Conférence de presse et programme de la sélection officielle du 65ème Festival de Cannes (19/04/2012)
Ce matin, la rue Scribe se donnait des airs de Croisette. Au Grand Hôtel Intercontinental où se déroulait la conférence de presse du 65ème Festival de Cannes, les médias du monde entier s’étaient donné rendez-vous pour écouter l’annonce tant attendue de la sélection par le Président du festival, Gilles Jacob, et par son délégué général, Thierry Frémaux. La campagne électorale s’est éclipsée quelques heures pour laisser place à cette autre compétition, moins rude mais tout aussi palpitante et qui, sans doute, nous en dira au moins aussi long sur l’état du monde et de notre société, sur ses maux, ses craintes, ses révoltes, ses aspirations. Ce sera déjà mon 12ème Festival de Cannes et pourtant l’impatience est la même, accrue par la fébrilité et l’effervescence qui règnaient dans la majestueuse salle de l’Intercontinental et qui, dans une délicieuse confusion de mon imaginaire galopant et impatient, m’ont donné l’impression d’être déjà un peu à Cannes…
L’annonce de la sélection a été précédée d’un discours de Gilles Jacob présentant notamment « ce petit travail d’artisan » comme il l’a humblement défini, cette Histoire de Festival numéro 4, un documentaire sur l’anniversaire des 60 ans du festival qui sera présenté le jour de l’anniversaire du festival (65 ans cette fois), sous le titre Une journée particulière, un documentaire que je suis d’autant plus impatiente de découvrir que j’avais vécu cette journée parmi les festivaliers et que j’en garde le souvenir d’un moment magique. Le titre est bien entendu un clin d’œil à Ettore Scola mais aussi à la particularité de cette journée pour laquelle les 35 réalisateurs de « Chacun son cinéma » (et non des moindres !) étaient venus à Cannes en 2007. C’est le 20 mai en salle Debussy que sera projeté ce film prometteur.
« À nous d’affirmer la persistance d’un cinéma différent cher au Président du Jury comme à celui du Festival» a ensuite poursuivi Gilles Jacob « car ce qui n’a pas changé et ne changera pas, c’est ce que sont les créateurs qui font Cannes et non pas l’éphémère ni l’écume des choses. Dans ce monde qui sacrifie au superficiel, au zapping, à la banalisation, à la fin du débat d’idées par indifférence, ce qui compte, ce qui fait notre force, c’est l’enracinement dans une passion pour le cinéma et pour ceux qui la portent : les grands auteurs. » Et il est vrai que, à Cannes, le rythme devient tout autre. Les débats passionnés et passionnants, exaltés et exaltants, s’inscrivent dans un temps que l’on voudrait éternité qui nous donne à voir des auteurs dont la singularité, la lenteur parfois salutaire, nous rassurent dans une course souvent carnassière et vaine aux images.
« La chance de Cannes, c'est sa faculté de rassembler dans l’instant privilégié de la découverte d'un film. Un film qui, en un clin d'oeil, invente, réveille, bouleverse, consacre. On vient du monde entier pour retrouver l'élan créateur, cette concentration magique irremplaçable. Les nouvelles technologies, Internet, le piratage, les sorties mondiales simultanées, les nouveaux formats, et tout ce qui viendra ensuite, n'y pourront rien car la passion collective réunificatrice est logée là, c'est ainsi» a-t-il conclu.
« Concentration magique irremplaçable » et « passion collective réunificatrice », voilà qui définit parfaitement cette atmosphère particulière qu’est celle de Cannes qui brouille délicieusement nos repères censés habituellement distinguer le cinéma de la réalité, qui nous plonge dans un bain cinématographique réconfortant (ou parfois salutairement choquant, dérangeant), dans un cinéma éclectique qui concilie et réconcilie cinéphiles et amateurs d’un cinéma plus grand public et de glamour que symbolise aussi Cannes (comme s’il fallait d’ailleurs les opposer.) Et cette année ne devrait pas déroger à la règle… Il se pourrait même qu’elle égale voire surpasse la surprenante et magnifique édition 2011 qui a vu éclore tant de grands films.
Thierry Frémaux (qui a terminé sa sélection -dont on imagine à quel point elle doit être un passionnant casse-tête- la nuit dernière !) a ensuite annoncé la sélection officielle tout en spécifiant au préalable que « Quiconque fait un film sur cette planète peut postuler au Festival de Cannes", voilà qui devrait faire taire ceux qui estiment que les mêmes sont toujours sélectionnés (16 des 22 sélectionnés de cette année ont déjà concouru pour la palme d’or et 4 l’ont d’ailleurs déjà obtenue –Mungiu, Haneke, Loach, Kiarostami- mais, après tout, comment ne pas sélectionner un film d’Haneke ou Kiarostami alors que ce sont toujours ou presque de grands films ?) . Il a également précisé que « Le festival ne décide jamais préalablement de donner telle ou telle couleur à la sélection mais reflète état de la création".
Plus de films ont été soumis au festival cette année : 1779 (1715 l’an passé). 26 pays représentés. 54 longs-métrages ont ainsi été annoncés aujourd’hui. D’autres seront annoncés la semaine prochaine (trois ou quatre). Peut-être le film de François Ozon, par exemple, dont certains regrettent l’absence ? 22 films sont ainsi en lice pour la palme d’or. Pour l’annonce du jury, il faudra attendre quelques jours, en début de semaine prochaine.
Thierry Frémaux a également souligné que « le cinéma américain revient en force résumé ni à un cinéma indépendant ni à un cinéma de studio ».
Trois films de réalisateurs français sont en lice pour la Palme d'or : "Vous n'avez encore rien vu" de Alain Resnais, "De rouille et d'os" de Jacques Audiard et "Holly Motors" de Leos Carax. Deux films français figurent également dans la section "Un certain regard": "Le grand soir" de Benoît Delépine et Gustave Kervern, et "Confessions d'un enfant du siècle" de Sylvie Verheyde.
La conférence de presse s’est achevée par quelques questions. Une journaliste a ainsi demandé pourquoi Wong Kar Wai n’était pas sélectionné, ce à quoi Thierry Frémaux à répondu « Wong Kar Wai met du temps à terminer les films, c'est pourquoi nous n'avons pas pu le voir" .
Une alléchante sélection entre nouveaux cinéastes et, surtout, cinéastes confirmés qui ne devraient pas moins nous surprendre, selon Thierry Frémaux qui a ainsi paraphrasé le titre du film d’Alain Resnais, « Vous n’avez encore rien vu ».
Enfin, c’est le scénariste et réalisateur américain Philip Kaufman, qui donnera la leçon de cinéma après Martin Scorsese, Stephen Frears, Nanni Moretti, Wong Kar Wai ou Sydney Pollack. A cette occasion, le Festival présentera son nouveau film : Hemingway & Gellhorn, présenté en Sélection Officielle Hors Compétition, un film produit par HBO, avec Nicole Kidman et Clive Owen qui relate l’histoire passionnée et tumultueuse du grand écrivain et de sa troisième épouse, célèbre correspondante de guerre.
Nombreux sont les films que j’attends avec énormément d’impatience : le film de Catherine Corsini à Un Certain Regard que Thierry Frémaux a défini comme un " film policier qu'on pourrait dire inspiré par Claude Sautet ». Evidemment le film d’Alain Resnais (accessoirement un de mes cinéastes de prédilection) qui avec « Les herbes folles » avait montré la jeunesse, la vitalité, l’inventivité de son cinéma, la curiosité aiguisée de son regard et qui avec « Vous n’avez encore rien vu » devrait à nouveau le démontrer. Evidemment, j’attends avec impatience « Like someone in love » de Kiarostami (compétition officielle) après un de mes grands chocs cinématographiques que fut son « Copie conforme » (pour lequel Juliette Binoche avait reçu un prix d’interprétation amplement mérité), le nouveau film de Jacques Audiard « De rouille et d’os » ( de retour à Cannes après son grand prix du jury avec « Un Prophète » au Festival de Cannes 2009), le film du petit génie Xavier Dolan « Laurence Anyways » après sa grisante fantasmagorie « Les amours imaginaires » déjà en sélection à Un Certain Regard, le film de Andrew Dominik « Killing them softly » de nouveau avec Brad Pitt déjà époustouflant dans le chef d’œuvre de ce même cinéaste « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford », le nouveau film de Michael Haneke « Amour » , de retour en compétition officielle trois ans après sa palme d’or pour l'oeuvre austère, cruelle, dérangeante, convaincante, et surtout impressionnante qu’est « Le Ruban blanc ». « Après la bataille » de Yousry Nasrallah sur le printemps égyptien s’annonce également passionnant, et tant d’autres entre lesquels il me sera bien difficile de choisir… et à vrai dire je pourrais vous citer tous les films ou presque de cette sélection même si, sans doute, attendrai-je un peu moins la « comédie musicale violente japonaise », en séance de minuit, de Takeshi Miike qui prouve néanmoins une nouvelle fois l’éclectisme de cette sélection.
Les amateurs de montées des marches pourront se réjouir d’y voir (probablement) Nicole Kidman, Brad Pitt, Marion Cotillard, Robert Pattinson, Kristen Stewart, Bérénice Béjo, Pete Doherty, Tom Hardy, Jessica Chastain, Kylie Minogue, Eva Mendès… parmi tant d’autres.
Précisons encore que le film de Wes Anderson dont nous savions qu’il ferait l’ouverture du festival sera également en compétition, que « Thérèse Desqueyroux », l’adaptation du roman éponyme par Claude Miller fera la clôture du festival, que Bérénice Béjo présentera les cérémonies d’ouverture et de clôture, que Nanni Moretti est toujours président du jury, Tim Roth celui du jury Un Certain Regard, que Jean-Pierre Dardenne est président du jury de la Cinéfondation et des courts-métrages, un jury composé de cinq personnalités du cinéma et de la littérature : Arsinée KHANJIAN (actrice canadienne), Karim AÏNOUZ (réalisateur et scénariste brésilien), Emmanuel CARRÈRE (écrivain, scénariste et réalisateur français) et YU Lik-wai (directeur de la photographie et réalisateur chinois).
Je vous donne rendez-vous chaque jour jusqu’au festival sur http://www.inthemoodforcannes.com mais aussi sur http://www.inthemoodforcinema.com et http://inthemoodlemag.com pour découvrir mes articles sur le festival.
Sur inthemoodforcannes, chaque jour, je vous présenterai un film de la sélection en détails. Bien entendu, vous y trouverez prochainement le jury et la suite de la sélection…en attendant d’y suivre le festival en direct du 16 au 27 mai.
En Compétition
Film d'ouverture |
||
Wes ANDERSON |
MOONRISE KINGDOM |
1h34 |
*** |
||
Jacques AUDIARD |
DE ROUILLE ET D'OS |
1h55 |
Leos CARAX |
HOLY MOTORS |
1h50 |
David CRONENBERG |
COSMOPOLIS |
1h45 |
Lee DANIELS |
THE PAPERBOY |
1h41 |
Andrew DOMINIK |
KILLING THEM SOFTLY |
1h40 |
Matteo GARRONE |
REALITY |
1h50 |
Michael HANEKE |
AMOUR |
2h06 |
John HILLCOAT |
LAWLESS |
1h55 |
HONG Sangsoo |
DA-REUN NA-RA-E-SUH |
1h28 |
IM Sang-soo |
DO-NUI MAT (THE TASTE OF MONEY) |
1h53 |
Abbas KIAROSTAMI |
LIKE SOMEONE IN LOVE |
1h49 |
Ken LOACH |
THE ANGELS' SHARE |
1h46 |
Sergei LOZNITSA |
V TUMANE (DANS LA BRUME) |
2h07 |
Cristian MUNGIU |
BEYOND THE HILLS |
2h35 |
Yousry NASRALLAH |
BAAD EL MAWKEAA (APRES LA BATAILLE) |
1h56 |
Jeff NICHOLS |
MUD |
2h15 |
Alain RESNAIS |
VOUS N'AVEZ ENCORE RIEN VU |
1h55 |
Carlos REYGADAS |
POST TENEBRAS LUX |
1h40 |
Walter SALLES |
ON THE ROAD (SUR LA ROUTE) |
2h20 |
Ulrich SEIDL |
PARADIES : Liebe |
2h00 |
Thomas VINTERBERG |
JAGTEN (THE HUNT) |
1h46 |
*** |
||
Film de clôture |
||
Claude MILLER |
THÉRÈSE DESQUEYROUX (H.C.) |
1h50 |
Un Certain Regard
Ashim AHLUWALIA |
MISS LOVELY 1er film |
1h50 |
Juan Andrés ARANGO |
LA PLAYA 1er film |
1h30 |
Nabil AYOUCH |
LES CHEVAUX DE DIEU |
1h55 |
Catherine CORSINI |
TROIS MONDE |
1h40 |
Brandon CRONENBERG |
ANTIVIRAL 1er film |
1h50 |
Benicio DEL TORO, |
7 DIAS EN LA HABANA |
2h05 |
Benoit DELÉPINE, |
LE GRAND SOIR |
1h32 |
Xavier DOLAN |
LAURENCE ANYWAYS |
2h41 |
Michel FRANCO |
DESPUÉS DE LUCIA |
1h33 |
Joachim LAFOSSE |
À PERDRE LA RAISON |
1h54 |
Darezhan OMIRBAYEV |
STUDENT |
1h30 |
Moussa TOURE |
LA PIROGUE |
1h27 |
Pablo TRAPERO |
ELEFANTE BLANCO |
2h00 |
Sylvie VERHEYDE |
CONFESSION OF A CHILD OF THE CENTURY |
2h05 |
Koji WAKAMATSU |
11.25 THE DAY HE CHOSE HIS OWN FATE |
2h00 |
LOU Ye |
MYSTERY |
1h30 |
Benh ZEITLIN |
BEASTS OF THE SOUTHERN WILD 1er film |
1h32 |
Hors Compétition
Bernardo BERTOLUCCI |
IO E TE |
1h37 |
Eric DARNELL, Tom MCGRATH |
MADAGASCAR 3, EUROPE'S MOST WANTED (MADAGASCAR 3, BONS BAISERS D'EUROPE) |
1h30 |
Philip KAUFMAN |
HEMINGWAY & GELLHORN |
2h34 |
Séances de minuit |
||
Dario ARGENTO |
DARIO ARGENTO'S DRACULA |
1h46 |
Takashi MIIKE |
AI TO MAKOTO |
2h14 |
65e anniversaire |
||
UNE JOURNÉE PARTICULIÈRE de Gilles Jacob et Samuel Faure |
53' |
Séances Spéciales
Fatih AKIN |
DER MÜLL IM GARTEN EDEN |
1h25 |
Laurent BOUZEREAU |
ROMAN POLANSKI : A FILM MEMOIR |
1h34 |
Ken BURNS, |
THE CENTRAL PARK FIVE |
2h00 |
Sébastien LIFSHITZ |
LES INVISIBLES |
1h55 |
Claudine NOUGARET, |
JOURNAL DE FRANCE |
1h40 |
Nelson |
A MUSICA SEGUNDO TOM JOBIM |
1h30 |
Gonzalo TOBAL |
VILLEGAS 1er film |
1h36 |
Apichatpong |
MEKONG HOTEL |
20:57 Écrit par Sandra Mézière | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer |