre tranquillité, nous avertir que la sérénité qui lui succèdera sera fallacieuse. La première scène nous donne à voir une image bucolique, celle d’une famille au bord d’une rivière par une journée éclatante. Celle de Rudolf Höss, commandant d’Auschwitz de 1940 à 1943, qui habite avec sa famille dans une villa avec jardin, juste derrière les murs du camp. À qui ignorerait l’histoire (et l’Histoire) et ne serait pas attentif, la vie de cette famille semblerait de prime abord presque « normale ». Un air de vacances et de gaieté flotte dans l’air. Les corps s’exhibent, en pleine santé. Pourtant c’est dans cette normalité, cette banalité que réside toute l’horreur, omniprésente, dans chaque son, chaque arrière-plan, chaque hors-champ. Cette zone d’intérêt, ce sont les 40 kilomètres autour du camp, ainsi qualifiés par les nazis. Une qualification qui englobe déjà le cynisme barbare de la situation. La biographie de Rudolf Höss avait inspiré La mort est mon métier de Robert Merle, puis le roman The Zone of Interest de Martin Amis (publié chez Calmann-Lévy en 2015) dont le film est adapté. Il décrit le quotidien de cet artisan de l’horreur avec Hedwig, son épouse et leurs cinq enfants.

    Avant même le premier plan, ce qui nous interpelle, c’est le son, incessant, négation permanente de la banalité des scènes de la maisonnée. C’est le bruit d’un wagon. Ce sont des cris étouffés. Ce sont des coups de feu. Ce sont des aboiements. Ce sont ces ronronnements terrifiants et obsédants des fours crématoires. Mais c’est l’arrière-plan aussi qui teinte d’horreur tout ce qui se déroule au premier, cette indifférence criante qui nous révulse. C’est la vue de cette cheminée, juste au-dessus du jardin, dont une fumée noire s’échappe, sans répit. Ce sont les barbelés. C’est ce prisonnier qui s’affaire dans le jardin du Commandant. C’est la vue de ces trains qui ne cessent d’arriver. Ce sont ces os que charrie la rivière. L’horreur est là, omniprésente, et pourtant insignifiante pour les occupants de la zone d’intérêt qui vivent là comme si de rien n’était, comme si la mort ne se manifestait pas à chaque seconde. La vie est là dans ce jardin, entre le père qui fume, les pépiements des oiseaux et les cris joyeux des enfants, éclaboussant de son indécente frivolité la mort qui sévit constamment juste à côté. La « banalité du mal » définie par Hannah Arendt représentée dans chaque plan.

    Hedwig Höss se glorifie même d’être gratifiée du titre de « reine d’Auschwitz » par son mari. Hedwig est en effet très fière : de son statut, de ce qu’elle fait de sa maison, surtout de son jardin, avec sa serre et sa piscine. Son havre de paix au cœur de l’horreur absolue. Son mari est muté. Pour elle, l’horreur absolue s’inscrit cependant là : dans la perspective de devoir déménager de son « paradis ». Cette « zone d’intérêt » qu’elle ne quitterait pour rien au monde. Ce cliché de propagande nazie.

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    Claude Lanzmann (dont le documentaire Shoah, reste l’incontournable témoignage sur le sujet, avec également le court-métrage d’Alain Resnais, Nuit et brouillard) écrivit ainsi : « L’Holocauste est d’abord unique en ceci qu’il édifie autour de lui, en un cercle de flammes, la limite à ne pas franchir parce qu’un certain absolu de l’horreur est intransmissible : prétendre pourtant le faire, c’est se rendre coupable de la transgression la plus grave. » Le film de Glazer a cette intelligence-là : ne jamais montrer l’intransmissible. L’imaginer est finalement plus parlant encore. Ainsi, nous ne voyons rien de ce qui se déroule dans le camp mais nous le devinons. Nous ne voyons que des objets appartenant aux déportés qui contiennent en eux des destins tragiques et racontent la folie des hommes : un manteau de fourrure, des vêtements d'enfants, des bijoux, ou ce rouge à lèvres appartenant à une déportée qu’Hedwig s’applique soigneusement, et dans cette application en apparence insignifiante s’insinue le souffle glaçant de la mort qui la sous-tend. Le film adopte la retenue qui sied au sujet, au respect des victimes dont l’absence à l’image ne contribue pas à les nier mais n’est que le reflet de ce qu’elles étaient pour leurs bourreaux : des chiffres, des êtres dont on occultait sans état d'âme l'humanité. Le dénouement leur rend la lumière et la dignité. La Zone d’intérêt a été tourné à Auschwitz même, encore une fois avec ce souci, de respect des victimes et de fictionnaliser le moins possible. Pas d’esthétisation. Pas de lumière artificielle. Le sentiment de contemporanéité n’en est que plus frappant.

    Sandra Hüller figurait au générique de deux films remarquables en compétition du Festival de Cannes 2023, puisqu’elle incarne aussi la Sandra de Anatomie d’une chute de Justine Triet, la palme d’or de cette édition. Révélée à Cannes en 2016 dans Toni Erdmann, dans le film de Justine Triet, elle est impressionnante d’opacité, de froideur, de maitrise, d’ambiguïté. Ici, dans le rôle d'Hedwig, elle est carrément glaçante. Elle se délecte à essayer un manteau de fourrure trop grand pour elle dont il est aisé de deviner l’origine. Elle distribue des vêtements à ses amis dont la provenance ne fait aucun doute là non plus. Elle est si fière d’être cette femme à la vie si privilégiée, clamant qu’elle a une vie « paradisiaque » dans ce jardin qu’elle montre avec orgueil à sa mère, comme cette chambre d’enfant où elle l’héberge, avec fenêtre sur les miradors et cheminées. Elle est monstrueuse dans l’apparente normalité de ses gestes et paroles, et laissant même éclater toute sa violence lorsqu’une assiette n’est pas là où elle doit être. Ou quand elle demande à « Rudolf » de l'« emmener encore dans ce spa italien »  tandis que rugissent les fours crématoires, et la mort, alors qu’elle ne pense qu’à jouir de la vie, sans scrupules.

    Pour le Commandant (Christian Friedel), seule compte la fierté de servir le 3ème Reich. Obstinément. Des industriels viennent louer les qualités de leurs fours, comme s’il s’agissait d’un quelconque produit industriel. Comment ne pas avoir la nausée devant l’ignominieuse distance et l’abominable froideur avec lesquelles ils discutent des modalités de la solution finale et du principe d’un "four crématoire circulaire" ? Les réunions des directeurs de camps sont aussi nauséeuses dans leur apparence ordinaire. Il est question d’efficacité, de rendement, de logistique. Comme si rien de tout cela ne concernait des êtres humains, et leur mort atroce.

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     Une folie qui semble contaminer jusqu’aux enfants quand l’un enferme son frère dans la serre. On pense alors au chef-d’œuvre de Michael Haneke, Le ruban blanc. Ce ruban blanc, dans le film d’Haneke, c’est le symbole d’une innocence ostensible qui dissimule la violence la plus insidieuse et perverse. Ce ruban blanc, c’est le signe ostentatoire d’un passé et de racines peu glorieuses qui voulaient se donner le visage de l’innocence. Ce ruban blanc, c’est le voile symbolique de l’innocence qu’on veut imposer pour nier la barbarie, et ces racines du mal qu’Haneke nous fait appréhender avec effroi par l’élégance moribonde du noir et blanc. Ces châtiments que la société inflige à ses enfants en évoquent d’autres que la société infligera à plus grande échelle, qu’elle institutionnalisera même pour donner lieu à l’horreur suprême, la barbarie du XXème siècle. Cette éducation rigide va enfanter les bourreaux du XXème siècle dans le calme, la blancheur immaculée de la neige d’un petit village a priori comme les autres. La forme, comme dans le film de Glazer, démontre alors toute son intelligence, elle nous séduit d’abord pour nous montrer toute l’horreur qu’elle porte en elle et dissimule à l’image de ceux qui portent ce ruban blanc.

    Je ne saurais citer un autre film dans lequel le travail sur le son est aussi impressionnant que dans La Zone d’intérêt, la forme sonore tellement au service du fond (parmi les films récents, je songe au long-métrage de Vincent Maël Cardona,  Les Magnétiques mais le sujet est à des années-lumière de celui du film de Glazer) : cette dichotomie permanente entre ce vacarme et l’indifférence qu’il suscite. Ce grondement incessant qui nous accompagne des jours après. Les musiques composées par Mica Levi et les sons du concepteur sonore Johnnie Burn sont pour beaucoup dans la singularité de cette œuvre et dans sa résonance. Ces dissonances qui constamment nous rappellent que tout cela n'a rien de normal, qui nous oppressent. Et au cas où nous aurions souhaité occulter ce que ces sons représentent, ce qui se joue là, derrière les discussions sur la façon d’agencer le jardin ou les jeux des enfants, un écran brusquement rouge vient nous heurter, comme un écho à l’écran noir du début, nous signifiant bien que ce paradis bucolique masque un enfer, que le vert qui envahit l’écran n’est là que pour masquer le rouge qui déferle à quelques mètres. Seules des parenthèses en négatif laissent éclater un peu d’humanité (lueur d’espoir apparaissant alors comme irréalité au milieu de cette inconcevable réalité), et peut-être le départ anticipé de la mère d’Hedwig avec un mot dont nous ne connaîtrons pas la teneur et dont on a envie de croire qu'il dénonce l'horreur, et qui pourtant a elle aussi profité des déportés, en l’occurrence ses anciens patrons. C’est tout. Pas d'autre lueur d'espoir.

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    En 2015, avec Le Fils de Saul, László Nemes nous immergeait dans le quotidien d'un membre des Sonderkommandos, en octobre 1944, à Auschwitz-Birkenau. Saul Ausländer est alors membre de ce groupe de prisonniers juifs isolé du reste du camp et forcé d’assister les nazis dans leur plan d’extermination. Il travaille dans l’un des crématoriums où il est chargé de « rassurer » les Juifs qui seront exterminés et qui ignorent ce qui les attend, puis de nettoyer… quand il découvre le cadavre d’un garçon en lequel il croit ou veut croire reconnaître son fils. Tandis que le Sonderkommando prépare une révolte (la seule qu’ait connue Auschwitz), il décide de tenter l’impossible : offrir une véritable sépulture à l’enfant afin qu’on ne lui vole pas sa mort comme on lui a volé sa vie, dernier rempart contre la barbarie. La profondeur de champ, infime, renforce cette impression d’absence de lumière, d’espoir, d’horizon, nous enferme dans le cadre avec Saul, prisonnier de l’horreur absolue dont on a voulu annihiler l’humanité mais qui en retrouve la lueur par cet acte de bravoure à la fois vain et nécessaire, son seul moyen de résister. Que d’intelligence dans cette utilisation du son, de la mise en scène étouffante, du hors champ, du flou pour suggérer l’horreur ineffable, ce qui nous la fait d’ailleurs appréhender avec plus de force encore que si elle était montrée. László Nemes s’est beaucoup inspiré de Voix sous la cendre, un livre de témoignages écrit par les Sonderkommandos eux-mêmes.

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    Avec le plus controversé La vie est belle, Benigni a lui opté pour le conte philosophique, la fable pour démontrer toute la tragique et monstrueuse absurdité à travers les yeux de l’enfance, de l’innocence, ceux de Giosué. Benigni ne cède pour autant à aucune facilité, son scénario et ses dialogues sont ciselés pour que chaque scène « comique » soit le masque et le révélateur de la tragédie qui se « joue ». Bien entendu, Benigni ne rit pas, et à aucun moment, de la Shoah mais utilise le rire, la seule arme qui lui reste, pour relater l’incroyable et terrible réalité et rendre l’inacceptable acceptable aux yeux de son enfant. Benigni cite ainsi Primo Levi dans Si c’est un homme qui décrit l’appel du matin dans le camp. « Tous les détenus sont nus, immobiles, et Levi regarde autour de lui en se disant : “Et si ce n’était qu’une blague, tout ça ne peut pas être vrai…” C’est la question que se sont posés tous les survivants : comment cela a-t-il pu arriver ? ». Tout cela est tellement inconcevable, irréel, que la seule solution est de recourir à un rire libérateur qui en souligne le ridicule. Le seul moyen de rester fidèle à la réalité, de toute façon intraduisible dans toute son indicible horreur, était donc, pour Benigni, de la styliser et non de recourir au réalisme. Quand il rentre au baraquement, épuisé, après une journée de travail, il dit à Giosué que c’était « à mourir de rire ». Giosué répète les horreurs qu’il entend à son père comme « ils vont faire de nous des boutons et du savon », des horreurs que seul un enfant pourrait croire mais qui ne peuvent que rendre un adulte incrédule devant tant d’imagination dans la barbarie (« Boutons, savons : tu gobes n’importe quoi ») et n’y trouver pour seule explication que la folie (« Ils sont fous »). Benigni recourt à plusieurs reprises intelligemment à l’ellipse comme lors du dénouement avec ce tir de mitraillette hors champ, brusque, violent, où la mort terrible d’un homme se résume à une besogne effectuée à la va-vite. Les paroles suivantes le « C’était vrai alors » lorsque Giosué voit apparaître le char résonne alors comme une ironie tragique. Et saisissante.

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    Autre approche encore que celle de La Liste de Schindler de Spielberg dont le scénario sans concessions au pathos de Steven Zaillian, la photographie entre expressionnisme et néoréalisme de Janusz Kaminski (splendides plans de Schindler partiellement dans la pénombre qui reflètent les paradoxes du personnage), l’interprétation de Liam Neeson, passionnant personnage, paradoxal, ambigu et humain à souhait, et face à lui, la folie de celui de Ralph Fiennes, la virtuosité et la précision de la mise en scène (qui ne cherche néanmoins jamais à éblouir mais dont la sobriété et la simplicité suffisent à retranscrire l’horrible réalité), la musique poignante de John Williams par laquelle il est absolument impossible de ne pas être ravagé d'émotions à chaque écoute (musique solennelle et austère qui sied au sujet -les 18 premières minutes sont d’ailleurs dénuées de musique- avec ce violon qui larmoie, voix de ceux à qui on l’a ôtée, par le talent du violoniste israélien Itzhak Perlman, qui devient alors, aussi, le messager de l’espoir), et le message d’espérance malgré toute l’horreur en font un film bouleversant et magistral. Et cette petite fille en rouge que nous n'oublierons jamais, perdue, tentant d’échapper au massacre (vainement) et qui fait prendre conscience à Schindler de l’individualité de ces juifs qui n’étaient alors pour lui qu’une main d’œuvre bon marché. 

    Avec The Zone of Interest, Jonathan Glazer prouve d’une nouvelle manière, singulière, puissante, audacieuse et digne, qu’il est possible d’évoquer l’horreur sans la représenter frontalement, par des plans fixes, en nous en montrant le contrechamp, reflet terrifiant de la banalité du mal, non moins insoutenable, dont il signe une démonstration implacable. Cette image qui réunit dans chaque plan deux mondes qui coexistent et dont l’un est une insulte permanente à l’autre est absolument effroyable.  Si cette famille nous est montrée dans sa quotidienneté, c’est avant tout pour nous rappeler que la monstruosité peut porter le masque de la normalité. L’intelligence réside aussi dans la fin, qui avilit le monstre et le fait tomber dans un néant insondable tandis que nous restent les images de ce musée d’Auschwitz dans lequel s’affairent des femmes de ménage, au milieu des amas des valises, de chaussures et de vêtements, et des portraits des victimes. C’est d’eux dont il convient de se souvenir. De ces plus de cinq millions de morts tués, gazés, exterminés, parfois par des journées cyniquement ensoleillées. Un passé si récent comme nous le rappellent ces plans de la maison des Höss aujourd’hui transformée en mémorial. Une barbarie passée contre la résurgence de laquelle nous avons encore trop peu de remparts. Le film s’achève par un écran noir accompagné d’une musique lugubre, là pour nous laisser le temps d’y songer, de nous souvenir, de respirer après cette plongée suffocante, et de reprendre nos esprits et notre souffle face à l’émotion qui nous submerge. Un choc cinématographique. Un choc nécessaire. Pour rester en alerte. Pour ne pas oublier les victimes de l’horreur absolue mais aussi que le mal peut prendre le visage de la banalité. Un film brillant, glaçant, marquant, incontournable. Avec ce quatrième long-métrage (après Sexy Beast, Birth, Under the skin) Jonathan Glazer a apporté sa pierre à l'édifice mémoriel. De ce film, vous ne ressortirez pas indemnes. Vous ne pourrez pas (l') oublier. Voyez-le, impérativement.

    CRITIQUE de BAMBI, L'HISTOIRE D'UNE VIE DANS LES BOIS de MICHEL FESSLER (avant-première, hors compétition)

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    Qui ne connaît pas Bambi, le dessin animé des studios Disney de 1942, bien souvent à l’origine des premiers chagrins et éblouissements cinématographiques ? Tout comme le film de Disney, celui de Michel Fessler, est adapté du livre Bambi, l’histoire d’une vie dans les bois de Felix Salten (1869–1945), autrichien d’origine hongroise, dramaturge, scénariste et romancier, qui écrivit plusieurs contes animaliers dont le célèbre Bambi, en 1923. De l’italien bambino, ce récit lui est inspiré par un séjour dans les Alpes. Bambi, Eine Lebengeschichte aus dem Walde.

    Cette fois, cependant, il ne s’agit pas d’un film d’animation mais de prises de vues réelles accompagnées par la voix de Mylène Farmer qui livre le récit, et par la musique originale de Laurent Perez del Mar. Le défi était de taille et est ici magistralement relevé avec pour résultat un conte initiatique d’une grande force et d’une saisissante beauté, un vibrant hymne à la nature.

    Comme le film de 1942, celui-ci raconte les aventures de Bambi, le jeune faon, entouré de sa mère et des animaux de la forêt : son ami le corbeau, le lapin, le raton laveur… Bambi découvre le monde des arbres et leurs secrets. Chaque jour, sa mère l’éduque pour qu’il puisse grandir avec force. Mais l’automne arrivé, Bambi s’aventure en terrain découvert lorsque des chasseurs le séparent de sa mère à tout jamais. Dès lors, le jeune faon doit apprendre à vivre seul. Heureusement, il retrouve Faline son amie d’enfance. Puis, un grand et majestueux cerf, qui n’est autre que son père, va retrouver Bambi et l’aider à grandir. Ce dernier va alors prendre son destin en main.

    Je vous parlais d’éblouissement à propos de ce que provoque Bambi chez les enfants qui découvrent le film d’animation de 1942 et qui, parfois, aussi, par ce biais, vivent leurs premières émotions cinématographiques. Éblouissement. Tel est aussi le mot qui définit la musique de Bambi, acteur à part entière de ce film qui le sublime.

    Dit-on d’une musique qu’elle éblouit ? Certainement le devrions-nous quand, comme celle-ci, elle charrie autant d’images et d’émotions, puissantes, entremêlées parfois. Un tourbillon d’émotions, même. La musique nous immerge en plein conte, dans une forêt tantôt luxuriante, tantôt menaçante, parfois les deux en même temps, tant elle est expressive, vibrante de vie, intense. À la fois terrienne et céleste (sensation qui atteint encore une dimension supplémentaire quand les voix de Léa Dasenka ou de Julia Wischnewski -chant ethnique pour la première et chant lyrique pour la seconde- se posent sur celle-ci). Elle nous donne à « voir » les animaux qui la peuplent, et qui gambadent, facétieux. Elle nous fait ressentir à quel point Bambi est accablé de chagrin. Elle évoque avec maestria la nature qui s’éveille, les lucioles qui volètent et nous procure la sensation de nous envoler avec elles, de ressentir les cycles de la vie, la succession des saisons, les dangers qui menacent le jeune faon, la renaissance de l'espoir.  Elle nous fait éprouver la peur et l’apaisement, la violence et la douceur, le désarroi et la gaieté. Elle nous transporte ailleurs, elle porte en elle l’élan de vie, et nous emporte dans son lyrisme subtil.

    Elle évoque une insouciance et un bonheur contagieux quand Bambi gambade avec sa mère, papillonne au milieu des fleurs ou s’éveille aux plaisirs de la liberté. Quand plane la menace de l’aigle, elle se fait à son image : majestueuse et inquiétante. Elle transcrit les élans amoureux quand Bambi est avec Faline, « quand deux petits cœurs s'emballent. » Quand « les lucioles se prennent pour des étoiles tombées du ciel », la musique miroite alors de concert avec elles. Quand Bambi est coursé par un chien, la musique tambourine et se gonfle d’un souffle épique, et évoque l’aventure et la chevauchée fantastique, telle celle d’un western. Elle irradie. Si elle est majestueuse, elle n’est jamais grandiloquente ou emphatique. Elle ne paraphrase pas. Elle accompagne, suggère une double lecture, ajoute un supplément d’âme, d’émotion et d’interprétation. À l'image du conte aussi : plusieurs degrés de lecture se superposent entre ses notes. Ainsi, quand Bambi est blessé, la musique suggère une double blessure, la blessure physique mais aussi la solitude, la blessure morale, l’absence de sa mère.  Elle chante, pleure, s’enthousiasme, vibre et vit, comme la nature qu'elle célèbre. Quand le coup de feu meurtrier immobilise la forêt et la fait trembler, elle se pare d’une gravité soudaine. Et quand elle est accompagnée de ces mots « La tristesse, c'est du froid à l'intérieur, il ne sait pas encore que c'est pour toujours », elle nous fait frissonner d’une glaçante admiration. Enfin, quand Bambi devient à son tour le roi de la forêt, ce et ceux qui la peuplent semblent vibrer en chœur et elle nous fait éprouver ce qu'ils ressentent : de la beauté pure, une joie profonde, rassurante et exaltante.

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    Souhaitons à cette musique un destin au moins aussi radieux que celui que connut la bande originale de La Tortue rouge de Michael Dudok de Wit, du même Laurent Perez del Mar, qui a obtenu le Prix Spécial du Jury Un Certain Regard du 69ème Festival de Cannes avant de nombreux autres prix et nominations dans le monde, notamment aux César et aux Oscars comme meilleur film d’animation. Ce conte philosophique et écologique était aussi un éblouissement permanent qui nous attrapait dès la première image (comme si nous étions ballottés par la force des éléments avec le naufragé) pour ne plus nous lâcher, jusqu’à ce que la salle se rallume, et que nous réalisions, abasourdis, que ce voyage captivant sur cette île déserte, cet état presque second dans lequel ce film nous avait embarqués, n’étaient que virtuels. Le murmure des vagues. Le chuchotement du vent. Le tintement de la pluie. L’homme si petit au milieu de l’immensité. La barque à laquelle il tente de s'accrocher. Le vrombissement de l’orage. Les cris des oiseaux. Les vagues qui se fracassent contre les rochers, puis renaissent. Le bruissement des feuilles. L'armée joyeuse des tortues. Le clapotis de l'eau. La nature resplendissait là aussi à travers les notes :  sauvage, inquiétante, magnifique. Sans oublier la respiration (dissonante ou complémentaire de l’homme) au milieu de cette nature harmonieuse. La musique à peine audible d’abord, en gouttes subtiles, comme pour ne pas troubler ce tableau, se faisait peu à peu plus présente. L’émotion du spectateur allait crescendo à l'unisson, comme une vague qui prend de l’ampleur et nous éloigne peu à peu du rivage de la réalité avant de nous embarquer, loin, dans une bulle poétique et consolatrice.

    Si je vous parle ainsi de la musique de La Tortue rouge, c’est parce que dans Bambi, comme dans ce film précité, la musique et les ambiances de nature se (con)fondent et s'enrichissent alors avec virtuosité pour créer cette symbiose magique. Jamais redondante, elle apporte un contrepoint romanesque, lyrique, et un supplément d’âme et d’émotion qui culmine lors d’un ballet aquatique et lors de la scène du tsunami dans La tortue rouge, lorsque Bambi devient le roi de la forêt dans le film éponyme. À ces instants, dans les deux films, la puissance romanesque de la musique hisse et propulse le film, et le spectateur, dans une sorte de vertige hypnotique et sensoriel d’une force émotionnelle exaltante, rarement vue (et ressentie) au cinéma.

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    Je vous avais aussi parlé de cette musique qui s’emballe comme un élan romanesque, à l'unisson de l’imagination de celle du personnage Gaby, quand un de de ses rêves se réalise et que son visage s’illumine de joie, dans l’excellent Super papa de Léa Lando. Dans Bambi, on retrouve ce souffle romanesque, exacerbé, qui s’empare de nous.

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    Dans Un coup de maître de Rémi Bezançon, à la fin du film, la musique de Laurent Perez del mar, sublime également la nature, lorsqu'elle s’emporte et s’emballe comme des applaudissements victorieux, comme un tourbillon de vie, comme un cœur qui renaît, comme le pouls de la forêt, avec de plus en plus de profondeur aussi, comme si la toile atteignait son paroxysme, sa plénitude. Dévoilant toute sa profondeur, elle emporte alors comme une douce fièvre, harmonieuse, réconfortante.

    Le travail sur le son, dans Bambi, est aussi absolument admirable et exceptionnel : les bruits de la nature sont en eux-mêmes une musique qui dialogue avec celle du compositeur.  Les feuilles qui bruissent et caressent nos oreilles. La pluie qui rebondit sur les feuilles. Les grondements de l’orage. Le clapotis de l’eau. Les bourdonnements des insectes. Les bruits des pattes du loup sur les feuilles. Les respirations des animaux et de la nature. Comme un acteur qui jouerait avec un partenaire, la musique de Laurent Perez del Mar répond aux sons de l'environnement et des animaux, joue et jongle avec les bruits (et les images) de la nature, grâce à un orchestre de plus de 70 musiciens.

    Le travail sur l’image et la réalisation sont tout aussi admirables. Bambi est personnifié. L’Homme n’est ici qu’une ombre menaçante, insidieuse, tueuse, sans visage. L’animal est l’être sensible, humain, avec ses yeux expressifs, qui nous restent en mémoire, comme ses « points blancs sur son dos qui imitent les taches du soleil. » Comme tant d’autres plans qui imprègnent nos souvenirs de spectateurs, comme au retour d’un voyage aux sensations indélébiles. Les couleurs chatoyantes de l’automne. Les reflets menaçants du ciel dans l’eau. Les reflets de la lune. La brume qui serpente au-dessus de l’eau. Le ciel rougeoyant. La beauté de l’animal, qui se confond avec les couleurs de la nature. Les feuilles qui tombent et tourbillonnent autour de sa tête, au ralenti. 

    La voix off, ensorcelante, de Mylène Farmer, d’une présence discrète, ne force pas l’émotion mais ajoute subtilement une dimension poétique, parfois philosophique : « C’est la diversité qui fait la beauté du monde. », « Être curieux n'est pas un si vilain défaut. » « Parfois, le simple fait de se ressembler fait naître une étincelle. » « L'été est bien installé une boule de feu règne. », « Rien n'est plus doux que des liens qui fleurissent »...

    Une association de protection animale s'est opposée à la diffusion du film et dénonce l'utilisation de vrais animaux pendant le tournage. Quelle absurdité ! Ce film est au contraire une ode respectueuse à la nature. Il est par ailleurs clairement précisé qu’aucun animal n’a été maltraité durant les seize semaines du tournage, qui eut lieu en région Centre Val de Loire et dans le département du Loiret. L’équipe n’a jamais oublié d’être à l’écoute du bien-être des animaux et de leur rythme biologique. Ce film doit au contraire être vu par le plus grand nombre, a fortiori par les scolaires.

    Scénariste accompli, Michel Fessler a écrit et coécrit plus d’une trentaine de films français comme internationaux en variant les genres : aventure, drame intime et psychologique. En 2022, il signe deux succès internationaux, Le Chêne, une fiction documentaire réalisée par Michel Seydoux et Laurent Charbonnier et un long-métrage d’animation avec les dessins de Sempé Le Petit Nicolas co-écrit avec Anne Goscinny. Trois films nommés aux Oscars le font connaître au grand public : RidiculeFarinelli et La Marche de l’Empereur.

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    Le travail de Laurence Buchmann, la cheffe monteuse, est également pour beaucoup dans la réussite de l'ensemble, et contribue aussi fortement à ce dialogue entre les animaux et les végétaux, et au rythme qui ne faiblit pas. De même que celui de Daniel Meyer, le Directeur de la photographie qui, après avoir parcouru le monde pour de multiples documentaires, a mis en lumière des séries télévisées ainsi que des unitaires, a participé à deux grands projets cinéma de Yann Arthus Bertrand, Human et Women, co-signé avec Anastasia Mikova.

    Bambi n’est pas seulement un conte pour enfants. Toute la vie, sa violence et sa douceur, sa beauté et sa cruauté, ses désespoirs et ses espoirs, ses morts et ses renaissances, l’amitié, l’amour, la découverte du monde et de soi, la préciosité, la force et la fragilité de la nature, tout cela est raconté dans le film de Michel Fessler. Et bien plus encore. Félix Salten, juif, dut fuir les nazis. Bambi fut ainsi interdit comme l'ensemble de l'œuvre de l'écrivain en raison de ses origines, en Allemagne puis dans l’Autriche annexée par Hitler.  L’homme qui cherche à enfermer et tuer la beauté de la nature, les animaux qui ne cessent de fuir… : difficile de ne pas y voir aussi une peinture de la noirceur de l’âme humaine et le reflet de la montée de l'antisémitisme.

    Un film sensoriel, une expérience et une musique qui est indéniablement une des plus expressives, profondes, puissantes, majestueuses, évocatrices, émouvantes, qu’il m’ait été donné d’entendre. Une musique éblouissante et bouleversante, d’une grande profondeur, richesse et sensibilité, qui reflète la simplicité et la polysémie du conte, face à la brutalité et la cruauté du monde. Un histoire intemporelle et universelle qui nous embarque dans un voyage fascinant, fascinés, les yeux écarquillés et les oreilles à l’affût du moindre frémissement de la nature, comme ceux d’un enfant ou du jeune faon devant la découverte des beautés du monde. Comme si nous découvrions un autre monde aux magnificences envoûtantes dont on oublie parfois que c'est aussi le nôtre et qu'il faut le protéger, le chérir et prendre le temps de l’admirer dans ce qu’il a de plus minuscule comme dans ce qu’il a de plus grandiose (magnifiques plans en plongée de la forêt). Une échappée belle inoubliable grâce à l’alliance d’une rare perfection de la musique et des images qui font que notre cœur bat à la chamade à l’unisson de celui de Bambi et des vibrations de la nature. En préface de la réédition de l’œuvre de Félix Salten, Amélie Nothomb a écrit : « Je défie le lecteur de ne pas en sortir bouleversé. » Je dirais de même au sujet du film. Et j’ajoute : préparez-vous à être émerveillés ! Si ce film est un hymne à la nature, il l’est aussi à l’émerveillement et nous en fait ressentir, de la première à la dernière image, de la première à la dernière note. Un chef-d’œuvre du genre, tout simplement, d’autant plus impressionnant qu’il s’agit du premier film en tant que réalisateur de Michel Fessler.

    À noter :

    • Le film sort en salles le 16 octobre et la musique sera disponible dès le 18 octobre, sur toutes les plateformes.

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    • Le film est sélectionné dans plusieurs festivals dont le Festival du Film du Croisic (festival d’adaptations littéraires sur grand écran) dans le cadre duquel il sera projeté, hors compétition, le mercredi 9 octobre, en présence d’une partie de l’équipe du film dont le réalisateur Michel Fessler et le compositeur Laurent Perez del Mar.

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    • Bambi, L’histoire d’une vie dans les bois de Felix Salten. Le roman intégral originel (1923) augmenté du storyboard du film 130 x 200 mm - 220 pages, est également à découvrir aux éditions Télémaque.

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    •  L’album jeunesse La première adaptation en images réelles du roman de Felix Salten, d’après le film réalisé par Michel Fessler est également disponible. Le film raconté aux enfants avec une sélection de ses 40 plus belles photos. 210 x 297 mm relié - 40 pages illustrées www.editionstelemaque.com SORTIE EN LIBRAIRIE Le 10 octobre 2024
    • Retrouvez prochainement cette critique en podcast (podcast In the mood for cinema sur Spotify…).

     

    CRITIQUE - LE COMTE DE MONTE-CRISTO de MATTHIEU DELAPORTE ET ALEXANDRE DE LA PATELLIÈRE (présidents du jury du Festival Cinéroman 2024)

    Une critique à écouter aussi en podcast, ici.

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    « Toute fausseté est un masque, et si bien fait que soit le masque, on arrive toujours, avec un peu d'attention, à le distinguer du visage. » Cette citation d’Alexandre Dumas de 1844, extraite des Trois Mousquetaires, rappelle le passionnant jeu de masques que sont les livres de Dumas et aussi pourquoi ils sont un matériau idéal pour l'adaptation cinématographique, le cinéma étant l’art de l'illusion (et donc du jeu de masques) par excellence.

    Le Comte de Monte-Cristo, avec d’Artagnan, en plus d’être le héros de Dumas le plus connu, est une des figures les plus mythiques de la littérature dont chacun s’est forgé une image, inspirée de ses lectures ou des précédentes adaptations cinématographiques du roman (une trentaine). S’attaquer à un tel monument était donc un véritable défi. Ce sont Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte qui s’y sont attelés, après avoir déjà écrit le scénario du diptyque sur Les Trois Mousquetaires, s’octroyant en plus cette fois la charge de la réalisation. Présenté hors-compétition, le film a reçu à Cannes un accueil très chaleureux.

    Dans cette nouvelle adaptation, comme dans le roman de Dumas, Edmond Dantès (Pierre Niney), victime d’un complot, est arrêté le jour de son mariage avec Mercédès (Anaïs Demoustier) pour un crime qu’il n’a pas commis, puis il est envoyé sans procès au large de Marseille, au château d’If dont il parvient à s’évader après 14 années de détention. Devenu immensément riche, grâce au trésor de l’Abbé Faria (Pierfrancisco Favino), il revient sous l’identité du Comte de Monte-Cristo pour se venger des trois hommes qui l’ont trahi.  C’est alors La Monarchie de Juillet, Louis Philippe gouverne et les faux-semblants règnent.

    Le lecteur assidu et amoureux de l’œuvre de Dumas peut d’abord être décontenancé par le travail d’adaptation qui fait disparaître des épisodes essentiels (par exemple, lorsque, après son évasion, Dantès travaille sur un bateau de contrebandiers qui le mènera jusqu’à l’île de Montrecristo) ou disparaître ou fusionner des personnages, ou qui en crée d’autres comme la sœur bonapartiste du procureur royaliste Villefort (Laurent Lafitte) ou encore qui modifie les relations entre Danglars (Patrick Mille), Villefort (Laurent Lafitte) et Morcerf (Bastien Bouillon) ou même leurs relations avec Dantès. Fernand de Morcerf est ainsi dès le début un aristocrate, ami de Dantès. Force est néanmoins de constater que toutes ces infidélités à l’œuvre de Dumas apportent du rythme et de la modernité, et qu’elles accentuent le sentiment d’intemporalité (d’ailleurs, souvent le décor disparaît derrière les personnages, filmés en gros plan, qui pourraient ainsi évoluer à n’importe quelle époque) et que nous ne voyons pas passer les presque 3 heures que dure ce film qui entremêle savamment les genres (aventure, tragédie, amour, thriller). La densité du roman feuilleton paru en 1844 est telle que l’adapter nécessitait forcément de sacrifier et remodeler, et cette restructuration est ici une entière réussite.

    Le contemporain de Balzac qu’était Dumas n’est pas seulement un auteur populaire d’intrigues historiques, épiques et romanesques (ce à quoi on l’a trop souvent réduit) mais aussi un magicien jonglant avec les mots, un fin observateur de la comédie humaine et des noirceurs de l’âme. Une noirceur que reflète brillamment cette adaptation fidèle à l’esprit du roman qui est aussi la peinture sociale de la Monarchie de Juillet.  Une noirceur que reflètent ces quelques phrases extraites du texte de Dumas :

    « La joie pour les cœurs qui ont longtemps souffert est pareille à la rosée pour les terres desséchées par le soleil ; cœur et terre absorbent cette pluie bienfaisante qui tombe sur eux, et rien n'en apparaît au-dehors. »

    « Ne comprenez-vous pas, madame, que, moi aussi, il faut que j'oublie? Eh bien, quand je travaille, et je travaille nuit et jour, quand je travaille, il y a des moments où je ne me souviens plus, et quand je ne me souviens plus, je suis heureux à la manière des morts; mais cela vaut encore mieux que de souffrir. »

    « Les blessures morales ont cela de particulier qu'elles se cachent, mais ne se referment pas; toujours douloureuses, toujours prêtes à saigner quand on les touche, elles restent vives et béantes dans le cœur. »

    « Si endurcis au danger que soient les hommes, si bien prévenus qu'ils soient du péril, ils comprennent toujours, au frémissement de leur cœur et au frissonnement de leur chair, la différence énorme qui existe entre le rêve et la réalité, entre le projet et l'exécution. »

    « Qu'est-ce que la vie? Une halte dans l'antichambre de la mort. »

    « Chaque homme a sa passion qui le mord au fond du cœur, comme chaque fruit son ver. »

    « A tous les maux il est deux remèdes : le temps et le silence. »

    Le film commence sous l’eau, Dantès sauvant une jeune femme d’une mort certaine (un personnage créé par les scénaristes qui jouera ensuite un rôle essentiel), qui préfigure la menace sourde de la mort qui ne cessera ensuite de planer derrière les images d’un sud idyllique, éclaboussé de soleil.

    Chacun s’est construit son Monte-Cristo, en fonction de ses lectures du roman et des précédentes adaptations. Pour moi, il arborait jusqu’à présent les traits de Jean Marais (dans la version de 1954 réalisée par Robert Vernay). Ce sera désormais Pierre Niney qui incarne avec autant de justesse Dantès, le jeune homme plein d’entrain, d’illusions, de naïveté, que Monte-Cristo, l’homme masqué, blessé, physiquement et moralement, qui met en scène sa vengeance contre Danglars, Villefort et Morcerf, en exploitant le point faible de chacun d’entre eux : la justice, l’argent, l’amour.   

    Après tant de rôles marquants (GoliathAmants, Boîte noireSauver ou périrLa Promesse de l’aube, L’Odyssée, FrantzUn homme idéalComme des frèresJ’aime regarder les filles), Pierre Niney prouve une nouvelle fois qu’il peut se glisser dans n’importe quel personnage et l’incarner avec intelligence. D’ailleurs, souvent des personnages d’hommes portant un masque, dissimulant une blessure, ou une double identité. L’intelligence de son jeu réside ici dans la démarche et les gestes de Monte-Cristo (qui diffèrent de ceux de Dantès) mais surtout ce regard qui se pare d’une dureté flagrante. Une métamorphose impressionnante qui ne réside pas tant dans les heures de maquillage (150 heures au total) que dans le jeu de l’interprète qui construit cette armure forgée par les blessures de Dantès que l’intensité douloureuse de  son regard reflète alors. Pour mettre en scène sa vengeance, Dantès recréé un monde, se fait le démiurge de l’univers dont il sera aussi le protagoniste. Une sorte de décor des Mille et Une Nuits, avec ses candélabres, et ses ombres, fascinant et inquiétant. Ce décor, à la fois sombre et étincelant, opulent et dépouillé, éblouissant et menaçant, miroir de la dualité de Monte-Cristo/Dantès, sera celui de sa vengeance macabre, le reflet de son âme aux frontières de la folie, glaçante et glaciale même, Monte-Cristo se prenant parfois même davantage pour le Diable que pour le Dieu auquel il veut se substituer, utilisant les jeunes Andrea (remarquable Julien de Saint Jean) et Haydée (Anamaria Vartolomeï, ensorcelante) comme les marionnettes de son théâtre de vengeance.  « Feras-tu le bien ou laisseras-tu ton cœur s’emplir de haine ? » lui avait demandé l’Abbé Faria. « À partir de maintenant, c’est moi qui récompense et c’est moi qui punis » clamera plus tard Dantès, persuadé pourtant de faire acte de justice et non de vengeance : « Si je renonce à la justice, je renonce à la seule force qui me tient en vie. » Lors de la conférence de presse cannoise, Pierre Niney a expliqué comment il s’était entrainé avec un champion du monde d’apnée. Et il est en effet évident qu’il est corps et âme le héros de Dumas, faisant oublier ses précédentes incarnations.

    Si Laurent Lafitte, Bastien Bouillon et Patrick Mille sont des méchants particulièrement convaincants, Mercédès (Anaïs Demoustier, remarquable une fois de plus, est ici une Mercédès droite, noble, intense) et Haydée (Anamaria Vartolomei), par l’ambivalence de leur jeu et de leurs sentiments, apportent de la complexité à l’histoire. Au-delà du roman d’aventure et du film épique, Monte-Cristo est aussi une sublime histoire d’amour contrariée qui s’incarne dans une scène magnifique et bouleversante lors de laquelle, devant Mercédès, Monte-Cristo évoque cette femme qu’il a tant aimée. Pas d'amples mouvements de caméra ou de mise en scène époustouflante à cet instant, seuls deux comédiens qui manient mots et émotion contenue avec maestria, face à face, et le texte, magnifique, et l'émotion qui, forcément, affleure.

    Le scénario, d’Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte, auxquels on doit notamment aussi la coécriture et la coréalisation du film Le Prénom, sorti en 2012, est fidèle à l’œuvre mais témoigne aussi de son intemporalité et son universalité dans les thèmes abordés : l’innocence bafouée, la confiance trahie, les regrets brûlants, l’amour entravé, le désir de vengeance.

    La musique de Jérôme Rebotier accompagne les élans épiques comme les élans amoureux, et renforce la flamboyance du film, et du héros sombre et tourmenté dans sa course effrénée vers la vengeance.

    La photographie, signée Nicolas Bolduc, jouit ici des contrastes qui faisait défaut aux Trois mousquetaires et s’assombrit judicieusement au fur et à mesure que Dantès devient Monte-Cristo, que la noirceur empiète sur l’innocence, que l’esprit de vengeance envahit son âme.

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     « On avait envie de fresques, de ces films qui charrient de grandes émotions » a déclaré le producteur Dimitri Rassam, lors de la conférence de presse à Cannes. Cette nouvelle adaptation du chef-d’œuvre de Dumas est à la hauteur de l’ambition. Une fresque épique et romantique. Un film à grand spectacle, fiévreux et vénéneux, qui nous emporte dans sa course échevelée et sa valse des sentiments. Une histoire d’amour contrariée. Des dialogues souvent empruntés à Dumas qui donnent envie de redécouvrir son œuvre. Une mise en scène avec de l’ampleur (qui joue beaucoup avec les mouvements de caméras pour accompagner ou même susciter le souffle épique).  Et des scènes d’anthologie comme lorsque Monte-Cristo découvre son trésor ou lorsqu'il retrouve l’abbé Faria. Et puis deux mots, avec lesquels nous quittons la projection, deux mots à l’image de ce film, remplis de promesses de rêves, aussi sombres soient-ils parfois : attendre et espérer.

    Un film spectaculaire comme le cinéma hexagonal n’en fait plus, qui transporte avec lui les souvenirs de cinéma de l’enfance, quand cet écran géant nous embarquait dans des aventures de héros tourmentés et intrépides, plus grandes que la vie, ou pour les plus rêveurs d'entre nous, à l’image de ce que nous l’imaginions devenir. Trépidante. Périlleuse. Romanesque. Traversée du vertige des grands sentiments. L’interprétation, la photographie, le montage, la musique, le maquillage (à juste titre, lors de la conférence de presse cannoise, Pierre Niney a souligné le manque de reconnaissance de cette profession en France, lors des remises de prix par les "professionnels de la profession"), les décors et enfin le rythme parent ce film de la plus belle des vertus : l’oubli du temps qui passe, l'oubli du fait que la vie n’est pas du cinéma, qu’il n’est pas possible de devenir un héros masqué. Ce film témoigne du pouvoir inestimable du cinéma de nous faire renouer avec les vestiges et les vertiges de l'enfance.

    CRITIQUE - PLEIN SOLEIL de RENÉ CLÉMENT (films cultes)

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    (Photos prises lors de la projection de Plein soleil en copie restaurée dans le cadre du Festival de Cannes 2013.)

    Alain Delon disait régulièrement de René Clément qu'il était pour lui le plus grand réalisateur mais surtout le plus grand directeur d’acteurs au monde. Sa présence à l’occasion de la projection de Plein soleil à Cannes Classics en 2013 fut donc une évidence. L’acteur avait par ailleurs tenu à ce qu’il ne s’agisse pas d’un hommage à Alain Delon mais d’un hommage à René Clément.

    Rappelons que Delon devait d’ailleurs au départ interpréter le rôle que Maurice Ronet jouera finalement et, malgré son jeune âge (24 ans alors), il avait réussi à convaincre Clément (et d’abord sa femme…) de le faire changer de rôle.

    Une longue ovation avait accueilli Alain Delon dans la salle Debussy où avait été projeté le film. Ce dernier était visiblement très ému par l’accueil qui lui avait été réservé lors de la montée des marches mais aussi dans la salle. Voici, ci-dessous en italique, avant ma critique du film, la retranscription de sa présentation du film, pleine d’émotion, d’humour et d’élégance. Un beau moment de cinéma et d’émotion.

    « C’est gentil de dire bravo et de m’applaudir mais attendez de voir le film, peut-être que vous allez être déçus, a-t-il répondu, avant de remercier son « très cher » Bertrand [Delanoe] et la Ministre de la Culture pour lui avoir fait « l’honneur et le bonheur » de l’accompagner dans la montée des marches. « C’est un grand moment pour moi. Je veux que vous sachiez que ma présence ici est avant tout un hommage, un hommage que je veux rendre à mon maître absolu, René, René Clément. Le 17 Mars passé, René aurait eu 100 ans et j’aurais tellement aimé qu’il soit là ce soir. Je sais qu’il aurait été bouleversé. « Plein soleil », ça a été mon 4ème film. Personne ne savait qui j’étais. Lorsque ce film est sorti il a fait la tour du monde et ça a été un triomphe, de l’Est à l’Ouest, de la Chine à l’Argentine, et ce film a été la base de toute ma carrière et ça je le dois à René qui m’a dirigé à ce moment-là comme personne. Tout de suite après, j’ai eu la chance de faire « Rocco et ses frères ». C’est après la vision de « Plein soleil » que Visconti a décidé « je veux que ce soit Alain Delon qui soit mon Italien du Sud ». J’avais plein de choses à dire mais là vous m’avez tellement coincé, dans la rue, ça a été extraordinaire donc vraiment merci René, merci de tout ce qu’il m’a donné car ce film, je n’aurais pas eu la chance de le faire en 1959, je ne sais pas où je serais, sûrement pas là ce soir. Après « Rocco et ses frères », il y a eu un autre Clément « Quelle joie de vivre » puis « Le Guépard ». Vous voyez qu’on peut commencer plus mal. Comme Luchino m’a toujours expliqué « la première chose qu’il faut c’est des bases » et avec Clément j’ai eu mes bases, voilà. Je voudrais avoir une pensée aussi ce soir pour quelqu’un qui m’était tellement cher qui est Maurice Ronet. Il riait tout le temps, il s’amusait de cela. Il disait « tu sais nous sommes les deux meilleurs amis du monde et dans tous les films il faut que tu me tues ». On n’a jamais compris mais c’était comme ça. Et puis une pensée pour Elvire Popesco qui fait une apparition qui était ma patronne et ma maîtresse de théâtre et enfin des gens que vous n’avez pas connus mais certains ici savent de qui je parle, les producteurs qui ont été formidables avec moi dans ce film et dans d’autres, ce sont les frères Robert et Raymond Hakim. Je vais vous laisser voir ce film que je qualifie d’exceptionnel, d’extraordinaire mais vraiment extra-ordinaire. Ceux qui ne l’ont pas vu vont comprendre, ceux qui l’ont déjà vu vont se le remémorer et vous verrez en plus une copie remasterisée. Vous allez voir ce qu’est un film remasterisé, on a l’impression qu’il a été tourné la semaine dernière. Bonne soirée. Bon film. Pour terminer, car je sais qu’il y a ici quelques sceptiques, quelques douteux, je voudrais simplement leur dire que l’acteur qui joue dans ce film le rôle de Tom Ripley, il y a 54 ans, c’est bien moi. »

    Dans ce film de 1960, Alain Delon est Tom Ripley, qui, moyennant 5000 dollars, dit être chargé par un milliardaire américain, M.Greenleaf, de ramener son fils Philippe (Maurice Ronet) à San Francisco, trouvant que ce dernier passe de trop longues vacances en Italie auprès de sa maîtresse Marge (Marie Laforêt). Tom est constamment avec eux, Philippe le traite comme son homme à tout faire, tout en le faisant participer à toutes ses aventures sans cesser de le mépriser. Mais Tom n’est pas vraiment l’ami d’enfance de Philippe qu’il dit être et surtout il met au point un plan aussi malin que machiavélique pour usurper l’identité de Philippe.

    Plein soleil est une adaptation d’un roman de Patricia Highsmith (écrite par Paul Gégauff et René Clément) et si cette dernière a été très souvent adaptée (et notamment le roman Le Talentueux Monsieur Ripley, titre originel du roman de Patricia Highsmith qui a fait l’objet de très nombreuses adaptations et ainsi en 1999 par Anthony Minghella avec Matt Damon dans le rôle de Tom Ripley), le film de René Clément était selon elle le meilleur film tiré d’un de ses livres.

    Il faut dire que le film de René Clément, remarquable à bien des égards, est bien plus qu’un thriller. C’est aussi l’évocation de la jeunesse désinvolte, oisive, désœuvrée, égoïste, en Italie, qui n’est pas sans rappeler La Dolce vita de Fellini.

    Cette réussite doit beaucoup à la complexité du personnage de Tom Ripley et à celui qui l’incarne. Sa beauté ravageuse, son identité trouble et troublante, son jeu polysémique en font un être insondable et fascinant dont les actes et les intentions peuvent prêter à plusieurs interprétations. Alain Delon excelle dans ce rôle ambigu, narcissique, où un tic nerveux, un regard soudain moins assuré révèlent l’état d’esprit changeant du personnage. Un jeu double, dual comme l’est Tom Ripley et quand il imite Philippe (Ronet) face au miroir avec une ressemblance à s’y méprendre, embrassant son propre reflet. La scène est d’une ambivalente beauté.

    Si Plein soleil est le quatrième film d’Alain Delon, c’est aussi son premier grand rôle suite auquel Visconti le choisit pour Rocco et ses frères. Sa carrière aurait-elle était la même s’il avait joué le rôle de Greenleaf qui lui avait été initialement dévolu et s’il n’avait insisté pour interpréter celui de Tom Ripley ? En tout cas, avec Plein soleil un mythe était né et, ensuite, Delon considéra toujours Clément comme son « maître absolu ». Ils se retrouveront d’ailleurs peu après pour les tournages de Quelle joie de vivre (1960), Les Félins (1964) et enfin Paris brûle-t-il ? (1966).

    Face à lui, Ronet est cynique et futile à souhait. Le rapport entre les deux personnages incarnés par Delon et Ronet est d’ailleurs similaire à celui qu’ils auront dans La Piscine de Jacques Deray 9 ans plus tard, le mépris de l’un conduisant pareillement au crime de l’autre. Entre les deux, Marge se laisse éblouir par l’un puis par l’autre, victime de ce jeu dangereux mais si savoureux pour le spectateur qui ne peut s’empêcher de prendre fait et cause pour l’immoral Tom Ripley.

    L’écriture et la réalisation de Clément procurent un caractère intemporel à ce film de 1960 qui apparaît alors presque moins daté et plus actuel que celui de Minghella qui date pourtant de 1999 sans compter la modernité du jeu des trois acteurs principaux qui contribue également à ce sentiment de contemporanéité.

    Plein soleil, c’est aussi la confrontation entre l’éternité et l’éphémère, la beauté éternelle et la mortalité, la futilité pour feindre d’oublier la finitude de l’existence et la fugacité de cette existence.

    Les couleurs vives avec lesquelles sont filmés les extérieurs renforcent cette impression de paradoxe, les éléments étant d’une beauté criminelle et trompeuse à l’image de Tom Ripley. La lumière du soleil, de ce plein soleil, est à la fois élément de désir, de convoitise et le reflet de ce trouble et de ce mystère. Une lumière si bien mise en valeur par le célèbre chef opérateur Henri Decaë sans oublier la musique de Nino Rota et les sonorités ironiquement joyeuses des mandolines napolitaines. L’éblouissement est celui exercé par le personnage de Tom Ripley qui est lui-même fasciné par celui dont il usurpe l’identité et endosse la personnalité. Comme le soleil qui à la fois éblouit et brûle, ils sont l’un et l’autre aussi fascinants que dangereux. La caméra de Clément enferme dans son cadre ses personnages comme ils le sont dans leurs faux-semblants.

    Acte de naissance d’un mythe, thriller palpitant, personnage délicieusement ambigu, lumière d’été trompeusement belle aux faux accents d’éternité, Plein soleil est un chef d’œuvre du genre dans lequel la forme coïncide, comme rarement, avec le fond, les éléments étant la métaphore parfaite du personnage principal. Plein soleil, un film trompeusement radieux par lequel je vous conseille vivement de vous laisser éblouir !

    En complément : retrouvez, ici, mon article hommage à Alain Delon publié le 18 août dernier.

    Prochain article : la critique de Quand vient l'automne de François Ozon

  • Programme du 10ème Festival de Cinéma et Musique de Film de La Baule (26-30.06.2024) : sélection officielle et jury

     

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    Ce lundi 27 mai ont été dévoilés la sélection officielle et le jury du 10ème Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule.

    Selon Kant, "la musique est la langue des émotions". Le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule, qui n'est avare ni de l'une ni des autres, le prouve chaque année depuis 10 ans.

    10 ans déjà ! Le Festival du Cinéma et de Musique de Film de La Baule auquel j'assiste depuis la première édition et pour lequel je vous partage ici chaque année mon enthousiasme célèbrera en effet déjà ses 10 ans cette année.

    Le jury de cette 10ème édition sera présidé par l'acteur, réalisateur, scénariste, producteur Franck Dubosc. Il sera accompagné de : Leslie Medina (actrice, réalisatrice), Ludovic Bource (compositeur), Samuel Le Bihan (acteur), Audrey Dana (actrice, réalisatrice, écrivaine).

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    Pour fêter cet anniversaire comme il se doit, les organisateurs ne pouvaient trouver meilleure idée qu'un hommage au réalisateur français Claude Lelouch et aux plus belles musiques de ses films !

    En effet, en 2014, Claude Lelouch et son compositeur fétiche Francis Lai avaient été les premiers invités d’honneur du Festival de La Baule. Claude Lelouch avait alors déclaré être « le parrain de cœur du Festival ». Je vous avais longuement parlé ici de cette première édition. Vous pourrez retrouver mon compte-rendu de cette première édition ici.

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    Au fil des ans, ce festival s'est imposé comme un rendez-vous incontournable, d'abord en novembre puis en été, mettant en lumière la musique de films mais aussi des films qui souvent ont ensuite connu un succès auprès de la critique et/ou du public.  Rien que l'an passé, le festival avait ainsi projeté des films tels que les formidables Le Théorème de Marguerite d'Anna Novion, Toni, en famille de Nathan Ambrosioni, Comme par magie de Christophe Barratier, Les Algues vertes de Pierre Jolivet etc. Autant de films que je vous avais vivement recommandés. Retrouvez, ici, mon compte-rendu de l'édition 2023 du festival.

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    Chaque année, le festival met également un compositeur à l'honneur. La 9ème édition fut ainsi portée par les battements trépidants de jazz de Kyle Eastwood. 

    Vous trouverez sur ce blog de très nombreuses critiques de films de Claude Lelouch : L'amour, c'est mieux que la vie, Un + Une, mais aussi le récit du spectacle symphonique pour ses 85 ans en 2022, ici, la critique du film Les plus belles années d'une vie et le récit de la conférence de presse à Cannes, ou encore la critique d'Itinéraire d'un enfant gâté qui avait d'ailleurs été projeté dans le cadre du Festival de La Baule 2016, en présence de Richard Anconina.

    "Dix ans après la première édition du festival, alors que Francis Lai nous a quittés, Claude Lelouch reviendra à La Baule pour recevoir un second trophée d’honneur et pour participer à un grand concert en hommage aux plus belles musiques de ses films. Le samedi 29 juin, à 19 h, sera donné un grand « Concert Hommage aux Musiques des films de Claude Lelouch », sur la scène du Palais des Congrès et des Festivals – Jacques Chirac Atlantia – de La Baule, par l’Orchestre National des Pays de la Loire (ONPL). Ce concert exceptionnel sera dirigé par le chef d’orchestre Nicolas Guiraud, l’arrangeur des musiques des films de Claude Lelouch, en sa présence. L’occasion de célébrer non seulement les 60 ans de carrière de Claude Lelouch et plus de 50 films à son actif, mais également de fêter les 10 ans du Festival de La Baule."

    Claude Lelouch, c’est bien sûr plus de 60 ans de carrière et presque autant de films, en tant que réalisateur, mais aussi comme producteur, scénariste et cadreur, puisque la caméra à l’épaule en est devenue sa marque de fabrique. Claude Lelouch c’est une filmographie à rendre jaloux n’importe quel cinéaste, avec des films aussi emblématiques qu’Un Homme est une femme, – Palme d’Or à Cannes et Oscar du meilleur scénario original et du meilleur film étranger en 1967 –, Un homme qui me plaît, Les uns et les autres, Itinéraire d’un enfant gâté,
    Il y a des jours... et des lunes, La Belle Histoire, L’Aventure c’est l’Aventure, Tout ça... pour ça !, Les Misérables, Hommes, femmes : mode d’emploi, Hasards ou coïncidences, And Now... Ladies and Gentlemen, Roman de Gare, Ces amours-là, Salaud, on t’aime, Un + une, L’Amour c’est mieux que la vie, pour ne citer que quelques films de sa très longue et impressionnante filmographie. 60 ans durant lesquels Claude Lelouch n’a jamais cessé de filmer nos petites histoires, avec nos travers, notre sensibilité et nos défauts d’êtres humains, souvent sur fond de grande histoire. 60 ans de bonheur et autant de nominations et de prix reçus auxquels le Festival de La Baule voulait ajouter sa pierre à l’édifice et récompenser, une fois de plus, cette carrière si singulière et extraordinaire à la fois.

    Le concert événement « Hommage aux Musiques des Films de Claude Lelouch » aura lieu au Palais des Congrès et des Festivals –Jacques Chirac Atlantia – de La Baule, le samedi 29 juin 2024, à 19 h (précédé de la cérémonie de remise des prix du Festival). 

    Un grand concert symphonique totalement inédit, autour des bandes originales lelouchiennes emblématiques signées Francis Lai et Michel Legrand, sera donné sur la scène du Palais des congrès et des festivals Atlantia-Jacques Chirac de La Baule, par l’Orchestre National des Pays de la Loire (ONPL). Il sera dirigé par le chef Nicolas Guiraud, l’arrangeur des musiques des films de Claude Lelouch. Il comptera parmi ses solistes Randy Kerber le grand pianiste, claviériste, compositeur et orchestrateur américain qui a travaillé sur plus de 800 films dont Titanic, Lincoln, Harry Potter et Forrest Gump (le piano au début et à la fin du film c’est lui) ou encore La La Land (c’est lui qui double au piano Ryan Gosling) et qui a été nommé aux Oscars avec Quincy Jones pour la musique du film La Couleur Pourpre (il a également collaboré aux côtés des plus grands artistes de la variété américaine comme Michaël Jackson, Whitney Houston, Barbra Streisand, Céline Dion...)."

    Voici les 5 longs-métrages en compétition parmi lesquels je peux d'ores et déjà recommander Le Fil de Daniel Auteuil et Le roman de Jim d'Arnaud Larrieu et Jean-Marie Larrieu, deux films remarquables vus au dernier Festival de Cannes (section Cannes Première) dont vous pourrez retrouver mes critiques ici dans les jours prochains.

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    Cette année, le festival a également la bonne idée de proposer 4 documentaires musicaux en compétition. Le documentaire My way de Thierry Teston sera également projeté dans le cadre du festival.

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    Comme chaque année, la compétition des courts métrages constituera aussi un des temps forts du festival.

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    Le festival sera aussi l'occasion de découvrir 5 longs-métrages hors compétition parmi lesquels Prodigieuses de Frédéric Potier et Valentin Potier, en ouverture, mais aussi D'un film à l'autre, dont je vous parle en bas de cet article.

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    Sera également projeté le film de Michel Hazanavicius, La plus précieuse des marchandises, qui figurait en compétition du 77ème Festival de Cannes, par ailleurs lauréat du Prix de la Semaine du Cinéma Positif.

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    Sera également projeté le film Seul de Pierre Isoard (avec le président du jury Samuel Lebihan).

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    Trois "coups de projecteur" seront également projetés hors compétition.

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    Le festival proposera trois rencontres et master class : avec Vincent Delerm, Claude Lelouch et Franck Dubosc.

    Les amateurs de frissons et sueurs froides ne seront pas en reste avec la séance de minuit consacrée à Nous les zombies de RKSS.

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    Le festival, comme chaque année, proposera deux films classiques, Les Misérables de Claude Lelouch et Les Parapluies de Cherbourg de Jacques Demy. 

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    Enfin, le jeune (et moins jeune) public pourra se régaler avec Petit Panda en Afrique.

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    J'en profite enfin pour vous dire que, après le Salon Livres et Musiques de Deauville, et le Festival de Cannes, j'aurai le plaisir de dédicacer mon roman La Symphonie des rêves (qui a en partie le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule pour cadre, une ode à la puissance émotionnelle de la musique, notamment la musique de films), après la séance du film Il était une fois Michel Legrand, le vendredi 28 juin à 18h, dans le hall du cinéma Le Gulf Stream. Et voilà un hasard et une coïncidence qui ne devraient pas déplaire à Claude Lelouch. Dans ce roman, comme fils directeurs figurent en effet les films de Jacques Demy et les musiques de Michel Legrand auxquels sont consacrés deux documentaires projetés dans le cadre de ce Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule 2024. Je vous en dis aussi davantage sur ce roman et ma passion pour les musiques de films dans cette interview.

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    Parmi les films évoqués dans le roman, figurent aussi des films qui furent projetés à La Baule comme La Tortue rouge de Michael Dudok de Wit.

    Pour en savoir plus sur le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule, et pour réserver vos pass, rendez-vous sur le site officiel du festival.

    CRITIQUE - D'un film à l'autre

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    Lelouch. Prononcez ce nom et vous verrez immédiatement l’assistance se diviser en deux. D'un côté, les adorateurs qui aiment : ses fragments de vérité, ses histoires d’amour éblouissantes, sa vision romanesque de l’existence, sa sincérité, son amour inconditionnel du cinéma, ses aphorismes récurrents, une musique et des sentiments grandiloquents, la beauté parfois cruelle des hasards et coïncidences. De l'autre, les détracteurs qui lui reprochent son sentimentalisme et tout ce que les premiers apprécient, et sans doute de vouloir raconter une histoire avant tout, que la forme soit au service du fond et non l’inverse. Je fais partie de la première catégorie et tant pis si pour cela je dois subir la condescendance des seconds. Le cinéma est pour moi avant tout affaire de passion, de sincérité, d’audace et quoiqu’en disent ses détracteurs, le cinéma de Claude Lelouch se caractérise par ces trois éléments comme le démontre magnifiquement de documentaire « D’un film à l’autre » réalisé à l’occasion des 50 ans des films 13.  Un documentaire qui résume un demi-siècle de cinéma du Propre de l’homme à Ces amours-là.

    Ayant pourtant lu l’autobiographie de Claude Lelouch (Itinéraire d’un enfant très gâté, Robert Laffont) que je vous recommande et ayant vu un grand nombre de ses films, j’ai néanmoins appris pas mal d’anecdotes et en ai réentendu d’autres comme l’histoire de la rencontre de ses parents auquel fera formidablement écho la remise de son Oscar des années plus tard (je vous laisse la découvrir si vous ne connaissez pas l’anecdote). Magnifique hasard à l’image de ceux qu’il met en scène.

    Un parcours fait de réussites flamboyantes et d’échecs retentissants. « C’est plus difficile aujourd’hui de sortir d’un échec, aujourd’hui la terre entière est au courant. A l’époque, cela restait confidentiel. Derrière un échec on peut rebondir autant qu’on veut si on ne demande rien aux autres. Etant donné que j’ai toujours été un spécialiste du système D, j’ai toujours trouvé le moyen de tourner des films » a-t-il précisé lors du débat qui avait suivi la projection lors de laquelle j'avais vu ce documentaire.

     La plus flamboyante de ses réussites fut bien sûr Un homme et une femme, palme d’or à Cannes en 1966, Oscar du meilleur film étranger et du meilleur scénario parmi 42 récompenses … à 29 ans seulement ! Film que Claude Lelouch a, comme souvent réalisé, après un échec. Ainsi le 13 septembre 1965, désespéré, il roule alors vers Deauville où il arrive la nuit, épuisé. Réveillé le matin par le soleil, il voit une femme depuis sa voiture,  elle  marche sur la plage avec un enfant et un chien. Sa « curiosité est alors plus grande que la tristesse ». Il commence à imaginer ce que peut faire cette femme sur cette plage, avec son enfant, à cette heure matinale. Cela donnera Un homme et une femme, la rencontre de deux solitudes blessées qui prouve que les plus belles histoires sont les plus simples et que la marque du talent est de les rendre singulières et extraordinaires.

    Une histoire que vous redécouvrirez parmi tant d’autres comme les derniers instants de Patrick Dewaere,  et une multitude d’autres hasards et coïncidences et d’histoires sur les uns et les autres que Lelouch nous raconte en voix off, avec passion et sincérité, comme un film, celui de son existence, une existence à 100 à l’heure, à foncer et ne rien regretter à l’image de son court-métrage C'était un rendez-vous qui ouvre le documentaire. L’histoire d’une vie et une histoire, voire une leçon, de cinéma. Claude Lelouch souligne notamment l’importance de la musique tellement importante dans ses films : « L’image, c’est le faire-valoir de la musique ». « Chaque nouvelle invention modifie l’écriture cinématographique. Mes gros plans c’est ma dictature, et les plans larges c’est ma démocratie, et pas de plan moyen. » a-t-il précisé lors du débat. « Le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui va très vite et on n’a plus le temps de lire le mode d’emploi alors que de mon temps on avait le temps de lire le  mode d’emploi mais il y a quelque chose qui n’a pas fait de progrès c’est l’amour.  La montée et la descente d’une histoire d’amour  m’ont toujours fasciné. »

    Claude Lelouch est né avec la Nouvelle Vague qui ne l’a jamais reconnu sans doute parce que lui-même  n’avait « pas supporté que les auteurs de la Nouvelle Vague aient massacré Clouzot,  Morgan, Decoin, Gabin », tous ceux qui lui ont fait aimer le cinéma alors qu’il trouvait le cinéma de la Nouvelle Vague « ennuyeux ».

     Quel bonheur de revoir Jean-Paul Belmondo, Jacques Villeret, Yves Montand, Annie Girardot,  Jean Louis Trintignant, Anouk Aimée, Fabrice Luchini Evelyne Bouix, Catherine Deneuve, Lino Ventura, Fanny Ardant,  Francis Huster, Alessandra Martines, tantôt irrésistibles ou bouleversants, parfois les deux, magnifiés par la caméra de Claude Lelouch qui sait si bien, par sa manière si particulière de tourner et surtout de diriger les acteurs, capter ces fameux fragments de vérités. « Les parfums de vérité plaisent au public français. Donner la chair de poule, c’est l’aristocratie de ce métier. » Comment ne pas être ému en revoyant Annie Girardot dans Les Misérables ( film qui lui vaudra ce César de la meilleure actrice dans un second rôle, en 1996, et sa déclaration d’amour éperdue au cinéma ), Jean-Paul Belmondo et Richard Anconina dans Itinéraire d’une enfant gâté (d'ailleurs projeté à La Baule, il y a quelques années) ? Des extraits comme autant de courts-métrages qui nous laissent un goût d’inachevé et nous donnent envie de revoir les films de Lelouch.

    « Il n’y a pas de vraies rencontres sans miracles » d’après Claude Lelouch et chacun de ces miracles en a donné un autre, celui du cinéma.  «L’idée était de raconter l’histoire des films 13 et comment je suis allée d’un miracle à l’autre car un film est toujours un miracle. »

    Alors tant pis si une certaine critique continue de le mépriser (il y est habitué lui dont un critique clairvoyant disait à ses débuts  "Claude Lelouch... Souvenez-vous bien de ce nom. Vous n'en entendrez plus jamais parler.")  voire les professionnels de la profession ( car  comme il le dit lui-même :  « Un seul critique qui compte sur moi, c’est le temps qui passe ».

     Alors si comme moi, vous aimez le cinéma de Claude Lelouch et les fragments de vérité, si vous croyez aux  hasards et coïncidences, fussent-ils improbables, ne manquez pas ce documentaire qui est aussi la leçon d’une vie d’un homme  qui a su tirer les enseignements de ses succès et surtout de ses échecs et d’un cinéaste qui a sublimé l’existence et les acteurs, ce dont témoigne chaque seconde de ce documentaire passionnant, l'itinéraire d'un enfant gâté, passionné fou de cinéma.

  • En dédicace au Festival livres & musiques de Deauville 2024

     

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    Le Festival littéraire Livres et Musiques de Deauville aura lieu du 3 au 5 mai prochain, dans le splendide musée des Franciscaines de Deauville. J’ai le grand plaisir d’être invitée le samedi 4 mai, de 15h30 à 17H30, pour la fameuse « grande dédicace », avec mon roman La Symphonie des rêves.

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    La magnifique affiche de cette édition rend hommage à Françoise Sagan (et à son livre Aimez-vous Brahms…, si vous regardez attentivement).
     
    Que de douces réminiscences pour moi au simple énoncé de ce nom de Deauville. D'abord, les débuts de mon histoire avec les festivals de cinéma puisque le premier auquel j’ai assisté fut le Festival du Cinéma Américain de Deauville, il y a une vingtaine d’années, un festival dont je n’ai pas manqué une édition depuis lors, juste deux jours l’an passé…pour relire les épreuves de La Symphonie des rêves
     
    Deauville, c’est aussi évidemment pour moi le film de Lelouch (que j'avais regardé déjà tant de fois avant de venir à Deauville !), et plus récemment ce remake avec P.Cruz et B.Pitt en introduction du défilé Chanel (c’est à Deauville qu’elle ouvrit sa première boutique). Dans le film de Lelouch, le montage et les alternances de noir et blanc et de couleurs jouent et jonglent habilement avec les méandres du temps et de la mémoire émotive, entre le présent et le bonheur passé qui ressurgit sans cesse. C’est un peu aussi mon histoire avec Deauville. À chaque retour à Deauville, une chaleureuse nostalgie m’envahit, le parfum de l’insouciance qui, là seulement inaltéré, flotte dans l’air. Comme la voix de Jean-Louis Trintignant quand il prononce « Montmartre 1540 » ou lorsque dans sa Ford Mustang il prépare ce qu'il dira à Anne lorsqu’ils se retrouveront. J’ai parfois aussi l’impression d’y entrevoir cet homme avec son chien qui marche dans la brume qui lui font penser à Giacometti.  Vous rappelez-vous sa question dans le film : « Qu'est-ce que vous choisiriez : l'art ou la vie ? ». Il semblerait qu’à Deauville, pour moi, les deux s’entremêlent constamment, et se confondent même parfois. 
     
    De Sagan, à l'honneur lors de cette édition 2024 du festival, j'aime tout : la mélancolie, la nostalgie, la lucidité, le romantisme désenchanté, l’humour, la petite musique des mots, l’élégance, le sens du détail, la gravité légère… Je crois avoir lu tous ses livres. Et il ne se passe pas une année sans que j’en relise un, voire plusieurs.

    Depuis 2004, le  Festival littéraire Livres & Musiques célèbre, chaque printemps, les mots et la musique...ou la fameuse musique des mots.

    Le Festival se déroule en deux temps : avec le Prix des Ados, remis en avril. En mai, romanciers, biographes, illustrateurs et auteurs de BD, auteurs jeunesse, se retrouvent à Deauville pour des lectures musicales, des concerts littéraires et des rencontres singulières. Un Jury d’écrivains et de musiciens, présidé par Jérôme Garcin, décerne depuis 2004 le Prix Livres & Musiques de Deauville qui récompense un roman inspiré par la musique.

    Depuis 2021, le Festival Livres & Musiques se déroule sur  3 jours de festivité dans les différents espaces des Franciscaines.


    En 2024, il revient pour sa 21ème édition, du vendredi 4 au dimanche 6 Mai 2024, et rendra un hommage aux petites et grandes musiques de Françoise Sagan à l’occasion du 20e anniversaire de la mort de celle-ci. Retrouvez le programme détaillé, ici.

    La Symphonie des rêves poursuit ainsi sa jolie route qui passera aussi bientôt par Cannes, le salon Quartier du Livre à Paris, le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule...
     
    « On ne m'ôtera jamais de l'idée que c'est en se colletant avec les extrêmes de soi-même, avec ses contradictions, ses goûts, ses dégoûts et ses fureurs que l'on peut comprendre un tout petit peu, oh, je dis bien, un tout petit peu ce que c'est que la vie. » (Françoise Sagan - Des bleus à l’âme).
     
    « Ce n'est pas parce que la vie n'est pas élégante qu'il faut se conduire comme elle. » (Des bleus à l’âme -Françoise Sagan).
     
    Et trois autres citations de Sagan auxquelles je souscris… :
     
    « Il m'arrive de trouver que la vie est une horrible plaisanterie. Si l'on est tant soi peu sensible, on est écorché partout et tout le temps. »
     
    « Un ami qui comprend nos larmes a beaucoup plus de valeur que plein d'amis qui ne comprennent que notre sourire. »
     
    « Écrire, c'est comme avoir un rendez-vous d'amour dangereux. J'ai toujours aimé la littérature. Elle m'a toujours aidée. C'est la seule réponse à la terre. Je n'ai jamais pensé que je lui rendais service. »
  • Les films de mon roman "La Symphonie des rêves" à l’honneur sur Universcine

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    Mon roman La Symphonie des rêves, à partir de mercredi, sera doublement à l’honneur sur la plateforme de VOD Universcine.com (@universcine), puisque non seulement trois exemplaires du roman seront à gagner pour les abonnés mais aussi parce que les 15 films dont les titres figurent ci-dessous, évoqués dans le livre, sont à l'honneur sur la page d’accueil du site.

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     Inutile de vous dire que je vous recommande ardemment chacun de ces longs-métrages. Dans tous, la musique joue un rôle primordial. D’ailleurs, c’est la puissance émotionnelle d'une de ces musiques et l'émotion que procure la musique en général (son potentiel comme lien romanesque) qui on suscité l’idée de ce roman (et son rôle consolateur que définit si bien cette citation de Stendhal qui figure au début du roman « La bonne musique ne se trompe pas, et va droit au fond de l’âme chercher le chagrin qui nous dévore ») dont une large partie se déroule ainsi dans le cadre du Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule.

    Alors, avant de vous retrouver pour de nouvelles séances de dédicaces, notamment au Festival de Cannes (Fnac de Cannes, probablement le 20 Mai), au Salon Livres et Musiques de Deauville (le 4 mai), à Saint-Malo (Cultura, le 20 avril),...je vous laisse avec ces films que vous croiserez au fil des pages du roman dans lequel ils sont cités plus ou moins explicitement…

    Pour certains, vous retrouverez mes critiques ci-dessous. Je remercie Universcine.com pour ce magnifique coup de projecteur.

    En rouge, les films dont mes critiques figurent ci-dessous.

    César et Rosalie de Claude Sautet

    Monsieur Klein de Joseph Losey

    In the mood for love de Wong Kar Wai

    La tortue rouge de Michael Dudok de Wit

    Le temps de l'innocence de Martin Scorsese

    Les parapluies de Cherbourg de Jacques  Demy

    Les choses de la vie de Claude Sautet

    La main au collet d'Alfred Hitchcock

    La bête humaine de Jean Renoir

    Deux hommes dans la ville de José Giovanni

    Le Train de Pierre Granier-Deferre

    Une vie cachée de Terrence Malick

    Le Chat de Pierre Granier-Deferre

    Sueurs froides d'Alfred Hitchcock

    Lawrence d'Arabie de David Lean

    Lire la suite

  • Roman - La Symphonie des rêves (Editions Blacklephant) - premiers épisodes de la belle aventure : critiques et dédicaces

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    Ci-dessus, La Symphonie des rêves à la librairie du Bon Marché Rive Gauche

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    Ci-dessus, La Symphonie des rêves à la nouvelle librairie Albin Michel, Boulevard Raspail, à Paris

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    Ci-dessus et ci-dessous, à la FNAC

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    Ci-dessous, à la librairie Gibert à Paris

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    Il est là. Le rêve qui se concrétise. Au milieu des autres. Un peu intimidé par ce prestigieux compagnonnage. Un peu fier d’y être, enfin. Je me souviens de ce sentiment d’exaltation quand l’idée s’est imposée, obsessionnelle, quand l’envie irréfragable d’écrire ce livre m’a transportée, quand j’ai établi un véritable plan d’attaque pour en bâtir l’univers en six mois alors que j’écris d’habitude à l’instinct, me laissant porter par mes personnages et émotions. L’émotion. C’est toujours la source et le but. Une émotion qui me submerge et m’envahit tant qu’il est vital de la transformer en histoire. Celle que j’espère réussir à vous transmettre, aussi. Je me souviens de cette énergie démente pendant ces six mois, à l’image de l’émotion d’alors qui la guidait. Je me souviens de ce journal intime auquel, à huit ans, j’avais confié le rêve secret, celui de devenir romancière. La voie me semblait impossible mais aussi être la seule possibilité de faire résonner ma voix. Je me souviens de ces livres dits d’adultes (Balzac, Hugo, Stendhal), que je dévorais à l’âge où ce n'était pas "normal", où au cours imposé de lecture à l’école je feignais de lire des BD pour avoir l’air « comme les autres ». Je me souviens que la normalité n’est qu’une invention des êtres sans fantaisie pour claquemurer celles des autres, et se rassurer. Je me souviens que les livres furent les derniers compagnons de vie de mon père qui m'en a transmis la passion, qu’ils nous relient au passé, aux disparus, aux rêves et êtres impossibles. Je me souviens qu’il vaut mieux éviter de se souvenir, parfois. Je me souviens d’une musique qui a tout enclenché, consolante et magnétique. Je me souviens que j’écris, à la fois pour me souvenir et pour oublier, pour une seule personne et pour tous. Et comme l’héroïne sur la couverture, pour regarder vers la mer, l’avenir, l’ailleurs, l’espoir.
    Je me souviens enfin de ces deux phrases déjà citées mais qui évoquent si bien la genèse de ce roman :
    « Écrire est un acte d'amour. S'il ne l'est pas il n'est qu'écriture. » Cocteau
    « Écrire, c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit. » Duras

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    Je pourrais vous parler des chemins détournés et épineux qu'empruntent les rêves pour se concrétiser. Je pourrais vous parler de tous les hasards et coïncidences, des turbulences et des rebondissements qui ont jalonné ces derniers mois avant et après la publication de ce roman. Je pourrais vous parler de ce qui, profondément, viscéralement, a suscité l'envie irrépressible de raconter cette histoire sur la force des rêves et la puissance émotionnelle de la musique qui, dans ce roman, bouscule et relie les destinées, enfièvre et console. Je pourrais vous parler des désillusions, des drames, des joies, des rencontres, des doutes qui l'ont nourri. Mais au fond je ne "parlerai" jamais aussi sincèrement et aussi bien de tout cela qu'à travers les personnages de La Symphonie des rêves, sorte de kaléidoscope de toutes ces émotions qui vous feront voyager, d'Athènes à Venise, de Trouville à Nice, de Dinard à Cannes, de La Baule à Hydra, de Beaune à Paris, du Festival de Cannes au Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule, au rythme des élans musicaux et de leurs élans du cœur.

    D'autres, aussi, en ont parlé magnifiquement, et je les remercie, tout particulièrement Dan Burcea pour son sublime article et sa magnifique analyse dans la revue littéraire Lettres Capitales, une chronique que vous pouvez lire, ici.

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    Retrouvez également mon interview sur le site littéraire A la lettre pour en savoir plus sur le roman, sa genèse, mes goûts cinématographiques, en matière de musiques de films...

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    Quelques avis de lecteurs, aussi (partagés avec leur accord) :

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    Merci à radio J pour l'invitation, et en particulier à Line Toubiana et Lise Gutman, les premières à avoir parlé de La Symphonie des rêves.

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    Enfin, les premières séances de dédicaces furent un bonheur, à la Librairie du Marché de Deauville, à la FNAC de Laval et à la Librairie du Cinéma du Panthéon de Paris que je remercie pour leur confiance.

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    Photo ci-dessus, copyright Dominique Saint

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    Retrouvez d'autres photos et vidéos des séances de dédicaces sur mon compte Instagram @Sandra_Meziere.

     

  • Librairie du Cinéma de Panthéon à Paris - Dédicace du roman "La Symphonie des rêves"

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    J'ai le grand plaisir de vous inviter à découvrir mon deuxième roman La Symphonie des rêves ( Editions Blacklephant) à l'occasion de cette première séance de dédicaces parisienne à la Librairie du Cinéma du Panthéon, le mercredi 24.01, à 19h. Ce moment littéraire, cinématographique et convivial sera accompagné d'un cocktail de la "meilleure table étrangère", le restaurant / traiteur des merveilleuses Maria et Dina Nikolaou, Evi Evane.
     
    Ode à la puissance émotionnelle et salvatrice de la musique, La Symphonie des rêves est en effet aussi une invitation au voyage qui vous emmènera notamment en Grèce mais aussi en Italie. Empreint de ma passion pour le septième art, ce roman vous transportera également au cœur des festivals de cinéma, notamment le Festival de Cannes et le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule, des festivals de cinéma que je couvre depuis plus de vingt ans.
    Extrait de l'analyse de la revue littéraire Lettrescapitales.com par Dan Burcea qui, peut-être vous donnera envie de le découvrir (à lire en entier, ici : https://lettrescapitales.com/la-symphonie-des-reves-de.../) :
     
    "Sandra Mézière utilise avec intelligence autant le fond que la forme littéraire de son récit. Pour elle, la construction romanesque suit intimement le titre de son histoire, étant structurée en quatre mouvements dont on reconnait, s’il fallait encore le rappeler, ceux d’une symphonie. C’est au fil de cette structure que le lecteur est invité à suivre les histoires de ces quatre personnages, dans une évolution bien maîtrisée et qui ne manque pas de lui faire découvrir, à chaque étape ou plutôt à chaque partition, le chemin que chacun emprunte pour arriver à accomplir leur rêve.
    Les références nombreuses au monde du cinéma, l’ambiance des festivals et les accords de la musique remplissent un espace suffisant, une scène dans le sens propre du terme. Sandra Mézière maîtrise avec tout autant de talent à la fois cette ambiance dorée, placée sous les feux de la rampe que l’introspection du récit intime qui lui permet d’exprimer le vécu intense, passionné, souvent dramatique des protagonistes de son roman.
    Le roman de Sandra Mézière confirme son talent et sa capacité très remarqués de construire des personnages complexes, d’une vraie beauté et d’une authenticité incontestables. Plus encore, mais à cette question elle seule serait capable d’y répondre, n’est-ce pas à se demander si derrière Carole, Rebecca, Catherine et Stéphanie ne se cacherait pas une seule et unique personne ? Peut-être la narratrice elle-même ? Peut-être l’autrice ?
    La réponse, en lisant ce passionnant roman !"
     
    Pour ne pas oublier la date ou pour en savoir plus, rejoignez la page de l'événement :
     
    Pour en savoir plus sur le roman :
     
    Pour retrouver le récit des deux premiers mois de cette belle aventure :
  • Mon nouveau roman "La Symphonie des rêves" (Éditions Blacklephant - 26/10/2023) : présentation

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    Je suis particulièrement heureuse de vous dévoiler la couverture et la quatrième de couverture de mon nouveau roman intitulé La Symphonie des rêves, publié par les Éditions Blacklephant, disponible en librairie à partir du 26 octobre 2023, et dès à présent en précommande, en librairie et sur les plateformes. Ce roman, comme le personnage qui figure sur cette photo, regarde vers la lumière, vers l'horizon, vers l'ailleurs. Il vous fera ainsi voyager en France, en Grèce et en Italie. Découvrez la page des Editions Blacklephant consacrée à La Symphonie des rêves, ici.
     
    Mon premier roman, qui évoquait un deuil insurmontable, était une plongée dans un gouffre infernal. Celui-ci, au contraire, chemine de l’ombre vers la lumière.
     
    J’ai commencé à écrire ce roman pendant le deuxième confinement, avec pour objectifs de m'évader, de me griser d’espoirs extravagants, de donner envie de croire en des émotions qui égarent parfois et enfièvrent et transportent. 
    J’espère que ce roman sera cela aussi pour vous : une échappée belle, une fugue joyeuse, une invitation à l'audace de rêver.
     
    Cette consolante contrée qu’est la musique, qui bouscule et relie ici les destins de mes personnages, a suscité l’idée de ce roman dans lequel il est aussi beaucoup question de cinéma, forcément. Il vous conduira ainsi notamment au Festival de Cinéma et de Musique de Film de La Baule et au Festival de Cannes.
     
    Pourquoi écrit-on ? 
    Pourquoi s'obstiner à lutter contre le silence, ses doutes et ses maux?
    À vouloir dompter les phrases et des destinées fictives ? 
    Je ne cesserai de m’interroger sur cette légitimité, en revanche pas sur ma passion viscérale et vitale pour l’écriture, en revanche pas sur cette nécessité impérieuse de raconter et entrelacer des destins, d’esquisser des âmes ébréchées, de jongler avec les mots, d'insuffler de la beauté dans la laideur, de tenter de me faufiler dans des interstices de vérité à travers la fiction. 
     
    Je remercie l'équipe de ma nouvelle maison d'édition pour l’écoute, la confiance, l’enthousiasme, la bienveillance. Je suis heureuse que le coup de foudre ait été réciproque. Pour faire retentir cette Symphonie, je n'aurais pu trouver mieux que Blacklephant éditions  dont les valeurs s'accordent si bien avec ce roman qui aspire à exalter la force des rêves.

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    Je vous donnerai prochainement les dates des séances de dédicaces en librairies et salons du livres. Vous pouvez d'ores et déjà noter celle de la Fnac de Laval le samedi  4 novembre 2023 à 15h et à la Librairie du Marché de Deauville pendant les vacances de Noël (date précisée prochainement).
    J'espère que cette Symphonie résonnera en vous…