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  • Discours de Gilles Jacob lors de la remise de la palme d'honneur à Clint Eastwood

    Pour patienter, en attendant ma critique de "Gran Torino" (très très bientôt ), le dernier film de et avec Clint Eastwood que je n'ai pas encore eu le temps de voir, voici le discours de Gilles Jacob en l'honneur de Clint Eastwood lors de la remise d'une palme  d'honneur à ce dernier, le 25 février 2009.

    Pour moi, en tout cas, son meilleur film, son chef d'oeuvre incontesté est pour le moment celui-là.

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    Photo ci-dessus prise par "In the mood for cinema" lors de l'hommage à Manuel de Oliveira, Festival de Cannes 2008

    DISCOURS DE GILLES JACOB LORS DE LA REMISE DE LA PALME D'HONNEUR A CLINT EASTWOOD, CE 25 FEVRIER 2009

    "Mon cher Clint, laissez-moi commencer par une petite devinette. Quelle est à votre avis la plus grande frustration qu’un président de festival puisse éprouver ? Vous ne voyez pas ? C’est pourtant bien simple : il n’a jamais son mot à dire lorsqu’arrive le moment crucial du festival, je veux parler bien sûr de l’attribution des prix. C’est la raison de notre réunion d’aujourd’hui, entre vieux amis. Ne le prenez pas mal : je suis né 15 jours après vous !
    Mais j’en viens au fait. Nous avons décidé de nous accorder, à titre exceptionnel, un privilège qui d’ordinaire nous échappe, à Thierry comme à moi. Il y a bien eu un précédent, la Palme des Palmes décernée à Bergman : aujourd’hui, c’est vous que nous souhaitons honorer, au nom du Festival de Cannes.
    En cela, le Festival ne commet pas un acte révolutionnaire mais accompagne plutôt, par ce geste hautement symbolique, la faveur que le public et la critique internationale unanime vous ont déjà accordée d’enthousiasme. D’ailleurs, il serait impossible de désigner l’une plutôt que l’autre de vos œuvres comme digne de la récompense suprême. Comment choisir entre BIRD, MYSTIC RIVER, MILLION DOLLAR BABY, votre diptyque japonais, ou encore GRAN TORINO, acclamé aujourd’hui comme le film « où Clint Eastwood rassemble toute sa pensée sur son cinéma, sa carrière et son pays ».
    C’est donc le bon moment pour dédier la Palme à Clint Eastwood, auteur de tous ces chefs d’œuvre. Et tant pis pour votre modestie légendaire… J’ai parlé de votre immense talent. Il faut savoir qu’il y a deux Clint Eastwood, tous deux se confondant sous les traits de l’American lonesome hero qui fait tant battre les cœurs de notre Vieux monde. Il y a celui, fameux pour son charisme, son caractère et sa faculté de défourailler son 38 Magnum plus vite que la foudre, je veux parler de l’Inspecteur Harry et autres caractères très populaires, que vous assassinez une bonne fois pour toutes dans GRAN TORINO. Ils vous ont pourtant permis de conquérir votre indépendance et une certaine renommée. Et ils ont permis à l’autre Clint, plus confidentiel celui-là, en tout cas à ses débuts, de réaliser des films personnels, qui ont surpris ceux qui ne vous connaissaient pas par leur charme, leur originalité, leur petite musique de nuit, mon cher Mozart – eh oui, il n’y a pas que le jazz dans la vie - et leur lyrisme bien tempéré. Dans ces deux courants de votre travail, la Brute et le Troublant, chacun ici reconnaîtra sans peine le main stream américain et l’European touch. Je vous laisse deviner lequel des deux je préfère. Mais le réconfortant de la chose est que le public s’est peu à peu intéressé, autant sinon plus, à vos films « about people » qu’à vos films d’action. Car, tel est l’art de votre mise en scène, vous filmez les scènes de tendresse comme des thrillers, et les thrillers comme…des thrillers ! L’itinéraire de MILLION DOLLAR BABY pour lequel j’ai le plus d’affection est à cet égard très convainquant : qui eut dit que ce film nocturne, d’une tristesse infinie, toucherait à ce point le cœur de tous les publics et deviendrait de la sorte un classique ?
    De même pour vos autres chefs d’œuvre. Comme pour les grands metteurs en scène de tous les pays, Bresson, Ford, Ozu, Satyajit Ray, Rossellini, vous avez très vite compris que la simplicité, la caméra à hauteur d’homme, l’exacte durée d’un plan, la nature de l’objectif, la coupe au montage, la situation des plages musicales, étaient affaire de choix. Dans chaque domaine, il n’y en a qu’un seul – et pas un autre. C’est ainsi qu’on s’installe tout doucement dans l’Histoire du cinéma.
    Il peut se faire enfin qu’on soit un grand artiste, mais un égoïste forcené. Ca arrive ! Ce n’est pas votre cas. Quand Pierre Rissient, votre « porte-drapeau » depuis la nuit des temps, s’est retrouvé hospitalisé, atteint d’un mal inconnu au Cedar Sinaï Hospital, il s’est réveillé, vaguement conscient, et en ouvrant les yeux, Clint Eastwood était à son chevet. Depuis combien de temps, on ne sait pas, mais vous aviez tout arrangé pour les soins, pour l’intendance, pour tout, et cet étranger s’est miraculeusement retrouvé nimbé d’une aura de popularité de nature à impressionner l’infirmière la plus rébarbative. Pourquoi j’ai cité en passant cette anecdote inconnue ? C’est que ces qualités humaines, si rares de nos jours, ne sont pas pour rien dans l’honneur que nous vous faisons aujourd’hui. Faisant mentir Scott Fitzgerald que vous citez en exergue de BIRD : « Il n’y a pas de deuxième chance pour un héros américain », je vais maintenant, mon cher Clint, vous remettre la Palme d’or en témoignage de notre admiration et d’une longue connivence d’un quart de siècle. "

  • 8ème Forum International Cinéma et Littérature de Monaco

    Ce Festival dont je vous ai déjà parlé brièvement le mois dernier aura lieu les 19, 20 et 21 mars, à l'auditorium Rainier III de Monaco.

    Retrouvez la première partie du programme ci-dessous. Pour les informations pratiques, rendez-vous sur le site officiel du Forum International Cinéma et Littérature de Monaco.

    Les prochaines informations concernant ce festival seront également publiées sur "In the mood for cinema".

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    Créé à l’initiative de Claire Breuvart et Hans-Stephan Kreidel et placé sous le Haut Patronage de SAS Le Prince Souverain Albert II le Forum Cinéma & Littérature est devenu, en sept ans, le rendez-vous incontournable de l’adaptation littéraire. Véritable banque d’idées internationale pour les professionnels du cinéma, de la littérature, de la télévision, de la bande dessinée et des jeux vidéo, le Forum est aussi un lieu privilégié de rencontres entre le public et des personnalités venues du monde entier.

    NOUVEAUTES 2009

    Des personnalités et des représentants officiels de l’Egypte, du Maroc, de la Tunisie et de l’Algérie… seront à Monaco pour participer au débat : « UNION POUR LA MEDITERRANEE : ECRIRE - COPRODUIRE - TOURNER » : quelles sont les conditions nécessaires pour favoriser les échanges entre l’ Union Européenne et les pays riverains de la Méditerranée et soutenir une création commune ?

    • «Pitching Sessions » de coproduction :

    Afin de compléter l’offre faite aux producteurs pour faciliter la création et le montage de leurs films, le Forum met en place des «Pitching Sessions » de coproduction. Une dizaine de projets cinématographiques ou télévisuels sera proposée, cette année, aux professionnels présents à Monaco.

    ET AUSSI

    • La compétition :

    Comme chaque année, les talents de l’adaptation littéraire seront mis à l’honneur à travers 7 PRIX :

    Prix du Meilleur Roman (thème, de l’édition 2009 : l’exil), Prix de la Meilleure Bande Dessinée, Prix de la Meilleure Adaptation Littéraire de Cinéma, Prix de la Meilleure Adaptation Littéraire de Télévision ainsi que les Prix du Meilleur Producteur, Meilleur Scénariste et Meilleur Acteur.

    • Les rencontres avec le public : Sont attendus ZABOU BREITMAN et toute l’équipe du film « JE L’AIMAIS »

    Tables rondes entre auteurs, réalisateurs et scénaristes, leçon de cinéma, lectures publiques et projections de films en avant-première en présence des équipes sont autant de temps forts entre le grand public et les personnalités invitées du Forum.

    Présentation en avant-première du nouveau film de Zabou Breitman, « Je l’aimais », avec Daniel Auteuil et Marie-Josée Croze, tiré du roman éponyme d’Anna Gavalda.

    Présentation du film "Chéri" de Stephen Frears, le 20 mars 2009.

    • 3ème concours de pitchs : atelier de « pitchs » par PHILIPPE BESSON

    L’objectif de ce concours est d’attirer les jeunes vers la lecture par le biais du cinéma. Imaginer le film adapté du livre d’un écrivain contemporain en rédigeant un pitch (résumé de 10 lignes) est l’exercice imposé. Près de 500 élèves (250 en 2008) de 5 lycées des Alpes-Maritimes et de Monaco participeront à cette opération organisée en collaboration avec le rectorat de Nice. Après Guillaume Musso en 2007 et Didier van Cauwelaert en 2008, c’est Philippe Besson qui participera à l’édition 2009 avec son roman « Les jours fragiles » (Editions Julliard) retraçant la jeunesse d’Arthur Rimbaud.

    • Les trois marchés :

    Pour la 7éme année consécutive, producteurs, éditeurs et agents littéraires se retrouveront dans le cadre des trois marchés du Forum : Le Marché International de l’Adaptation Littéraire regroupant de nombreux sujets adaptables au cinéma et à la télévision (romans, bandes dessinées, jeux-video), le Shootings Trade Show, vitrine des commissions de films de régions et de pays désireux d’accueillir des tournages, ainsi que le Marché du Remake.

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  • Ang Lee: président de la 66ème Mostra de Venise

    ang.jpgLe jury de la 66e édition du Festival de cinéma de Venise qui aura lieu du 2 au 12 septembre 2009 (eh oui...à nouveau pendant le Festival du Cinéma Américain de Deauville) sera présidé par le cinéaste taïwanais Ang Lee, lui-même primé deux fois par la Mostra pour Lust, caution en 2007 (Lion d'or) et Le secret de Brokeback mountain en 2005 (Lion d'or).

    Parmi ses nombreuses réalisations: le lyrique "Tigre et dragon" (2000), primé par 4 Oscars.

    Le jury de la Mostra était présidé en 2008 par le cinéaste allemand Wim Wenders.

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  • "La Règle du jeu" de Jean Renoir (1939) au Ciné-club de SciencesPo (04.03): critique du film

    Je vous ai déjà parlé à plusieurs reprises du Ciné-club de SciencesPo, notamment à l'occasion de la venue de Catherine Deneuve, suite à la projection de "Belle de jour" mais aussi à l'occasion de la projection en avant-première de "Nuit de chien" de Werner Schroeter.

    Mercredi prochain, 4 mars,  à 19H, dans l'amphi Boutmy  (27 rue Saint-Guillaume, Paris 7ème), le ciné-club projettera un chef d'oeuvre du cinéma mondial : "La Règle du jeu" de Jean Renoir.

    Je vous en propose de nouveau la critique et l'analyse, ci-dessous.

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    La Règle du jeu: le clairvoyant "drame gai" de Jean Renoir (1939)

     Souvent classé comme le meilleur film de tous les temps, c’est en tout cas incontestablement un chef d’œuvre de l’Histoire du cinéma…
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     La règle du jeu : le constat désespéré et la métaphore cynique d’une société en crise
    Au premier rang de ces nombreux films qui, avant-guerre, dépeignaient une société en crise se trouve La règle du jeu, qui, derrière son apparente légèreté, établit un constat cynique et désespéré de la décomposition morale de la France et qui en fit un chef d’œuvre annonciateur d’un avenir inéluctable. Le dernier film d’avant-guerre de Renoir est aussi le film annonciateur de la guerre. Les successions de styles auxquels recourt Renoir, entre vaudeville, satire et tragédie ne sont pas utilisées gratuitement mais contribuent à créer une véritable peinture sociale.
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    Une alliance subtile de vaudeville, satire et tragédie
    Dès le départ le cadre est planté, Renoir sous-titrant son film « fantaisie dramatique » et en définissant ainsi l’atmosphère. Tout comme son synopsis le film échappe à toute définition, Renoir prenant néanmoins soin de nous préciser au préalable que « ce divertissement dont l’action se passe à la veille de la guerre de 1939 n’a pas la prétention d’être une étude de moeurs. Les personnages qu’il présente sont purement imaginaires. » Ces personnages ce sont d’abord André Jurieux (Roland Toutain), le film débutant par l’atterrissage de son avion au Bourget. Celui-ci vient en effet de battre un record après avoir traversé l’Atlantique. Ovationné il ne pense qu’à Christine de La Chesnaye ( Nora Grégor), une femme du monde avec qui il avait une eu liaison platonique et qu’il s’attendait à voir à son retour. Il crie son désespoir à la radio puis tente de se suicider en voiture. Afin d’arranger les choses son ami Octave (Jean Renoir), également ami des La Chesnaye, le fait inviter à une partie de chasse que ceux-ci donnent dans leur propriété en Sologne, à La Colinière. Les terres sont surveillées par l’ombrageux Schumacher, qui surprend en flagrant délit de braconnage Marceau (Carette). Amusé le marquis le prend alors à son service. Christine découvre par hasard la liaison de son mari avec une de leurs amies Geneviève de Marras (Mila Parély). Par dépit elle répond aux avances du fade Saint-Aubin (Pierre Nay)…mais Octave aussi est amoureux d’elle. Une fête costumée va alors devenir le cadre d’un véritable vaudeville où maîtres et valets vont s’entrecroiser, Jurieux se battant avec Saint-Aubin, puis le marquis avec Jurieux, Schumacher courant après Marceau l’ayant surpris dans les bras de sa femme, Lisette (Paulette Dubost). Alors que tout s’apprêtait à rentrer dans l’ordre, Schumacher (Gaston Modot) se méprend en croyant Lisette dans les bras d’Octave alors qu’il s’agissait de Christine et abusé par un échange de costumes, il tue Jurieux d’un coup de carabine. Les Chesnaye après ce « déplorable accident » vont sauver la face après le salut final… Comme au théâtre tout le monde revient saluer à la fin. On passe du vaudeville à la satire. Les personnages paraissent en effet de prime abord fantasques, au début le film s’apparente à un vaudeville même s’il commence avec un ton tragique et la tentative de suicide d’André Jurieu. Le vaudeville est d’ailleurs annoncé dès l’exergue avec la citation de Beaumarchais : « Si l’amour porte des ailes, n’est-ce pas pour voltiger ».Dans ce vaudeville les couples s’échangent et les portes claquent. Renoir avait d’ailleurs songé à appeler son film Les caprices de Marianne. C’est même le burlesque qui succède au vaudeville lorsqu’Octave ne parvient pas à enlever sa peau d’ours et lorsque tout le monde passe devant lui sans prendre le temps de la lui enlever. On repasse ensuite à la tragédie : les personnages sincères, comme Octave ou Jurieu, sont écartés du jeu. Mais c’est la satire qui prédomine : les personnages deviennent alors odieux. Tous les styles de récit se mêlent sans que cela jamais ne paraisse incohérent. Le ton est annoncé dès le début par La Chesnaye : « nous jouerons la comédie, nous nous déguiserons », mais ce déguisement là n’est pas seulement vestimentaire c’est aussi celui derrière lequel se dissimule l’hypocrisie des personnages.
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    La volonté satirique de Renoir
    Renoir annonce donc ambitionner de faire « une description exacte des bourgeois de notre époque ». Le jeu annoncé par le titre est pourtant le jeu social et dans ce jeu-là Renoir n’épargne personne qu’il s’agisse des riches ou des pauvres... et les deux seuls personnages qui échappent à ce règlement de comptes se retrouveront hors du jeu, qu’il s’agisse de l’aviateur André Jurieu qui sera assassiné ou Octave, évincé, après avoir rêvé un moment de pouvoir partir avec Christine. Les femmes ne sont pas épargnées, elles y sont aussi cyniques. Tel Beaumarchais, Renoir raille les manèges mondains, La Règle du jeu étant empreinte de l’esprit du 18ème siècle, ne serait-ce que l’exergue empruntée au Mariage de Figaro. La volonté satirique est par ailleurs flagrante comme à travers cette réplique dont la censure exigea la suppression : « On est à une époque où tout le monde ment : les prospectus des pharmaciens, les gouvernements, le cinéma, la radio, les journaux…Alors pourquoi veux-tu que nous autres les simples particuliers, on ne mente pas aussi ? ». Le monde dépeint par Renoir est un spectacle dans lequel chacun a ses raisons d’endosser un rôle. C’est avant tout la violence de la société que dénonce Renoir, une société pour qui tout peut rentrer dans l’ordre après une mort comme tout rentre dans l’ordre après la mort de Jurieu, une société qui vient saluer comme si de rien n’était après ce « déplorable accident ». Les personnages ne sont pas spontanés et malgré les sentiments qu’il éprouve pour Christine, Jurieu veut avoir une conversation avec La Chesnaye : «Christine tout de même il y a des règles. » Chacun affecte le respect des convenances sociales et le respect d’autrui. Ainsi La Chesnaye fait l’éloge de la liberté : « Sur cette terre il y a quelquechose d’effroyable, c’est que chacun a ses raisons. » « D’ailleurs je suis pour que chacun les expose librement (…) contre les barrières. » Quant aux domestiques ils ne sont pas épargnés : ils réinventent une société à l’image de celle des maîtres qu’ils critiquent. Les employés singent leurs maîtres comme lors de cette scène de repas. Ils semblent libres mais sont en réalité totalement assujettis, La Chesnaye signifiant ainsi à Schumacher qu’il n’a pas le droit d’être dans le château, que ce n’est pas son domaine, qu’il doit se cantonner à l’extérieur. Le mépris des uns pour les autres est également fustigé : « Au contraire, il faut bien que ces gens-là s’amusent comme les autres. » Les différentes classes font donc preuve de la même hypocrisie et ont les mêmes défauts, les mêmes faiblesses.
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    Un chef d’œuvre-testament : le film annonciateur d’un avenir inéluctable
    Dans La règle du jeu, Renoir fait preuve d’une réelle virtuosité technique qui presque 70 ans après, reste encore un véritable modèle. Cette virtuosité n’est pas une simple démonstration ostentatoire et gratuite mais elle est au service d’un véritable propos dont l’acuité est, aujourd’hui encore, sidérante.
    La virtuosité technique de l’œuvre
    La règle du jeu est ainsi d’une force plastique saisissante. Ce qui apparaît d’abord, c’est le goût du théâtre ou plutôt de la théâtralité à travers les déguisements, les chassés croisés. Le final est d’ailleurs très théâtral et annoncé par la citation de Beaumarchais du début. Mais si les références au théâtre sont multiples La règle du jeu est loin d’être une pièce filmée. La caméra semble voguer au hasard et dissimule en réalité un brio inégalé grâce à une profondeur et une largeur de champ si signifiantes. Les dialogues semblent être improvisés, les situations semblent se chevaucher. On a l’impression de voir la rapidité et la confusion d’images réelles même si pour Bazin « toute image cinématographique est réaliste par essence. » Le travail sur le son est admirable provenant tantôt de la TSF, du phono, de la poupée mécanique, des instruments etc. La musique n’est pas non plus anodine, elle révèle la fausseté des sentiments comme ces grenouilles qui coassent à la fin du film. La virtuosité technique de l’œuvre notamment grâce à la profondeur de champ ajoute encore à la complexité de l’œuvre et à celle du propos qui, derrière le vaudeville, dissimule la gravité.
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    La virtuosité observatrice de l’œuvre : un regard clairvoyant sur une société aveugle et aveuglée
    Cette virtuosité technique n’est donc pas innocente mais au contraire utilisée au service d’un propos. Ce qui pourrait n’être qu’une comédie virevoltante est en réalité un des films qui observent et décryptent le mieux sa société et les causes de la guerre. Renoir dépeint en effet la fin d’un monde dont l’aveuglément permet l’émergence du fascisme. La tension est d’ailleurs à son comble pendant le tournage, Hitler ayant envahi la Tchécoslovaquie au mois de Mars. Le marquis, qui est d’origine juive, se fait ainsi traiter dans son dos de « métèque » par un des domestiques, ce à quoi le cuisinier réagit vivement : « A propos de juif, La Chesnaye, tout métèque qu’il est… » L’antisémitisme et le racisme y sont latents, les domestiques insistent ainsi sur le fait que « La mère de La Chesnaye avait un père qui s’appelait Rosenthal et qui arrivait tout droit de Francfort ». On y parle « des histoires de nègres » et il est question de « parasites ». Le film n’est pas prémonitoire mais révélateur de la dégradation de la société que Renoir a minutieusement observée. Les réactions que suscita le film à ce sujet furent d’ailleurs tout aussi révélatrices d’un état d’esprit comme celui de Brasillach qui estima que c’était inquiétant « d’oser montrer pour la première fois un juif sympathique », estimant que « de La Chesnaye est plus juif que jamais…Une autre odeur monte de lui du fond des âges, une autre race qui ne chasse pas, qui n’a pas de château, pour qui la Sologne n’est rien… Jamais peut-être l’étrangeté du juif n’avait été aussi fortement, aussi brutalement montrée. » C’est pourtant le film que sera fustigé et non ces propos outrageants. La scène de la chasse est par ailleurs particulièrement révélatrice du climat de l’époque. Les tireurs, hommes ou femmes, tuent avec froideur. La mort est d’ailleurs omniprésente comme lorsque les personnages sont déguisés en squelettes : la mort danse, les fantômes rodent autour d’eux. C’est le spectre de la guerre qui rôde. C’est une époque où « c’est assommant les gens sincères. » Etre sincère c’est voir la réalité, et dans la réalité le monde est à la veille de la guerre. Et même derrière les lieux communs, on perçoit la crainte de l’avenir, et la noirceur du présent. Ainsi pour Marceau : « Dans notre partie, c’est comme dans tout y a la crise. » Rien n’est laissé au hasard. Ainsi Marceau justement est le nom du plus grand général républicain de la Révolution Française. La véritable terreur pour La Chesnaye et ses invités c’est le Front Populaire. Dans La Marseillaise, La Chesnaye est d’ailleurs un défenseur ultraroyaliste… L’œuvre de Renoir devient en quelque sorte une véritable Comédie humaine où les mêmes personnages ou du moins les mêmes noms et caractéristiques se retrouvent de films en films. Quand la société se donne en spectacle les tenues ne sont pas innocentes : ils sont déguisés en tyroliens et chantent une chanson ultranationaliste, un hymne boulangiste à la gloire de l’armée française. Les idéaux d’avant sont tournés en dérision et ceux qui sont mis en avant laissent présager un avenir inquiétant. Comme la société qu’il retranscrit le film oscille constamment entre le drame et la tragédie… et cette audace à une période où on ne pouvait plus rire de tout fut certainement une des causes de l’échec commercial que connut La règle du jeu. Qu’il s’agisse d’un « drame gai » ou d’une « fantaisie dramatique », la qualification demeure antithétique à l’image de cette société de paradoxes que Renoir décrit. Si le film se présente comme une comédie frivole en dehors de l’actualité, c’est en donc réalité une comédie grinçante qui en démontre subtilement les travers. « On sait jamais, y a rien d’impossible. » dit Marceau à de La Chesnaye, oui rien semble vouloir nous dire Renoir : pas même l’horreur qui se profile aux portes de la France…, pas même l’aveuglement de la société face au danger imminent qui la menace.
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     Un échec commercial : une société qui refuse de se reconnaître
    Tout comme la réalité et le destin échappent au déserteur du Quai des brumes, il échappe au bourgeois et à l’aristocrate de La règle du jeu, pourtant la réussite du premier fut tout aussi retentissant que l’échec du second. Même après que Renoir ait réduit son film de 23 minutes, La règle du jeu suscite un rejet unanime de la part du public. On cassait même les fauteuils dans certaines salles. Il provoqua également le rejet de la critique même s’il fut moins unanime, Georges Sadoul le qualifiant ainsi « d’incohérence ». Renoir songea même à abandonner le cinéma, il se résolut finalement à l’exil. A la veille de la seconde guerre mondiale on ne peut en effet applaudir une telle fantaisie, aussi dramatique soit-elle, ou peut-être justement parce-qu’elle fut aussi dramatique. On ne supporta pas la dénonciation de l’hypocrisie sociale de ce petit monde « dansant sur un volcan. » Renoir disait en effet avoir voulu « peindre une société qui danse sur un volcan » . Est-ce là l’origine du mal qui progresse et menace l’Europe ? Renoir semble le sous-entendre. On ne pardonna pas non plus à Renoir d’avoir utilisé un juif pour manifester un semblant d’humanité. L’amitié même n’y est qu’un leurre…et « c’est la fatalité qui a voulu qu’André Jurieu soit victime de cette erreur. »« Au contraire, il faut bien que ces gens-là s’amusent comme les autres. » La caricature y est plus visible que dans les autres films de Renoir et le public ne l’admet pas tout comme ce drame gai aux portes d’un drame, un drame imminent rappelé par les danses macabres : spectres armés de lanternes précédant le squelette de la mort au son de la Danse macabre de Saint-Saens. La fête permet d’oublier que l’on est aux portes d’une catastrophe et on ne pardonnera pas à Renoir de l’avoir interrompue. Les remous suscités par la première projection furent tels que Renoir se hâta de préciser qu’il n’avait pas eu la prétention de faire une étude de mœurs ; les personnages étant « purement imaginaires. » Quand le film ressortit en copie complète dans les ciné-clubs en 1960 il fut pourtant reconnu comme un chef-d’œuvre incontesté…
    Sandra.M
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  • 1er Festival International du Film Policier de Beaune: Claude Chabrol, président

    beaune.jpgNous savions déjà que le 1er Festival International du Film Policier de Beaune (qui remplacera le Festival du Film Policier de Cognac , un Festival que je connais bien pour avoir fait partie de son jury de cinéphiles en 2002 et dont je peux donc vous recommander vivement son "remplaçant") aurait lieu du mercredi 1er au dimanche 5 Avril 2009.

    Ce festival réunira les 3 disciplines suivantes autour de la compétition, des hommages et du palmarès: cinéma, littérature, télévision.

    Le festival comprend une section long-métrage, télévision et littéraire avec l'attribution du grand prix du roman noir.

     La manifestation proposera également une compétition de courts, et une section "sang neuf".

    En plus des jurys de professionnels et de journalistes, un jury Spécial Police composé de membres de la police nationale décernera le prix Spécial Police.

    CHABROL: PRESIDENT DU JURY

    Claude Chabrol sera le président de cette première édition. Il a ainsi déclaré avec l'humour grinçant qui le caractérise:  « Je déteste être président, je déteste les jurys, mais comme je suis le roi de la contradiction, j’adore être le président du jury longs métrages du Festival International du Film Policier de Beaune »

    LE CERCLE ROUGE

    La 1ère édition du Festival International du Film Policier de Beaune marque aussi la naissance du « Cercle Rouge » qui réunit quinze personnalités du monde littéraire et cinématographique, amateurs éclairés par les lumières sombres du polar :

    François Guérif (éditeur - créateur et directeur de la collection Rivages Noir -, journaliste,

    traducteur, auteur de biographies et de livres spécialisés sur le film noir),

    Claude Chabrol (scénariste, réalisateur),

    Marie-Caroline Aubert (éditeur, écrivain),

    Tonino Benacquista (écrivain, scénariste),

    Laurent Chalumeau (écrivain, scénariste, parolier),

    Benoit Cohen (scénariste, réalisateur),

    Alain Corneau (scénariste, réalisateur),

    Antoine de Caunes (scénariste, réalisateur, comédien),

    Jean Hernandez (distributeur),

    Pierre Jolivet (scénariste, réalisateur),

    Joëlle Losfeld (éditeur),

    Olivier Marchal (scénariste, réalisateur, comédien),

    Claude Mesplède (critique et d'historien du genre policier),

    Claude Miller (scénariste, réalisateur),

    Frédéric Schoendoerffer (scénariste, réalisateur).

    "Ces parrains accompagneront le Festival au fil des éditions tout en ayant un regard bienveillant sur ses ivresses cinéphiliques."

    Leur mission sera aussi tous les ans de récompenser le meilleur roman noir français et étranger de l’année en remettant deux prix littéraires :

    · le Grand Prix du roman noir français,

    · le Grand Prix du roman noir étranger.

    Très attaché à l’histoire de la femme dans le cinéma et particulièrement dans le polar, « Le Cercle Rouge » élira également la Femme Fatale de l’année.

    INFORMATIONS PRATIQUES

    Vous trouverez toutes les informations pratiques sur le site officiel du Festival International du Film Policier de Beaune.

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