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IN THE MOOD FOR CINEMA - Page 320

  • Bande-annonce de "Cheval de guerre" le prochain film de Steven Spielberg

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    En attendant mon prochain compte rendu en direct du Festival Paris Cinéma 2011, une petite bande-annonce, celle de "Cheval de guerre"qui sortira au cinéma le 23 février 2012.

    Synopsis: "Cheval de guerre" est le nouveau film événement des studios DreamWorks réalisé par Steven Spielberg, est une aventure à grand spectacle pour tous, une formidable odyssée où s’entremêlent l’amitié, la découverte et le courage.À la veille de la Première Guerre mondiale, le jeune Albert mène une existence paisible dans une ferme anglaise avec son cheval, Joey, qu’il adore. Mais le père d’Albert décide de vendre Joey à la cavalerie britannique, et le cheval se retrouve bientôt sur le front français. L’animal entame alors une extraordinaire aventure en plein conflit. En dépit des obstacles qu’il rencontre à chaque pas, Joey va changer la vie de ceux dont il croise la route. Incapable d’oublier son ami, Albert quitte la ferme et rejoint à son tour le champ de bataille dans l’espoir de retrouver son cheval et de le ramener chez lui.

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  • Ouverture du 9ème Festival Paris Cinéma par Charlotte Rampling et projection de « Polisse » de Maïwenn

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    Hier soir, devant une salle comble, au Gaumont Opéra, Charlotte Rampling a déclaré ouvert le 9ème Festival Paris Cinéma avant que soit projeté en avant-première « Polisse » de Maïwenn, en présence de la réalisatrice et d’une partie de l’équipe du film, mais aussi de Michel Ocelot et de Michael Lonsdale à qui le festival rendra hommage et consacrera une rétrospective.

    Un festival qui, à l’image de sa cérémonie d’ouverture, n’oublie pas que la star de ce festival c’est le cinéma et non les organisateurs avant tout là pour mettre en avant les films et les artistes venus les présenter. Pour moi, c’était aussi l’occasion de revoir le film de « Maïwenn » vu une première fois à Cannes lors de sa présentation en compétition (un des quatre films réalisés par une réalisatrice figurant cette année en compétition) parmi un public moins excessif et versatile et loin de l’exaltation frénétique de la Croisette où il est de bon ton de haïr ou d’adorer, de détruire ou d’encenser sans nuances.

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    Vous trouverez ci-dessous ma critique revue et corrigée suite à cette deuxième projection et à partir de samedi, un an après ma participation au jury blogueurs du festival, et comme chaque année, je vous ferai vivre ici les grands évènements de cette édition 2011. Sachez  également que le festival propose une autre ouverture avec la nuit du cinéma, du 2 au 3 juillet, au Forum des Images.

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    « Polisse » est le troisième long métrage de Maïwenn  après « Pardonnez-moi » (2006) et « Le bal des actrices » (2009).  J’étais restée particulièrement sceptique devant «Le  Bal des actrices » , film sur les masques et  les mensonges des actrices  dans lequel Maïwenn nous impose sa propre vérité, un bal dont elle est la reine et la manipulatrice, un bal dans lequel le cinéma est montré comme un théâtre masqué, un monde de faux-semblants dans lequel les actrices sont toutes malheureuses, narcissiques, prétentieuses et pour se dédouaner de s'être attribuée le beau rôle, Maïwenn lors d'une scène finale (lors de laquelle toutes les actrices sont réunies pour voir son documentaire) devance toutes les critiques, ses actrices lui adressant les reproches que pourrait lui faire la critique. Bref, je craignais le pire avec le sujet ô combien sensible de ce troisième long métrage.

     Connaissant l’intrigue et le dénouement, j’étais curieuse de voir si je serais à nouveau embarquée, touchée, parfois agacée… et je dois avouer qu’à cette deuxième vision l’émotion, surtout, était tout autant au rendez-vous qu’à la première.

    Synopsis : « Polisse » suit le quotidien des policiers de la BPM (Brigade de Protection des Mineurs) : gardes à vue de pédophiles,  arrestations de pickpockets mineurs, auditions de parents maltraitants, dépositions des enfants, les dérives de la sexualité chez les adolescents, mais aussi la solidarité entre collègues et les fous rires incontrôlables dans les moments les plus impensables. En parallèle, Maïwenn montre les répercussions sur la vie privée de chacun de ces policiers et l’équilibre précaire entre leur vie professionnelle et leur vie privée. Mélissa ( Maïwenn) est mandatée par le Ministère de l’Intérieur pour réaliser un livre de photos sur la brigade. Ce regard va révéler les fêlures de Fred (Joeystarr), le plus écorché vif de la brigade.

    Les premières minutes nous montrent une petite fille décrivant avec sa candeur enfantine les attouchements que son père lui a ou aurait fait subir (nous ne saurons pas vraiment). Quelques scènes plus tard, nous retrouvons les policiers de la BPM qui, à la cantine, racontent leurs histoires de couples, avec une certaine crudité, à la fois pour désamorcer la violence de ce qu’ils entendent au quotidien, mais aussi parce que cette violence a des répercussions inévitables sur leur vie privée.

      C’est avant tout eux que la caméra de Maïwenn va suivre, nous immergeant dans leur douloureux quotidien. Douloureux parce que difficile d’entendre des horreurs toute la journée et de ne pas en ressortir écorché, voire blessé, ou même meurtri. Douloureux parce que la vie privée devient chaotique quand la vie professionnelle est aussi rude et vorace, et exige un tel dévouement dont il est impossible de ressortir indemne. Douloureux parce que les blessures des autres ravivent les leur.

    Lors de la première projection à Cannes, je vous avais dit avoir été partagée entre émotion et scepticisme, agacement et admiration mais j’avoue que cette fois l’émotion et l’admiration ont dominé. Emotion parce que la caméra de Maïwenn capte et esquisse admirablement des portraits de pères, de mères, d’hommes, de femmes, d’enfants, désemparés face à la douleur indicible mais aussi la glaçante épouvante de ceux qui avouent les pires horreurs avec le sourire et une terrible « innocence », inconscients de celle qu’ils ont bafouée (Terrifiante déclaration du personnage d’Audrey Lamy inspirée comme tous les autres faits de ce film, de faits réels). Emotion parce qu’il est impossible de rester insensible devant, par exemple, cette scène douloureusement réaliste de cet enfant arraché à sa mère parce qu’il est impossible de leur trouver un foyer à tous deux. Emotion lorsque par un frôlement de main, une danse d’abandon, surgit une tendresse si longtemps contenue. Emotion parce que la scène finale d’une logique tragiquement implacable vous saisit d’effroi.

    Admiration parce que Maïwenn en quelques plans, parfois juste le temps d’une déclaration à la police, nous raconte toute une histoire, un passé sombre et un avenir compromis. Admiration parce qu’elle tire des acteurs et surtout actrices, le meilleur d’eux-mêmes : Sandrine Kiberlain bouleversante,  Karin Viard insaisissable, touchante puis presque effrayante,  et que dire de Marina Foïs, remarquable dans le rôle de ce personnage de policier, le plus intéressant, abimé, fragile, désorienté. Même Joeystarr dont la prestation dans « Le bal des actrices » ne m’avait pas convaincue, est ici particulièrement touchant dans son rôle de flic bourru au cœur tendre qui s’implique émotionnellement dans chaque « cas ».

    Alors pourquoi étais-je aussi sceptique et agacée suite à la projection cannoise ? Sceptique parce que le personnage qu’incarne Maïwenn qui se cache derrière ses grandes lunettes, son chignon, qui passe des beaux quartiers aux quartiers plus populaires, semble une nouvelle fois une manière de se dédouaner, de se donner le beau rôle, de se mettre en scène sans que cela soit forcément nécessaire. Il faut avouer que, suite à cette deuxième projection, j’ai trouvé que son personnage qui certes parfois sourit un peu trop béatement, apporte une certaine fraîcheur, un regard extérieur et est une vraie trouvaille scénaristique pour permettre au personnage de Joeystarr d’évoluer et de révéler une autre facette de sa personnalité. C’est aussi un moyen d’explorer à nouveau la mise en abyme.  C'est d’ailleurs après avoir vu un documentaire à la télévision sur le travail des policiers chargés de protéger les mineurs, qu'elle a eu l'idée d'en faire un film.

     Agacée par ce style faussement réaliste (Lors de la conférence de presse des lauréats à Cannes, Maïwenn s’est énervée suite à la question d’un journaliste qui, à propos de son film, parlait de style semi-documentaire) qui recrée une réalité et forcément l’édulcore pour faire surgir une réalité qui forcément n’en est pas totalement une. Agacée parce que Maïwenn par moments semble nous refaire « Le bal des actrices » et plus soucieuse de leurs performances que du réalisme (peut-être aurait-il été plus judicieux d’utiliser uniquement des comédiens inconnus) mais après cette deuxième projection, je reconnais que tous les acteurs sans exception, sont absolument remarquables et que Maïwenn est incontestablement douée pour la direction d’acteurs sachant tirer ici le meilleur de chacun (les « témoignages » d’anonymes sont saisissants).

    Agacée parce que parfois la caméra s’attarde un peu trop, et nous prend en otage, ou parce que parfois elle semble privilégier ou du moins hésiter entre l’effet de style ou l’émotion et le réalisme (comme la scène des enfants qui dansent dans le bus). Agacée parce que, à l’image de son titre, cela frôle alors l’artificiel. Polisse écrit par un enfant. Polisse mais surtout pas « policé ». Polisse parce qu’il y avait déjà le PoliCe de Pialat.

    Avec ce troisième film, Maïwenn veut à nouveau faire surgir la vérité, « peindre les choses cachées derrière les choses » pour reprendre une célèbre réplique d’un non moins célèbre film de Marcel Carné. En voulant parfois trop mettre en valeur ses actrices (ou elle-même), elle nuit justement à cette vérité nous rappelant trop souvent que « c’est du cinéma », alors qu’elle retranscrit malheureusement surtout une sombre réalité. Il n’en demeure pas moins que c’est un bel hommage à ces policiers de la BPM, à leur dévorant métier et leur dévouement,  un constat effroyable sur la noirceur humaine, et il n’en demeure pas moins que la fin est bouleversante de beauté tragique et de lyrisme dramatique : ces deux corps qui s’élancent, et font éclater ou taire la vérité, inadmissible, et éclater ou taire l’espoir. Un film agaçant, intense, marquant, bouleversant, parfois même (sombrement) drôle.

    A cette deuxième vision, la qualité de la réalisation (caméra nerveuse qui épouse la tension palpable), et surtout l’écriture m’ont particulièrement marquée, sans doute la raison pour laquelle Maïwenn condamnait cette définition de semi-documentaire. Le film est extrêmement construit, les dialogues sont particulièrement efficaces et sans doute certains les trouveront trop écrits, en contradiction avec l’impression de réalisme auquel ils ne nuisent néanmoins pas. Chaque scène de chaque personnage, qu’il soit au premier ou au second plan, dit quelque chose du dénouement concernant ce personnage et il faut dire que Maïwenn et sa coscénariste Emmanuelle Bercot manient brillamment le film choral aidées par un brillant montage qui fait alterner scènes de la vie privée et scènes de la vie professionnelle, les secondes révélant toujours quelque chose sur les premières, ces deux familles se confondant parfois. Pialat, Tavernier, Beauvois, Marchal avaient chacun à leur manière éclairer une facette parfois sombre de la police. Il faudra désormais compter avec le « Polisse » de Maïwenn dont le prix du jury cannois était en tout cas entièrement justifié.

    Cliquez ici pour lire le compte rendu de la conférence de presse cannoise de « Polisse ».

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    Quelques temps forts du Festival Paris Cinéma à ne pas manquer samedi :  les films de Jerzy Skomilowski  au Nouveau Latina, les films de Michael Lonsdale au Champo (vous pourrez notamment –re- voir l’excellent « La mariée était en noir » de Truffaut), la rétrospective Don Siegel au Grand Action.  Vous pourrez voir ou revoir « Two lovers » de James Gray au mk2 Bibliothèque. Parmi les avant-premières, à 19H au mk2 Bibliothèque, vous pourrez voir « La fée » encensé suite à ses projections aux Festivals de Cannes et Cabourg. Pour les informations pratiques rendez-vous sur pariscinema.org.

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  • Ce soir, ouverture du Festival Paris Cinéma 2011 avec "Polisse" de Maïwenn

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    polisse68.jpgL'an passé, c'est Woody Allen, avec son réjouissant "You will meet a tall dark stranger", qui avait fait l'ouverture du Festival Paris Cinéma.

    Cette année, ce soir, pour la 9ème édition du festival, ce sera au tour de Maïwenn avec "Polisse", prix du jury du dernier Festival de Cannes (dont vous pouvez retrouver ma critique en cliquant ici et mon résumé de la conférence de presse cannoise en cliquant là.  ) au cinéma Gaumont Opéra.

    L'ouverture officielle pour le public aura lieu le 2 juillet.

    Vous pourrez, dès ce soir, retrouver ici le récit de cette ouverture et vous pourrez suivre l'intégralité de ce festival sur inthemoodforcinema.com .

    Retrouvez mes précédents articles sur le festival en cliquant ici (conférence de presse etc).

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  • Critique de « Pater » d’Alain Cavalier avec Vincent Lindon, Alain Cavalier, Bernard Bureau

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    J’étais d’autant plus impatiente de découvrir « Pater » en salles que j’avais assisté à Cannes à la conférence de presse (passionnante, et à laquelle les journalistes étaient étrangement très peu nombreux -voir résumé en bas de cet article-) et que le film y avait reçu un accueil pour le moins chaleureux (17 minutes d’applaudissements dans la salle du Grand Théâtre Lumière, sans doute, pourtant, le public le plus impitoyable et versatile qui soit).  Un succès cannois qui contraste avec le peu de salles projetant le film … et avec son caractère très iconoclaste.

    Pendant un an, le réalisateur « filmeur » Alain Cavalier et le comédien Vincent Lindon se sont vus et filmés. Le réalisateur devenu aussi acteur et l’acteur réalisateur. Et le réalisateur acteur devenant Président de la République et son acteur réalisateur son Premier Ministre. Le tout mêlant réalité et fiction, vérité et jeu. Une fiction inventée tout en filmant la vie, l’une et l’autre étant indistinctes et se contaminant. Le Président de la République et son Premier ministre décident de proposer une loi fixant l’écart maximal entre les salaires. Le Président est partisan d’un rapport de 1 à 15 alors que son Premier ministre préférerait un écart de 1 à 10. L’élection présidentielle approche, les deux hommes s’éloignent alors et finissent par se présenter l’un contre l’autre…

     Un film pour lequel Alain Cavalier a eu carte blanche de son fidèle producteur Michel Seydoux. Et sans doute ne sont-ils pas très nombreux à accepter encore ce genre de projet : hybride, hors normes, indéfinissable.

    Un film malin et agaçant, humble et prétentieux, ludique et pédant. Mais en tout cas, un film courageux, audacieux, original, libre, à l’image de son réalisateur et de son acteur principal. Déjà au moins quatre qualités à mes yeux.

    Malin parce que, en feignant l’improvisation totale, Alain Cavalier nous emmène là où il souhaite nous emmener tout comme il conduit son acteur-réalisateur-Premier-Ministre. Malin parce qu’il brouille constamment les repères, les pistes. Malin parce que, en feignant de ne rien dire, ne rien faire ou presque, il stigmatise la politique ou du moins (dé)montre à quel point elle est un jeu (de pouvoirs, d’acteurs).  Malin parce que le titre est loin d’être innocent ou anodin. Pater. Père de la nation. Relation filiale complexe qui s’établit un père et un fils.  Entre Lindon et Cavalier, hommes entre lesquels s’établit une relation presque filiale. Entre le Président et le 1er Ministre, le fils rêvant d’ailleurs de prendre la place du père. Pater. Ce père que Cavalier évoque non sans tendresse, avouant l’avoir jugé trop durement mais gommant par une opération un défaut physique qui fait qu’il lui ressemble. Enfin, Pater parce que Cavalier a été élevé chez les prêtres où Dieu était un autre Pater. Pater : une absence donc omniprésente.

    Agaçant quand il singe la politique, la décrédibilise une fois de plus comme si elle avait encore besoin de ça. Agaçant quand Lindon et Cavalier jouent à être des politiques (et jouent sous nos yeux à être des acteurs, le film se construisant sous notre regard, ou du moins feignant de se construire sous notre regard) avec une sémantique tout aussi enfantine ( comme un « malgré que » qui a écorché mes oreilles etc et un programme relevant de ce que certains qualifieront sans doute d’une enfantine utopie : retrait de la légion d'honneur à qui place son argent à l'étranger,  limitation de l'écart entre petits et gros salaires dans une même entreprise).

    Ludique quand il interroge les fonctions d’acteur et de politique et les met en parallèle. Ludique parce que finalement l’un et l’autre (acteur et politique) jouent à être quelqu’un d’autre pour convaincre. Ludique parce que c’est aussi une leçon de cinéma (la dernière scène en est particulièrement emblématique) et une leçon contre les budgets pharaoniques donnant des films vains. Ludique quand il nous devient impossible de distinguer ce qui est fiction ou réalité, ce qui est jeu ou vérité.

    Ludique et même drôle quand  Vincent Lindon parle à ses gardes du corps dans le film  se plaignant de ne pas avoir reçu de coup de fil du Président/réalisateur Cavalier pour valider son interprétation « Qu'il n'appelle pas Vincent Lindon c'est une chose, mais le Premier Ministre quand même... » ou quand une photo compromettante pour le leader de l'opposition  tombe entre ses mains.

    Humble par ses moyens de production. Prétentieux par sa forme déconcertante, son discours d’apparence simple et finalement complexe comme la relation qu’il met en scène. Prétentieux car finalement très personnel avec un discours prétendument universel.  

     L’antithèse de la « Conquête » (également en sélection officielle à Cannes mais hors compétition, contrairement à « Pater ») qui veut nous faire croire que le cinéma c’est l’imitation ; Cavalier nous dit ici au contraire que c’est plutôt recréation (et récréation). Réflexion déroutante et ludique sur le jeu et les jeux de pouvoirs (entre un Président de la République et son Premier Ministre, entre deux hommes, entre un père et son fils, entre un réalisateur et un acteur mais aussi entre un réalisateur et le spectateur ici allègrement manipulé) qui, tout de même, témoigne d’une belle audace et liberté (de plus en plus rares) mais s’adresse à des initiés tout en feignant de s’adresser à tous. Le « Pater » Cavalier ne reproduit-il pas ainsi d’une certaine manière avec le spectateur ces jeux de pouvoirs qu’il stigmatise ?  Le sous-estime-t-il, l’infantilise-t-il ou au contraire le responsabilise-t-il en lui laissant finalement l’interprétation –dans les deux sens du terme- finale ? Peut-être que trouver des réponses à ces questions vaut la peine d’aller le voir en salles. A vous de juger.

     

    Festival de Cannes 2011- Conférence de presse de « Pater » d’Alain Cavalier avec Alain Cavalier, Vincent Lindon…

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    Il ne s'agit pas d'Eric Libiot mais bien évidemment de Vincent Lindon et Alain Cavalier...

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    C’est une des bizarreries cannoises : alors que pour la conférence de presse de « Pirate des Caraïbes » il était impossible d’entrer (c’est le cas, la plupart du temps, des conférences de presse de films américains), pour celle de « Pater » et alors que je venais simplement attendre pour la conférence suivante (celle de « La Conquête » que je vous raconterai ultérieurement), et alors que celle de « Pater » était déjà commencée, on m’a permis d'entrer dans la salle ...car quasiment vide et c’est bien dommage car cette conférence était réellement passionnante, et n’a fait qu’accroître mon envie de découvrir le film d’Alain Cavalier. Vincent Lindon s’est révélé passionné, engagé même en parlant du film, mais aussi touchant, drôle, sincère, à fleur de peau.

    Vincent Lindon a notamment parlé d’économie du cinéma, un sujet qui le passionne, rappelant que la qualité d’une scène ou d’un film n’était pas affaire de budget prenant pour exemple la scène d’ « Itinéraire d’un enfant gâté » dont tout le monde se souvient, celle du face-à-face  entre Belmondo et Anconina dans une chambre de bonne et au cours de laquelle il lui apprend à ne pas être surpris, ou celle de Titanic « avec la buée sur la vitre », des films qui ont coûté très chers et dont les scènes les plus mémorables sont les moins coûteuses.

    Vincent Lindon a déclaré que c’était la première fois qu’il voyait le film sur grand écran : « Tous les gens attendaient un OVNI. On confond bizarre avec chiant » a-t-il dit.

    « On ne faisait qu’une prise et si elle ne fonctionnait pas, elle n’était pas dans le film ».

    Cavalier : « On prenait la caméra et on continuait une sorte de conversation. »

    Vincent Lindon a également révélé avoir été très touché par l’accueil dans le Grand Théâtre Lumière (le film le plus applaudi de cette sélection 2011 ) : « Cela faisait 25 ans que j’attendais ce moment, ce n’était pas un bon accueil mais un accueil incroyable. » « Je l’aurai en souvenir toute ma vie. » « On prenait la caméra et on continuait une sorte de conversation. »  « J’adore qu’on m’aime, j’adore qu’on aime ce que je fais quand j’aime autant ce que je fais. » Quant à Cavalier : « Le fait d’être aimé régulièrement dans la vie n’est pas mon problème. » Concernant les artistes, d’après Cavalier : « On ne s’aime pas tellement que ça et on s’abrite derrière ce qu’on fait. »

    Pour Cavalier, concernant les citations du film se rapprochant de citations réelles : « Je sais tout sur ceux qui ont le pouvoir mais c’est moi qui avais le pouvoir. Les citations étaient inconscientes. »

    Pour Vincent Lindon : « On passe son temps à vouloir plaire ou déplaire à son papa ou sa maman, toujours en réaction ».

    Pour lui ce film a changé son regard sur son métier : «  Je crois que, Alain, est en train de m’influencer sur une chose et une idée est en train de naitre » se déclarant las de tout ce qui précède habituellement le tournage (attente, maquillage, répétitions…), ce qui n’était pas le cas pour « Pater ». « Je pense que j’arrêterai ce métier plus tôt que prévu car je n’ai pas envie de devenir un vieil acteur. C’est ça qui a changé chez moi, je ne prends rien au sérieux, tout au tragique ».

    Sur ces paroles péremptoires et finalement très justes me rappelant la devise crétoise « tout est grave, rien n’est sérieux », je vous laisse pour partir vers de nouvelles aventures …un peu frustrée de ne pas avoir le temps de vous en raconter davantage…

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  • Critique - « Omar m’a tueR » de Roschdy Zem avec Sami Bouajila, Denis Podalydès

     

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    Adapter un fait divers aussi médiatique soit-il (ou justement parce qu’il est aussi médiatique) n’est jamais facile, d’abord parce qu’il faut respecter les droits des parties en cause, ensuite parce que réussir à susciter et maintenir l’intérêt du public avec des faits connus de tous nécessite une certaine maîtrise du récit.

    C’était ici d’autant plus difficile que le fait divers est relativement récent et toujours très présent dans les esprits puisqu’il remonte au 24 juin 1991 avec l’assassinat de Ghislaine Marchal retrouvée morte dans sa villa de Mougins. Des lettres tracées avec le sang de la victime accusent :    « Omar m’a tuer ».  Quelques jours plus tard, Omar Raddad (Sami Bouajila), son jardinier, est écroué à la prison de Grasse. Il parle peu et comprend mal le français. Dès lors, il est le coupable évident….et idéal.  Il n’en sortira que 7 ans plus tard, gracié, mais toujours coupable aux yeux de la justice. En 1994, révolté par le verdict, Pierre-Emmanuel Vaugrenard (Denis Podalydès), écrivain convaincu de l’innocence d’Omar Raddad ou du moins trouvant une belle opportunité dans la défense de son innocence, s’installe à Nice pour mener sa propre enquête et rédiger un ouvrage sur l’affaire…

    C’est Rachid Bouchareb qui devait initialement réaliser ce film consacré à « L’affaire Raddad ». Le succès d’« Indigènes » en a décidé autrement. Après s’être vu proposer le rôle d’Omar,  Roschdy Zem a finalement décidé de diriger lui-même le film, son second long-métrage après l’excellent « Mauvaise foi » en 2006.  Le scénario originel a ainsi été écrit par Rachid Bouchareb et Olivier Lorelle. Le scénario s'inspire de deux ouvrages : « Pourquoi moi ? »  dans lequel Omar Raddad livre son témoignage sur cette épreuve et  « Omar : la construction d'un coupable » du romancier Jean-Marie Rouard, un livre-enquête qui  dénonce les défaillances de la justice au moment de cette affaire criminelle et le lynchage médiatique dont a alors été victime Omar Raddad.

    Afin d’apporter du rythme à l’histoire, les scénaristes ont eu la bonne idée de montrer les destins croisés de l’accusé Omar Raddad et de l’écrivain dandy qui écrit un livre sur ce dernier, sans doute pas seulement pour de nobles raisons, épris au moins autant d’ambition que de justice, mais cela permet en tout cas de révéler les multiples zones d’ombre de l’enquête : aucune trace de sang détectée sur les vêtements qu'Omar Raddad portait au moment du crime, ses empreintes n'apparaissent nulle part sur les lieux du crime, les gendarmes se sont débarrassés de l'appareil photo qui contenait des clichés pris par la victime peu avant son décès, son corps a été incinéré moins d'une semaine après le meurtre, alors que de nouvelles autopsies auraient dû être effectuées…sans oublier les deux phrases "Omar m'a tuer" et "Omar m'a t" écrites de manière lisible, avec les lettres bien détachées alors que Mme Marchal était dans l’obscurité…et avec cette faute d’orthographe reprise dans le titre du film, d’autant plus étrange lorsqu’on sait que Ghislaine Marchal était férue de littérature et en particulier de Sagan, le nom de sa villa étant même inspiré de celui du roman « La Chamade » (que je vous recommande vivement par ailleurs).

    Plutôt que de s’attaquer aux médias et à la justice et à leur violence aveugle (traiter de l’implacable machine médiatique et judiciaire aurait d’ailleurs été un autre point de vue intéressant), Roschdy Zem a préféré réaliser un film à hauteur d’homme et dresser le portrait d’un homme simple démuni face à l’implacable machine judiciaire sans nier qu’il dépensait beaucoup  au jeu (on l’a aussi accusé de dépenser pour des prostituées…mais personne n’est jamais parvenu à le prouver). Démuni parce que ne possédant pas la maîtrise du langage et son premier interrogatoire par des gendarmes montre de manière flagrante l’incompréhension, l’angoisse qui le saisissent, dans toute son humanité désarmée.  Ce film est aussi un plaidoyer pour les mots, la maîtrise du langage, véritable arme (celle dont se sert l’écrivain et celle dont Omar est démuni) et instrument de pouvoir. Les mots qui l’accuseront, aussi.

    Comme souvent dans les films réalisés par des acteurs, l’interprétation est remarquable pas seulement grâce à la direction d’acteurs de Roschdy Zem mais évidemment aussi grâce à l’interprétation de Sami Bouajila qui interprète Omar Raddad avec sobriété, sans jamais en faire trop,  mais interprétant l’homme dans toute  sa dignité bafouée, sa fragilité, presque sa candeur. Dans un regard ou un silence, il parvient ainsi à exprimer toute la détresse d’un homme, sans parler évidemment de la performance physique (perte de poids, apprentissage du marocain).

    Roschdy Zem a eu l’intelligence de mettre en avant le coupable (devenu la seconde victime de cette histoire) plutôt que sa réalisation qui se contente de poser sa caméra sur pied ou sur des rails pour les scènes de l’écrivain qui « maîtrise » (sa situation, le langage)  et de porter la caméra à l’épaule pour filmer les scènes plus fébriles liées à Omar Raddad (désarmé, perdu).  Il n’oublie pas non plus la victime initiale en en dressant le portrait d’une femme libre, plutôt iconoclaste dont on ne souhaitait visiblement pas voir le passé révélé au grand jour !

    Un film de compassion, d’humanité poignante qui témoigne autant de celle de celui dont il raconte l’histoire que de celle de celui qui se trouve derrière la caméra, comme c’était d’ailleurs déjà le cas dans son premier film « Mauvaise foi ».

    Denis Podalydès est juste dans le rôle de cet écrivain parisien à mille lieux de l’univers de celui qu’il prétend défendre  et Maurice Bénichou dans celui de l’avocat Vergès qui trouvera en Omar son « premier innocent ».

    En attendant, le mystère demeure : les deux ADN masculins retrouvés sur les lieux du crime et qui ne correspondent ni l'un ni l'autre à celui d'Omar Raddad demeurent non identifiés. La Cour de révision, en charge du dossier a malgré cela décidé en 2002 de ne pas rejuger l'homme, qui reste toujours coupable aux yeux de la justice tout en ayant bénéficié de la grâce présidentielle de Jacques Chirac.  Et surtout demeure l’honneur bafoué d’Omar Raddad, un homme physiquement libre et mentalement emprisonné. A défaut de plaider ouvertement pour son innocence, le film plaide, avec compassion, pudeur et sobriété, pour une réouverture de l’enquête et une réhabilitation d’un homme privé du pouvoir des mots, que le pouvoir de quatre mots à a jamais enfermé et à qui le pouvoir d’un seul mot pourrait rendre la liberté.

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  • Programme du Festival Lumière de Lyon 2011 : le Prix Lumière 2011 pour Gérard Depardieu

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    En 3 ans, le Festival Lumière de Lyon a réussi à s'imposer comme un des grands rendez-vous de l'année professionnelle avec à chaque fois une programmation remarquable... Pas tellement étonnant lorsque l'on sait que le directeur de l'Institut Lumière se nomme... Thierry Frémaux.  Le festival aura lieu du 3 au 9 octobre. Après Clint Eastwood la première année du festival et Milos Forman l'an passé, c'est Gérard Depardieu qui sera à l'honneur pour cette nouvelle édition du festival, il recevra son prix le samedi 8 octobre. Thierry Frémaux a ainsi expliqué ce choix:

    Gérard Depardieu est un homme très populaire, très vu, très aimé mais qui n'a jamais reçu vraiment d'hommage. Il nous a semblé que la place qu'il occupe dans l'histoire du cinéma français et ce que avec lui on peut redire de ce qu'est le cinéma français des années 70, 80, 90 noussemble être un prétexte formidable pour l'acceuillir ici. Il adore Lyon et a accepté très rapidement alors qu'il a souvent refusé d'être honoré. Il faudra que plus qu'un hommage se soit une fête car il a encore beaucoup de choses à faire."

    Au programme également cette année:

    -190 séances dans 36 cinémas

    -une nuit de la science fiction sur le thème de la Terre à la Lune le vendredi 7 octobre avec : Voyage dans la Lune de Georges Méliès (1902), Blade Runner de Ridley Scott (1983) ou Soleil vert de Richard Fleischer (1973) )

    - une soirée pour les enfants avec la projection de La Guerre des Boutons d'Yves Robert (1962)

    -une rétrospective des films restaurés de Jacques Becker et de Kevin Brownlow, William Wellman

     -une sélection de films de Yakuza

     -le mercredi 5 octobre un ciné-concert avec la projection du film de Rex Ingram Les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse (1921) accompagné par l'Orchestre national de Lyon.

    -Des projections de classiques en présence des réalisateurs

    : Le Sucre de Jacques Rouffio (1978)
    La Fiancée du pirate de Nelly Kaplan (1969)
    Le Sauvage de Jean-Paul Rappeneau (1975

    -Présentation de Corman’s World : Exploits of a Hollywood Rebel d’Alex Stapleton (2011)En présence de Roger Corman et Alex Stapleton.
    Vous connaîtrez le programme définitif fin août mais pouvez d'ores et déjà réserver vos places pour la cérémonie d'ouverture et pour la séance jeune public.

    Plus de renseignements sur www.festival-lumiere.org

  • Bilan du Festival du Film de Cabourg (Journées romantiques ) : 25ème anniversaire

    cab56.jpgCette année, Cabourg célébrait ses 25 années de cinéma romantique, un romantisme qui, dans la sélection de cette année, était souvent désenchanté, déçu, timoré, condamné, vain quand il n’était pas implicite ou même absent des films présentés. Les âmes des personnages étaient en effet plus souvent esseulées ou perdues que tourmentées. Le romantisme était peut-être finalement davantage dans l’atmosphère follement mélancolique et passionnément pluvieuse de Cabourg que dans les salles obscures.  Quelques films néanmoins (heureusement ) répondaient à cette définition et sortaient du lot.

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    regarder.jpgParmi ceux-ci, « J’aime regarder les filles », premier long métrage  de Frédéric Louf présenté dans la section Panorama du festival et dont l’action débute la veille du 10 mai 1981. C’est ce jour-là que Primo (Pierre Niney) et Gabrielle (Lou de Laâge) se rencontrent. Ils ont 18 ans. Primo va bientôt passer le bac. Gabrielle fait partie de la bourgeoisie parisienne, lui est fils de petits commerçants de province. Primo est ébloui par le charme de Gabrielle. Il va s’inventer une vie qui n’est pas la sienne… Frédéric Louf arrive à transcrire la fébrilité et la fougue de la jeunesse, cet âge où tout est possible, à la fois infiniment grave et profondément léger, où tout peut basculer d’un instant à l’autre dans un bonheur ou un malheur pareillement excessifs, où les sentiments peuvent éclore, évoluer ou mourir d’un instant à l’autre, où tout est brûlant et incandescent. De son film et de ses interprètes se dégagent toute la candeur, la fraîcheur mais aussi parfois la violence et l’intransigeance de cet âge décisif. Et puis il y a la littérature qui cristallise magnifiquement les sentiments avec une des œuvres les plus marquantes du romantisme « On ne badine pas avec l’amour » de Musset car romantique « J’aime regarder les filles » l’est indéniablement. Et en arrière plan l’éveil à la politique, la violence sociale étant d’ailleurs aussi présente comme dans l’œuvre de Musset.  Un film simple, touchant, drôle qui a la grâce des 18 ans de ses personnages, à la fois fragiles et résolus, audacieux, insouciants et tourmentés et qui incarnent à merveille les héros romantiques intemporels même si le film est volontairement très ancré dans les années 80. Au sommet de la distribution, Pierre Niney (que vous avez pu notamment voir dans « les Emotifs anonymes » et « L’autre monde ») et Audrey Bastien qui incarnent toutes les nuances, les excès, les passions, la vulnérabilité et la force de la jeunesse avec un naturel confondant et avec ce petit quelque chose en plus, si rare et précieux, qui se nomme la grâce, le tout servi par des dialogues bien écrits. Mon coup de cœur de cette édition 2011 dont je vous reparlerai.

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     Mon autre coup de cœur s’intitule « Au cul du loup » et est le premier long métrage de Pierre Duculot présenté dans la section Panorama du festival. Il suit Cristina, presque trentenaire, qui vit dans la région de Charleroi avec son petit ami ;  elle y travaille comme serveuse. L’héritage d’une maison en Corse que lui a léguée sa grand-mère va chambouler son existence. Alors que tout le monde l’incite à vendre, elle va peu à peu y trouver un sens à sa vie et le goût de vivre, vraiment. Pierre Duculot filme son anti-héroïne avec beaucoup de délicatesse, d’empathie, de sensibilité et son éveil à un nouvel amour (surtout celui de la vie mais aussi celui d’un berger) au contact de la rudesse et de la beauté des paysages corses. Le film est porté par sa fascinante actrice principale Christelle Cornil, une actrice malheureusement encore méconnue d’une étonnante présence. « J’aime la beauté des filles ordinaires qui ne le sont pas » a déclaré Pierre Duculot lors du débat d’après film et c’est exactement ça. Christelle Cornil derrière une apparence banale révèle peu à peu, grâce à la délicatesse du regard de Pierre Duculot derrière la caméra, une beauté, une détermination et un caractère tout sauf ordinaires. Pierre Duculot a débuté sa carrière comme assistant des Dardenne et on retrouve dans son cinéma cette manière de révéler le meilleur des acteurs et des êtres derrière leur froideur parfois, cette manière d’accorder beaucoup de place au silence, à l’implicite, aux fêlures tacites des personnages, cinéaste également de l’intime  et de l’universel. Son film a été « fait avec le budget de la bande-annonce de l’élève Ducobu » a ironisé le réalisateur (800 000 euros) et c’est insensé qu’il n’ait pas de distributeur. J’espère que cette sélection l’aidera à en trouver un.

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    « Bonsaï » film en compétition du chilien Cristian Jimenez entrelaçait lui aussi fiction, réalité et littérature comme les branches du Bonsaï qui donne son titre au film.   Julio (Diego Noguera) y rencontre un écrivain qui cherche un assistant pour dactylographier son roman mais il n’est pas retenu. Il décide cependant d’écrire un manuscrit qu’il fait passer pour celui de l’écrivain auprès de sa maîtresse. Il s’inspire en réalité de son histoire d’amour passionnelle avec Emilia, huit ans plus tôt, lorsqu’ils étaient étudiants en littérature. La complexité et la fragilité de l’architecture du bonsaï mais aussi le soin qu’il faut lui apporter constituent une parabole de son histoire d’amour. «Bonsaï » est avant tout une belle déclaration d’amour à Proust et à la littérature. « On n'aime que ce en quoi on poursuit quelque chose d'inaccessible, on n'aime que ce qu'on ne possède pas », écrivait par exemple Proust dans «  La Prisonnière ». Cette citation pourrait parfaitement résumer ce film triste et sensuel comme une recherche du temps perdu…celui vécu entre le jeune romancier et son héroïne, amour de jeunesse, sans doute le seul véritable amour de sa vie…

    ville3.jpgProust décidément omniprésent puisqu’il l’était également dans « En ville » de Valérie Mréjen et Bertrand Schefer qui suit la jeune Iris, 16 ans, qui vit dans une petite ville de province la fin de son adolescence. Elle rencontre par hasard Jean, photographe parisien d’une quarantaine d’années. Leur relation va évoluer en amitié amoureuse. Proust est cette fois présent par son célèbre questionnaire. Là aussi un film très littéraire aux accents parfois truffaldiens qui vaut surtout par la relation trouble entre Jean interprété par le beaucoup trop rare Stanislas Merhar (son très beau monologue dans lequel il exprime ce sentiment amoureux qu’il voit renaitre avec bonheur vaut à lui seul le déplacement) et Iris interprétée par la lumineuse Lola Créton. Une parenthèse qui a pour eux toute la beauté ambivalente d’une amitié amoureuse, celle d’une renaissance. Vous y retrouverez Valérie Donzelli…présente dans 3 films de ce festival !

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    Littérature toujours avec « Brighton rock » de Rowan Joffe adapté d’un roman de  Graham Greene de 1938 ( par le scénariste de l’excellent « The American » de Anton Corbijn dont l’atmosphère était d’ailleurs déjà menaçante et fascinante) transposé dans les années 1960.  Entre le thriller et la romance, « Brighton Rock » vaut surtout pour la beauté mélancolique et inquiétante de Brighton et du personnage principal qui emprunte au cadre du film ce mélange de rudesse et de fragilité mélancoliques. Sam Riley interprète à merveille ce personnage complexe de Pinkie Brown, petite frappe de 17 ans tourmenté et mégalomane qui veut venger le meurtre de son chef de gang et s’imposer comme leader. Lorsque Rose, une jeune et innocente serveuse tombe sur les preuves le liant à un règlement de comptes, il décide de la séduire afin de s’assurer de son silence. Elle tombe sous son charme aussi envoûtant qu’inquiétant… Le traitement comme la réalisation manquent un peu de fougue pour donner à cette histoire les accents lyriques auxquels elle aurait pu se prêter, néanmoins une des bonnes surprises de cette édition avec une distribution remarquable :  Helen Mirren, John Hurt, Andrea Riseborough dans le rôle, sur le fil, de la candide et passionnée Rose.

    Je passe sur la déception Miranda July qui cette fois avec son nouveau film « The future » oublie un peu la poésie (toujours néanmoins présente par petite touches) pour privilégier l’absurde en abordant la difficulté de créer, de vivre dans le présent dont elle fait l’éloge en oubliant peut-être un peu trop celui du spectateur. Je passe également sur le sympathique « L’art de séduire » de Guy Mazarguil qui vaut surtout pour Mathieu Demy formidable en personnage de comédie romantique maladroit…et une nouvelle fois pour Valérie Donzelli fantasque et volubile à souhait.

    Comme chaque année, la compétition des courts-métrages réservait de belles surprises même si là aussi romantisme signifiait plutôt solitude, amours désenchantés ou déçus, voire morbides,  avec un réel coup de cœur pour « Alexis Ivanovich vous êtes mon héros » de Guillaume Gouix, malheureusement oublié du palmarès : « Alex et Cerise s’aiment d’un amour joyeux. Un jour, Alex est agressé devant Cerise et la peur l’empêche de réagir. Alors que Cerise fait de cette histoire une simple anecdote, Alex la vit comme une réelle humiliation. Et si son amour-propre le faisait passer à côté du bonheur. » Le fait que Guillaume Gouix soit acteur n’est sûrement pas étranger au jeu des comédiens qui résonne ici si juste (Swann Arlaud est réellement remarquable et me fait aussi penser à cette phrase plus haut  de Pierre Duculot à propos de son actrice principale « la beauté des filles ordinaires qui ne le sont pas », Swann Arnaud a ainsi la beauté d’un garçon ordinaire dont Guillaume Gouix révèle la belle fragilité, cela confirme d’ailleurs au passage le talent de découvreur d’acteurs de Jean-Pierre Améris puisque, Swann Arlaud, comme Pierre Niney, dont je vous parlais plus haut jouait dans « Les Emotifs anonymes », son dernier film.) Guillaume Gouix arrive à rendre particulièrement touchant ce personnage radieux et joyeusement désinvolte qui, en une fraction seconde, blessé dans son orgueil, va tout remettre en question, découvrant ne pas être le héros qu’il aurait aimé être aux yeux de son amoureuse. Ce film recèle de ces instants de vérité dont parle si souvent Lelouch ( même si ce court-métrage n’a rien d’un Lelouch) qui auraient à eux seuls valu une récompense à ce film très juste et sensible.

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    Mention spéciale (de ma part et non de celle du jury puisque ce film ne figurait pas non plus au palmarès) également pour « Aglaée » de Rudi Rosenberg  (« un collégien perd un pari et a pour gage de proposer à une jeune handicapée de sortir avec lui ») dans lequel tous les jeunes comédiens sont étonnants de justesse à commencer par l’interprète principale mais aussi pour « Cheveu » de Julien Hallard pour lequel Franc Bruneau a obtenu le prix d’interprétation masculine et dans lequel « Philippe perd ses cheveux. Combien de temps lui reste-t-il avant la calvitie ? Son dermatologue est formel : seul son père a la réponse à cette question ». Cette rencontre avec son père va le ramener vers le passé, et confronter l’essentiel et le dérisoire avec là aussi beaucoup de justesse...même si ce film, à mon sens n’a rien de romantique.

     « Prochainement sur vos écrans » de Fabrice Maruca est à voir absolument pour sa succession de bandes annonces pour raconter une rencontre : comédie romantique, film d’horreur, film d’action, mélo et témoigne d’un réel don de l’observation mais aussi d’adaptation de son auteur. Un pastiche très drôle de ces différents styles cinématographiques et accessoirement une formidable carte de visite pour le réalisateur qui témoigne de sa faculté d’adaptation à ces différents genres.

    Et enfin « Hymen » de Cédric Prévost pour l’interprétation remarquable notamment de Grégory Gadebois (déjà remarquable dans le prix Michel d’Ornano du dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville « Angèle et Tony »).

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    Dommage que pour la clôture la salle ait été divisée en deux (retrouvez le palmarès complet en cliquant ici), ce qui a rendu inaudible les propos des lauréats pour la moitié des spectateurs réduits à regarder la cérémonie sur des écrans.  Toute la salle a néanmoins pu se retrouver pour profiter du karaoké  et du concert improvisé qui a suivi entre l’improbable hommage de Dominique Besnehard à Sylvie Vartan (bien meilleur agent et désormais producteur que chanteur donc), celui de Pauline Lefevre à Elvis et  « Stand by me » remarquablement chanté par Tomer Sisley (un petit extrait ci-dessous).

    Je me réjouis du prix du public attribué à « Et maintenant on va où » dont je vous parlais le premier jour du festival, ici. Sans grande surprise Valérie Donzelli a obtenu le Swann d’or avec « La guerre est déclarée » inspiré du combat qu’elle a mené avec son compagnon contre la maladie de son fils.  Une déclaration de guerre mais surtout d’amour. Un hymne à la vie, au courage, à la fugacité du bonheur, un film plein de douce fantaisie, avec une inspiration toujours très truffaldienne, et jamais mièvre. Un film bouleversant d’une beauté subtile et sensible.  A cette occasion, je vous invite à redécouvrir ma vidéo du passionnant débat qui avait suivi la projection à Cannes et je vous rappelle que vous pourrez également voir ce film à Paris Cinéma puisqu’il figurera en compétition.

    Un festival qui a au moins le mérite de mettre en avant un cinéma populaire parfois méprisé par une certaine presse, un festival malheureusement boudé par les grands médias et dont le grand mérite est d’avoir révélé de nombreux cinéastes et comédiens qui reviennent d’ailleurs chaque année avec plaisir. Un festival pour moi aussi rythmé par la mélodie douce et mélancolique des souvenirs, réminiscence proustienne sans doute même si contrairement l’auteur indissociable de Cabourg (et a fortiori cette année où il était tellement présent dans les films en sélection), je ne pense heureusement pas que seul le temps écoulé, perdu, a une valeur. Un festival qui, à défaut de nous parler vraiment d’amour, a renforcé le mien pour les mots, l’écriture…et les festivals une fois de plus indissociables de jolis rencontres et de précieux moments hors du temps, fut-il irrémédiablement pluvieux. Dommage d’ailleurs que la météo capricieuse ait empêché les projections des films sur la plage comme « Voir la mer » de Patrice Leconte, « Les Yeux de sa mère » de Thierry Klifa et « Les émotifs anonymes » de Jean-Pierre Améris que je vous encourage à voir si ce n’est déjà fait.

    Prochains festivals à suivre en direct sur inthemoodforcinema.com : Paris cinéma du 30 juin au 13 juillet, Festival du Cinéma Américain de Deauville du 2 au 11 septembre 2011 et Festival du Film Britannique de Dinard du 5 au 9 octobre 2011. Et très bientôt, le retour des critiques de films un peu délaissées ces derniers temps.

    Et en attendant, je vous engage à revoir quelques chefs d’œuvre du cinéma romantique dont vous pouvez lire mes critiques en cliquant sur leurs titres:

    Sur la route de Madison de Clint Eastwood

    Un coeur en hiver de Claude Sautet

    Casablanca de Michael Curtiz

    La femme d'à côté de François Truffaut

    Un homme et une femme de Claude Lelouch

    Le Quai des brumes de Marcel Carné

    La fièvre dans le sang d'Elia Kazan

    Les Enchaînés d'Alfred Hitchcock

    Gatsby le Magnifique de Jack Clayton

    Ludwig ou le crépuscule des Dieux de Luchino Visconti

    Etreintes brisées de Pedro Almodovar

    César et Rosalie de Claude Sautet

    L’étrange histoire de Benjamin Button de David Fincher

    Les noces rebelles de Sam Mendes

    Les amours imaginaires de Xavier Dolan

    Les émotifs anonymes de Jean-Pierre Améris

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    Lien permanent Imprimer Catégories : FESTIVAL DE CABOURG 2011 Pin it! 5 commentaires