Vidéo - Clôture et palmarès du Festival du Film Asiatique de Deauville 2013
Pour vous faire patienter, en attendant mon bilan du Festival du Film Asiatique de Deauville 2013, retrouvez, ci-dessous, ma vidéo de la clôture:
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Pour vous faire patienter, en attendant mon bilan du Festival du Film Asiatique de Deauville 2013, retrouvez, ci-dessous, ma vidéo de la clôture:
Ce lundi 11 mars 2013
Dans le prestigieux cadre du Park Hyatt Paris-Vendôme, ont été décernés
Les Prix Romy Schneider & Patrick Dewaere 2013 à
Céline Sallette et Raphaël Personnaz. L'occasion de revoir "After" de Géraldine Maillet avec Raphaël Personnaz dont vous pouvez retrouver la critique, ci-dessous.
A quelques exceptions près comme les remarquables et très différents « Amour »de Michael Haneke, « Laurence Anyways » de Xavier Dolan et « Tabou » de Miguel Gomes, l’année 2012 nous aura livré peu de films d’amour(s), et c’est avec plaisir que je débute l’année cinématographique 2013 par le premier long-métrage de Géraldine Maillet qui nous raconte la rencontre entre deux solitudes, une nuit, à Paris.
C’est un de ces soirs pluvieux comme dans les films de Claude Sautet dans lesquels, une pluie incessante rapproche les êtres, accélère les rencontres, devient un moteur et un accélérateur du rapprochement. Par cette nuit pluvieuse, Julie (Julie Gayet), belle quadragénaire lumineuse, mystérieuse, à la vie semble-t-il bien « cadrée », et mariée rencontre Guillaume (Raphaël Personnaz), trentenaire,libre, impétueux, ombrageux, séducteur, fantasque.
Comme dans toute comédie romantique que cet after n’est d’ailleurs pas tout à fait, cela commence par la rencontre de deux personnes que tout oppose a priori. A priori seulement. Il pleut, donc. Julie ne trouve pas de taxi. Elle se réfugie dans un petit restaurant quasiment désert. Guillaume est là… La rencontre est un peu artificielle mais comme elle le serait dans un conte, une fable, même si ce n’est pas un Paris de carte postale mais un Paris métallique, de lignes froides et paradoxalement rassurantes, un Paris fantomatique, un Paris à la fois proche et lointain, presque abstrait, qui sert de cadre à cette rencontre.
On se sent presque indiscret d’être là tant l’alchimie et la magie opèrent entre ces deux personnages. Même si les dialogues sont particulièrement bien écrits, trop sans doute diront certains esprits chagrins (Géraldine Maillet est auteure de dix romans), ce sont finalement les silences, les non dits, les regards échangés ou éludés, parfois enfiévrés de désirs, les gestes esquissés, les touchantes maladresses caractéristiques des prémisses d’une rencontre et d’un désir latent qui font toute la richesse de ce premier long-métrage. La force de cette rencontre est exacerbée par le sentiment tenace et menaçant de ce qui se passera « After » qui renforce l’intensité, la tristesse, et la nécessité de cette rencontre. Géraldine Maillet a aussi l’intelligence de ne pas nous dire grand-chose de plus sur ses personnages que ce qu’ils savent l’un de l’autre si ce n’est un plan furtif l’intérieur de l’appartement de Julie qui en dit plus que tout le reste.
A l’image de son personnage masculin principal, « After » est un film plein de douceur et d’énergie furieuse, plein de fragilités et de sensibilité mais surtout plein de charme, porté par ailleurs par une belle BO. Géraldine Maillet se concentre ainsi sur ses deux personnages principaux et, à l’amour naissant qui les unit s’ajoute celui que leur porte sa caméra qui ne les lâche pas, traque le moindre sursaut de désir et de fragilité. Elle est visiblement amoureuse de ses acteurs. Elle a d’ailleurs déjà tourné deux courts avec Julie Gayet qui porte ici son prénom, plus lumineuse et mystérieuse que jamais (et trop rare au cinéma). Quant à Raphaël Personnaz, inoubliable et marquant duc d’Anjou dans l’excellent et mésestimé « La Princesse de Montpensier » de Bertrand Tavernier – un film d’une âpre beauté dont la fièvre contenue explose au dénouement en un paradoxal et tragique silence, à voir absolument-, il sera indéniablement, je l’espère, une des révélations de cette année 2012 (il est d’ailleurs parmi les trois nommés au prix Patrick Dewaere avec deux autres excellents comédiens que sont Pierre Niney et Matthias Schoenaerts). Il vient également de tourner les deux premiers volets de la trilogie de Pagnol réalisée par Daniel Auteuil. Il est également à l’affiche dans « Anna Karénine » de Joe Wright, de « Trois mondes » de Catherine Corsini, et prochainement dans « la Stratégie de la poussette » de Clément Michel ! Ici il est constamment sur le fil, à fleur de peau, à la fois touchant, et légèrement inquiétant. Avec Julie Gayet ils forment un couple évident duquel émane un trouble lancinant.
« After » est une danse sensuelle et mélancolique, un tango doux et troublant, une parenthèse enchantée qui possède la magie ineffable des rencontres improbables et furtives, éphémères et indélébiles, et malgré ou à cause de tout cela d’une évidence insensée. Ce film nous embarque avec ces deux personnages qui vont tomber le masque, incarnés par deux comédiens irrésistibles. Un dénouement intelligemment elliptique achève de faire de ce premier film une œuvre particulièrement attachante qui nous fait quitter à regrets ses personnages et son univers plein de vitalité (chère à Truffaut), de luminosité nocturne, et empreint de la beauté troublante à la fois et paradoxalement évanescente et/ou éternelle d’une rencontre magique.
Et puis à tous ceux qui luttent pour faire leurs premiers films (j’en sais quelque chose…), je recommande vivement le carnet de bord de la réalisatrice « Il ferait quoi Tarantino à ma place ? ».
Découvrez à votre tour cette belle et douce errance nocturne, sensuelle et complice.
Après les succès de « Mon idole » (dont j’avais aimé la causticité) et « Ne le dis à personne » (par lequel je n’avais pas été convaincue, voir ici) Guillaume Canet, comme beaucoup de réalisateurs, aurait pu se contenter d’adapter un best-seller avec une part de risque minimale. Il a au contraire choisi un sujet très personnel (pour lequel il a même refusé de travailler pour Scorsese) et c’est à la fois la grande force et la faiblesse du film.
Direction le Cap-Ferret, une maison en bord de mer appartenant à Max (François Cluzet), une maison où chaque été se réunit une bande d’amis. Seulement cet été-là, tout est comme d’habitude et à la fois différent car l’un d’entre eux, Ludo (Jean Dujardin) manque à l’appel, retenu sur un lit d’hôpital. Chacun va mettre un « petit mouchoir » sur la vérité. Le petit mouchoir c’est le voile du mensonge, le masque que chacun arbore pour ne pas dévoiler ses doutes, ses failles et ses angoisses. Les petits mouchoirs, ce sont les mensonges faits aux autres mais surtout à soi-même.
Cela commence au Baron, célèbre boîte de nuit du 8ème arrondissement. Un habile plan-séquence qui nous plonge dans cette frénésie et en capture la gravité masquée de bonne humeur excessive : la gaieté feinte et les rires factices et exubérants suscités par l’alcool, la drogue, la tristesse dissimulée. Puis c’est le fracas de la réalité. Et le retour à la vie normale comme si de rien n’était… ou presque.
Guillaume Canet nous immerge alors dans la vie de ces amis au Cap-Ferret avec la volonté délibérée de faire « un film de potes » comme il le dit lui-même. S’il évoque notamment « Mes meilleurs copains » de Jean-Marie Poiré, en inconditionnelle du cinéma de Claude Sautet, j’ai évidemment plutôt pensé à « Vincent, François, Paul et les autres ». D’ailleurs, Benoît Magimel s’appelle Vincent ; François Cluzet s’appelle ici Max (comme Michel Piccoli dans « Max et les ferrailleurs ») et il m’a rappelé ce dernier dans la fameuse scène de colère de « Vincent, François, Paul et les autres ». Gabin aussi, si célèbre pour ses scènes de colère. Et la maison du Cap-Ferret m’a fait penser à celle de « César et Rosalie ».
Même si Guillaume Canet/réalisateur n’atteint pas cette note parfaite, cette virtuosité à laquelle accédait Claude Sautet, mélomane averti, il y a dans ce film cette même quête de raconter la complexité derrière « une histoire simple », de quérir les frémissements de vie, les fléchissements en chacun, de dévoiler une part du mystère dans lequel chacun se drape.
Plus qu’à Claude Sautet, il m’a d’ailleurs fait penser à Lelouch (même s’il reniera peut-être cette comparaison, lui qui lorgne davantage du côté du cinéma américain et cite plus volontiers Cassavetes) dans sa quête de « fragment de vérité », dans sa sincérité, dans sa façon de filmer au plus près des visages, d’effleurer presque amoureusement ses personnages, et de constamment chercher à tirer le meilleur de ses acteurs. Les virtuoses ce sont eux et c’est la raison pour laquelle il n’a pas voulu faire de l’esbroufe dans sa réalisation. Sa mise en scène se fait donc ainsi discrète. Le cadre à la fois étouffe et caresse les personnages et les enserre, comme ils le sont dans leurs apparences et leurs mensonges.
A l’exception de Laurent Lafitte (dont les rires et les larmes m’ont semblé parfois forcés, en particulier lors de la scène de la fin qui manque vraiment de nuances), le casting est irréprochable. Chaque apparition de François Cluzet est un pur bonheur, à la fois irascible et touchant, volubile et secret. Benoît Magimel dégage un charme mélancolique irrésistible. Marion Cotillard n’a jamais été filmée aussi amoureusement, à la fois frontalement et délicatement. Valérie Bonneton est férocement drôle et Gilles Lellouche incarne avec beaucoup de nuances son personnage qui accepte enfin et trop tard de grandir. Quant à Joel Dupuch, il est plus qu’il ne joue et le film y gagne en émotion et gravité.
La comparaison avec Lelouch s’arrête là, si ce n’est qu’elle explique sans doute aussi la virulence de certaines réactions suite à l’avant-première. Elle s’arrête là parce que Canet impose son propre rythme et son propre style et de films en films construit son propre univers.
« Les petits mouchoirs » dure 2H25, beaucoup trop semble-t-il pour certains. Or, justement, c’est cette durée qui nous permet de créer la proximité avec les personnages, c’est une durée qui coïncide judicieusement avec le fond du film. Une durée nécessaire pour donner du temps au temps, pour laisser tomber les masques, pour prendre le temps de vivre, d’accepter la qualité des silences, du temps qui passe et en saisir la beauté et la violence fugaces. Il n’est pas dans le spectaculaire mais dans l’intime. Il ne cherche pas à nous en mettre plein la vue mais à ouvrir notre regard, lui laisser le temps de se poser, de regarder la vie qui passe et qu’il tente de capter. Certaines scènes peut-être auraient pu être écourtées voire supprimées –même si beaucoup l’ont déjà été puisque le montage initial faisait près de 4H-(et c’est là sans doute que le film est « trop » personnel, en totale empathie pour son sujet, ses personnages et ses acteurs, Guillaume Canet nous oublie un peu) mais il a en tout cas beaucoup de tendresse communicative pour ses personnages et ses acteurs et nous donne envie , malgré et à cause de leurs failles, de se joindre à eux.
A l’issue de la projection (cette critique a été écrite suite à l'avant-première du film, en présence de l'équipe), Guillaume Canet a demandé que nous n’évoquions ni la fin ni le début, tétanisé visiblement à l’idée qu’ils puissent être dévoilés, pourtant ce n’est pas là que réside le principal intérêt de son film. La fin est d’ailleurs attendue mais non moins bouleversante faisant surgir l’émotion contenue qui explose et avec elle les masques de chacun, faisant voler en éclats les petits mouchoirs posés sur la vérité. Le rire n’a jamais si bien illustré sa définition de « politesse du désespoir », tout son film étant jalonné de moments drôles et savoureux mais qui sont aussi touchants parce que le masque de la culpabilité et/ou de la tristesse qui affleurent dans un regard soudainement assombri. Son film souffre donc (un peu) mais s’enrichit (surtout) d’être très personnel. Pour moi, Guillaume Canet/réalisateur est donc indéniablement meilleur quand il signe un sujet personnel que quand il adapte Harlan Coben. J’en attends beaucoup de son futur projet avec James Gray.
Un film choral qui ne cherche pas à révolutionner le cinéma (et dont je n’ai d’ailleurs cessé de me dire pendant toute la projection qu’il ferait une excellente pièce de théâtre) mais qui vous donne envie de prendre le temps de vivre, de laisser choir le voile du mensonge, de regarder et voir, d’écouter et d’entendre. Et c’est finalement là sans doute la plus discrète des audaces et sa vraie réussite. . Malgré quelques longueurs vous ne verrez pas passer les 2H25 de ce troisième long-métrage de Guillaume Canet qui enlace ses personnages avec une tendre lucidité et embrasse la vie et sa cruauté poignante et involontaire avec tendresse et qui, à son image, complexe et paradoxale, s’achève sur une touchante note de tristesse et d’espoir.
La rumeur courait depuis plusieurs mois. C’est désormais confirmé: le très attendu « Gatsby le magnifique » de Baz Luhrmann qui sortira en France le 15 mai 2013 fera l’ouverture du 66ème Festival de Cannes. Voilà qui promet une ouverture et une montée des marches resplendissantes; un film que je suis particulièrement impatiente de découvrir et dont vous pourrez retrouver ma critique ici puisque, comme chaque année, je vous ferai vivre le festival en direct ici et sur http://inthemoodforfilmfestivals.com (qui, dans quelques jours, sera entièrement consacré au Festival de Cannes), de l’ouverture à la clôture.
Le talent de Leonardo Di Caprio n’est plus à prouver : que ce soit dans « Les Noces rebelles« , « Inception », « Shutter Island« ou, plus récemment dans "Django unchained" , il crève l’écran, c’est pourtant un vrai challenge que de reprendre le rôle de Gatsby, l’inoubliable personnage du non moins inoubliable roman de Fitzgerald déjà interprété à l’écran par Robert Redford duquel il est indissociable. C’est Baz Luhrmann qui se charge de cette nouvelle adaptation. Tobey Maguire et Amanda Seyfried incarneront respectivement Nick Carraway et Daisy Buchanan. En attendant de découvrir cette nouvelle adaptation, retrouvez, ci-dessous, ma critique de « Gatsby le magnifique » de Jack Clayton avec Robert Redford et Mia Farrow et, en bas de cet article, le communiqué de presse du Festival de Cannes.
Adapté en 1974 du chef d’œuvre de Fizgerald, le film (comme le roman) se déroule dans la haute aristocratie américaine. Une vraie gageure d’adapter ce sublime roman( sans doute un de ceux que j’ai le plus relus) qui évite toujours soigneusement la mièvrerie et assume le romantisme effréné et exalté (mais condamné) de son personnage principal.
Eté 1920. Nick Carraway (Sam Waterston), jeune homme du Middlewest américain se rend à New York pour travailler comme agent de change. C’est dans la zone huppée de Long Island qu’il trouve une maison, juste à côté de la somptueuse demeure du mystérieux Gatsby (Robert Redford) et avec une vue imprenable sur East Egg où vivent sa cousine Daisy (Mia Farrow) et son mari Tom Buchanan (Bruce Dern) . Daisy s’ennuie avec son mari bourru qui la trompe ouvertement et elle tue le temps avec son amie la golfeuse professionnelle Jordan Baker. Tom présente même à Nick sa maîtresse Myrtle Wilson (Karen Black), la femme du garagiste. Tous s’étonnent que Nick ne connaisse pas son voisin Jay Gatsby qui donne des réceptions somptueuses avec des centaines d’invités et sur le compte de qui courent les rumeurs les plus folles. C’est en répondant à une des invitations de son mystérieux voisin que Nick va faire ressurgir le passé liant sa cousine Daisy à l’étrange et séduisant Jay Gatsby.
Dès les premières minutes, ce film exerce la même fascination sur le spectateur que le personnage de Jay Gatsby sur ceux qui le côtoient ou l’imaginent. La magnificence crépusculaire de la photographie et la langueur fiévreuse qui étreint les personnages nous laissent entendre que tout cela s’achèvera dans le drame mais comme Nick nous sommes fascinés par le spectacle auquel nous souhaitons assister jusqu’au dénouement. Jay Gatsby n’apparaît qu’au bout de vingt minutes, nous nous trouvons alors dans la même situation que Nick qui ne le connaît que par sa réputation : on dit qu’il « a tué un homme » et qu’il n’apparaît jamais aux fêtes somptueuses qu’il donne dans une joyeuse décadence.
Comme dans le roman de Fitzgerald, le film de Jack Clayton dépeint brillamment l’ennui de la haute aristocratie américaine grâce à plusieurs éléments : l’élégance romantique et le jeu de Robert Redford ( difficile après avoir vu le film d’imaginer autrement le personnage de Gatsby qu’il incarne à la perfection), le scénario impeccable signé Francis Ford Coppola, une photographie éblouissante qui évoque à la fois la nostalgie et la chaleur éblouissantes, une interprétation de Mia Farrow entre cruauté, ennui, insouciance et même folie, l’atmosphère nostalgique et fiévreuse (la sueur perle en permanence sur le front des personnages comme une menace constante), et puis bien sûr l’adaptation du magnifique texte de Fitzgerald : « La poussière empoisonnée flottant sur ses rêves » ou cette expression de « nuages roses » qui définit si bien le ton du roman et du film. Avec l’amertume dissimulée derrière l’apparente légèreté. La mélancolie et le désenchantement derrière la désinvolture. Il faut aussi souligner l’excellence des seconds rôles et notamment de Karen Black aussi bien dans la futilité que lorsqu’elle raconte sa rencontre avec Tom Buchanan.
« Gatsby le magnifique » est à la fois une critique de l’insouciance cruelle et de la superficialité de l’aristocratie que symbolise Daisy, c’est aussi le portrait fascinant d’un homme au passé troublant, voire trouble et à l’aura romantique dont la seule obsession est de ressusciter le passé et qui ne vit que pour satisfaire son amour inconditionnel et aveugle. (Ah la magnifique scène où Jay et Daisy dansent dans une pièce vide éclairée à la bougie !) Face à lui Daisy, frivole et lâche, qui préfère sa réputation et sa richesse à Gatsby dont la réussite sociale n’avait d’autre but que de l’étonner et de poursuivre son rêve qui pour lui n’avait pas de prix. Gatsby dont par bribes la personnalité se dessine : par sa manie d’appeler tout le monde « vieux frère », par ses relations peu recommandables, par le portrait qu’en dresse son père après sa mort, un père qu’il disait riche et mort. Pour Daisy, la richesse est un but. Pour Jay, un moyen (de la reconquérir). Elle qui ne sait que faire des 30 années à venir où il va falloir tuer le temps.
Les deux êtres pour qui l’argent n’étaient qu’un moyen et non une fin et capables d’éprouver des sentiments seront condamnés par une société pervertie et coupable de désinvolture et d’insouciance. Un film de contrastes. Entre le goût de l’éphémère de Daisy et celui de l’éternité de Gatsby. Entre la réputation sulfureuse de Gatsby et la pureté de ses sentiments. Entre la fragilité apparente de Daisy et sa cruauté. Entre la douce lumière d’été et la violence des sentiments. Entre le luxe dans lequel vit Gatsby et son désarroi. Entre son extravagance apparente et sa simplicité réelle. Entre la magnificence de Gatsby et sa naïveté. Et tant d’autres encore. Des contrastes d’une douloureuse beauté.
C’est à travers le regard sensible et lucide de Nick qui seul semble voir toute l’amertume, la vanité, et la beauté tragique de l’amour, mélancolique, pur et désenchanté, que Gatsby porte à Daisy que nous découvrons cette histoire tragique dont la prégnante sensation ne nous quitte pas et qui nous laisse avec l’irrésistible envie de relire encore et encore le chef d’œuvre de Fitzgerald et de nous laisser dangereusement griser par l’atmosphère de chaleur écrasante, d’extravagance et d’ennui étrangement mêlés dans une confusion finalement criminelle. Un film empreint de la fugace beauté de l’éphémère et de la nostalgie désenchantée qui portent le fascinant et romanesque Gatsby. A (re)voir absolument.
Communiqué de presse du Festival de Cannes
Le film du cinéaste australien Baz Luhrmann, The Great Gatsby (Gatsby le Magnifique), sera projeté lors de l’inauguration du 66e Festival de Cannes, le mercredi 15 mai, dans le grand Théâtre Lumière du Palais des Festivals, en Sélection officielle Hors Compétition.
Adapté du plus célèbre roman de l’écrivain américain Francis Scott Fitzgerald, le film évoque, dans l’effervescence des années vingt sur la côte Est des Etats-Unis, la figure romantique et tragique de Jay Gatsby (Leonardo DiCaprio), racontée par son ami Nick Carraway (Tobey Maguire). Carey Mulligan joue Daisy Buchanan, dont l’époux est incarné par Joel Edgerton. A cette distribution prestigieuse s’ajoute la participation de la légende du cinéma indien Amitabh Bachchan, ainsi que celle du musicien américain, le rappeur Jay-Z.
« Pour tous ceux qui ont travaillé sur Gatsby, c’est un grand honneur que de faire l’ouverture du Festival de Cannes, déclare Baz Luhrmann. Je suis très fier de revenir dans un pays et un festival qui se sont toujours montrés généreux avec moi. Et heureux de voir ce film projeté à Cannes, pas très loin de Saint-Raphaël où Scott Fitzgerald a écrit parmi les passages les plus poignants et les plus émouvants de son extraordinaire roman. »
Produit par Warner Bros. Pictures et Village Roadshow Pictures, le film a été écrit par Baz Luhrmann et son fidèle coscénariste Graig Pearce, à partir du roman publié par Fitzgerald en 1925.
Le film sera projeté en 3D – ce sera la deuxième fois dans l’histoire du Festival après Up (Là-Haut) de Pete Docter, en 2009, que le film d’ouverture fera l’objet d’une projection en relief.
Gatsby le Magnifique sortira le jour de l’ouverture du Festival, mercredi 15 mai, dans toutes les salles de France. En France, et dans le monde, le film est distribué en 2D et 3D par Warner Bros. Pictures et dans certaines régions par Village Roadshow Pictures.
Né en 1962 en Australie, Baz Luhrmann a été accueilli à deux reprises par le Festival de Cannes pour Strictly Ballroom (Ballroom Dancing, projeté au Certain Regard en 1992) et pour Moulin Rouge ! lors du 54e Festival en 2001, pour une ouverture restée dans les mémoires.
Leonardo DiCaprio (Jay Gatsby) est rarement venu sur la Croisette. Il revient à Cannes pour la première fois depuis la présentation en 2007 de The 11th Hour (La Onzième Heure) un documentaire défendant la cause écologiste dont il était le producteur.
► Accédez au site officiel du film
En attendant mon bilan de ce 15ème Festival du Film Asiatique de Deauville, retrouvez, ci-dessous, la vidéo du cinéaste Sono Sion, réalisateur de mon coup de coeur de ce festival "The land of hope" dont vous pouvez retrouver la critique, ici :
Plutôt qu'un résumé par définition trop court, je vous livrerai demain mon compte-rendu de l'hommage à Wong Kar Wai, ma vidéo de cet hommage, ma critique de "The Grandmaster", film aussi éblouissant (visuellement) que décevant (scénaristiquement) mais aussi mon bilan de la compétition et, bien sûr, le palmarès (commenté) qui sera dévoilé ce soir.
Je vous parlerai ultérieurement des films vus en compétition hier et desquels se dégage une thématique commune et un désespoir commun…dont ne s’éloigne d’ailleurs pas vraiment le film dont je vais vous parler aujourd’hui (qui n’est pas en compétition) même s’il surpasse, et de loin, les autres films vus, et pour cause puisque c’est l’œuvre d’un cinéaste confirmé à qui le festival rendait hier hommage : Sono Sion (cf ma vidéo de l'hommage à suivre, en ligne dans la journée). A son hommage a succédé la projection de « The land of hope », un film de ce dernier datant de 2012 et qui sortira en France en avril prochain.
L’an passé, en compétition, le festival avait projeté « Himizu » du même Sono Sion, film que je qualifiais alors d’une rageuse, fascinante, exaspérante et terrifiante beauté. Les premiers plans, effroyables, nous plongeaient dans le décor apocalyptique de l’après tsunami exploré par de longs travellings, mais le chaos n’était alors pas seulement visuel, c’était surtout celui qui rongeait, détruisait, étouffait les êtres ayant perdu leur identité et tout espoir.
Ce nouveau long-métrage de Sono Sion commence de manière plutôt inattendu : d’abord par son classicisme (relatif, mais du moins pour Sono Sion, moins dans la folie et l’explosion visuelles, ici) et ensuite parce qu’il met en scène un cadre bucolique, des couleurs chatoyantes et des personnages heureux. Evidemment, cela ne va pas durer et la réalité, tragique, terrible, celle du Japon que Sono Sion, films après films, dissèque et dénonce, va ressurgir avec un tremblement de terre qui frappe alors le Japon. Il entraîne l’explosion d’une centrale nucléaire. Sans vraiment en donner la raison, le gouvernement fait évacuer les habitants à proximité de la catastrophe. La famille Ono dont la ferme est située à cheval entre la zone de danger et le périmètre de sécurité, doit choisir entre fuir et rester. Sono sion va alors suivre trois couples : un couple de vieux paysans dont la femme est malade, vraisemblablement atteinte d’Alzheimer, un jeune couple qui s’apprête à avoir un enfant et un autre couple en quête des parents de la jeune femme mais aussi d’un avenir.
Aux scènes joyeuses du début succède un bref et effroyable vacarme puis un silence retentissant avant que la vie et l’image ne deviennent grisâtres puis avant que les couleurs « normales » ne reviennent, plus terrifiantes encore que ces couleurs grisâtres qui les ont précédées car si tout semble banal et quotidien, la menace et le danger sont là, constants, une guerre invisible. Les « autorités » (ici traitées au début comme une dictature par définition inique et intolérante) qui ne se contentent d’être que cela ne sont d’abord que des sortes de combinaisons inhumaines et sans identité. Tout est à la fois banal et singulier, paisible et agité. Comme le titre résonne (déraisonne aussi) alors comme une ironie tragique.
Dans la beauté éclatante de chaque plan (qui n’en est alors que plus redoutablement tragique puisqu’elle n’est que le masque de cet ennemi invisible), dans son humour désenchanté (l’absurdité de cette ligne qui sépare un jardin que Tati n’aurait osé inventer et pourtant terriblement réaliste ou de ces combinaisons de protection et la paranoïa qui seraient risibles si leur existence n’était malheureusement fondée), dans sa poésie d’une beauté et d’une tristesse ravageuses, Sono Sion nous livre son cri de révolte, d’une mélancolie déchirante : révolte contre les autorités (qu’il ne cesse de dénoncer tout au long du film), révolte contre cette centrale qu’« ils » ont malgré tout construite, une telle absurdité là aussi que c’est finalement celle qui a perdu la raison qui ne cesse de la souligner.
Sans doute Sono sion décontenancera-t-il ici ses admirateurs avec ce film plus classique que ses précédents mais, comme ses autres films, d’une beauté désenchantée, d’un romantisme désespéré (cette scène où le couple de vieux paysans danse au milieu du chaos est à la fois terriblement douce et violente, sublime et horrible, en tout cas bouleversante), d’un lyrisme et d’une poésie tragiques avec des paraboles magnifiquement dramatiques comme cet arbre -et donc la vie- qui s'embrasent mais aussi un travail sur le son d’une précision et efficacité redoutables.
Un film porté par un cri de révolte et l’énergie du désespoir, plus efficace que n’importe quelle campagne anti-nucléaire et surtout l’œuvre d’un poète, un nouveau cri d’espoir vibrant et déchirant qui s’achève sur un seul espoir, l’amour entre deux êtres, et une lancinante litanie d’un pas, qui, comme l’Histoire, les erreurs et la détermination de l’Homme, se répètent, inlassablement. Et à nouveau, pourtant, la possibilité d’un lendemain. Malgré tout, malgré l’horreur encore là et invisible. Et Fukushima délaissée par les médias, autre fatalité qui se répète, peut-être plus terrible encore : l’oubli.
Quelques lignes trop courtes et rapides pour parler de ce film qui m’a bouleversée et sur lequel je reviendrai. Aujourd’hui, pour moi, au programme, trois films en compétition mais, surtout, l’hommage à Wong Kar Wai et l’avant-première de « The Grandmaster ».
Et après la beauté mélancolique du cinéma de Sono Sion, quelques images qui reflètent celle de Deauville: