Adapté par : Matthieu Rozé et Julie Peyr
D’après le roman «Les Petits Chevaux de Tarquinia » de Marguerite Duras
3. Canailles réalisé par CHRISTOPHE OFFENSTEIN
AVEC FRANÇOIS CLUZET, JOSÉ GARCIA, DORIA TILLIER
Adapté par : Jessica Palud
D’après le roman «Une canaille et demie » de lain Levison
4. Enquête sur un scandale d’état réalisé parTHIERRY DE PERETTI
AVEC ROSCHDY ZEM, PIO MARMAÏ, VINCENT LINDON
Adapté par Thierry de Peretti et Jeanne Aptekman
D’après le roman «L’Infiltré» de d’Emmanuel Fansten et Hubert Avoine
5. L’Affaire Collini réalisé par MARCO KREUZPAINTNER
AVEC ELYAS M’BAREK, ALEXANDRA MARIE LARA, HEINER LAUTERBACH
Adapté par Christian Zübert, Robert Gold, Jens-Frederik Otto
D’après le roman éponyme de Ferdinand von Schirach
6. L’Evènement réalisé par AUDREY DIWAN
AVEC ANAMARIA VARTOLOMEI, KACEY MOTTET KLEIN, LUÀNA BAJRAMI, LOUISE ORRY-DIQUÉRO, LOUISE CHEVILLOTTE, PIO MARMAÏ, SANDRINE BONNAIRE, ANNA MOUGLALIS
Adapté par Audrey Diwan et Marcia Romano
D’après le roman d’Annie Ernaux
7. La Dégustation réalisé par IVAN CALBÉRAC
AVEC BERNARD CAMPAN, ISABELLE CARRÉ
Adapté par Ivan Calbérac
D’après le roman de Ivan Calbérac
8. Les Volets verts réalisé par JEAN BECKER
AVEC GÉRARD DEPARDIEU, FANNY ARDANT, BENOIT POELVOORDE, STEFI CELMA, ANOUK GRINBERG, FRED TESTOT
Adapté par Jean-Loup Dabadie
D’après le roman éponyme de Georges Simenon
9. Maigret réalisé par PATRICE LECONTE
AVEC GÉRARD DEPARDIEU, JADE LEBESTE, MÉLANIE BERNIER, AURORE CLÉMENT
Adapté par Patrice Leconte et Jérôme Tonnerre
D’après le roman «Maigret et la jeune morte » de Georges Simenon
10. ...
LES FILMS EN AVANT-PREMIERE
1. Couleurs de l’incendie réalisé par CLOVIS CORNILLAC
EN PRÉSENCE DE CLOVIS CORNILLAC, ALICE ISAAZ ET LÉA DRUCKER
AVEC LÉA DRUCKER, BENOIT POELVOORDE, ALICE ISAAZ, FANNY ARDANT, OLIVIER GOURMET
D’après le roman «Couleurs de l’Incendie» de Pierre Lemaître
2. Le Torrent réalisé par ANNE LE NY
JOSÉ GARCIA, CAPUCINE VALAMRY, ANDRÉ DUSSOLLIER, CHRISTIANE MILLET, ZÉPHYR ELIS, ANNE LE NY
3. Tempête réalisé par CHRISTIAN DUGUAY
AVEC MÉLANIE LAURENT, PIO MARMAÏ, KACEY MOTTEIT KLEIN, CARMEN KASSOVITZ, HUGO BECKER
D’après le roman«Tempête au Harras » de Chris Donner
4. La Maison réalisé par ANNISSA BONNEFONT
AVEC ANA GIRARDOT, AURE ATIKA, ROSSY DE PALMA, PHILIPPE REBBOT, YANICK RENIER
D’après le roman d’Emma Becker
5. Arrête avec tes mensonges réalisé par OLIVIER PEYON
AVEC GUILLAUME DE TONQUÉDEC, VICTOR BELMONDO, GUILAINE LONDEZ
D’après le roman éponyme de Philippe Besson
6. Simone réalisé par OLIVIER DAHAN
AVEC ELSA ZYLBERSTEIN, REBECCA MARDER, ELODIE BOUCHEZ, OLIVIER GOURMET, JUDITH CHEMLA
7. Cet été-là réalisé par ERIC LARTIGAU
AVEC MARINA FOÏS, GAËL GARCIA BERNAL, CHIARA MASTROIANNI, ADÈLE WISMES, ANGELA MOLINA
EN PRÉSENCE DE BENOÎT POELVOORDE
Adapté par Ivan Calbérac d’après le roman «Cet été-là»
8. Mascarade réalisé par NICOLAS BEDOS
PIERRE NINEY, ISABELLE ADJANI, FRANÇOIS CLUZET, MARINE VACTH, EMMANUELLE DEVOS, LAURA MORANTE, CHARLES BERLING
9. Maestro(s) réalisé par BRUNO CHICHE
AVEC YVAN ATTAL, PIERRE ARDITI, MIOU MIOU, CAROLINE ANGLADE, PASCALE ARBILLOT
D’après le roman «Footnote » de Joseph Cedar
FILMS CULTES
(Projetés à La Cinémathèque de Nice)
Rencontre avec Joann Sfar
GAINSBOURG (VIE HEROIQUE)
LA DAME DE L’AUTO AVEC DES LUNETTES
Hommage à Jean-Loup Dabadie
VINCENT, FRANÇOIS, PAUL ET LES AUTRES
RÉALISÉ PAR CLAUDE SAUNET 1974. ADAPTÉ AU CINEMA PAR JEAN-LOUP DABADIE EN PRÉSENCE DE NICOLAS BEDOS
RÉALISÉ PAR CLAUDE SAUNET 1970. ADAPTÉ AU CINEMA PAR JEAN-LOUP DABADIE
Hommage à Jean-Paul Rappeneau
MASTERCLASS DU RÉALISATEUR JEAN-PAUL RAPPENEAU, ANIMÉ PAR CLARA LAURENT, AUTEUR ET JOURNALISTE
EN PRÉSENCE DE JEAN-PAUL RAPPENEAU
Réalisé par : Jean-Paul Rappeneau 1995.
EN PRÉSENCE DE JEAN-PAUL RAPPENEAU
Réalisé par : Jean-Paul Rappeneau 1995.
Réalisé par : Jean Becker 1983
D’après le roman de Sébastien Japistrot
Réalisé par : Claude Berri 1983
D’après le roman d’Alain Page
EN PRÉSENCE DE SYLVIE TESTUD
Réalisé par : Alain Corneau 2003
D’après le roman d’Amélie Nothomb.
LA FAMEUSE INVASION DES OURS EN SICILE
Réalisé par : Lorenzo Mattoti 2019
D’après le roman de Alain Page
Critique LES CHOSES DE LA VIE de Claude Sautet
(projeté dans le cadre de l'hommage à Jean-Loup Dabadie)
Les choses de la vie est certainement le film de Sautet que j’ai le plus de mal à revoir tant il me bouleverse à chaque fois, sans doute parce qu’il met en scène ce que chacun redoute : la fatalité qui fauche une vie en plein vol. Le film est en effet placé d’emblée sous le sceau de la fatalité puisqu’il débute par un accident de voiture. Et une cacophonie et une confusion qui nous placent dans la tête de Pierre (Michel Piccoli). Cet accident est le prétexte à un remarquable montage qui permet une succession de flashbacks, comme autant de pièces d’un puzzle qui, reconstitué, compose le tableau de la personnalité de Pierre et de sa vie sentimentale.
Au volant de sa voiture, Pierre (Michel Piccoli donc), architecte d’une quarantaine d’années, est victime d’un accident. Éjecté du véhicule, il gît inconscient sur l’herbe au bord de la route. Il se remémore son passé, sa vie avec Hélène (Romy Schneider), une jeune femme qu’il voulait quitter, sa femme Catherine (Lea Massari) et son fils (Gérard Lartigau)...
Sur la tombe de Claude Sautet, au cimetière Montparnasse, il est écrit : « Garder le calme devant la dissonance ». Voilà probablement la phrase qui définirait aussi le mieux son cinéma. Celui de la dissonance. De l’imprévu. De la note inattendue dans la quotidienneté. Et aussi parce que cette épitaphe fait référence à la passion de Claude Sautet pour la musique. Le tempo des films de Sautet est ainsi réglé comme une partition musicale, impeccablement rythmée, une partition dont on a l’impression qu’en changer une note ébranlerait l’ensemble de la composition.
Tous les films de Sautet se caractérisent d’ailleurs aussi par le suspense (il était fasciné par Ford et Hawks) : le suspense sentimental avant tout, concourant à créer des films toujours haletants et fascinants. Claude Sautet citait ainsi souvent la phrase de Tristan Bernard : « il faut surprendre avec ce que l’on attend ». On ne peut certainement pas reprocher au cinéma de Claude Sautet d’être démesurément explicatif. C’est au contraire un cinéma de l’implicite, des silences et du non-dit. Pascal Jardin disait de Claude Sautet qu’il « reste une fenêtre ouverte sur l’inconscient ».
Si son premier film, Classe tous risques, est un polar avec Lino Ventura et Jean-Paul Belmondo ( Bonjour sourire, une comédie, a été renié par Claude Sautet qui n’en avait assuré que la direction artistique), nous pouvons déjà y trouver ce fond de mélancolie qui caractérise tous ses films et notamment Les choses de la vie même si a priori Claude Sautet changeait radicalement de genre cinématographique avec cette adaptation d’un roman de Paul Guimard, écrite en collaboration avec Jean-Loup Dabadie.
« Les films de Claude Sautet touchent tous ceux qui privilégient les personnages par rapport aux situations, tous ceux qui pensent que les hommes sont plus importants que ce qu’ils font (..). Claude Sautet c’est la vitalité. » disait ainsi Truffaut. Et en effet, le principal atout des films de Sautet, c’est la virtuosité avec laquelle sont dépeints, filmés et interprétés ses personnages qui partent de stéréotypes pour nous faire découvrir des personnalités attachantes et tellement uniques, qui se révèlent finalement éloignées de tout cliché.
On a souvent dit de Claude Sautet qu'il était le peintre de la société des années 70 mais en réalité la complexité des sentiments de ses personnages disséquée avec une rare acuité est intemporelle. S’il est vrai que la plupart de ses films sont des tableaux de la société contemporaine, notamment de la société d’après 1968, et de la société pompidolienne, puis giscardienne, et enfin mitterrandienne, ses personnages et les situations dans lesquelles il les implique sont avant tout universels, un peu comme La Comédie Humaine peut s’appliquer aussi bien à notre époque qu’à celle de Balzac.
Ce sont avant tout de ses personnages dont on se souvient après avoir vu un film de Sautet. Ses films ensuite porteront d’ailleurs presque tous des prénoms pour titres. On se dit ainsi que Les choses de la vie aurait ainsi pu s'intituler... Hélène et Pierre.
Même dans Quelques jours avec moi, qui ne porte pas pour titre des prénoms de personnages (un film de Sautet méconnu que je vous recommande, où son regard se fait encore plus ironique et acéré, un film irrésistiblement drôle et non dénué de douce cruauté), c’est du personnage de Pierre (interprété par Daniel Auteuil) dont on se souvient.
De Nelly et M. Arnaud, on se souvient d'Arnaud (Michel Serrault), magistrat à la retraite, misanthrope et solitaire, et de Nelly (Emmanuelle Béart), jeune femme au chômage qui vient de quitter son mari. Au-delà de l’autoportrait ( Serrault y ressemble étrangement à Sautet ), c’est l’implicite d’un amour magnifiquement et pudiquement esquissé, composé jusque dans la disparition progressive des livres d’Arnaud, dénudant ainsi sa bibliothèque et faisant référence à sa propre mise à nu. La scène pendant laquelle Arnaud regarde Nelly dormir, est certainement une des plus belles scènes d’amour du cinéma : silencieuse, implicite, bouleversante. Le spectateur retient son souffle et le suspense y est à son comble. Sautet a atteint la perfection dans son genre, celui qu’il a initié avec Les choses de la vie : le thriller des sentiments.
Dans Un cœur en hiver, là aussi, le souffle du spectateur est suspendu à chaque regard, à chaque note, à chaque geste d’une précision rare, ceux de Stephan (Daniel Auteuil). Je n’ai d'ailleurs encore jamais trouvé au cinéma de personnages aussi « travaillés » que Stéphane, ambigu, complexe qui me semble avoir une existence propre, presque vivre en dehors de l’écran. Là encore comme s'il s'agissait un thriller énigmatique, à chaque visionnage, je l’interprète différemment, un peu aussi comme une sublime musique ou œuvre d’art qui à chaque fois me ferait ressentir des émotions différentes. Stéphane est-il vraiment indifférent ? Joue-t-il un jeu ? Ne vit-il qu’à travers la musique ? « La musique c’est du rêve » dit-il.
Et puis, évidemment, il y a l’inoubliable César. Un des plus beaux rôles d’Yves Montand. Derrière l’exubérance et la truculence de César, on ressent constamment la mélancolie sous-jacente. Claude Beylie parlait de « drame gai » à propos de César et Rosalie, terme en général adopté pour la Règle du jeu de Renoir, qui lui sied également parfaitement.
César, Rosalie, Nelly, Arnaud, Vincent, François, Paul, Max, Mado, …et les autres. Les films de Sautet sont donc avant tout des films de personnages. Des personnages égarés affectivement et/ou socialement, des personnages énigmatiques et ambivalents.
Les choses de la vie, c’est le film par lequel débute la collaboration de Claude Sautet avec le compositeur Philippe Sarde. Le thème nostalgique et mélancolique intitulé La chanson d’Hélène a aussi contribué à son succès. Sarde avait d’ailleurs fait venir Romy Schneider et Michel Piccoli en studio pour qu’ils posent leur voix sur la mélodie. Cette version, poignante, ne sera finalement pas utilisée dans le film.
Et puis il y a les dialogues, remarquables, qui pourraient aussi être qualifiés de musiques, prononcés par les voix si mélodieuses et particulières de Romy Schneider et Michel Piccoli : « Quel est le mot pour mentir enfin pas mentir mais raconter des histoires, mentir mais quand on invente affabuler ». « Je suis fatiguée de t'aimer. » « Brûler la lettre pour ne pas vivre seul. » Parfois ils sont cinglants aussi… : la fameuse dissonance ! Comme « Nous n'avons pas d'histoire et pour toi c'est comme les gens qui n'ont pas d'enfants c'est un échec». On songe à la magnifique lettre de Rosalie dans César et Rosalie, aux mots prononcés par la voix captivante de Romy Schneider qui pourraient être ceux d’un poème ou d’une chanson : « Ce n'est pas ton indifférence qui me tourmente, c'est le nom que je lui donne : la rancune, l'oubli. David, César sera toujours César, et toi, tu seras toujours David qui m'emmène sans m'emporter, qui me tient sans me prendre et qui m'aime sans me vouloir... ».
Il y eut un avant et un après Les choses de la vie pour Claude Sautet mais aussi pour Romy Schneider et Michel Piccoli. La première est aussi éblouissante qu’émouvante en femme éperdument amoureuse, après La Piscine de Jacques Deray, film dans lequel elle incarnait une femme sublime, séductrice dévouée, forte, provocante. Et Michel Piccoli incarne à la fois la force, l’élégance et la fragilité et puis il y a cette voix ensorceleuse et inimitable qui semble nous murmurer son histoire à notre oreille.
Comme dans chacun des films de Sautet, les regards ont aussi une importance cruciale. On se souvient de ces regards échangés à la fin de César et Rosalie. Et du regard tranchant de Stéphane (Daniel Auteuil) dans Un cœur en hiver…Et de ce dernier plan qui est encore affaire de regards.
Le personnage de Stéphane ne cessera jamais de m’intriguer, comme il intrigue Camille (Emmanuelle Béart), exprimant tant d’ambiguïté dans son regard brillant ou éteint. Hors de la vie, hors du temps. Je vous le garantis, vous ne pourrez pas oublier ce crescendo émotionnel jusqu’à ce plan fixe final polysémique qui vous laisse ko et qui n’est pas sans rappeler celui de Romy Schneider à la fin de « Max et les ferrailleurs » ou de Michel Serrault (regard absent à l’aéroport) dans « Nelly et Monsieur Arnaud » ou de Montand/Frey/Schneider dans « César et Rosalie ». Le cinéma de Claude Sautet est finalement affaire de regards, qu’il avait d’une acuité incroyable, saisissante sur la complexité des êtres. Encore une digression pour vous recommander "Un coeur en hiver", mon film de Sautet préféré, une histoire d’amour, de passion(s), cruelle, intense, poétique, sublime, dissonante, mélodieuse, contradictoire, trouble et troublante, parfaitement écrite, jouée, interprétée, mise en lumière, en musique et en images (ma critique complète sur Inthemoodforcinema.com).
Dans Les choses de la vie, on se souviendra longtemps du regard d’Hélène qui, de l’autre côté de la porte de son immeuble et à travers la vitre et la pluie, regarde, pour la dernière fois, Pierre dans la voiture, allumer sa cigarette sans la regarder, et partir vers son fatal destin. Et quand il relève la tête pour regarder elle n'est plus là et il semble le regretter. Et quand elle revient, il n’est plus là non plus. Un rendez-vous manqué d’une beauté déchirante….
Les regards sont aussi capitaux dans la séquence sublime du restaurant dans laquelle ils passent du rendez-vous d’amour à la dispute, une scène qu’ils ne paraissent pas jouer mais vivre sous nos yeux, dans un de ces fameux cafés ou brasseries qu’on retrouvera ensuite dans tous les films de Claude Sautet, dans les scènes de groupe dont Vincent, François, Paul et les autres est le film emblématique. On retrouvera aussi la solitude dans et malgré le groupe. « A chaque film, je me dis toujours : non, cette fois tu n’y tournes pas. Et puis, je ne peux pas m’en empêcher. Les cafés, c’est comme Paris, c’est vraiment mon univers. C’est à travers eux que je vois la vie. Des instants de solitude et de rêvasseries. » dira ainsi Claude Sautet. On retrouvera souvent les personnages filmés à travers les vitres de ces mêmes cafés, des scènes de pluie qui sont souvent un élément déclencheur, des scènes de colère (peut-être inspirées par les scènes de colère incontournables dans les films de Jean Gabin, Sautet ayant ainsi revu Le jour se lève …17 fois en un mois!), des femmes combatives souvent incarnées par Romy Schneider puis par Emmanuelle Béart, des fins souvent ouvertes.
Annie Girardot et Yves Montand puis Lino Ventura déclinèrent les rôles d'Hélène et de Pierre dans Les choses de la vie. Romy Schneider et Michel Piccoli seront ainsi à jamais Hélène et Pierre. Inoubliables. Comme le rouge d’une fleur. Peut-être la dernière chose que verra Pierre qui lui rappelle le rouge de la robe d’Hélène. Comme cet homme seul sous la pluie, mortellement blessé, gisant dans l'indifférence, tandis que celle qu’il aime, folle d’amour et d’enthousiasme, lui achète des chemises. Et que lui rêve d’un banquet funèbre. Et qu’il murmure ces mots avec son dernier souffle de vie qui, là encore, résonnent comme les paroles d’une chanson : «J'entends les gens dans le jardin. J'entends même le vent. » Et ces vêtements ensanglantés ramassés un à un par une infirmière, anonymes, inertes.
Je termine toujours ou presque la vision d’un film de Sautet bouleversée, avec l’envie de vivre plus intensément encore car là était le véritable objectif de Claude Sautet : nous « faire aimer la vie »…et il y est parvenu, magistralement. En nous racontant des « histoires simples », il a dessiné des personnages complexes qui nous parlent si bien de « choses de la vie ». Claude Sautet, en 14 films, a su imposer un style, des films inoubliables, un cinéma du désenchantement enchanteur, d’une savoureuse mélancolie, de l’ambivalence et de la dissonance jubilatoires, une symphonie magistrale dont chaque film est un morceau unique indissociable de l’ensemble, et celui-ci est sans doute le plus tragique et poignant.
Il y a les cinéastes qui vous font aimer le cinéma, ceux qui vous donnent envie de faire du cinéma, ceux qui vous font appréhender la vie différemment, voire l’aimer davantage encore. Claude Sautet, pour moi, réunit toutes ces qualités.
Certains films sont ainsi comme des rencontres, qui vous portent, vous enrichissent, vous influencent ou vous transforment même parfois. Les films de Claude Sautet font partie de cette rare catégorie et de celle, tout aussi parcimonieuse, des films dont le plaisir à les revoir, même pour la dixième fois, est toujours accru par rapport à la première projection. J’ai beau connaître les répliques par cœur, à chaque fois César et Rosalie m’emportent dans leur tourbillon de vie joyeusement désordonné, exalté et exaltant. J’ai beau connaître par cœur Les choses de la vie et le destin tragique de Pierre me bouleverse toujours autant et ce « brûle la lettre » ne cesse de résonner encore et encore comme une ultime dissonance.
Les choses de la vie obtint le Prix Louis-Delluc 1970 et connut aussi un grand succès public.