Soirée spéciale Romy Schneider ce 7 septembre sur France 2 avec diffusion de "La Piscine" de Jacques Deray (07/09/2010)
France 2 consacrera une soirée à Romy Schneider, le mardi 7 septembre à partir de 20h35 .
En première partie de soirée sera diffusé un numéro inédit de "Un jour, un destin" présenté par Laurent Delahousse et à 22h25, France 2 rediffusera "La piscine" de Jacques Deray, un film que je vous recommande à nouveau et dont vous pourrez lire ma critique ci-dessous.
CRITIQUE DE LA PISCINE DE JACQUES DERAY
Ce film date de 1968, c’est déjà tout un programme. Il réunit Maurice Ronet, Alain Delon, Romy Schneider, Jane Birkin dans un huis-clos sensuel et palpitant, ce quatuor est déjà une belle promesse.
Marianne (Romy Schneider) et Jean-Paul (Alain Delon) passent en effet des vacances en amoureux dans la magnifique villa qui leur a été prêtée sur les hauteurs de Saint-Tropez. L’harmonie est rompue lorsqu’arrive Harry (Maurice Ronet), ami de Jean-Paul et de Marianne chez lequel ils se sont d’ailleurs rencontrés, cette dernière entretenant le trouble sur la nature de ses relations passées avec Harry. Il arrive accompagné de sa fille de 18 ans, la gracile et nonchalante Pénélope (Jane Birkin).
« La piscine » fait partie de ces films que l’on peut revoir un nombre incalculable de fois (du moins que je peux revoir un nombre incalculable de fois) avec le même plaisir pour de nombreuses raisons mais surtout pour son caractère intelligemment elliptique et son exceptionnelle distribution et direction d’acteurs.
Dès les premières secondes la sensualité trouble et la beauté magnétique qui émane du couple formé par Romy Schneider et Alain Delon, la langueur que chaque plan exhale plonge le spectateur dans une atmosphère particulière, captivante. La tension monte avec l’arrivée d’Harry et de sa fille, menaces insidieuses dans le ciel imperturbablement bleu de Saint-Tropez. Le malaise est palpable entre Jean-Paul et Harry qui rabaisse sans cesse le premier, par une parole cinglante ou un geste méprisant, s’impose comme si tout et tout le monde lui appartenait, comme si rien ni personne ne lui résistait.
Pour tromper le langoureux ennui de l’été, un jeu périlleusement jubilatoire de désirs et de jalousies va alors commencer, entretenu par chacun des personnages, au péril du fragile équilibre de cet été en apparence si parfait et de leur propre fragile équilibre, surtout celui de Jean-Paul, interprété par Alain Delon qui, comme rarement, incarne un personnage vulnérable à la sensualité non moins troublante. L’ambiguïté est distillée par touches subtiles : un regard fuyant ou trop insistant, une posture enjôleuse, une main effleurée, une allusion assassine. Tout semble pouvoir basculer dans le drame d’un instant à l’autre. La menace plane. L’atmosphère devient de plus en plus suffocante.
Dès le début tout tourne autour de la piscine : cette eau bleutée trompeusement limpide et cristalline autour de laquelle ils s’effleurent, se défient, s’ignorent, s’esquivent, se séduisent autour de laquelle la caméra virevolte, enserre, comme une menace constante, inéluctable, attirante et périlleuse comme les relations qui unissent ces 4 personnages. Harry alimente constamment la jalousie et la susceptibilité de Jean-Paul par son arrogance, par des allusions à sa relation passée avec Marianne que cette dernière a pourtant toujours niée devant Jean-Paul. Penelope va alors devenir l’instrument innocent de ce désir vengeur et ambigu puisqu’on ne sait jamais vraiment si Jean-Paul la désire réellement, s’il désire atteindre Harry par son biais, s’il désire attiser la jalousie de Marianne, probablement un peu tout à la fois, et probablement aussi se raccrochent-ils l’un à l’autre, victimes de l’arrogance, la misanthropie masquée et de la désinvolture de Harry. C’est d’ailleurs là que réside tout l’intérêt du film : tout insinuer et ne jamais rien proclamer, démontrer. Un dialogue en apparence anodin autour de la cuisine asiatique et de la cuisson du riz alors que Jean-Paul et Penelope reviennent d’un bain nocturne ne laissant guère planer de doutes sur la nature de ce bain, Penelope (dé)vêtue de la veste de Jean-Paul dans laquelle elle l’admirait de dos, enlacer Marianne, quelques jours auparavant, est particulièrement symptomatique de cet aspect du film, cette façon d’insinuer, cette sensualité trouble et troublante, ce jeu qui les dépasse. Cette scène entremêle savoureusement désirs et haines latents. Les regards de chacun : respectivement frondeurs, évasifs, provocants, dignes, déroutés… font que l’attention du spectateur est suspendue à chaque geste, chaque ton, chaque froncement de sourcil, accroissant l’impression de malaise et de fatalité inévitable.
Aucun des 4 personnages n’est délaissé, la richesse de leurs psychologies, de la direction d’acteurs font que chacune de leurs notes est indispensable à la partition. La musique discrète et subtile de Michel Legrand renforce encore cette atmosphère trouble. Chacun des 4 acteurs est parfait dans son rôle : Delon dans celui de l’amoureux jaloux, fragile, hanté par de vieux démons, d’une sensualité à fleur de peau, mal dans sa peau même, Romy Schneider dans celui de la femme sublime séductrice dévouée, forte, provocante et maternelle, Jane Birkin dont c’est le premier film français dans celui de la fausse ingénue et Maurice Ronet dans celui de l’ « ami » séduisant et détestable, transpirant de suffisance et d’arrogance…et la piscine, incandescente à souhait, véritable « acteur ». Je ne vous en dirai pas plus pour ne pas lever le voile sur les mystères qui entourent ce film et son dénouement.
Deray retrouvera ensuite Delon à 8 reprises notamment dans « Borsalino », « Flic story », « Trois hommes à abattre »… mais « La piscine » reste un film à part dans la carrière du réalisateur qui mettra en scène surtout un cinéma de genre.
Neuf ans après « Plein soleil » de René Clément (que je vous recommande également), la piscine réunit donc de nouveau Ronet et Delon, les similitudes entres les personnages de ces deux films sont d’ailleurs nombreuses et le duel fonctionne de nouveau à merveille.
Un chef d’œuvre dont le « Swimming pool » de François Ozon apparaît comme une copie détournée, certes réussie mais moins que l’original. En lisant récemment « UV » de Serge Joncour je me dis que cette piscine-là n’a pas fini d’inspirer écrivains, scénaristes et réalisateurs mais qu’aucune encore n’a réussi à susciter la même incandescence trouble.
Un film sensuel porté par des acteurs magistraux, aussi fascinants que cette eau bleutée fatale, un film qui se termine par une des plus belles preuves d’amour que le cinéma ait inventé. A voir et à revoir. Plongez dans les eaux troubles de cette « piscine » sans attendre une seconde !
Retrouvez également ma critique de "César et Rosalie" avec Romy Schneider en cliquant ici.
Filmographie de Romy Schneider:
- 1953 : Lilas blancs (Wenn der weiße Flieder wieder blüht) de Hans Deppe : Evchen Forster
- 1954 : Feu d'artifice (Feuerwerk) de Kurt Hoffmann : Anna Oberholzer
- 1954 : Les Jeunes Années d'une reine (Mädchenjahre einer Königin) d'Ernst Marischka : Victoria
- 1955 : Mon premier amour (Der letzte Mann) de Harald Braun : Niddy
- 1955 : Mam'zelle Cri-Cri (Die Deutschmeister) d'Ernst Marischka : Stanzi Huebner
- 1955 : Sissi (Sissi) d'Ernst Marischka : Elisabeth de Bavière, dite Sissi
- 1956 : Kitty à la conquête du monde (Kitty und die große Welt) d'Alfred Weidenmann : Kitty Dupont
- 1956 : Sissi impératrice (Sissi, die junge Kaiserin) d'Ernst Marischka : Sissi
- 1957 : Monpti (Monpti) de Helmut Käutner : Anne-Claire
- 1957 : Un petit coin de paradis (Robinson soll nicht sterben) de Josef von Báky : Maud Cantley
- 1957 : Sissi face à son destin (Sissi, Schicksalsjahre einer Kaiserin) d'Ernst Marischka : Sissi
- 1958 : Carnets intimes de jeune fille (Die Halbzarte) de Rolf Thiele : Nicole Dassau/Eva
- 1958 : Mademoiselle Scampolo (Scampolo) d'Alfred Weidenmann : Mademoiselle Scampolo
- 1958 : Christine de Pierre Gaspard-Huit : Christine Weiring
- 1958 : Jeunes filles en uniforme (Mädchen in Uniform) de Géza von Radványi (remake)
- 1959 : Katia de Robert Siodmak : Katia
- 1959 : La Belle et l'empereur (Die schöne Lügnerin) d'Axel von Ambesser : Fanny Emmetsrieder
- 1960 : Plein soleil de René Clément : l'amie de Freddy
- 1960 : Mademoiselle Ange (Ein Engel auf Erden) de Géza von Radványi : Line/L'ange
- 1961 : Lysistrata - (Die Sendung der Lysistrata) (TV) de Fritz Kortner
- 1962 : Le Combat dans l'île d'Alain Cavalier : Anne
- 1962 : Le Procès d'Orson Welles : Leni
- 1962 : Boccace 70 (Boccaccio '70) de Luchino Visconti : Pupé (Il Lavoro)
- 1963 : Les Vainqueurs (The Victors) de Carl Foreman
- 1963 : Le Cardinal (The Cardinal) d'Otto Preminger : Annemarie von Hartman
- 1964 : Prête-moi ton mari (Good Neighbor Sam) de David Swift : Janet Lagerlof
- 1964 : L'Enfer de Henri-Georges Clouzot (inachevé)
- 1964 : Romy , anatomie eines gesichts de Hans-Jürgen Syberberg - documentaire -
- 1965 : L'Amour à la mer de Guy Gilles : la vedette
- 1965 : Paris brûle-t-il ? de René Clément - scènes coupées au montage -
- 1965 : Quoi de neuf, Pussycat ? (What's New Pussycat?) de Clive Donner : Carole Werner
- 1966 : Dix heures et demie du soir en été (10:30 P.M. Summer) de Jules Dassin : Claire
- 1966 : La Voleuse de Jean Chapot : Julia Kreuz
- 1966 : La Fantastique histoire vraie d'Eddie Chapman (Triple cross) de Terence Young : Comtesse
- 1968 : Otley de Dick Clement : Imogen
- 1968 : La Piscine de Jacques Deray : Marianne
- 1970 : La Califfa d'Alberto Bevilacqua : La Califfa
- 1970 : L'Inceste (My lover, my son) de John Newland : Francesca Anderson
- 1970 : Les Choses de la vie de Claude Sautet : Hélène
- 1970 : Qui ? de Léonard Keigel : Marina
- 1971 : L'Assassinat de Trotsky (The Assassination of Trotsky) de Joseph Losey : Gita Samuels
- 1971 : Max et les ferrailleurs de Claude Sautet : Lily
- 1971 : Bloomfield (Bloomfield) de Richard Harris
- 1972 : César et Rosalie de Claude Sautet : Rosalie
- 1973 : Un amour de pluie de Jean-Claude Brialy : Elizabeth
- 1973 : Le Train de Pierre Granier-Deferre : Anna
- 1973 : Ludwig, le crépuscule des dieux (Ludwig) de Luchino Visconti : Elisabeth d'Autriche
- 1974 : Le Trio infernal de Francis Girod : Philomena Schmidt
- 1974 : L'important c'est d'aimer d'Andrzej Żuławski : Nadine Chevalier
- 1974 : Le Mouton enragé de Michel Deville : Roberte Groult
- 1975 : Le Vieux Fusil de Robert Enrico : Clara Dandieu
- 1975 : Les Innocents aux mains sales de Claude Chabrol : Julie Wormser
- 1976 : Mado de Claude Sautet : Hélène
- 1976 : Une femme à sa fenêtre de Pierre Granier-Deferre : Margot Santorini
- 1977 : Portrait de groupe avec dame (Gruppenbild mit Dame) d'Aleksandar Petrovic : Leni Gruyten
- 1978 : Une histoire simple de Claude Sautet : Marie
- 1979 : Liés par le sang (Bloodline) de Terence Young : Hélène Martin
- 1979 : Clair de femme de Costa-Gavras : Lydia
- 1979 : La Mort en direct de Bertrand Tavernier : Katherine Mortenhoe
- 1980 : La Banquière de Francis Girod : Emma Eckhert
- 1981 : Fantôme d'amour (Fantasma d'amore) de Dino Risi : Anna Brigatti
- 1981 : Garde à vue de Claude Miller : Chantal Martinaud
- 1982 : La Passante du Sans-Souci de Jacques Rouffio : Elsa Wiener/Lina Baumstein
Récompenses et nominations
- 1976 : César de la meilleure actrice - L'important c'est d'aimer
- 1977 : Nomination au César de la meilleure actrice - Une femme à sa fenêtre
- 1979 : César de la meilleure actrice - Une histoire simple
- 1980 : Nomination au César de la meilleure actrice - Clair de femme
- 1983 : Nomination au César de la meilleure actrice - La Passante du Sans-Souci
- 2008 : César d'honneur pour l'ensemble de sa carrière
01:31 Écrit par Sandra Mézière | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer |