IN THE MOOD FOR CINEMA - Page 77
-
Voici une nouvelle critique de mon recueil de 16 nouvelles sur les festivals de cinéma "Les illusions parallèles" publiée ce jour sur un blog littéraire (cliquez sur l'image ci-dessus pour y accéder). Merci à sa rédactrice pour ce coup de cœur et ce 5/5 sur son blog "Des plumes et des livres !"Retrouvez également l'entretien accordé à ce même blog il y a quelques mois, ici.Et pour ceux qui ne l'auraient pas encore, il est toujours disponible : chez mon éditeur Les éditions du 38, en librairie directement ou à la commande, chez Amazon, Fnac...Retrouvez d'autres critiques répertoriées ici.Et bien sûr n'hésitez pas à laisser votre avis sur Amazon, Fnac, Babelio etc.
-
Mon premier texte traduit...en allemand pour Short Edition
Voici mon premier texte traduit...en allemand ! En février dernier, je remportais le prix du jury d'un concours d'écriture de nouvelles organisé par Short Edition dont vous pouvez trouver des distributeurs d'histoires courtes un peu partout. Plus de 100 distributeurs sont ainsi disséminés en France et dans le monde. Un distributeur d'Histoires Courtes est même installé au Cafe Zoetrope - de Francis Ford Coppola - à San Francisco.Le distributeur continue à s'exporter et il y a quelques semaines a été installé le premier Distributeur en Suisse allemande, très précisément à la gare de Zurich. A cette occasion, Short Edition a choisi de faire traduire ma nouvelle lauréate "L'être romanesque" en allemand, une nouvelle qui sera ainsi disponible à la gare de Zurich.La voici donc en allemand pour les germanophones, ci-dessous, et dans sa version française toujours sur le site de Short Edition, ici.Et pour ceux qui veulent lire davantage de nouvelles, plus longues, mon recueil de 16 nouvelles Les illusions parallèles (Les éditions du 38) est toujours disponible. -
Mon avis sur l'Hôtel Barrière Le Royal de Deauville : séjour de rêve pour le Festival du Cinéma Américain de Deauville 2017
Photo ci-dessus © Dominique Saint
Je vous ai souvent parlé ici de l’Hôtel Barrière Le Royal de Deauville, mon adresse deauvillaise de prédilection, où j’ai eu l’occasion de séjourner à plusieurs reprises mais toujours seulement trois ou quatre jours. Si je vous en parle à nouveau aujourd’hui, c’est parce que, en septembre dernier, à l’occasion du Festival du Cinéma Américain de Deauville (dont vous trouverez mon compte rendu cinématographique complet et détaillé, ici), mais aussi à l’occasion de la dédicace de mes livres Les illusions parallèles et L’amor dans l’âme (Editions du 38) à l’hôtel Barrière Le Normandy voisin (mon article sur l’hôtel Normandy est à retrouver ici), en partenariat avec la formidable librairie de Deauville Jusqu’aux lueurs de l’aube, également pendant le festival ( hôtel et festival qui sont le cadre de plusieurs passages des livres en question ), j’ai eu l’immense plaisir d'être invitée 15 jours au Royal. Petite parenthèse pour vous annoncer que ma prochaine séance de dédicaces aura lieu au prestigieux Salon du Livre de Paris en mars 2018.
[ Dire que ce séjour à l’Hôtel Royal fut idyllique est un euphémisme tant tout fut absolument parfait ! Une véritable parenthèse de sérénité. Rarement un hôtel a aussi bien porté son nom tant j’ai été reçue comme une véritable princesse. Et c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de vous en parler à nouveau aujourd’hui pour partager avec vous ce séjour inoubliable qui vous donnera peut-être envie à votre tour de découvrir cet hôtel mythique et d’y vivre une expérience hors du temps. Peut-être cela vous donnera-t-il aussi une idée pour la Saint-Sylvestre si vous n’avez encore rien de prévu ou bien une idée de cadeau de Noël comme un séjour ou un soin dans son splendide nouveau Spa Diane Barrière.
J’avais aussi envie de partager avec vous les nombreux clichés que j’ai réalisés pendant mon séjour qui fut un joyeux tourbillon et ceux réalisés par le photographe Dominique Saint (également auteur des photos des quatrièmes de couverture de mes livres) qui a eu la gentillesse de me proposer une séance photos dans l’hôtel.
Photos ci-dessus © Dominique Saint
Après mon article consacré à l’hôtel Royal Barrière de La Baule (à retrouver ici), le mois dernier, c’est donc au Royal de Deauville que je vous emmène cette fois-ci. En préambule, je tiens à remercier tout particulièrement le Directeur de l’hôtel Cyril Casabo qui est pour beaucoup dans le caractère convivial et chaleureux des lieux (et qui vous parlera avec passion de cet hôtel où il a depuis toujours rêvé de travailler) et qui contribue à ce que cet hôtel ait tant d’habitués qui le choisissent plutôt qu’un autre. Je remercie aussi tout particulièrement les chefs de réception adjoints, M.Sagot et Mme Matter pour leur accueil ainsi que le Directeur d’exploitation M.Franck Louâpre et toute l’équipe du Royal qui a été aux petits soins…
Deauville (ville à laquelle je consacre un autre blog, Inthemoodfordeauville.com) est à jamais pour moi le lieu où fut exacerbée ma passion pour le cinéma et le lieu qui changea le cours de ma vie, lors de mon premier Festival du Cinéma Américain de Deauville, il y a …25 ans déjà. Je n’ai jamais cessé d’y retourner depuis. L’hôtel Royal, lié pour moi a tant de souvenirs, représente la quintessence de Deauville. Et c’était indéniablement l’endroit idéal pour profiter au mieux du 43ème Festival du Cinéma Américain de Deauville (mon 25ème donc !).
C’est Nathalie Ryan, architecte d’intérieur et décoratrice, qui a notamment créé la somptueuse suite Dior à l’Hôtel Majestic à Cannes, qui s’est chargée de la décoration avec pour credo de « respecter et conserver l’âme historique des bâtiments, avec leurs codes, leurs caractères, en insufflant un décor d’aujourd’hui, authentique. » La décoration du lobby, d’un rouge là aussi chaleureux et étincelant, vous donne envie de ne plus le quitter, surtout que la luminosité et l’atmosphère varient au gré des heures, entre cocooning et ambiance lounge, élégante et romantique le soir avec, en plus, une excellente bande sonore.
L’hôtel 5 étoiles a tout du palace qu’il incarne et qu’il avait vocation à être dès sa construction, la preuve: il fait aussi partie de la chaîne Leading Hotels of the World qui compte ce qu’il y a de mieux dans l’hôtellerie mondiale.
L’hôtel compte 217 chambres et 30 suites et dispose d’un restaurant, le Coté Royal mais aussi d’un bar où vous pourrez vous restaurer, L’Etrier.
Bâti il y a plus de cent ans, le Royal a ainsi su s’adapter au fil du temps, se moderniser tout en conservant son luxe et son charme d’antan, bien loin des hôtels standardisés sans âme qui fleurissent un peu partout.
Au Royal rien ne manque et avec le rythme trépidant du festival, je n’ai même pas eu le temps de profiter de tout et notamment pas de son nouveau Spa Diane Barrière. Le centre de yoga Tigre Yoga club propose ainsi des cours de yogas, méditation de pleine conscience, arts énergétiques et cours de Pilates. Le Tigre Yoga Club est un concept unique; à la fois club de bien-être, institut de soins et concept store dédié au wellness. Y sont pratiqués techniques de pointe de soins et massages du concept Aerial Wellbeing for the Future™ . Ce lieu réunit des soins raffinés, efficaces, consacrés à la beauté et au bien-être : manucures et pédicures, épilations à la cire douce et endermologie corps et visage .
Au Royal, vous trouverez aussi hammam, sauna, solarium, piscine privée (extérieure mais chauffée à 28 degrés et très agréable) et centre de fitness… Vous pouvez même y louer gratuitement des vélos et profiter du magnifique salon Jacques Dessange situé au deuxième étage ! Les beaux jours, vous pourrez aussi profiter des buffets autour de la piscine.
A proximité immédiate de l’hôtel, Deauville et ses environs proposent aussi de nombreuses activités sportives et de plein air : golf, thalassothérapie (de l’autre côté de la rue), tennis, équitation, sports nautiques, casino (juste à côté)… et bien sûr, les planches où vous pourrez profiter de la beauté lunatique et du cadre revigorant et enchanteur de ce lieu deauvillais emblématique sans compter les nombreuses activités à Deauville, toute l’année. Vous pourrez aussi aller à pied à l’hippodrome.
La chambre, réellement splendide qui m’a été attribuée (au 4ème étage les deux premiers jours puis la 612 au 6ème étage le reste du séjour, je vous la recommande !) bénéficiait d’une vue à couper le souffle sur Deauville (je n’ai pas été avare de photographies de cette vue tant elle est sublimement changeante au gré du temps et des heures de la journée) et d’un décor princier avec, pour agrémenter le séjour, toutes les petites attentions qui distinguent un bel hôtel d’un hôtel de luxe et, pour couronner le tout, une splendide salle de bain (avec douche et baignoire), véritable havre de bien-être et de luxe.
Ma photo ci-dessous a eu le deuxième prix du concours Instagram Barrière de cet été.
Petit souvenir du room service avant la dédicace… Là aussi service et présentation absolument parfaits.
L’accueil et le service ont d’ailleurs été irréprochables de l’arrivée au départ. A tous les niveaux, des femmes de chambre à la direction en passant par le bar, la conciergerie et la réception, l’amabilité était remarquable. J’ai réellement eu l’impression d’être à la maison pendant 15 jours.
Chaque matin, avant d’aller aux projections, le petit déjeuner était un moment précieux avec un large choix de produits frais mais aussi des crêpes, pancakes, et tout ce dont vous rêvez pour le petit déjeuner. Là aussi, l’accueil et le service ont été (pardon pour la redondance) parfaits.
Que vous soyez clients ou non de l’hôtel, vous pourrez bien sûr aussi profiter du bar et de sa carte, riche en produits de qualité et qui vous permettra de vous restaurer dans un cadre agréable.
A noter: les amis à quatre pattes des clients sont particulièrement bien reçus et choyés avec, là aussi, de délicates attentions.
Vous l’aurez compris, je vous recommande le Royal, fastueux et majestueux hôtel, sans la moindre réserve. Un hôtel qui a une âme et qui est le lieu idéal qui vous permet de profiter de celle de Deauville dans des conditions de rêve. Ci-dessous, ma notation détaillée de l’hôtel et d’autres conseils pour profiter au mieux de l’hôtel avec des photos de mes précédents séjours.
A noter : le Royal est actuellement fermé. L’Hôtel Barrière Le Royal Deauville réouvrira ses portes les week-ends à partir du 31 mars jusqu’à la réouverture totale le 27 avril 2018.
L’Hôtel sera ouvert pour la Saint-Sylvestre du 29 décembre 2017 au 1er janvier 2018.Notation de l’hôtel Royal Barrière par Inthemoodforhotelsdeluxe.com
Situation de l’hôtel: Idéale, en plein cœur de Deauville, à deux pas du centre, du casino, de la plage, du centre de thalassothérapie, juste en face du CID où se déroule le festival, bref, le meilleur emplacement de la ville.
Classification officielle de l’hôtel: 5 étoiles
Classification de l’hôtel par la rédaction d’Inthemoodforhotelsdeluxe.com : Label inthemoodforluxe
Nombre de chambres: 217 chambres et 30 suites
Chaînes hôtelières auxquelles appartient l’hôtel: Barrière,Leading Hotels of the World
Adresse de l’hôtel:
Boulevard Cornuché – BP 74400 – 14804 Deauville
Pour contacter l’hôtel – service Réservation:
+33(0)970 809 555
-Dates de séjour:
Septembre 2017
-Service (1M à 5M):
5M. Rien à redire. Service digne d’un palace, parfait du début à la fin du séjour.
-Amabilité (1M à 5M):
5M. Service affable et personnalisé que ce soit à la réception, ou dans le restaurant, au bar, dans les étages. Là aussi amabilité « palace ».
-Propreté (1M à 5M):
5M. Rien à redire.
-Loisirs/Animations (1M à 5M):
5M. Comme précisé plus haut, en plus des services que propose l’hôtel, l’hôtel est situé au cœur de toutes les activités de la ville. Vous n’aurez que l’embarras du choix.
-Situation (1M à 5M):
5M. Idéale.
-Décoration (1M à 5M):
5M. Joliment sobre et élégante dans les chambres rénovées, particulièrement chaleureuse dans les parties communes, le tout créant une atmosphère cosy propice à la détente.
Photos ci-dessus prises dans la suite Johnny Hallyday.
-Confort de la chambre (1M à 5M):
5M. Rien ne manque. Salle de bain particulièrement agréable et vue exceptionnelle et idyllique pour les chambres vues mer au décor somptueux, élégant, cosy, chaleureux.
-Equipements de l’hôtel (1M à 5M):
5M. Rien ou presque ne manque.
-Originalité- Le(s) plus qui fait/font de cet hôtel un établissement « in the mood for luxe » (1M à 5M):
5M.
Son emplacement
L’accueil, irréprochable, remarquable, personnalisé.
La gastronomie
Sa piscine extérieure
–Rapport qualité/prix (1M à 5M) : 4M
-Inconvénient(s) de cet hôtel :
Je n’en vois pas…
Atouts de cet hôtel:
– l’amabilité
– l’emplacement
-la décoration
-la piscine extérieure
-le buffet de petit déjeuner
-la vue depuis les chambres côté mer
-le bar très agréable
-Recommanderiez-vous cet hôtel (Oui ou Non):
Oui. Sans hésiter.
-Conseil(s) aux futurs clients :
Avant la rénovation complète de l’hôtel, choisissez plutôt une chambre rénovée, vue mer et à un étage élevée si vous voulez bénéficier de la vue à couper le souffle immortalisée sur mes photos. De l’autre côté, la vue sur Deauville et la campagne n’en est pas moins très belle aussi, seulement moins spectaculaire.
-Bilan et appréciation globale (1M à Label intemoodforluxe):
Label inthemoodforluxe
-
Critique de DALIDA de Lisa Azuelos à voir à 21h ce soir sur Canal +
Le biopic (film autobiographique qui, par définition, retrace l’existence de personnalités ayant existé) est un genre cinématographique à la mode, symptomatique d’une époque dans laquelle la notoriété (quelle qu’en soit l’origine) apparaît comme la réussite ultime. Aussi parce qu’il retrace le plus souvent des destins tragiques qui permettent au spectateur de mêler à l’envie et l’admiration, une sorte de pitié consolante, et de se rassurer sur la vanité universelle de l’existence, y compris pour ses idoles. Enfin parce qu’il s’agit, aussi, d’un genre très commercial puisque cela garantit déjà un nombre minimum de spectateurs, ceux qui appréciaient la personnalité disparue. Avec 170 millions de disques vendus, un film sur Dalida dispose indéniablement d’un public acquis.
Voici donc le biopic sur Dalida. Après « La Môme », « Sagan », « J.Edgar » (remarquable), « La dame de fer », « My week with Marilyn ». Après Ali, Ray, Marie-Antoinette, Cloclo… Autant de prénoms comme titres de films qui suffisent à résumer la notoriété de ceux qu’ils désignent et leur potentiel empathique et commercial. Il y eut aussi « Gainsbourg, vie héroïque », un conte, et une libre adaptation, liberté dont était épris celui dont il retraçait une partie du parcours artistique et des histoires d’amour souvent célèbres et tumultueuses, un film en apparence désordonné et confus comme émergeant des volutes de fumée et des vapeurs d'alcool indissociables de Gainsbourg. Le film sur Dalida, s’il n’avait pas la même ambition artistique, n’en est pas moins particulièrement efficace et réussi.
Je suis pourtant allée sans grande conviction découvrir ce nouveau film de Lisa Azuelos, n’étant pas particulièrement sensible aux chansons de Dalida. « Une rencontre », le dernier film de la réalisatrice m’avait laissé le souvenir d’une très belle comédie romantique, une ode moderne et réjouissante aux illusions, portée par des acteurs et une réalisation lumineux. Ce souvenir m’a donc incitée à rencontrer cette « Dalida ».
De sa naissance au Caire en 1933 à son premier Olympia en 1956, de son mariage avec Lucien Morisse, patron de la jeune radio Europe n°1, aux soirées disco, de ses voyages initiatiques en Inde au succès mondial de Gigi l’Amoroso en 1974, le film Dalida est le portrait intime d’une femme absolue, complexe et solaire... Une femme moderne à une époque qui l’était moins ... Malgré son suicide en 1987, Dalida continue de rayonner de sa présence éternelle.
« Cloclo » retraçait le destin tragique de Claude François, icône de la chanson française décédée à l’âge de 39 ans qui, plus de trente ans après sa disparition, continue de fasciner. Tout commençait (et tout s’expliquait) par son enfance et son adolescence en Egypte auprès d’une mère aimante et d’un père irascible et exigeant dont le travail consistait à contrôler le trafic de la Compagnie du Canal de Suez et qui en, en 1956, lors de la nationalisation du canal de Suez, dut rentrer en France avec sa famille, une humiliation dont il ne se remettra jamais. Une fois la famille, alors désargentée, arrivée en France, Claude fit ensuite ses débuts de musicien au Sporting club de Monaco, ce que désapprouva son père qui souhaitait le voir devenir comptable, refusant alors de lui parler et, jusque sur son lit de mort, il s’y obstinera.
Un artiste se construit sur des failles et c’est par celle-ci, ce silence et cette incompréhension douloureux, que ce biopic sur Claude François expliquait en grande partie la complexité, l’insatisfaction permanente, le perfectionnisme de Claude François mais aussi sa rage de réussir. C’est aussi autour des failles enfantines que s’articule le scénario de « Dalida » . Et c’est ce qui le rend passionnant. Chaque séquence, chaque chanson illustrent une blessure supplémentaire, autant d’éraflures devenant au fil des ans une plaie béante et profonde, provoquant cette douleur indicible masquée par les paillettes et les projecteurs qui a mené à son suicide, comme inéluctable. Dès les premiers plans, l’histoire est placée sous le sceau de la tragédie, les ultimes mots que Dalida écrit avant de se suicider, sa première tentative de suicide et les témoignages de ses proches chez un psychiatre.
L’accent est mis sur l’enfance de Dalida, née Iolanda Cristina Gigliotti au Caire en 1933 dans une famille italienne, qui depuis lors s’est toujours vue laide, une maladie des yeux l’ayant contrainte à porter de grosses lunettes et provoquant les moqueries des autres enfants. Autre point commun et non des moindres avec l’enfance de Cloclo, sa relation à son père, qui explique en grande partie ses souffrances. Le père de Dalida, professeur de violon, accusé de collaboration, Italien dans une Egypte à domination anglaise alors que la Grande-Bretagne est en guerre contre l’Italie, a en effet été fait prisonnier pendant la guerre, dans un camp dans le désert. Il y resta 4 ans. De cet emprisonnement, il revient malade et violent. Dalida souhaitait alors sa mort ( il décéda en 1945) et en portera toujours la culpabilité comme elle portera ensuite la culpabilité des suicides successifs des hommes de sa vie.
Lisa Azuelos a eu la bonne idée de construire un film à l’image de son héroïne, constitué de contrastes : mélancolique et lumineux, à la fois flamboyant (dans les costumes, les reconstitutions des spectacles, les scènes en public) et sombre (dans les scènes plus intimes) comme dans cette scène lors de laquelle, après un triomphe et ses clameurs, Dalida se retrouve dans la solitude glaçante et le silence tétanisant de sa salle de bain. Nous rappelant ce plan : cette image d’elle-même qui se démultiplie dans le reflet d’un miroir, multiples facettes de la femme, plus fragile, que l’icône se doit de dissimuler.
« Dalida » est avant tout un sublime portrait de femme libre, sombre et solaire, très entourée et solitaire, en avance sur son époque. Cette à qui toutes les femmes voulaient ressembler mais qui voulaient « juste être une femme ». Cette femme qui incarnait la vie éclatante et autour de qui la mort semblait toujours rôder. Cette femme qui incarnait la culture populaire mais qui s’intéressait à la philosophe d’Heidegger. Cette femme qui, dans ses chansons qui provoquaient les joies de son public, semblait crier les drames de sa vie (« Mourir sur scène », reprise de « je suis malade », « Pour ne pas vivre seul », « Il venait d’avoir 18 ans »). Cette artiste qui criait les drames de la femme, Iolanda que les projecteurs éblouissants braqués sur Dalida reléguaient dans l’ombre.
Dans le rôle de Dalida, Sveva Alviti crève littéralement l’écran, nous faisant oublier son modèle et le sublimant, sans jamais le singer. D’une justesse sidérante, elle vit son rôle plus encore qu’elle ne l’incarne. Les seconds rôles sont parfaits : Patrick Timsit en Bruno Coquatrix, Jean-Paul Rouve en Lucien Morisse, qui aimait l’artiste avant la femme et a étouffé Iolanda pour créer « leur » enfant, Dalida, Nicolas Duvauchelle, inénarrable avec sa perruque, ses tenues improbables dans le rôle de l’étrange Richard Chanfray alias le Comte de St Germain, Vincent Perez dans le rôle d’Eddie Barclay, mais aussi Ricardo Scarmacio dans le rôle d’Orlando, Alessandro Borghi dans le rôle du ténébreux Luigi Tenco, Niels Schneider dans le rôle du séduisant Jean Sobieski, le seul peut-être à avoir aimé vraiment la femme, avant l’artiste, pour qui elle n’était pas un instrument, même si la frontière toujours semble floue, y compris avec son frère (qui l’aimait avec possessivité) et producteur qui a aussi supervisé le scénario et les différentes étapes de la production du film. On imagine à quel point le montage d’un tel film a dû être un casse-tête et si certains personnages sont sacrifiés, chaque rôle existe et permet de dresser, par petites touches et rencontres successives, le portrait de Iolanda, la femme que dissimulait la star Dalida. Très belle scène du retour en Egypte avec les réminiscences de l’enfance, et ce contraste, saisissant et poignant, entre le passé (omniprésent) et le présent.
Lisa Azuelos signe un biopic captivant, à l’image de son héroïne, populaire, électrique, vibrant d’émotions et de vie, un sublime, touchant et tragique portrait de femme, une reconstitution envoûtante qui fait tomber le masque de Dalida (sans l’écorner et même au contraire la réhabilitant) pour dessiner le visage tourmenté de Iolanda, un cœur malade, celle qui à la fois vivait intensément, chantait sa vie avec flamboyance, et mourait un peu plus sur scène, en chantant les affres de Iolanda et les condamnant paradoxalement à l’ombre et au silence. Des chansons et une histoire, celle des déchirantes souffrances de l’artiste, à l’image du film : intemporelles et universelles. Et bouleversantes. Alors n'écoutez pas les éternels grincheux qui, systématiquement, critiquent le cinéma populaire (au sens noble) lorsqu'il est (et parce qu'il est) hexagonal et, à votre tour, allez rencontrer cette fascinante Dalida.
-
1er Festival International du Film de Saint-Tropez - Les nouvelles étoiles du cinéma
Un nouveau festival de cinéma, c'est toujours un moyen supplémentaire de célébrer le septième art et de découvrir des pépites cinématographiques alors saluons l'arrivée du Festival International du Film de Saint-Tropez qui mettra à l'honneur "Les nouvelles étoiles du cinéma".
Le festival aura Vincent Perrot pour directeur artistique, ce qui est déjà un bon présage, ce dernier étant un vrai cinéphile, également réalisateur de documentaires sur le cinéma. Il présentait d'ailleurs le mois dernier son documentaire sur Rémy Julienne au Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule (je vous en reparlerai bientôt). Claude Lelouch sera l'un des parrains du festival mais aussi Patrice Leconte, Christophe Barratier, Pierre Arditi, Ary Abittan, Danièle Thompson. Le festival annoncera ce soir le nom du président du jury de cette première édition.
Nouveau-né sur la planète cinéma, le Festival International du Film de Saint-Tropez « Les Nouvelles Etoiles du Cinéma » remettra les prix d’interprétation aux meilleures révélations d’acteurs et d’actrices. L'objectif du festival sera de mettre en valeur les actrices et acteurs révélés dans un premier grand rôle.
Lancé pour sa première édition du 10 au 14 avril 2018 à Saint-Tropez, ce festival compétitif s’adresse aux longs métrages, français et étrangers, et de tous genres. Il récompense et met en lumière les acteurs et actrices qui ont un grand rôle pour la première fois et dont la prestation est remarquable. Chaque jour, les projections se termineront par de grands dîners dans le Golfe de Saint-Tropez jusqu’à la soirée de Clôture, où les prix seront remis par un jury de professionnels.
Ce festival marquera l’ouverture de la saison estivale à Saint-Tropez, célèbre village provençal mondialement connu. Véritable carrefour de la culture française et internationale, le Festival est entièrement fondé sur la révélation d’acteurs et actrices montantes, la passion du cinéma, la convivialité et l’échange. il offre aux invités et aux équipes des films une sélection internationale dans le célèbre village varois !Scène mythique du cinéma français et étranger depuis 1930, le village de Saint-Tropez offre un décor naturel de rêve aux réalisateurs et acteurs venus du monde entier. Marqués par ses nombreuses légendes du 7ème art, le Président Eric Michel et son équipe, souhaitent consolider ce lieu culte en y organisant cinq jours de projections, rencontres professionnelles et de festivités en hommage au cinéma et ses nouvelles étoiles !
Pour en savoir plus sur ce nouveau festival :
https://www.facebook.com/FestivalFilmSaintTropez/
http://www.festival-sainttropez.com/
-
Critique de JOHNNY GUITAR de Nicholas Ray à voir ce soir sur Paramount
Tout commence dans une de ces vallées aussi majestueuses qu’hostiles. Un homme assiste à une attaque de diligence. Il n’intervient pas. Il porte en bandoulière une guitare d’où son surnom de « Johnny Guitar » (Sterling Hayden). Il se rend dans un saloon (Que serait un western sans saloon et sans ses clients aux visages patibulaires affalés sur le bar derrière lequel se trouve toujours un barman –en général vieux, suspicieux et maugréant- ?) où il a été engagé pour jouer de la guitare. Là, pas de clients aux visages contrariés ni de barman antipathique. Un barman, certes, mais plutôt sympathique, et des croupiers. Et une femme dont le saloon porte le nom et qui en est la propriétaire : Vienna (Joan Crawford). Le frère d’Emma, une riche propriétaire, (Mercedes McCambridge), a été tué dans l’attaque de la diligence. Emma et d’autres propriétaires terriens, viennent au saloon pour arrêter Vienna, accusant la bande du Dancing kid (Scott Brady), à laquelle Vienna est très liée, d’être à l’origine de l’attaque. Ils donnent 24h à Vienna et ses amis pour partir. Mais pour Vienna ce saloon représente toute sa vie et elle refuse de quitter les lieux. Johnny Guitar se révèle avoir été l’amant d’Emma cinq ans auparavant tandis que le Dancing kid est amoureux d’elle. La situation se complique encore quand la bande du Dancing kid attaque la banque. Vienna, suspectée d’en être la complice, devient alors le bouc-émissaire des fermiers en furie, menés par Emma qui voit là l’occasion rêvée d’abattre sa rivale…
Dans ce simple résumé, on peut déjà voir que « Johnny Guitar » s’affranchit des règles du western classique. Contrairement à ce que son titre pourrait indiquer, le véritable protagoniste n’est pas un homme et ce n’est pas ici l’éternel duel entre deux hommes liés par une haine farouche, immédiate ou séculaire, mais entre deux femmes : Vienna et Emma.
Vienna, c’est donc Joan Crawford, d’une beauté étrange et irréelle, au seuil de son déclin, dont les lignes du visage, non moins splendides, ressemblent à des lames tranchantes et fascinantes. Indomptable (en général dans les westerns les femmes sont des faire-valoir destinés à être « domptés »), déterminée, fière, forte, indépendante, aventurière, c’est Vienna la véritable héroïne du film que Joan Crawford incarne brillamment. Face à elle, Emma, aigrie, jalouse, enfermée dans ses principes.
Mais là n’est pas la seule originalité de « Johnny Guitar ». Derrière l’apparente opposition classique et manichéenne des westerns des bons contre les méchants se cache une subtile critique du Maccarthysme dont Nicholas Ray fut lui-même victime. Les fermiers en furie qui lynchent aveuglément symbolisent la commission Mac Carthy souvent aveuglée par la haine et la suspicion. Sterling Hayden était lui-même passé devant la commission. Nicholas Ray aurait même délibérément confié à Ward Bond le rôle de chef des lyncheurs. Ce dernier était ainsi lui-même membre de "Motion Picture Alliance for the Preservation of American Ideals" qui avait activement participé à la « chasse aux sorcières ».
Mais, même sans cela, « Johnny Guitar » serait un chef d’œuvre. Dès les premières minutes, la tension est palpable, renforcée par l’intensité du jeu et de la présence de Joan Crawford, et elle ne cessera de croître jusqu’au dénouement : classique duel final, mais non pas entre deux hommes donc mais entre les deux femmes. Les dialogues sont aussi des bijoux de finesse où s’exprime toute la nostalgie poignante d’un amour perdu qui ne demande qu’à renaitre de ses cendres. A côté de Vienna, Johnny Guitar représente une présence douce et forte, qui n’entrave pas sa liberté et non le macho cynique conventionnel des westerns.
Et que dire de ces plans, somptueux, ensorcelants, d’une beauté littéralement à couper le souffle : celui de Joan Crawford, dans sa robe blanche, virginale, jouant du piano, tel un animal sauvage et impérial réfugié dans son saloon assimilé à une grotte, face à la population vêtue de noir, des « vautours » prêts à fondre sur elle (une scène magistrale à la fois violemment et cruellement sublime) ; celui où elle apparaît pour la première fois en robe dans l’encadrement d’une fenêtre, soudainement à fleur de peau et fragile ; où de cette scène au clair de lune, réminiscence mélancolique de leur amour passé. Ou encore de ce brasier qui consume le saloon en même temps que leur amour tacitement se ravive. Des scènes d’une rare flamboyance (au propre comme au figuré) pendant lesquelles les hommes et la nature se déchaînent avec des couleurs étonnantes (liées au procédé Trucolor qui fut ensuite abandonné).
Drame, splendide histoire d’amour, parabole politique, bien plus qu’un western, « Johnny Guitar » est un chef d’œuvre atypique, lyrique et baroque, sombre et flamboyant. D’ailleurs de Godard à Almodovar en passant par Truffaut, nombreux sont les cinéastes à l’avoir cité dans leurs films
-
Critique de UN + UNE de Claude Lelouch à 20H45 le 19 décembre sur Ciné + Emotion
En 1966, avec « Un homme et une femme », sa sublime histoire de la rencontre de deux solitudes blessées avec laquelle il a immortalisé Deauville, Claude Lelouch recevait la Palme d’or, l’Oscar du meilleur film étranger et du meilleur scénario parmi 42 récompenses … à 29 ans seulement ! Ce 45ème film de Claude Lelouch, presque cinquante ans plus tard raconte à nouveau l’histoire d’un homme et d’une femme et les années et les films qui séparent ces deux longs-métrages semblent n’avoir en rien entaché la fougue communicative, la réjouissante candeur, le regard enthousiaste, la curiosité malicieuse du cinéaste. Ni la fascination avec laquelle il regarde et révèle les acteurs. Les acteurs et la vie qu’il scrute et sublime. Bien que les critiques ne l’aient pas toujours épargné, il est en effet toujours resté fidèle à sa manière, singulière, de faire du cinéma, avec passion et sincérité, et fidélité, à la musique de Francis Lai, aux fragments de vérité, aux histoires d’amour éblouissantes, à sa vision romanesque de l’existence, à son amour inconditionnel du cinéma et de l’amour, à ses phrases récurrentes, à ses aphorismes, aux sentiments grandiloquents et à la beauté parfois terrible des hasards et coïncidences.
Claude Lelouch est né avec la Nouvelle Vague qui ne l’a jamais reconnu sans doute parce que lui-même n’avait «pas supporté que les auteurs de la Nouvelle Vague aient massacré Clouzot, Morgan, Decoin, Gabin », tous ceux qui lui ont fait aimer le cinéma alors qu’il trouvait le cinéma de la Nouvelle Vague « ennuyeux ». Et tous ceux qui m’ont fait aimer le cinéma. Avec son film « Roman de gare », les critiques l’avaient enfin épargné, mais pour cela il avait fallu que le film soit au préalable signé d’un autre nom que le sien. Peu m’importe. Claude Lelouch aime la vie. Passionnément. Sous le regard fiévreux et aiguisé de sa caméra, elle palpite. Plus qu’ailleurs. Et ce nouveau film ne déroge pas à la règle.
Après Johnny Hallyday, Eddy Mitchell et Sandrine Bonnaire dans « Salaud, on t’aime », c’est un autre trio charismatique qui est à l’honneur dans ce nouveau film : Jean Dujardin, Elsa Zylberstein et Christophe Lambert (voire un quatuor avec Alice Pol). Son dernier film « Salaud, on t’aime » se rapprochait de « Itinéraire d’un enfant gâté », du moins en ce qu’il racontait l’histoire d’un homme à l’automne de sa vie, un autre « enfant gâté » passé à côté de l’essentiel et qui, contrairement au film précité, n’allait pas fuir sa famille mais tenter de la réunir. Ici, c’est finalement aussi d’un homme passé à côté non pas de sa vie mais de lui-même dont Lelouch nous raconte l’histoire, une histoire que j’attendais de découvrir depuis que j’avais vu cette affiche du film orner les murs de Cannes, lors du festival, en mai dernier.
La manière dont le film est né ressemble déjà à un scénario de film de Claude Lelouch. Jean Dujardin et Elsa Zylberstein ont ainsi plusieurs fois raconté sa genèse. Le hasard qu’affectionne tant Claude Lelouch les a réunis sur le même vol entre Paris et Los Angeles lors duquel ils ont parlé de cinéma pendant des heures et notamment d’un film de Claude Lelouch, « Un homme qui me plaît », qu'ils adorent tous les deux. L'histoire d'amour entre un compositeur incarné par Jean-Paul Belmondo et une actrice incarnée par Annie Girardot qui tombent amoureux à l'autre bout du monde. Elsa Zylberstein a appelé Claude Lelouch et l’histoire était lancée, une histoire d’amour qui, eux aussi, les a emmenés à l’autre bout du monde…
Jean Dujardin incarne ici le séduisant, pragmatique, talentueux Antoine. Antoine est compositeur de musiques de films. Antoine regarde la vie avec distance, humour et légèreté. Antoine est comme un enfant joueur et capricieux. D’ailleurs, il porte le prénom du petit garçon dans « Un homme et une femme ». Hasard ? Ou coïncidence ? Il part en Inde travailler sur une version très originale de « Roméo et Juliette » intitulée « Juliette et Roméo » et alors que sa compagne (Alice Pol) le demande en mariage par téléphone. A l’occasion d’une soirée donnée en son honneur à l’Ambassade de France, il rencontre la pétillante Anna (Elsa Zylberstein), la femme de l’ambassadeur (Christophe Lambert), aussi mystique qu’il est pragmatique, une femme qui, en apparence, ne lui ressemble en rien, pourtant, dès ce premier soir, entre ces deux-là, semble régner une magnétique connivence. Cette rencontre va les entraîner dans une incroyable aventure. Et le spectateur avec eux.
Ce que j’aime par-dessus tout dans les films de Claude Lelouch, ce sont ces personnages, toujours passionnément vivants. Dans chacun de ses films, la vie est un jeu. Sublime et dangereux. Grave et léger. Un jeu de hasards et coïncidences. Le cinéma, son cinéma, l’est aussi. Et dans ce film plus que dans tout autre de Claude Lelouch. Le fond et la forme coïncident ainsi en une ludique mise en abyme. Le film commence par l’histoire d’un voleur qui va inspirer le film dont Antoine a composé la musique et dont les images jalonnent le film…de Lelouch. Le présent, le passé et le rêve s’entrelacent constamment pour peu à peu esquisser le portrait des deux protagonistes, pour se jouer de notre regard sur eux et sur la beauté troublante des hasards de la vie.
Cela commence par des images de l’Inde, fourmillante, colorée, bouillonnante de vie dont la caméra de Lelouch, admirative, caresse l’agitation multicolore. Prémisses d’un voyage au pays « du hasard » et « de l’éternité. » Un voyage initiatique. Puis, il nous raconte une première histoire. Celle du voleur qui sauve sa victime, et de leur histoire d’amour. Celle du film dans le film. Un miroir de celle d’Anne et d’Antoine. Presque un conte. D’ailleurs, devant un film de Lelouch, j’éprouve la sensation d’être une enfant aux yeux écarquillés à qui on raconte une fable. Ou plein d’histoires puisque ce film est une sorte de poupée russe. Oui, une enfant à qui on rappelle magnifiquement les possibles romanesques de l’existence.
Ensuite, Antoine rencontre Anna lors du dîner à l’ambassade. Antoine pensait s’ennuyer et le dit et le clame, il passe un moment formidable et nous aussi, presque gênés d’assister à cette rencontre, leur complicité qui crève les yeux et l’écran, leur conversation fulgurante et à l’image de l’Inde : colorée et bouillonnante de vie. Il suffirait de voir cet extrait pour deviner d’emblée qu’il s’agit d’un film de Lelouch. Cette manière si particulière qu’ont les acteurs de jouer. Ou de ne pas jouer. Vivante. Attendrissante. Saisissante de vérité. En tout cas une scène dans laquelle passe l’émotion à nous en donner le frisson. Comme dans chacun des tête-à-tête entre les deux acteurs qui constituent les meilleurs moments du film, dans lesquels leurs mots et leurs silences combattent en vain l’évidente alchimie. Ils rendent leurs personnages aussi attachants l’un que l’autre. Le mysticisme d’Anna. La désinvolture et la sincérité désarmante d’Antoine avec ses irrésistibles questions que personne ne se pose. Antoine, l’égoïste « amoureux de l’amour ».
Comme toujours et plus que jamais, ses acteurs, ces deux acteurs, la caméra de Lelouch les aime, admire, scrute, sublime, magnifie, révèle, caresse presque, exacerbe leur charme fou. Ce film comme chaque film de Lelouch comporte quelques scènes d’anthologie. Dans son précédent film « Salaud, on t’aime », les deux amis Kaminsky/Johnny et Selman/ Eddy nous rejouaient « Rio Bravo » et c’était un régal. Et ici, chacun des échanges entre Antoine et Anna l’est aussi. Comme dans tout film de Lelouch aussi les dialogues sont parsemés de petites phrases dont certaines reviennent d’un film à l’autre, souvent pour nous rappeler les « talents du hasard » :
« Mon agent, c’est le hasard. »
« Mon talent, c’est la chance. »
« Le pire n’est jamais décevant. »
Ce film dans lequel l’amour est l’unique religion est une respiration salutaire a fortiori en cette période bien sombre. Un hymne à l’amour, à la tolérance, au voyage aussi bigarrés et généreux que le pays qu’il nous fait traverser. Un joyeux mélange de couleurs, de fantaisie, de réalité rêvée ou idéalisée, évidemment souligné et sublimé par le lyrisme de la musique du fidèle Francis Lai (retrouvez mon récit de la mémorable master class commune de Lelouch et Lai au Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule 2014, ici) et celle de la Sérénade de Schubert (un peu trop utilisée par les cinéastes ces temps-ci mais c’est celle que je préfère donc je ne m’en lasse pas), par des acteurs que le montage inspiré, la musique lyrique, la photographie lumineuse ( de Robert Alazraki), le scénario ingénieux (signé Valérie Perrin et Claude Lelouch), et l’imparable et incomparable direction d’acteurs de Lelouch rendent plus séduisants, convaincants, flamboyants et vibrants de vie que jamais.
Une « symphonie du hasard » mélodieuse, parfois judicieusement dissonante, émouvante et tendrement drôle avec des personnages marquants parce que là comme ils le sont rarement et comme on devrait toujours essayer de l’être : passionnément vivants. Comme chacun des films de Lelouch l’est, c’est aussi une déclaration d’amour touchante et passionnée. Au cinéma. Aux acteurs. A la vie. A l’amour. Aux hasards et coïncidences. Et ce sont cette liberté et cette naïveté presque irrévérencieuses qui me ravissent. Dans la vie. Au cinéma. Dans le cinéma de Lelouch qui en est la quintessence. Vous l’aurez compris, je vous recommande ce voyage en Inde !
En bonus, ma critique de "Itinéraire d'un enfant gâté" de Claude Lelouch
Le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule (mon compte rendu complet, ici) permet aussi de revoir des classiques du cinéma. Parmi les nombreux classiques au programme (j’aurais aimé tous les revoir mais il a fallu faire des choix) figurait « Itinéraire d’un enfant gâté » de Claude Lelouch, un des plus grands succès du cinéaste datant de 1988, une projection d’autant plus riche en émotions que lui a succédé un échange passionnant avec Richard Anconina. Un film que j’ai choisi de mettre en parallèle avec une avant-première du festival, deux films qui ont en commun d’être des tours de manège, de nous raconter l’histoire d’hommes qui se choisissent une famille et dont les vies sont jalonnées de hasards et coïncidences. Deux films qui sont de magnifiques métaphores du cinéma qui permet de réinventer nos vies.
Sam Lion (Jean-Paul Belmondo) a été élevé dans le milieu du cirque puis a dû faire une reconversion forcée comme chef d’entreprise. Mais la cinquantaine passée, il se lasse de ses responsabilités et de son fils, Jean-Philippe, dont la collaboration ne lui est pas d’un grand secours. Il décide d’employer les grands moyens et de disparaître en Afrique, après avoir simulé un naufrage lors de sa traversé de l’Atlantique en solitaire. Mais son passé va l’y rattraper en la personne d’Albert Duvivier (Richard Anconinia), un de ses anciens employés licencié qu’il retrouve par hasard en Afrique et qui le reconnaît…
« Chaque homme est seul et tous se fichent de tous et nos douleurs sont une île déserte ». La citation d’Albert Cohen qui ouvre le film le place sous le sceau du pessimisme et de la solitude, impression que renforce la chanson de Nicole Croisille qui ouvre le film. « Qui me dira, les mots d’amour qui font si bien, du mal ? Qui me tiendra, quand tu iras décrocher toutes les étoiles ? Qui me voudra, avec le nez rouge, et le cœur en larmes ? Qui m’aimera, quand je n’serai plus que la moitié d’une femme ? » La musique est reprise en chœur tandis qu’un petit garçon seul sur un manège attend désespérément sa mère. Un homme s’occupe de lui, découvre le carton qu’il a autour du cou et qui indique que sa mère l’a abandonné. La musique épique, flamboyante, lyrique, accompagne ensuite les premières années et les numéros de cirque étourdissants qui défilent (sans dialogues juste avec la musique pour faire le lien) jusqu’à l’accident fatidique. Les flashbacks alternent avec les vagues sur lesquelles flotte le navire de Sam Lion, des vagues qui balaient le passé. Les premières minutes sont bouleversantes, captivantes, montées et filmées sur un rythme effréné, celui sur lequel Sam Lion (ainsi appelé parce qu’il a été élevé dans un cirque) va vivre sa vie jusqu’à ce qu’il décide de disparaître.
Rares sont les films qui vous émeuvent ainsi, dès les premiers plans et qui parviennent à maintenir cette note jusqu’au dénouement. Pour y parvenir, il fallait la subtile et improbable alliance d’ une musique fascinante comme un spectacle de cirque, d’acteurs phénoménaux au sommet de leur art, de dialogues jubilatoires magistralement interprétés, un scénario ciselé, des paysages d’une beauté à couper le souffle, des histoires d’amour (celles qui ont jalonné la vie de Sam Lion, avec les femmes de sa vie, son grand amour décédé très jeune, sa seconde femme, sa fille Victoria pour qui il est un héros et un modèle et qui l’aime inconditionnellement, mais aussi celles d’Albert avec Victoria), jouer avec nos peurs (l’abandon, la disparition des êtres chers, le besoin de reconnaissance), nos fantasmes (disparaître pour un nouveau départ, le dépaysement) et les rêves impossibles (le retour des êtres chers disparus).
Sam Lion va par hasard rencontrer un employé de son entreprise (entre temps il a construit un empire, une entreprise de nettoyage), ce jeune homme maladroit et qui manque de confiance en lui va devenir l’instrument de son retour et sa nouvelle famille. Cela tombe bien : il commence à s’ennuyer.
Peu à peu le puzzle de la vie et des déchirures de Sam Lion, grâce aux flashbacks, se reconstitue, celui des blessures de cet homme qui l’ont conduit à tout quitter, écrasé par les responsabilités sans avoir le temps de penser à ses blessures, ni de les panser, porté par la soif d’ailleurs, de vérité, de liberté.
Alors bien sûr il y a la si célèbre et irrésistible scène du bonjour, toujours incroyablement efficace, tant la candeur d’Albert est parfaitement interprété par Anconina, tant la scène est magistralement écrite, tant les comédiens sont admirablement dirigés mais chaque scène (les acteurs sont filmés en gros plan, au plus près des émotions) sont des moments d’anthologie de comédie, d’humour, de poésie, d’émotion (parfois tout cela en même temps lorsque Victoria est conduite à son père grimé en pompiste et qu’on lui présente comme le sosie parfait de son père qu’elle croit mort, lors de la demande en mariage…) et toujours ces moments qui auraient pu être de simples saynètes contribuent à faire évoluer l’intrigue et à nous faire franchir un cran dans l’émotion, dans ces parfums de vérité qu’affectionne tant le réalisateur. Claude Lelouch ne délaisse aucun de ses personnages ni aucun de ses acteurs. Chacun d’entre eux existe avec ses faiblesses, ses démons, ses failles, ses aspirations. Et puis quelle distribution ! En plus des acteurs principaux : Marie-Sophie L, Michel Beaune, Pierre Vernier, Daniel Gélin.
Jean-Paul Belmondo, plusieurs années après « Un homme qui me plaît » retrouvait ici Claude Lelouch qui lui offre un de ses plus beaux rôles en lui faisant incarner pour la première fois un homme de son âge au visage marqué par le temps mais aussi un personnage non moins héroïque. En choisissant Anconina pour lui faire face, il a créé un des duos les plus beaux et les plus touchants de l’histoire du cinéma.
« Itinéraire d’un enfant gâté » est une magnifique métaphore du cinéma, un jeu constant avec la réalité : cette invention qui nous permet d’accomplir nos rêves et de nous faire croire à l’impossible, y compris le retour des êtres disparus. Belmondo y interprète l’un de ses plus beaux rôles qui lui vaudra d’ailleurs le César du Meilleur Acteur, césar que le comédien refusera d’aller chercher.
On sort de la projection, bouleversés de savoir que tout cela n’était que du cinéma, mais avec la farouche envie de prendre notre destin en main et avec, en tête, la magnifique et inoubliable musique de Francis Lai : « Qui me dira… » et l’idée que si « chaque homme est seul », il possède aussi les clefs pour faire de cette solitude une force, pour empoigner son destin. Et ce dernier plan face à l’horizon nous laisse à la fois bouleversés et déterminés à regarder devant, prendre le large ou en tout cas décider de notre itinéraire. Un grand film intemporel, réjouissant, poignant.
A lire également sur ce blog, ma critique de l'excellent "Salaud on t'aime", en cliquant ici.