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film - Page 11

  • Prix de la meilleure création sonore du Festival de Cannes 2022 : CORSAGE de Marie Kreutzer

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    Dans le cadre de ce 75ème Festival de Cannes, ce 27 Mai à 11h, Corsage de Marie Kreutzer a reçu le prix de la meilleure création sonore. Ce prix est décerné parmi les films de la sélection Un Certain Regard. En 2017, en accord avec le Festival de Cannes, l’association La Semaine du Son a ainsi créé le Prix de la meilleure création sonore. L’association La Semaine du Son, fondé en 1998 par son président Christian Hugonnet, acousticien et expert près de la Cour d’appel de Paris, a « pour but d’amener chaque être humain à prendre conscience que le sonore est un élément d’équilibre personnel fondamental dans sa relation aux autres et au monde. »  Lancé avec le soutien de Costa-Gavras, ce prix récompense un réalisateur pour l’excellence sonore de son film « parce qu’elle sublime la perception artistique, sémantique et narrative du spectateur ». Le jury 2022 était présidé par le cinéaste Christophe Barratier, entouré de la comédienne Anne Parillaud, du compositeur Greco Casadesus, ainsi que de la cheffe opératrice Marie Massiani, et de Janine Langlois-Glandier et Christian Hugonnet, fondateurs du prix.

    Le jury, par la voix de son président, a ainsi explicité son prix décerné au film de Marie Kreutzer, attribué à l’unanimité : « En considération des vertus narratives, esthétiques, sémantiques de la dimension sonore d’une œuvre cinématographique, le jury de la Meilleure Création Sonore 2022, dans le cadre de la sélection Un Certain Regard, décerne son prix au film Corsage de Mary Kreutzer, distinguant ainsi une approche sonore d’un rare équilibre, restituant qualités des timbres de voix, atmosphères d’époques, degré des respirations et silences tout autant que les compositions musicales ».

    Noël 1877, Élisabeth d’Autriche (Sissi), fête son 40e anniversaire. Première dame d’Autriche, femme de l’Empereur François-Joseph Ier, elle n’a pas le droit de s’exprimer et doit rester à jamais la belle et jeune impératrice. Pour satisfaire ces attentes, elle se plie à un régime rigoureux de jeûne, d’exercices, de coiffure et de mesure quotidienne de sa taille. Etouffée par ces conventions, avide de savoir et de vie, Élisabeth se rebelle de plus en plus contre cette image.

    Corsage se focalise ainsi sur six mois de la vie d’Élisabeth d’Autriche, du Noël 1887, où on célèbre son 40ème anniversaire, dont elle semble absente déjà, à l’été suivant. 

    Cela commence d’emblée par un son, avant l’image. Celui du clapotis de l’eau. Sous le regard de deux dames de compagnie, Elisabeth apparaît alors, sous l’eau, dans sa baignoire, en apnée, s’entraînant à ne pas respirer. En apnée, elle le sera tout au long du film qui est avant tout cela : une quête de respiration dans un univers corseté. Oubliez les Sissi avec Romy Schneider, aussi charmants soient-ils, avec les décors kitschs et scénarii acidulés. Si dans les films de Ernst Marischka, Romy Schneider incarnait une Sissi douce et espiègle, 67 ans plus tard, Vicky Krieps interprète une Sissi tourmentée, révoltée, incandescente, obstinée qui veut à tout prix échapper à l’enfermement qu’elle subit et qui se rebelle contre le protocole. Quant aux décors, leurs murs sont souvent nus, délabrés, craquelés comme si ces intérieurs reflétaient l’intériorité des êtres. Les couleurs, souvent froides (magnifique photographie de Judith Kaufmann), reflètent aussi ces âmes glacées par les contraintes extérieures.

     « Ton rôle consiste à représenter. C’est pour cela que je t’ai choisie. C’est pour cela que tu es là » lui dit ainsi son empereur d’époux. « L’important est de laisser une belle image » dit également Elisabeth en passant devant un portrait de sa fille aînée décédée d’une maladie infantile.  « Je t’interdis de te noyer dans mon lac » lui déclare quant à lui son cousin. Voilà, tout est dit. Elisabeth doit constamment faire semblant, être en représentation, n’être qu’un corps qui laisse une belle image, tandis que les tourments de l’âme doivent être tus et étouffés.

    De nombreuses scènes la montrent se faisant habiller, le corset toujours plus serré, entravant sa respiration. On lui rappelle sans cesse son âge, et qu’elle n’est plus celle qu’elle était, dont la beauté fascinait tant. Elle impose des souffrances à ce corps qu’il faut maitriser, notamment par des régimes drastiques, ou par cette pesante coiffure. Elle aime particulièrement aller voir les fous dans les asiles, ceux qui sont enfermés, qui crient leur douleur qu’on veut claquemurer, ceux en lesquels elle se reconnaît. La folie semble aussi être là, toute proche, comme une forme paradoxale d’échappatoire. Alors, elle tape du point sur la table, fume, fait un doigt d’honneur, tire la langue, se coupe les cheveux, essaie à tout prix, même celui de la raison, de s’émanciper jusqu'à ce plan final, parfait contrepoint du début. Elle a besoin qu’on cesse de la regarder comme une image mais qu’on la voit telle qu’elle est. « J’aime te regarder me regarder» dit-elle ainsi.

    En contraste, les scènes où elle se sent enfin libre n’en sont que plus belles et poignantes. Lorsqu’elle s'évade sur son cheval au galop. Lorsqu’elle se baigne dans un lac au cœur de la nuit noire. Le corps échappe alors aux contraintes et aux regards.  La musique et la voix de Camille accompagnent ces moments d’évasion et insufflent une puissance émotionnelle supplémentaire à ces scènes. Ces envolées lyriques sonores font alors écho à celles de l’impératrice. Elles ressemblent tantôt à un cri de douleur, tantôt à un cri de liberté et marquent profondément le film de leur empreinte.

    Elisabeth a besoin de sortir du carcan dans lequel on veut la cadenasser, comme de réveiller sa fille en pleine nuit pour faire du cheval, pour agir et décider de ses mouvements. C’est d’ailleurs pour cela que l’image animée la réjouit autant et qu’elle accepte d’être filmée par un inventeur incarné par Finnegan Oldfield. Dans ces séquences muettes, elle est libre de crier, bouger, d’être. Le cinéma : espace de liberté, comme l’est ce film qui se départit des convenances.

    Vicky Krieps, productrice exécutive, est exceptionnelle et on comprend qu’elle ait à tout prix voulu être cette Sissi frondeuse. Elle est à la fois sombre et excentrique, enfermée et avide de liberté.  Elle a obtenu le prix de la meilleure performance de la sélection Un Certain Regard, pour un rôle très différent de celui qu'elle incarne dans Plus que jamais de Emily Atef qu’elle présentait également à Cannes cette année.

    Corsage n’est donc pas véritablement un biopic mais une réflexion et métaphore astucieuse des règles auxquelles doivent se plier les femmes, d’où l’intemporalité de ce film qui justifie les judicieux anachronismes. C’est le portrait d’une révoltée.  La forme épouse ainsi brillamment le fond. Marie Kreutzer (également scénariste de son film), elle aussi s’échappe : des contraintes formelles et des règles, et même de la vérité. Elle apporte de la modernité dans cette œuvre à l’image de l’impératrice qu’elle dépeint : irrévérencieuse.

    Il y eut le Marie-Antoinette de Sofia Coppola qui se jouait aussi des codes et des conventions, sans s'émanciper du glamour, indissociable du film d'époque en costumes, alors que Marie Kreutzer envoie tout valser pour aboutir à cette brillante allégorie de notre époque dans laquelle les apparences enserrent et emprisonnent  les femmes dans un corset plus insidieux que celui d’Elisabeth mais parfois non moins destructeur. Une œuvre  à l’image de sa création sonore, innovante, à juste titre récompensée, et de sa musique : intense, vibrante, marquante, engagée, puissante.

  • Festival de Cannes 2022 - Compétition officielle - Critique de CLOSE de Lukas Dhont

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    Close aura sans nul doute sa place au palmarès. Il s’agit là du second long-métrage de Lukas Dhont, après Girl qui fut couronné de nombreux prix dont la Caméra d’or du Festival de Cannes 2018 mais aussi le prix d'interprétation Un Certain Regard pour son jeune interprète, Victor Polster.

    Léo, le blond, (Eden Dambrine) et Rémi, le brun, (Gustav de Waele), 13 ans, sont amis depuis toujours. Jusqu'à ce qu'un événement impensable les sépare. 

    Cela commence par des jeux d’enfants, jouer à être des chevaliers, à être quelqu’un d’autre. De ce duo rempli de charme émane un mélange de fougue et de naïveté. Cette enfance dont ils ont encore les jeux, ils sont sur le point de la quitter. Ce quelqu’un d’autre qu’ils jouent à être, ils le sont un peu aussi, à cet âge où les repères se brouillent, où les sentiments deviennent confus, où la société, les autres, exigent de se/vous ranger dans des cases. Ce n’est pas encore la rentrée des classes. C’est la fin de l’été avec les derniers sursauts de ses couleurs éclatantes, les plus beaux, un peu nostalgiques déjà.

     L’insouciance et la joie de vivre règnent dans la vie des deux jeunes garçons. Une amitié forte, fraternelle, fusionnelle, tendre et apparemment indéfectible, les lie. Leur amitié a pour cadre la campagne belge, les champs de fleurs des parents de Léo, un décor joyeux et coloré à perte de vue dans lequel ils courent à perdre haleine, et deux familles aimantes qui les accueillent comme s’ils étaient frères. Ils dorment l’un chez l’autre, l’un avec l’autre. La nuit, Léo invente des histoires extraordinaires et les raconte à Rémi, blotti contre lui. Léo dessine Rémi aussi. La beauté innocente et flagrante de leur amitié ensoleille tout le début du film.

    Leurs parents s’occupent d’eux et les reçoivent comme s’ils étaient frères.  Et lorsque la maman de Rémi, Sophie, est, couchée dans l’herbe, posée sur le ventre de son fils, Léo contre eux, leur complicité est rayonnante et harmonieuse comme la campagne qui les environne. C’est le règne de la joie et de l’innocence.

    Et puis arrive la rentrée des classes. Avec le regard des autres, inquisiteur, malveillant, insistant, étouffant. Cette cruelle intransigeance adolescente qui ravage les âmes sensibles. Une question « Vous êtes ensemble ? ». Et c’est tout leur univers qui s’écroule. La note dissonante. La fin de l’harmonie. Les regards qui pèsent sur eux mettent Léo mal à l’aise, le poussent à se questionner sur ce qui était naturel auparavant, et à s’éloigner de Rémi. Il commence à se détacher de son ami, à jouer au football avec ses camarades de classe, à s’inscrire dans un club de hockey sur glace, à s’investir ainsi dans des activités qui sont des symboles supposés de virilité. Rémi souffre de cet éloignement. Le cœur est brisé, le sien et celui du spectateur d’assister, impuissant, à sa détresse insondable. Le dialogue a laissé place aux non-dits, à l’agressivité. Jusqu’au point de non-retour.

    Léo comprendra alors trop tard, sera envahi par la culpabilité, devra quitter les derniers habits de l’enfance, et plonger subitement dans l’âge adulte. Le père de Rémi s’effondre à table. Les mères se murent dans la dignité et dans le silence. Sublimes Léa Drucker et Émilie Dequenne, dont le talent éclate encore plus face à la candeur et la vérité du jeu des deux magnifiques acteurs en devenir que sont Eden Dambrine et Gustav de Waele. Deux révélations dont on entendra forcément parler à nouveau tant ils crèvent l’écran…et nos cœurs.

    Avec quelle délicatesse, Lukas Dhont filme (chorégraphie même) l’affection des deux garçons, leur proximité, leur joie, leurs jeux, leurs corps et leurs mouvements, comme une danse joyeuse et échevelée, avec une vitalité truffaldienne !

    Le travail sur la photographie et les couleurs est aussi remarquable, comme dans Girl qui était auréolé de cette douce et délicate lumière. L’équipe technique et artistique du film est ainsi la même que celle de Girl, notamment le directeur de la photographie Frank van den Eeden. Les couleurs changeantes au gré des saisons font écho aux émotions versatiles des deux garçons. Le changement de saison et les nuances de l’automne créent ainsi une rupture avec les teintes solaires de l’été. Une rupture aussi dans l’époque de la vie de Rémi et Léo. Puis, c’est l’hiver. Jusqu’à ce que les couleurs et les fleurs reviennent, et avec elles, un espoir et la vie…

    Le scénario coécrit par Lukas Dhont avec Angelo Tijssens est d’une justesse, d’une subtilité et d’une sensibilité rares, ne tombant jamais dans le pathos, jamais dans l’explication, jamais dans les clichés.  Mais nous serrant le cœur. Il dissèque la violence parfois tueuse du regard des autres, et la douleur ineffable de la perte (d’un être, de l’innocence), et ce poids constant que doit affronter Léo. Selon Sénèque, "Les peines légères s'expriment aisément; les grandes douleurs sont muettes." Celle de la mère de Rémi est tout en retenue. Sage-femme de métier. On imagine la force et la douleur de cette femme exacerbée par la confrontation permanente avec des nouveau-nés.

    Les violons de la BO de Valentin Hadjadj auraient pu être redondants. Il n’en est rien. Ils accompagnent et contrebalancent la retenue des personnages.

    Le titre est aussi parfaitement choisi. Il évoque la proximité amicale mais aussi corporelle des deux amis, mais aussi celle de la caméra qui semble les enlacer et embrasser leurs émotions. Et aussi ensuite les enfermer dans la douleur. Du rejet pour Rémi. Et de la culpabilité pour Léo. Comme cette grille du casque de hockey qui enferme son visage. Il porte un masque au sens propre comme au sens figuré. Comme encore dans cette scène, terrible, lors de laquelle la mère de Léo vient le chercher dans le bus, qui fait écho à cette autre scène tout en tension, de Léo avec la mère de Rémi. Dans les deux cas, les mots sont impossibles à trouver, et tout est dit dans le jeu des acteurs, dans les silences gênés, dans la maladresse des gestes.

    Malgré la tragédie évoquée, le film de Lukas Dhont, d’une maitrise (de jeu, d’écriture, de mise en scène) rare, est empreint de poésie qui ne nuit pas au sentiment de véracité et  de sincérité. Et puis il y a ce regard final qui ne nous lâche pas comme l’émotion poignante, la douce fragilité et la tendresse qui parcourent et illuminent ce film. Un regard final qui résonne comme un écho à un autre visage, disparu, dont le souvenir inonde tout le film de sa grâce innocente.

    Un des grands films de cette édition cannoise, étourdissant de sensibilité, bouleversant, à voir absolument !

  • Festival de Cannes 2022 - Cannes Première - Critique de AS BESTAS de Rodrigo Sorogoyen

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    Madre (le dernier film de Sorogoyen, sorti en 2019) débutait ainsi…Le téléphone sonne. Le fils d’Elena, 6 ans, paniqué, perdu, seul sur une plage des Landes, appelle sa mère à des kilomètres de là et dit ne plus trouver son père. C’est par ce plan-séquence brillantissime, haletant, qui nous met dans la peau d’Elena, saisie par cette angoisse absolue, que commence en effet ce film captivant, suffocant, déroutant, comme il le sera jusqu’à la dernière seconde. Constamment, il brouille les pistes, les genres même, comme le deuil lui-même abolit toute notion de réalité, aux frontières de la morale et de la folie : savant écho entre le fond et la forme dans ce thriller sur la confusion des sentiments autant que sur l’absence inacceptable. Ajoutez à cela un sens rare du cadre et du hors champ, une interprétation magistrale et vous obtiendrez un film d’une singularité rare, et palpitant.

    Si je vous parle de ce précédent film, c’est parce que As bestas ne manque pas de points communs avec celui-ci, à commencer par une maîtrise magistrale de chaque plan. Mais aussi sa scène d’introduction d’une puissance rare.  Elle montre des « aloitadores » qui luttent, et parviennent finalement à immobiliser un cheval. Une chorégraphie à la fois fascinante et violente. Un affrontement jusqu’à la capitulation finale d’un des deux « duellistes ». Une métaphore qui nous laisse deviner que la bataille qui s’annonce sera rude et impitoyable. Une allégorie qui place d’emblée le film sous le sceau de la tension et de l’étouffement…qui ne se relâchera qu’à la fin.

    Antoine (Denis Ménochet) et Olga (Marina Foïs), un couple de Français, sont installés depuis longtemps dans un petit village de Galice. Ils possèdent une ferme et restaurent des maisons abandonnées pour faciliter le repeuplement. Tout devrait être idyllique mais un grave conflit avec leurs voisins lié à leur opposition à un projet d’éoliennes fait monter la tension jusqu’à l’irréparable…  

    Ce serait réducteur de qualifier ce film uniquement de thriller, aussi palpitant soit-il. Drame personnel, social, il est à la frontière des genres, reprend et détourne même les codes du western. Sorogoyen a le don d’instiller de la tension dans des scènes a priori anodines (comme ces scènes de saloon dans les westerns dans lesquelles la tension est palpable, l’apparente tranquillité n’étant qu’un leurre et pouvant dégénérer en duel meurtrier), avec notamment deux plans-séquences magistraux. Les frères Anta rappellent bien des personnages de westerns aux visages patibulaires, nés sur leurs terres, ancrés dans leurs certitudes et leurs haines tenaces.

    Dans ce film en deux parties (comme Madre, là encore) la suffocation est progressive, jusqu’à l’étouffement. Ce film est d’ailleurs dichotomique à bien des égards. Il met ainsi face à face les citadins idéalistes face aux campagnards aux rudes conditions de vie dont le seul rêve est de partir vivre en ville, sans que cela soit pour autant manichéen. Deux mondes qui ne se comprennent pas, en partie en raison des préjugés des derniers. La rancœur devient bientôt irrationnelle. C’est celle d’un monde où l’on ne s’entend plus, où l’on ne cherche plus à se comprendre. Les deux frères sont en colère contre le reste du monde. Contre ces étrangers qui, pour eux, l’incarnent. La rancœur devient alors une haine sans limites, sans lois, sans morale et finalement sans raison.

    Le village en déclin et la campagne de Galice, sauvage, grisâtre et monotone, constituent un personnage à part entière, à la fois fascinant et inquiétant, hostile et admirable.  Ajoutez à cela un scénario impeccable ( de Isabel Peña et Rodrigo Sorogoyen), une interprétation de Marina Foïs et Denis Ménochet d’une justesse qui ne flanche jamais, et qui contribue beaucoup au parfait équilibre de l'ensemble, et vous obtiendrez un film âpre mais remarquable. A voir absolument au cinéma, dès ce 20 juillet.

  • Festival de Cannes 2022 – Sélection officielle hors compétition – Critique de ELVIS de Baz Luhrmann

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    Chaque année, au fur et à mesure que les jours avancent et que la clôture du Festival de Cannes se rapproche, la barrière entre la fiction et la réalité s’amenuise, transformant chaque journée et chaque seconde en une troublante, délicieuse, enivrante et perturbante confusion… Pour la 66ème édition du festival, cela avait débuté dès l’ouverture avec la projection d’un autre film de Baz Luhrmann, Gatsby le magnifique, adaptation de l’intemporel roman de Francis Scott Fitzgerald,  miroir de Cannes, de la mélancolie et de la solitude derrière le faste, la fête, les éblouissements. Un tourbillon mélancolique et festif. Et pour la deuxième fois seulement dans l’histoire du Festival un film était projeté en 3F, après « Up » (« Là-Haut ») de Pete Docter, en 2009. Un film, comme celui de Clayton, empreint de la fugace beauté de l’éphémère et de la nostalgie désenchantée que représente le fascinant et romanesque Gatsby auxquelles Baz Luhrmann ajoutait une mélancolique flamboyance, sans dénaturer l’essence du roman, en choisissant justement de modérer ses envolées musicales. Un hommage magnifique à ce roman bouleversant sur l’amour absolu, la solitude et les illusions perdues derrière le faste et la multitude. Une sublime mise en abyme pour une ouverture et un film d’ouverture mêlant flamboyance, grand spectacle, mélancolie… à l’image de Cannes.

    Nous pourrions en dire de même d’Elvis (Austin Butler), qui raconte la vie et l'œuvre musicale du King à travers le prisme de ses rapports complexes avec son mystérieux manager, le colonel Tom Parker (Tom Hanks). Le film explore leurs relations sur une vingtaine d'années, de l'ascension du chanteur à son statut de star inégalé, sur fond de bouleversements culturels et de la découverte par l'Amérique de la fin de l'innocence.

    Elvis Presley et Baz Luhrmann. L’extravagance et la flamboyance (à nouveau) de l’un sont en parfaite adéquation avec celles de l’autre.  Tout comme c’était le cas avec Gatsby qui, comme Elvis, dissimulait une profonde mélancolie derrière l’exubérance de son mode de vie. Le grand spectacle est à nouveau au rendez-vous dans ce biopic passionnant de la première à la dernière seconde.

    Austin Butler incarne à la perfection un Elvis charismatique et blessé de ses débuts dans le Tennessee à sa mort. Il est sans nul doute une des révélations de ce festival.

    Ce biopic n’est pas seulement le portrait d’un homme mais aussi celui d’une époque, celle de l’Amérique puritaine, ségrégationniste, inique et à travers son destin ce sont trente années de l’histoire des mœurs américaines qui sont aussi retracées.

    Le montage est particulièrement rythmé, nerveux et brillant. Les costumes et les décors sont également remarquables dans ce qui n’est pas une reconstitution minutieuse mais un véritable point de vue sur l’artiste qui demeure l’artiste à avoir vendu le plus de disques dans le monde. Baz Luhrmann mêle en effet des images d’archives, des scènes de concerts reconstituées, utilise beaucoup le split screen…et les références à la bande dessinée qu’aimait tant Elvis. Le destin d’Elvis est vu à travers les yeux du Colonel Parker qui le manipula toute sa vie…et manipule sans doute un peu notre regard, le faisant tomber dans un véritable piège (comme un écho à l’une de ses chansons) qui « l’enferma » pendant des années à Las Vegas.

    Ce premier biopic réalisé par Baz Luhrmann est un voyage étourdissant, captivant, spectaculaire, frénétique, débordant d’énergie, enfièvre de musique comme l’était celui dont il relate la tragique et passionnante destinée mais aussi teinté de mélancolie. Je vous en parlerai plus longuement ultérieurement. En attendant, je vous recommande d’ores et déjà vivement ce film dont vous ressortiez avec une image plus précise et nuancée d’Elvis et en fredonnant ses musiques entêtantes. Il sera en salles le 22 juin.

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  • Festival de Cannes 2022 - Compétition officielle - Critique de TORI ET LOKITA de LUC DARDENNE et JEAN-PIERRE DARDENNE

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    « Notre plus cher désir est qu’à la fin du film le spectateur et la spectatrice qui auront ressenti une profonde empathie pour ces deux jeunes exilés et leur indéfectible amitié, éprouvent aussi un sentiment de révolte contre l’injustice qui règne dans nos sociétés » ont ainsi déclaré Luc et Jean-Pierre Dardenne à propos de ce film. L’empathie ressentie par le spectateur pour leurs personnages est en effet un des points communs de leurs films, dont nombreux sont ceux qui furent projetés et récompensés à Cannes : Grand prix ex-aequo pour Le gamin au vélo en 2011, Prix du scénario pour Le silence de Lorna en 2008, palme d’or pour L’enfant en 2005, palme d’or remise à l’unanimité pour Rosetta en 1999.

    Ce nouveau film nous emmène en Belgique à la rencontre de Tori (Pablo Schils) et Lokita (Mbundu Joely), un jeune garçon et une adolescente venus seuls d’Afrique qui opposent leur invincible amitié aux difficiles conditions de leur exil.

    Les deux jeunes adolescents interprètent ici leurs premiers rôles au cinéma. Les frères Dardenne avaient déjà fait appel à des acteurs non professionnels pour Le Gamin au vélo et pour Le jeune Ahmed. Jérémie Rénier était débutant quand il joua dans La Promesse et Emilie Dequenne également dans Rosetta.

    Et à combien d’autres acteurs ont-ils permis de donner le meilleur d’eux-mêmes comme Marion Cotillard qui, dans Deux jours, une nuit, crève littéralement l'écran dans ce sublime portrait de femme fragile et téméraire ? Physiquement transformée mais aussi admirablement dirigée, elle est pour beaucoup dans l'empreinte que nous laisse ce film grave et lumineux, ancré dans notre époque et intemporel.

    Dans chacun de leurs films, les Dardenne obtiennent le meilleur de leurs acteurs et celui-ci ne déroge pas à la règle. Encore une fois, ils s’imposent comme des directeurs d’acteurs exceptionnels et, forts de leur expérience du documentaire, recréent une réalité si forte et crédible avec des êtres blessés par la vie dont les souffrances se heurtent, se rencontrent, s’aimantent.

    Leur cinéma est réaliste, humaniste, social sans être revendicatif mais au contraire nous plongeant dans l’intimité des personnages.  A propos du Silence de Lorna (dans lequel il était déjà question d'exil), je vous disais qu’il est plus parlant que n’importe quel discours politique. Il en va de même pour ce nouveau long-métrage.  Il dépeint magnifiquement une douloureuse histoire fraternelle entre des êtres que le destin va bousculer.

    Au cœur d’une tragique actualité, ce film âpre des Dardenne ne peut laisser insensible grâce à l’acuité de leur regard, leur « empathie », mais aussi l’interprétation bouleversante de leurs deux jeunes comédiens confrontés aux impitoyables réseaux des passeurs, mettant des visages (bouleversants) sur une réalité que l’on réduit bien trop souvent à des chiffres. Ce film se suit comme un thriller mais c’est avant tout un plaidoyer vibrant contre l’injustice et pour ces enfants livrés à eux-mêmes et confrontés à d’effroyables obstacles. A ceux-ci s’oppose la force saisissante de l’amitié des deux jeunes adolescents.  Un lien dont on ne connaîtra jamais vraiment l’origine. Ce film oscille constamment entre la violence et la tendresse qui les lie.

    Après deux Palmes d’or (pour Rosetta et pour L’Enfant), les Dardenne pourraient décrocher une troisième la récompense suprême avec ce film, une nouvelle fois, au cœur de la réalité sociale. Un film poignant et sobre qui évite toujours l'écueil du pathos, d'autant plus émouvant qu'il est filmé à hauteur d'enfants plongés trop tôt dans ce que le monde a de plus rude. Les Dardenne restent les meilleurs cinéastes de l’instant, à la fois de l’intime et de l’universel dans lequel tout peut basculer en une précieuse et douloureuse seconde : un thriller intime.

  • Festival de Cannes 2022 – Cannes Première – Critique de DON JUAN de Serge Bozon

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    Comme ce film a été injustement méprisé par une partie de la critique suite à sa projection hier dans le cadre de Cannes Première, avant de vous en parler plus longuement, je voulais vous convaincre dès à présent de découvrir ce sixième long métrage de Serge Bozon, qui sort en salles ce 23 mai.

    En 2022, Don Juan renommé Laurent (Tahar Rahim) n’est plus l’homme qui séduit toutes les femmes, mais un homme obsédé par une seule femme, Julie (Virginie Efira) : celle qui l’a abandonné…

    Un homme se prépare face à un miroir. Ses gestes orchestrent la musique. Don Juan aime mener la danse, semble-t-on nous dire. Puis Don Juan entre en scène, en l’occurrence dans la salle de la mairie où il doit se marier. Sa future femme n’est pas encore arrivée, tarde à venir. Et il l’attend, l’attend, l’attend…Pour soulager cette interminable attente, il invite les invités à écouter un air de musique qu’elle aime pour « la connaître un peu par la musique. » Il continuera à attendre. En vain. Sa future femme ne viendra pas. Il regarde par la fenêtre. Son regarde s’attarde sur une femme qui passe sous celle-ci. Pendant ce temps, Julie entre dans un café et au « Qu’est-ce que je vous sers ? » par lequel on l’interroge, elle répond « Servez-moi de la musique. »

    Tout est là, dans ces premières minutes, le ton décalé, poétique, romantique, mélancolique. Serge Bozon dit avoir voulu abandonner le registre des films de genre pour signer un film d’amour et il y est parvenu. Laurent/Don Juan ne verra alors plus que Julie dans toutes les femmes qu’il rencontrera (incroyable Virginie Efira qui incarne avec brio toutes ces femmes différentes, ce fut probablement aussi jubilatoire à l'actrice de les incarner toutes que cela l'est pour le spectateur à regarder toutes ces incarnations). Ce Don Juan est obsédé par une seule femme. Il croit la reconnaître dans toutes les femmes qu’il aborde, et qui d’ailleurs le rejettent (ce rejet atteint son paroxysme lors d’une fête de mariage à l’occasion d’une danse nocturne presque macabre, fascinante). Plus défait que victorieux, plus sincère que cynique, ce Don Juan contemporain arrive après l’ère #Metoo. C’est donc une version féministe que nous propose ici Serge Bozon, avec ce scénario coécrit avec Axelle Roppert. C’est par la chanson que Don Juan exprime sa douleur par la voix mélodieuse de Tahar Rahim.

    Un troisième protagoniste va jouer un rôle essentiel, sous les traits d’Alain Chamfort dans le rôle du Commandeur, altier et inquiétant, éprouvé par un chagrin incommensurable, la perte de sa fille.

    Avec cette revisite du mythe de Don Juan, sous forme de comédie musicale féministe, Serge Bozon nous livre un film particulièrement élégant, une relecture de Molière moderne et sensible qui inverse la situation : c’est elle qui l’a abandonné, lui qui ne peut pas l’oublier. L’autre bonne idée est que Tahar Rahim interprète ici un comédien qui joue le rôle de Don Juan permettant d’initier un jeu de miroirs entre le rôle que son personnage joue sur scène et celui qu'il incarne dans la vie. La mise en abyme apporte à la fois recul et profondeur à ce film qui mêle brillamment les genres : un film harmonieusement mélancolique qui nous emporte dans sa danse, envoûtante et douloureuse.

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  • Festival de Cannes 2022 - Quinzaine des Réalisateurs - Critique de FALCON LAKE de Charlotte Le Bon

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    Une histoire d'amour et de fantômes. Ainsi le pitch officiel présente-t-il ce premier long-métrage de Charlotte Le Bon projeté à la Quinzaine des Réalisateurs 2022. Pour son premier long-métrage, Charlotte Le Bon a choisi de porter à l’écran le roman graphique de Bastien Vivès, Une sœur. Cette adaptation très libre le transpose de la Bretagne à un lac des Laurentides, situé au Québec, au Nord-Ouest de Montréal.

    C’est là, pendant l’été, qu’un jeune Français, Bastien (Joseph Engel), ses parents et son petit frère viennent passer quelques jours, dans un chalet situé au bord d’un lac où sa mère québécoise (Mona Chokri) venait déjà avec son amie d’enfance. Il est décidé que Bastien dormira dans la même chambre que Chloé (Sara Montpetit), de trois ans son ainée. Une adolescente frondeuse, étrange et un peu fantasque. Chloé, qui passe d’habitude son temps avec des garçons plus âgés qu’elle, est d’abord contrariée par l’arrivée de celui qu’elle considère comme un enfant. Bastien qui a 13 ans « bientôt 14 » n’en est pourtant plus tout à fait un. Il éprouve immédiatement de la fascination pour Chloé. Cette dernière en joue. Mais n’est-ce véritablement qu’un jeu entre celui qui se cherche et celle qui pense n’avoir sa place nulle part ? Les deux adolescents se rapprochent peu à peu…

    Cela commence comme un conte funèbre. Un plan sur un lac sur lequel on distingue ensuite comme un corps mort qui flotte à la surface.  Puis le corps prend vie. Ensuite, une voiture s’engouffre dans une forêt dense et mystérieuse, à la fois admirable et presque menaçante. Dans la voiture qui s’enfonce dans cette forêt, Bastien touche son petit frère qui ne s’en rend pas compte, comme s’il était une présence fantomatique. La famille entre ensuite dans un chalet plongé dans l’obscurité. Toute la puissance énigmatique et ensorcelante du film est déjà là, dans ces premiers plans.

    En effet, dès le début, dans ce chalet isolé au milieu de cette nature aussi captivante qu’inquiétante, une indicible menace plane. Ce mélange de lumière et d’obscurité, de candeur et de gravité, instaure d’emblée une atmosphère singulière. Cet été flamboyant contraste avec la rudesse de l’hiver à venir, et rend chaque minute plus urgente, faussement légère et presque brusque. Comme une allégorie de l’adolescence…

    Baignade dans la nuit, ombres sur les murs...: Charlotte Le Bon s’amuse avec les codes du film de genre. Quand Chloé apparaît la première fois, c’est de dos, comme un fantôme. Ces fantômes dont l’adolescente ne cesse de parler. La mort est là qui rode constamment. Bastien raconte qu’il a peur de l’eau, ayant failli se noyer petit. Chloé s’amuse à disparaître dans l’eau. Elle joue à la morte et dit « j’ai pas l’air assez morte ». Elle s’approche de Bastien pour lui faire peur, déguisée en fantôme. Ils jouent à se mordre jusqu’au sang. Bastien trouve un animal mort. Il s’adonne à une danse endiablée avec un masque fantomatique sur le visage etc.

    Tout cela ressemble-t-il encore à des jeux d’enfant ? Pour aller à une soirée, Chloé habille Bastien comme elle le ferait avec une poupée ou un enfant et pour désamorcer une éventuelle ambiguïté lui dit que « Les petites filles vont devenir folles ». Chloé et Bastien aiment jouer à se faire peur, à se draper d’un voile blanc pour jouer aux fantômes, à feindre la mort. Chloé photographie ainsi Bastien recouvert d’un voile blanc près d’un arbre mort. Et Chloé est surtout obsédée par la présence d’un fantôme suite à une mort accidentelle dans la partie sauvage du lac, une mort dont elle semble la seule à avoir entendu parler.

    Ce récit initiatique est envoûtant du premier au dernier plan. Chloé et Bastien sont à une période charnière où tout est urgent, où les émotions sont à fleur de peau. D’un instant à l’autre, dans ce décor de fable, tout semble pouvoir basculer dans le drame.

    La réalisation particulièrement inspirée de Charlotte Le Bon, entre plans de natures mortes et images entre ombre et lumière (sublime photographie de Kristof Brandl), avec son judicieux mode de filmage (pellicule 16mm), plonge le film dans une sorte de halo de rêve nostalgique, comme un souvenir entêtant. Le format carré en 4/3 semble être un hommage au film A ghost story. Dans ce long-métrage de David Lowery qui fut également projeté il y a quelques années dans le cadre du Festival du Cinéma Américain de Deauville, un homme décède et son esprit, recouvert d'un drap blanc, revient hanter le pavillon de banlieue de son épouse éplorée, afin de tenter de la consoler. Mais il se rend vite compte qu’il n’a plus aucune emprise sur le monde qui l’entoure, qu’il ne peut être désormais que le témoin passif du temps qui passe, comme passe la vie de celle qu’il a tant aimée. Fantôme errant confronté aux questions profondes et ineffables du sens de la vie, il entreprend alors un voyage cosmique à travers la mémoire et à travers l’histoire. Dans ce conte poétique et philosophique sur le deuil, l’absence, l’éphémère et l’éternel, l’impression d’étirement du temps est renforcée par le format 4/3, un film inclassable qui remuera les entrailles de quiconque aura été hanté par un deuil et la violence indicible de l’absence. Cette référence n’est certainement pas un hasard tant le scénario de Charlotte Le Bon et François Choquet est d’une précision remarquable. D'une précision (et d'une justesse) remarquable, les deux jeunes comédiens qui insufflent tant de véracité à cette histoire aux frontières du fantastique le sont aussi.

    Le travail sur le son est également admirable, qu’il s’agisse des sons de la nature mais aussi des sons du monde des adultes comme un bruit de fond étouffé, lointain, appartenant à une autre réalité ou tout simplement même à la réalité. La musique de Shida Shahabi à l’aura fantastique et mélancolique, est aussi un acteur à part entière. Elle vient apporter du mystère et de l’angoisse dans des moments plus légers. Elle ne force jamais l’émotion mais la suscite et nous intrigue comme lorsque quelques notes plus tristes viennent se poser sur des moments joyeux pour nous signifier qu’ils appartiennent peut-être déjà au passé.

    « Certains fantômes ne réalisent pas qu'ils sont morts. Souvent c'est des gens qui n'étaient pas près de mourir, ils vivent avec nous sans pouvoir communiquer avec personne » dit ainsi Bastien à un moment du film. Une phrase qui résonnera d’autant plus fort après cette fin, ce plan de Chloé face au lac, avec sa mèche blonde, qui se tourne à demi quand Bastien l’appelle. Une fin entêtante, magnifique, énigmatique qui fait confiance au spectateur et au pouvoir de l’imaginaire. Une fin comme ce film, magnétique, dont le fantôme ne cessera ensuite de nous accompagner…Une histoire d’amour et de fantômes, certes, mais surtout une exceptionnelle et sublime histoire d’amour et de fantômes  qui vous hantera délicieusement très longtemps.