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Par Sandra Mézière. Le 7ème art raconté avec passion depuis 2003. 4000 articles. Festivals de cinéma en direct : Deauville, La Baule, Cannes, Dinard...Critiques de films : avant-premières, à l'affiche, classiques. Actualité de romancière. Podcast.
Après avoir été présenté au siège des Nations Unies à New York, à la Mostra de Venise (hors compétition) et à la Fête de l’humanité, le même jour et dans sa version cinématographique, ainsi que dans 500 cinémas en France, « Human », le documentaire de Yann Arthus-Bertrand sera diffusé le 29 septembre, à 20H55, sur France 2. C’est cette version (plus courte que la version cinématographique mais non moins intense) que j’ai visionnée pour vous et dont je tenais absolument à vous parler aujourd’hui. Cette soirée événement s’achèvera à 4h00 du matin. En plus du documentaire, vous pourrez en effet ainsi découvrir un ensemble de programmes auxquels le projet a donné lieu qui seront tous en replay sur Pluzz pendant 30 jours.
« Home », le précédent film de Yann Arthus-Bertrand sorti en 2009 était un hymne à la terre qui nous expliquait que, en 200 000 ans d’existence, l’Homme avait rompu un équilibre fait de près de 4 milliards d’années d’évolution. Certaines images restent encore gravées dans ma mémoire : ces tours insolentes et dévastatrices qui conquièrent le ciel de Shanghai (3000 tours érigées en 20 ans), ces villes tentaculaires qui se gorgent d’eau face à ces étendues asséchées, dans d’autres endroits de la planète, où elle est une quête quotidienne et vitale (500 millions d’Hommes habitent ainsi des contrées désertiques !), cette sidérante standardisation, jusqu’aux pavillons de Pékin qui ressemblent à s’y méprendre à ceux de Palm Springs, autant de témoignages de la construction à outrance, comme encore la monstruosité bétonnée de Dubaï qui contraste tellement avec l’image sublimement simple et rare qui lui succède, celle d’une baleine qui nage dans la mer. Je me souviens aussi de l’exemple très parlant de l’île de Pâques où la civilisation n’a pas survécu après avoir été exploitée jusqu’au bout, autrefois une des plus brillantes. Plus manichéen que « Human », « Home » opposait ainsi la culture dévastatrice à la nature bienveillante, une opposition alors appuyée par une musique angoissante lorsqu’étaient montrées des mégalopoles ou une musique lénifiante et rassurante quand il s’agissait des paysages vierges de toute habitation.
Six ans plus tard sort donc « Human », un projet salutairement fou, incroyablement ambitieux, utopiste, (planétaire !), dont la réalisation a nécessité 3 ans, 110 tournages dans 65 pays, pour recueillir 2020 récits de vie dans pas moins de 63 langues grâce à une équipe de 16 journalistes, 20 chefs-opérateurs, 5 monteuses et 12 personnes pour la production.
Quels que soient le pays, les cultures, l’âge ou les religions, les personnes qui ont recueilli les témoignages ont soumis aux participants les mêmes questions essentielles autour de la condition humaine, ces questions que nous préférons en général ne pas nous poser car elles nous mettent face à la vanité, peut-être la vacuité, en tout cas la finitude de nos existences :
Vous sentez-vous libre ? Quel est le sens de la vie ? Quelle est l’épreuve la plus difficile que vous avez dû affronter et qu’en avez-vous appris ? Quel est votre message pour les habitants de la planète ?…
Ces témoignages sont entrecoupés d’images aériennes inédites d’une beauté vertigineuse, fulgurante, étourdissante qui subliment la planète ou parfois mettent l’accent sur ses drames écologiques.
D’abord, d’emblée, se succèdent des visages sur fond noir face caméra que cette sobriété met en relief. Autant de regards. D’histoires. D’expressions. Des parcours de vie. Un visage sur lequel coule une larme. Des yeux qui se ferment. Qui ouvrent sur un paysage désertique d’une beauté époustouflante. Tel un rêve. Des hommes gravissent ensuite cette montagne désertique sur laquelle apparaît le titre « Human » comme une parabole de toutes ces destinées éprouvées mais combattives qui vous nous happer dans leurs récits et face auxquelles, cette fois, nous ne pourrons détourner le regard. Une musique qui fend l’âme parachève l’ensemble.
Puis cela commence réellement par le témoignage bouleversant d’un homme qui fut battu par son père : « Je me souviens… ». « Pendant de nombreuses années j’ai cru que l’amour devait faire mal. » Je vous laisse découvrir son poignant témoignage comme le seront tous ceux qui vont lui succéder exacerbés par ce dispositif qui donne l’impression que chacun d’entre eux s’adresse directement à nous, qui renforce la résonance de certains drames ou bonheurs, qui renforce la force des mots, des visages, des regards, des silences, annihilant les différences pour souligner les peurs, les révoltes, les aspirations communes. Comme un miroir des nôtres. Des moments de vérité face auxquels il est impossible de rester insensible qui nous bousculent, nous heurtent, pansent -un peu- ou avivent nos plaies par l’écho ou la prise de conscience qu’ils provoquent.
Ce dispositif singulier nous contraint judicieusement à regarder, à affronter le regard de l’autre alors que notre attention est sans cesse sollicitée, dispersée, aveuglée nous faisant éluder les questions essentielles auxquelles ces témoignages nous confrontent. Pendant les témoignages, d’autres visages défilent sur l’écran, soulignant ainsi l’universalité des propos.
Les images aériennes inédites sublimées par une musique ensorcelante signée Armand Amar créent une respiration entre les témoignages et soulignent la beauté sidérante et hétérogène du monde. Le reflet du ciel dans les rizières. Le soleil qui se réverbère dans le bleu azuré de la mer. La spectaculaire et terrifiante fureur des océans. Les méandres improbables et fascinants du salar d’Uyuni en Bolivie. Ces enfants qui chevauchent dans les steppes mongoles. Des images poétiques, envoûtantes, lyriques qui ressemblent parfois à des tableaux abstraits comme un contrepied au réalisme et à la sobriété des témoignages.
Ces images sont aussi parfois tristement absurdes quand l’humanité et la singularité s’égarent dans l’uniformité que ce soit celle de cette vague humaine de Chinois à Chengdu avec leurs bouées colorées ou celle qui lui succède de cette multitude de mariés en noir et blanc. Comme un écho à ce building avec tous ces bureaux uniformes. Derrière une vitre y apparaît ainsi un homme seul au téléphone. Lui succède l’image d’un homme lui aussi seul sur une montagne dans le désert. Des multitudes. Des solitudes. Par-delà les océans et les frontières. Les disparités et les paradoxes du monde sont alors flagrants et parfois dans un même pays comme le souligne le témoignage de cet homme qui raconte comment, en Inde, ceux qui ont fui à cause de la crise de l’eau se retrouvent, dans le même pays, à construire des buildings avec des piscines à chaque étage rivalisant de gigantisme et de luxe ostentatoires.
Tant d’images, de visages mais de mots aussi qui vous bousculeront longtemps après la projection comme ceux de cet enfant, « Je n’ai pas peur de la mort si c’est pour la Syrie », Comme cette femme qui crie « on est train de mourir. Mais personne ne nous écoute. » Et tant d’autres : « Tout cela a fait naître en moi l’amour de la haine, l’amour de la vengeance. L’homme ne nait pas avec ces sentiments-là, ils s’installent avec le temps, avec ce qu’on vit. » A hauteur d’hommes, les témoignages soulignent l’absurdité des conflits récurrents qui déchirent la planète à l’image du conflit israélo-palestinien lorsqu’un Palestinien puis un Israélien témoignent de la mort de leurs filles qu’il a provoquée et appellent pareillement au pardon et à la paix.
« Human » possède la vertu inestimable de donner du temps à la parole et aux silences quand le fonctionnement médiatique actuel, dans l’urgence et dans l’immédiateté, condamne la première à être si souvent résumée, caricaturée, interrompue et le second à être banni alors qu’il peut être, comme il l’est parfois dans ce documentaire, si bavard et riche de sens.
Bien plus qu’un documentaire et un projet salutairement naïf et pharaonique, « Human » est un voyage émotionnel d’une force redoutable, une démonstration implacable de la réitération des erreurs de l’humanité, une radiographie saisissante du monde actuel, un plaidoyer pour la paix, pour l’écoute des blessures de la planète et de l’être humain dans toutes leurs richesses et leurs complexités, une confrontation clairvoyante, poignante au monde contemporain et à ceux qui le composent.
Si je ne devais retenir que deux phrases, ce seraient sans doute celles-ci, un appel à l’humanité et aux réminiscences d’enfance, que nous portons tous en nous :
-« N’oubliez pas qui vous êtes et souriez toujours car sourire est le seul langage universel. »
-« La vie c’est comme porter un message de l’enfant que tu as été au vieillard que tu seras. Il faut faire en sorte que ce message ne se perde pas en route. »
Un documentaire nécessaire, d’une bienveillance, d’une empathie et d’une utopie salutaires quand le cynisme ou l’indifférence sont trop souvent glorifiés, et parfois aussi la cause des tourments et les ombres du monde que « Human » met si bien en lumière. Préparez-vous à être emportés par ce torrent d’émotions. A voir absolument !
A voir en complément : « La glace et le ciel » de Luc Jacquet qui sortira en salles le 21 octobre 2015 et dans lequel le réalisateur de « La Marche de l’Empereur » (Oscar du meilleur documentaire en 2006), braque de nouveau sa caméra sur la fragile beauté de la nature avec ce portrait de Claude Lorius, glaciologue, l’homme qui a scientifiquement prouvé l’inexorable réchauffement climatique. Le cinéaste capte la beauté fragile et éblouissante d’une nature en péril pour souligner la nécessité impérieuse de prendre conscience de l’urgence de la situation. La phrase finale du film, bouleversante, est un appel à l’action et la résistance résumant le message de ce film fort et là aussi indispensable. A voir, a fortiori, en amont de Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (à Paris du 30 novembre au 11 décembre 2015.)
France 2 propose une semaine dédiée à HUMAN, en commençant par une soirée événement mardi 29 septembre 2015 à partir de 20h55 jusqu’à 4h00 du matin.
Vous pouvez aussi partager l’expérience sur les réseaux sociaux avec les hashtags : #WhatMakesUsHUMAN #HUMAN ou voir le film et de nombreux témoignages sur Youtube (de personnes connues ou surtout inconnues, je vous recommande là aussi d’y faire un tour).
L’an dernier, j’avais eu le plaisir d’assister à la première édition du Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule (dont vous pouvez retrouver mon compte rendu ci-dessous).
Au-delà de sa convivialité et de sa belle programmation, ce festival avait été une réussite en nombre d’entrées avec plus de 7.000 spectateurs en 4 jours!
La seconde édition du Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule, aura lieu pendant cinq jours -au lieu de 4 l’an passé-, du 11 au 15 novembre prochain (week-end du 11 novembre). Elle s’annonce au moins aussi réussie que l’an passé avec de premières informations pour le moins enthousiasmantes.
La nouvelle affiche de ce deuxième Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule est déjà un bon présage. Des parapluies joyeusement multicolores s’y envolent pour laisser la place au soleil, une référence au film « Les Parapluies de Cherbourg », réalisé par Jacques Demy en 1964 avec dans le rôle principal Catherine Deneuve et dont la musique a été composé par Michel Legrand à qui le festival rendra hommage cette année.
L’ouverture promet déjà de créer l’événement puisqu’il s’agit du très attendu » Spectre » de Sam Mendes, toujours avec le charismatique Daniel Craig et dont voici le synopsis: Un message cryptique venu tout droit de son passé pousse Bond à enquêter sur une sinistre organisation. Alors que M affronte une tempête politique pour que les services secrets puissent continuer à opérer, Bond s’échine à révéler la terrible vérité derrière… le Spectre. Egalement au casting: Christoph Waltz, Monica Bellucci, Léa Seydoux, Ralph Fiennes, Ben Wishaw. Le script du prochain James Bond a été réécrit après le piratage du système informatique de Sony, avec un changement drastique dans le dénouement de l’intrigue de ce James Bond le plus cher de la franchise : budget estimé entre 300 et 350 millions de dollars pour un tournage entre Tanger, le Maroc, Londres et l’Autriche. En attendant ma critique suite à la projection dans le cadre du festival, retrouvez, en cliquant ici, ma critique de SKYFALL de Sam Mendes.
L’an passé, le compositeur Francis Lai avait reçu un Ibis d’Or pour l’ensemble de sa carrière ( et ses 50 ans de collaboration avec Claude Lelouch) –retrouvez mon compte rendu de leur mémorable et passionnante master class commune ci-dessous-. Cette année, ce sera au tour d’un autre très grand compositeur de musiques de films, Michel Legrand, d’être honoré par le Festival (avec un concert unique et exceptionnel lors de la clôture), voilà qui annonce de beaux moments, de cinéma, de musique, d’émotion. L’occasion aussi pour moi de vous recommander l’excellent « Cinq jours en juin » si vous ne l’avez pas déjà vu. Un film de 1988 qu’il a réalisé. Le film est certes de facture classique mais la réalisation est loin d’être inintéressante ou banale et, en plus d’être un musicien génial, Michel Legrand se révèle être un cinéaste doué, pudique et inspiré. Dans ce film, il raconte une histoire fortement inspiré de la sienne: Michel, âgé de quinze ans, (Matthieu Rozé) remporte son prix de piano au conservatoire de Paris le jour où les alliés débarquent sur les plages de Normandie. Les trains sont réquisitionnés, lui et sa mère (Annie Girardot) ne peuvent plus rentrer en Normandie. Avec Yvette ( Sabine Azéma), une jeune femme délurée, ils volent des bicyclettes et partent pour Saint-Lô. Sur leur chemin, ils échappent à des bombardements et à des combats, assistent à la débâcle des troupes allemandes et rencontrent des soldats américains. Michel tombe amoureux d’Yvette. Ce film exhale un parfum entêtant et enivrant qui doit s’appeler le charme qui doit beaucoup au trio de comédiens avec une Sabine Azéma, rayonnante, mutine, malicieuse, éclatante de vie et une Annie Girardot, à la fois grave et sereine et bienveillante, comme toujours d’une justesse remarquable. Un film plein de vitalité et d’émotions, de celle qui nous envahit quand on écrit pour les êtres chers disparus, de celle qui vient du cœur, qui transparait dans chacun des plans de ce film qui mérité d’être vu.
Le Festival du Cinéma et Musique de Film de la Baule est organisé et présidé par deux passionnés, Christophe Barratier (le réalisateur –notamment !- du film « Les Choristes ») et Sam Bobino (ancien Délégué général des « Prix Lumières »).
Selon le communiqué de presse du festival « Il est spécialement dédié à la rencontre magique entre la musique et le 7e art. Cet événement autour d’instants culturels et artistiques est unique et donne l’occasion au public d’être à la fois acteurs et spectateurs du rayonnement culturel. Avec une sélection de films inédits et de grands classiques, à destination de tous les publics, le festival a été créé pour faire vibrer au diapason de la réunion de deux arts, en compagnie de ceux qui la font naître. » Voilà qui promet le meilleur pour cette deuxième édition à suivre sur son site officiel (http://www.festival-labaule.com/), son compte twitter (@FestivalLaBaule), sa page Facebook (https://www.facebook.com/Festival-Cinéma-Musique-de-Film-de-La-Baule-434566903387755/timeline/) et son compte instagram (@festivalLaBaule).
Retrouvez ci-dessous mon compte rendu de l’an passé.
Au fur et à mesure des annonces, je vous tiendrai informés du programme du festival.
Le Groupe Barrière est partenaire du festival. Retrouvez ci-dessous mon article détaillé sur le Royal Thalasso Barrière de La Baule entièrement rénové ainsi que sur son restaurant Le Fouquet’s où vous pourrez vous restaurer entre deux projections. Retrouvez également cet article sur mon site consacré aux hôtels de luxe Inthemoodforhotelsdeluxe.com.
Voilà plus de trois années que je n’étais pas revenue en ce lieu qui m’est cher dont chaque recoin suscite tant de réminiscences. Entre-temps, l’hôtel a subi une rénovation et un embellissement impressionnants (décoration signée Chantal Peyrat comme à l’hôtel du Golf Barrière de Deauville dont je vous disais récemment tout le bien que j’en pense et comme au Gray d’Albion Barrière de Cannes) et particulièrement réussis sans que l’hôtel (toujours 5 étoiles qu’il mérite amplement) ne perde ce supplément d’âme qui le caractérise. Pas moins de cinq mois de travaux ont ainsi été nécessaires pour donner une nouvelle jeunesse à l’Hôtel Barrière Le Royal (le si bien nommé!) et à la Thalasso & Spa Barrière Le Royal by Thalgo. La réouverture a en effet eu lieu le 3 avril 2015.
Loin du luxe souvent plus tapageur de la Côte d’Azur, à La Baule, la bien nommée Côte d’Amour, la discrétion est de mise. Immortalisée par le film de Diane Kurys « La Baule-Les Pins », la célèbre cité balnéaire s’enorgueillit de son élégance décontractée que symbolise si bien le Royal Barrière. Situé face à la célèbre plage de 8 kilomètres de La Baule, entre Pornichet et Le Pouliguen, l’hôtel Royal Thalasso Barrière, trône sur le front de mer à la fois avec le charme intemporel des palaces d’antan et tout le confort moderne et élégant des hôtels récents. Juste à côté, se situe la galerie marchande et le casino. Le Centre de La Baule est facilement accessible à pied.
Après son voisin l’Hermitage Barrière, c’était ainsi au tour de l’hôtel Royal-Thalasso Barrière de La Baule de fermer pour une remise en beauté. C’est sans nul doute l’hôtel dont je vous ai le plus souvent parlé, celui aussi où je suis le plus souvent allée, en appréciant tout particulièrement le cadre et le service dont cette rénovation a encore exacerbé les atouts.
Toujours dirigé avec professionnalisme et passion par Emmanuel Béquet, l’établissement s’est modernisé, paré de nouveaux atouts, de nouvelles couleurs, de nouvelles prestations, sans perdre l’atmosphère chaleureuse et le service irréprochable qui le distinguent.
Dès la conciergerie (entièrement rénovée, avec beaucoup de goût), c’est avec plaisir que j’ai retrouvé Stéphane, le concierge qui, depuis mon dernier séjour, a obtenu les clefs d’or (l’hôtel a deux concierges clefs d’or) là aussi amplement méritées avec cette douce impression que, malgré les vicissitudes de l’existence, tout a changé et que, en même temps, rien de ce qui contribue à la magie et à la singularité du lieu n’a réellement changé.
Là, le luxe, pourtant omniprésent, n’est pas clinquant ou ostentatoire mais se dégage du lieu une élégante quiétude. Construit en 1896, l’Hôtel Barrière Le Royal La Baule, avec son architecture néo-romane, évocatrice de la Belle Epoque, plus qu’un hôtel, est un splendide édifice sur lequel votre regard d’esthète s’arrêtera forcément si vous vous promenez sur le front de mer. Devant la grande et imposante bâtisse, vous ne pourrez qu’admirer le somptueux parc où sont disséminés les pins caractéristiques de La Baule et au centre duquel, à l’abri des regards indiscrets, se trouve la splendide piscine extérieure. Depuis les chambres côté mer, vous pourrez ainsi profiter d’une vue à couper le souffle sur le parc et sur l’impressionnante baie de La Baule.
Les beaux jours, vous pourrez aussi y déjeuner ou y dîner dans ce qui est une autre grande nouveauté de l’établissement : le Fouquet’s Barrière qui, après Paris et Cannes, s’est donc aussi désormais installé à La Baule (et temporairement à l’hôtel Royal de Deauville, comme je vous le racontais ici) remplaçant le restaurant « La Rotonde ». L’installation est ici définitive et les habitués de l’établissement cannois et parisien y retrouveront le décor « brasserie chic » chaleureux et élégant, caractéristique des établissements Fouquet’s, à l’atmosphère si cinématographique. Vous y retrouverez l’accueil affable et les produits de qualité et une carte signée Pierre Gagnaire qui vaut vraiment le détour, par exemple la sole meunière et la tarte au citron remarquables que j’ai eu le plaisir de déguster. La carte diffère légèrement le midi et le soir, de quoi satisfaire les papilles les plus versatiles et exigeantes dans un cadre particulièrement propice à la dégustation et à la détente avec vue sur le parc et sur la mer que les grandes baies vitrées vous permettront d’admirer allègrement.
La piscine extérieure n’est pas la seule puisque l’hôtel bénéficie de 3 piscines (d’eau de mer chauffée !) dont 1 intérieure(particulièrement agréable et chaleureuse) et un parcours Aquaminceur®. Vous y trouverez aussi un jacuzzi, des saunas, hammams et une salle de fitness. Egalement à votre disposition : 10 cabines de massage avec douche , 6 cabines beauté avec douche , 2 cabines VIP de 35 m2 équipées de 2 tables de soins, d’une baignoire balnéo et d’une douche offrant la liberté de créer différents rituels Visage et Corps, à vivre en duo ou en solo, des services sur mesure au centre Thalgo, et la mise à disposition de vélos pour arpenter la baie à loisir.
Après avoir gravi quelques marches depuis l’extérieur, vous vous retrouverez dans le lobby, véritable puits de lumière qui ouvre sur le parc, de même que le bar « so british » propice à une pause détente que vous soyez de l’hôtel ou clients de l’extérieur.
L’hôtel dispose aujourd’hui de 72 chambres et 15 suites. Aux couleurs rouges de la décoration autrefois signée Jacques Garcia succèdent aujourd’hui des tonalités plus douces, véritable invitation au repos et à l’évasion, en harmonie avec la nature, à l’image de la nouvelle décoration très inspirée des espaces communs.
Désormais, les plus exigeants y trouveront aussi une somptueuse suite royale de 75m2 avec son impressionnante terrasse plein sud de 140 m2 face à la mer qui n’ont rien à envier aux plus beaux palaces de la Côte d’Azur (à partir de 1520 euros la nuit).
Comme dans tous les établissements du Groupe Barrière, l’hôtel vous propose un Pass Evasion pour parfaire votre séjour. Celui-ci vous permet de bénéficier de réductions et/ou d’accès gratuits à de nombreux loisirs chez les partenaires de l’hôtel (tennis, planche à voile, golf, discothèque…).
Je vous le garantis, là-bas, vous prendrez le temps de vivre tout en ne voyant pas le temps passer entre promenades le long du front de mer ou dans le centre La Baule (tout proche), la galerie du Casino et la casino (qui jouxtent l’hôtel), les baignades dans les splendides piscines de l’hôtel ou dans l’océan juste en face, la thalasso, les déjeuners au Ponton (sans aucun doute le meilleur restaurant de plage de La Baie de La Baule) ou dîners au Fouquet’s ou à l’Eden Beach (restaurant de l’Hermitage situé tout près).
Avec ses rénovations, son nouveau restaurant, l’hôtel est à mon sens désormais ce qui se fait de mieux sur la Côte Atlantique. Que ce soit pour un séjour entre amis, en famille, en amoureux ou même en solo, c’est l’endroit idéal où vous serez comme chez vous notamment grâce à un service particulièrement personnalisé (avec un service bien supérieur à celui, bien chaotique, d’un nouvel établissement comme le Château des Tourelles dont je vous parlerai ultérieurement). Cet hôtel est une véritable ode au bien-être dont il est la quintessence. Croyez-moi. Allez-y les yeux fermés. Vous y passerez un séjour hors du temps et du stress du quotidien dans un cadre idyllique.
Retrouvez, ci-dessous, ma notation détaillée de l’établissement avec de nombreux conseils.
Nom de l’hôtel: Hôtel Le Royal Barrière
Situation de l’hôtel: La Baule – Loire-Atlantique – Pays de la Loire – France
Classification officielle de l’hôtel: 5 étoiles
Classification de l’hôtel par Inthemoodforhotelsdeluxe.com : Label in the mood for luxe (classification maximale)
Nombre de chambres : 72 chambres et 15 suites
Equipements/services de l’hôtel:
-3 piscines d’eau de mer chauffée dont 1 intérieure et un parcours Aquaminceur®
– Jacuzzi, saunas, hammams et une salle de fitness.
– Accès direct au Centre de Thalassothérapie Thalgo.
-Deux restaurants dont un sur la plage
-Un bar
-Conciergerie Clefs d’or…
Chaînes hôtelières auxquelles appartient l’hôtel: Groupe Lucien Barrière
Adresse de l’hôtel:
Royal-Thalasso Barrière 6, avenue Pierre Loti 44504 La Baule France
NOTATION DE L’HÔTEL PAR INTHEMOODFORHOTELSDELUXE.COM :
-Service (1M à 5M):
5M. Irréprochable, particulièrement personnalisé, des femmes de chambre à la direction.
-Amabilité (1M à 5M):
5M. Grand atout du groupe Barrière et de cet hôtel en particulier.
-Propreté (1M à 5M):
5M
-Loisirs/Animations (1M à 5M):
5M. L’été, vous pourrez profiter du magnifique parc et de la piscine extérieure. L’hiver, l’hôtel se transforme en cocon douillet entre ses piscines intérieures dont celle de la Thalasso également accessible sans sortir de l’hôtel, ses deux restaurants (l’un à l’intérieur, l’autre sur la plage) et son bar avec ses animations musicales en week-end ou en périodes de vacances scolaires.
Les amoureux des loisirs balnéaires seront ravis et les enfants choyés.
-Gastronomie (1M à 5M):
5M. Situé directement sur la plage, en face de l’hôtel, le restaurant Le Ponton propose des produits de la mer et autres spécialités dans une ambiance décontractée où se mêlent des acteurs qui ont bien souvent leurs résidences secondaires à La Baule, bourgeoisie locale, Parisiens, et familles en vacances. L’accueil est toujours extrêmement chaleureux, la cuisine fraîche et si vous souhaitez une modification à la carte, à moins que votre demande soit vraiment extravagante, il est peu probable qu’on vous opposera un refus. Renseignez-vous avant d’y aller. Il arrive que, en basse saison, le restaurant soit fermé le soir, même le week-end. Et préférez Le Ponton à certains établissements à la mode du centre de La Baule (fuyez les autres établissements de plage, type « La Signature du sunset », dont je vous parlerai ultérieurement dans un nouvel article consacré à mes bonnes adresses –et celles à éviter- à La Baule, si vous voulez dîner dans le centre de La Baule, je vous recommande « La Cucina des Evens »-dont, là aussi, je vous reparlerai, pour l’accueil irréprochable et sa cuisine italienne maison qui attirent de nombreux habitués) dont l’accueil et la qualité de la nourriture sont, pour certains, inqualifiables… . Les beaux jours, vous pourrez également profiter de la terrasse face à un cadre idyllique. Le Ponton réussit la subtile alliance de la gastronomie et du panorama donc, auxquels il faut ajouter un accueil aussi chaleureux, professionnel que décontracté (sans -et heureusement- jamais être flagorneur) qui vous donnera rapidement la sensation d’être « à la maison » que vous y alliez deux ou trois fois ou depuis une dizaine d’années comme moi. La carte est très abordable avec tous les jours un menu du jour ou des semaines thématiques « coquilles saint-jacques », « bar » etc… Je vous recommande évidemment les poissons et crustacés et les desserts, un régal. Je vous garantis que, même si vous séjournez une semaine à La Baule, et y allez tous les jours, vous ne vous en lasserez pas. Les enfants sont également les bienvenus avec un menu enfant bien garni. La carte change également régulièrement même si certains mets sont souvent à l’honneur comme la coquille saint-jacques.
Au Fouquet’s, que vous soyez amateurs de viandes ou de poissons, vous trouverez votre bonheur parmi une carte de produits de qualité dont les plats ont été élaborés par Pierre Gagnaire.
A tenter également : le restaurant Eden Beach, de l’Hermitage Barrière, juste à côté (plus « gastronomique » et plus onéreux).
–Situation (1M à 5M):
5M. Loin du luxe souvent plus tapageur de la Côte d’Azur, à La Baule, la bien nommée Côte d’Amour, la discrétion est de mise. Immortalisée par le film de Diane Kurys « La Baule-Les Pins », la célèbre cité balnéaire s’enorgueillit de son élégance décontractée que symbolise si bien le Royal Barrière. Situé face à la célèbre plage de 8 kilomètres de La Baule, entre Pornichet et Le Pouliguen, l’hôtel Royal Thalasso Barrière, trône sur le front de mer à la fois avec le charme intemporel des palaces d’antan et tout le confort moderne et élégant des hôtels récents. Juste à côté, se situe la galerie marchande et le casino. Le Centre de La Baule est facilement accessible à pieds, de même que Le Pouliguen et les autres restaurants et hôtels du Groupe Barrière. Vous pourrez aussi bien aller faire du shopping que de longues promenades sur la plage ou même jusqu’au Pouliguen par le petit chemin en front de mer.
-Décoration (1M à 5M):
5M. L’hôtel a été magnifiquement rénové par Chantal Peyrat. Elégance, sobriété, harmonie avec la nature sont de mise dans un cadre particulièrement propice à la détente.
–Confort de la chambre (1M à 5M):
5M. Les 72 chambres et 15 suites de l’hôtel ont été décorées par Chantal Peyrat avec beaucoup de goût et possèdent une vue sur la baie de La Baule, sur le parc arboré de l’hôtel, ou sur l’intérieur de La Baule.
-Equipements de l’hôtel (1M à 5M):
5M. Rien ne manque !
–Originalité- Le(s) plus qui fait/font de cet hôtel un établissement « in the mood for luxe » (1M à 5M):
5M. Les très agréables piscines intérieures et extérieure. La proximité de La Baule. L’accueil, chaleureux, avec l’impression d’être chez soi. Le magnifique parc arboré avec sa piscine extérieure, la très belle piscine intérieure pour ceux qui ne font pas la thalasso, l’impression de quiétude qui se dégage du lieu, le restaurant de plage le Ponton, les vélos gratuits en libre service, l’emplacement et désormais Le Fouquet’s, nouvelle adresse incontournable des gastronomes.
Enfin, une spécificité du Groupe Barrière, le pass Evasion qui, lors d’un séjour dans l’un des hôtels Barrière, en l’espèce à La Baule, vous permet de bénéficier de nombreux avantages dans les établissements Barrière et chez leurs partenaires.
-Rapport qualité/prix (1M à 5M) :
4M. A certaines périodes, vous pourrez obtenir des tarifs très avantageux, en particulier si vous êtes membres Infiniment Barrière. Actuellement, vous trouverez une offre de séjour à partir de 175 euros.
-Inconvénient(s) de cet hôtel :
Avec la rénovation récente, le seul bémol (qui concernait la vétusté de certaines chambres et de certains espaces communs), je n’en vois plus…
-Recommanderiez-vous cet hôtel (Oui ou Non):
Oui.
-Conseil(s) aux futurs clients :
-Le week end ou en période de vacances scolaires, il est indispensable de réserver au restaurant Le Ponton.
-Si vous n’avez pas d’impératifs de dates, le groupe Lucien Barrière propose des ventes flash qui vous permettront d’y séjourner à des tarifs très attractifs.
-Evitez, si vous le pouvez, les chambres côté rue (parfois bruyantes le week-end à cause de la proximité d’une discothèque)
– Bilan et appréciation globale (1M à Label intemoodforluxe):
Label In the mood for luxe. Le Royal Barrière de La Baule possède à la fois le charme intemporel des palaces d’antan et tout le confort moderne et l’élégance des hôtels récents, a fortiori depuis sa rénovation qui lui procure un cadre plus moderne sans que rien ne soit renié de l’Histoire et de ce qui fait l’âme singulière de l’établissement. L’endroit est nimbé d’une luminosité chaleureuse qui dégage une sorte de mélancolie rassurante, le lieu vraiment idéal pour se ressourcer et pour avoir l’impression d’être ailleurs à moins de 400 kms de Paris. Un hôtel chaleureux, élégant, qui est un véritable hymne au bien-être, idéalement situé, avec de nombreuses activités dans l’hôtel ou à proximité et des restaurants de qualité, aussi beaux que les produits qui y sont proposés sont bons. L’endroit idéal, aussi bien pour les familles avec enfants que pour les couples ou pour les personnes seules, pour se ressourcer en plein hiver ou pour profiter des plaisirs balnéaires l’été. Le Royal, grâce à ses multiples atouts, et notamment son cadre exceptionnel et son accueil personnalisés et exemplaire, fait partie de ces rares hôtels où vous pouvez retourner 50 fois sans jamais être déçu avec une seule envie: y revenir.
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Alors que, à quelques jours d’intervalle, ont été annoncées la fin du Festival Paris Cinéma « faute de subventions » et l’interruption du Festival du Film Asiatique de Deauville en 2015, pour des raisons similaires, pendant ce temps, à La Baule, était donné le coup d’envoi d’un nouveau festival de cinéma avec, pour thème fédérateur, la musique de Film. Un cinéma qui palpite, vibre, populaire au sens noble du terme. Une réussite et un bel évènement auquel je souhaite de nombreuses éditions futures et d’autres moments d’émotion communicative comme celle qui s’est emparée de la salle lors de la remise de l’Ibis d’honneur à Francis Lai et Claude Lelouch (vidéo ci-dessous).
Photo ci-dessus prise à l’occasion des 10 ans des Choristes au Marché de La Baule.
Le cofondateur du 1er Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule (avec Sam Bobino), Christophe Barratier, lors de l’ouverture, avait ainsi insisté sur la volonté de faire de ce nouvel évènement cinématographique un festival « de rencontres » et « sans barrières » comme en témoignait l’ouverture en présence du président du jury Jean Becker et de ses jurés Alain Chamfort, Zoé Félix, Natacha Régnier (Marco Prince arrivé le lendemain complétait le jury). Une convivialité qui seyait parfaitement à l’élégante quiétude bauloise et qui a caractérisé ce festival du début à la fin et qui lui a valu une belle affluence, méritée: plus de 7000 spectateurs en 4 jours ont assisté à la vingtaine de films projetés (dont 7 figuraient en compétition).
Le président du jury de cette première édition, Jean Becker, et ses quatre jurés, Alain Chamfort, Zoé Félix, Natacha Régnier et Marco Prince ont décerné trois prix parmi une sélection de très haut niveau, là encore un défi relevé pour cette première édition. Les films primés de cette édition avaient en commun d’évoquer les rêves, leur concrétisation ou leur abandon, les compromis, les renoncements, la détermination qu’ils impliquent, des films profondément ancrés dans la petite ou grande musique de leur époque.
C’est le musicien (et désormais cinéaste) Abd Al Malik qui a reçu l’Ibis d’or pour son film « Qu’Allah bénisse la France ».
Synopsis: Enfant surdoué, Régis grandit dans un quartier populaire de Strasbourg en compagnie de ses six frères et soeurs. Elevé par une mère catholique, monoparentale et pauvre, cet enfant d’immigrés fait jours après jour l’expérience de la délinquance des cités. Les vols et trafics en tout genre forment le quotidien rythmé par les blessures par balles, les overdoses et les plongées dans le fanatisme religieux. Entré dans la danse, Régis s’égare. Jusqu’à ce qu’il découvre le rap et l’islam, et – ultimement – l’amour. Abd Al Malik qui adapte sa propre autobiographie, ou le parcours d’un enfant d’immigrés, noir, surdoué et élevé dans une cité de Strasbourg. Un film constat autant qu’un état des lieux personnel entre délinquance, rap et islam.
Adapté du roman autobiographique éponyme d’Abd Al Malik par son auteur , tourné dans une cité au Neuhof, à Strasbourg, ville où l’auteur a grandi, « Qu’Allah bénisse la France » pose un voile noir et blanc nostalgique, universel et intrinsèquement cinématographique sur les réalités protéiformes de la banlieue, sans misérabilisme, sans angélisme non plus (une scène qui fait froid dans le dos évoque avec beaucoup de pudeur la courte durée de vie de ceux qui y vivent). Derrière ce noir et blanc, toute une mythologie cinématographique qui imprègne d’ailleurs la vie de ces quartiers, notamment « Scarface », référence parfois destructrice pour ceux pour qui ledit film est un modèle. C’est bien sûr à « La Haine » que fait penser ce noir et blanc même si Abd Al Malik évoque aussi Visconti (« Rocco et ses frères ») et Carné. Le noir et blanc permet aussi de créer une distance sur une réalité parfois âpre, de même que la voix off, douce et lancinante. Le jeu parfois maladroit de certains rôles secondaires n’entache pas ce beau chant de tolérance, empreint d’espoir et de la personnalité lumineuse de son auteur, artiste talentueux et pluriel : musicien, poète et écrivain. « Qu’Allah bénisse la France » avait déjà reçu le Prix de la critique internationale au Festival du film de Toronto.
La réalisatrice Mia Hansen-Løve a remporté l’Ibis de la meilleure musique de film pour « Eden ».
Synopsis: Dans les années 90, Paul fait ses premiers pas dans le milieu de la nuit parisienne. Passionné de musique, il crée avec son meilleur ami le duo de DJ’s « Cheers ». Ils trouveront rapidement leur public et vivront une ascension vertigineuse, euphorique, dangereuse et éphémère. Aspiré par sa passion, Paul en oubliera de construire sa vie.. J’avais été particulièrement marquée par « Le père de mes enfants », un film lumineux sur le secret et le deuil, le portrait d’un homme solaire qui finira par se suicider, à la fois robuste et vulnérable, fort et fragile. Un film d’une belle clarté malgré le deuil, un film qui a l’ambivalence et les nuances de la vie : à la fois lumineux et mélancolique, tragique et plein d’espoir, mystérieux et séduisant. Un film qui m’a bouleversée comme je ne l’avais pas été depuis longtemps au cinéma.
« Eden » est le quatrième long métrage de Mia Hansen-Løve, coécrit avec son frère Sven Løve, dont l’histoire a inspiré celle du personnage principal du film, un film à la fois personnel et universel mais aussi le portrait d’une génération désenchantée, désillusionnée. Un film ambitieux qui, à travers le récit du parcours romancé du frère de la réalisatrice, dresse le portrait d’une génération qui passe de l’hédonisme à la fin de l’insouciance, de la jeunesse de l’âge adulte. Un long cheminement mélancolique, intelligemment éprouvant pour amener une fin d’une logique terrible, implacable, cruellement prosaïque. Dommage qu’il souffre d’une interprétation parfois trop appliquée dans les seconds rôles, un petit air de nouvelle nouvelle vague un peu trop artificiel qui ne nuit heureusement pas à ce film qui vous laisse une empreinte tendrement mélancolique pour une musique qui tient à cœur et au cœur, celle d’un passé récent, trop rapidement révolu.
L’Ibis du public a été attribué à Lola Bessis et Ruben Amar pour leur premier long-métrage, mon coup de cœur de cette édition « Swim Little Fish Swim ».
Synopsis: « Swim little fish swim », raconte l’histoire de Leeward, musicien talentueux et atpyique qui, dans son petit appartement new-yorkais où il vit avec sa femme, compose des morceaux à l’aide de jouets de sa fille de trois ans, Rainbow. Lilas, jeune vidéaste, traîne sa valise de squats d’artistes underground en galeries branchées, en espérant percer dans le milieu fermé de l’art contemporain. Leur rencontre va les aider à accomplir leurs rêves.
Ce film possède une magie indicible qui s’appelle le supplément d’âme, la grâce, tout ce que vous voulez mais toujours est-il qu’il vous envoûte subrepticement par la douceur, la tendre émotion, la fantaisie et la sincérité qui en émanent. Ce film réalisé avec un budget minime est impressionnant de maîtrise et de vérité touchantes. Ruben Amar avait auparavant réalisé plusieurs courts-métrages récompensés dans de nombreux festivals. Il est étonnant (et injuste) que ce long-métrage n’ait pas eu davantage d’échos lors de sa sortie. Un regard ironique mais jamais méprisant sur l’art contemporain. Des personnages attachants en révolte contre la société de consommation, qui interrogent les compromis de la vie d’artiste, portés par leurs rêves. Un film qui vous accompagne longtemps après le générique de fin, vous laissant l’empreinte de sa fantaisie poétique, rare et communicative. Un petit bijou du cinéma indépendant, tendre, singulier et attachant comme ses personnages principaux. A voir absolument.
Parmi les grands moments de cette édition la master class de Christophe Barratier et Bruno Coulais mais aussi celle de Francis Lai et Claude Lelouch, absolument passionnante, dont vous pourrez retrouver mes vidéos ci-dessous ainsi que quelques citations. Le compositeur et le cinéaste ont également reçu un ibis d’or d’honneur pour leurs 50 ans de collaboration commune, un moment émouvant de la clôture à l’occasion de laquelle les deux artistes ont reçu une standing ovation pour leur longue et impressionnante carrière commune. Claude Lelouch et Francis Lai ont ainsi travaillé sur 32 films ensemble au cours des 50 dernières années.
Quelques citations extraites de la Master class de Claude Lelouch et Francis Lai:
« Mon prochain film (avec Jean Dujardin) « Un plus une » raconte l’histoire d’un compositeur de film. Ma manière de rendre hommage à Francis Lai » a ainsi raconté Claude Lelouch.
« Si je devais faire comme Hollande, attendre l’avis de tout le monde avant de décider, je ne ferais pas de film »a-t-il également déclaré.
« Le seul critique qui compte est le temps qui passe », selon Claude Lelouch.
« Lelouch utilise la musique au même titre qu’un acteur. Elle joue son propre rôle » selon Francis Lai.
« Je ne suis pas un metteur en scène. Je suis un metteur en vie .Le plus grand scénariste, le meilleur dialoguiste, c’est la vie », a également déclaré Claude Lelouch.
« J’ai toujours privilégié l’émotion à la technique. L’émotion, c’est la vérité »a-t-il également ajouté.
« C’est l’irrationnel qui invente notre vie. La musique est ce qui parle le mieux à notre irrationnel », pour Claude Lelouch. « La musique c’est ce qui parle le mieux à notre instinct, qui interpelle notre cœur. » a-t-il résumé.
Critique de « SALAUD, ON T’AIME » de Claude Lelouch (projeté dans le cadre du festival)
Lelouch. Prononcez ce nom et vous verrez immédiatement l’assistance se diviser en deux. D’un côté, les adorateurs du cinéaste qui aiment : ses fragments de vérité, ses histoires d’amour éblouissantes, sa vision romanesque de l’existence, sa sincérité, son amour inconditionnel du cinéma, ses phrases récurrentes, ses aphorismes, une musique et des sentiments grandiloquents, la beauté parfois terrible des hasards et coïncidences. De l’autre, ses détracteurs qui lui reprochent son sentimentalisme et tout ce que les premiers apprécient, et sans doute de vouloir raconter une histoire avant tout, que la forme soit au service du fond et non l’inverse. Avec « Roman de gare », les seconds s’étaient rapprochés des premiers, mais pour cela il aura auparavant fallu que le film soit au préalable signé d’un autre nom que le sien. Je fais partie de la première catégorie et tant pis si pour cela je dois subir la condescendance des seconds. Le cinéma est pour moi avant tout affaire de passion, de sincérité, d’audace, de liberté et quoiqu’en disent ses détracteurs, le cinéma de Claude Lelouch se caractérise par ces quatre éléments comme le démontre magnifiquement le documentaire « D’un film à l’autre » réalisé à l’occasion des 50 ans des films 13. Un documentaire qui résume un demi-siècle de cinéma du « Propre de l’homme » à « Ces amours-là ».
La plus flamboyante de ses réussites fut bien sûr « Un homme et une femme », palme d’or à Cannes en 1966, Oscar du meilleur film étranger et du meilleur scénario parmi 42 récompenses … à 29 ans seulement ! L’histoire de la rencontre de deux solitudes blessées qui prouve que les plus belles histoires sont les plus simples et que la marque du talent est de les rendre singulières et extraordinaires. A chaque fois que je le revois (et je ne les compte plus !), je suis frappée par son étonnante modernité, notamment dans le montage avec les alternances de noir et blanc et de couleurs qui jouent alors habilement avec les méandres du temps et de la mémoire émotive, entre le présent et le bonheur passé qui ressurgit sans cesse. Je suis aussi toujours frappée par cette photographie aux accents picturaux qui sublime Deauville (et qui n’est certainement pas étrangère à mon coup de foudre pour le lieu en question) filmée avec une lumière nimbée de mélancolie, des paysages qui cristallisent les sentiments de Jean-Louis et d’Anne, fragile et paradoxalement impériale, magistralement (dirigée et) interprétée par Anouk Aimée. Rares sont les films qui procurent cette impression de spontanéité, de vérité presque. Les fameux « instants de vérité » de Lelouch. Et puis le célèbre « Montmartre 1540 » prononcé par la voix inimitable de Jean-Louis Trintignant. Mais, je m’égare…
Avec sa dernière fiction, « Ces amours-là », Lelouch signait une fresque nostalgique, une symphonie qui s’achevait sur une note d’espoir, la bande originale de son existence cinématographique (qui évitait l’écueil du narcissisme) en guise de remerciements au cinéma, à la musique, à son public, à ses acteurs. Un film qui mettait en exergue les possibles romanesques de l’existence. Un film jalonné de moments de grâce, celle des acteurs avant tout à qui ce film était une déclaration d’amour émouvante et passionnée.
Cette dernière réalisation qu’est « Salaud, on t’aime » se rapproche peut-être davantage de « Itinéraire d’un enfant gâté », du moins en ce qu’elle raconte l’histoire d’un homme à l’automne de sa vie, un autre « enfant gâté » qui est peut-être passé à côté de l’essentiel et qui, contrairement au film précité, ne va pas fuir sa famille, mais au contraire tenter de la réunir.
Jacques Kaminsky (Johnny Hallyday) est ainsi un photographe de guerre et père absent, qui s’est plus occupé de son appareil photo (enfin plutôt de son impressionnante collection d’appareils photos) que de ses 4 filles (de 4 mères différentes) nommées Printemps (Irène Jacob), Eté (Pauline Lefèvre), Automne (Sarah Kazemy –révélée par le magnifique « En secret » de Maryam Keshavarz ) et Hiver (Jenna Thiam). Avec l’espoir de les réunir, il décide d’acquérir une maison dans les Alpes dont il tombe amoureux en même temps que de celle qui la lui fait visiter, Nathalie Béranger (Sandrine Bonnaire). Tout va se compliquer encore un peu plus quand son meilleur ami, Frédéric Selman (Eddy Mitchell) va tenter de le réconcilier avec sa famille en leur racontant un terrible mensonge.
Avec « Salaud, on t’aime », Claude Lelouch signe son 44ème film. Les réalisations et les années n’ont pourtant pas entamé la jeunesse et la modernité de son cinéma. Ni la curiosité, l’admiration, la fascination avec lesquelles il regarde et révèle les acteurs. Les acteurs et la vie qu’il scrute et sublime. Dès ce premier plan avec le beau visage buriné de Johnny Hallyday et derrière lui les pages d’un livre (écrit par sa fille) qui se consume, j’étais déjà happée. Et les pages de cet autre livre qui se tournent et montrent et rendent hommage au photographe de guerre qu’est Kaminsky, à tous les photographes de guerre et aux horreurs (et quelques bonheurs) de l’Histoire qu’ils ont immortalisées, souvent au péril de leur vie. Deux livres. Deux faces d’un même homme. Peut-être un peu le double de Claude Lelouch qui fut lui-même photographe de guerre à ses débuts. Dès les premiers plans du film règne à la fois une atmosphère tranquille et inquiétante à l’image de celle de cette maison gardée par un aigle majestueux, sublime, clairvoyant, là comme une douce menace, comme si tout pouvait basculer d’un instant à l’autre dans le drame ou le thriller. Le cinéma de Claude Lelouch ne rentre dans aucune case, situé à la frontière des genres. Ou si: il rentre dans un genre, celui d’un film de Lelouch, tout simplement. Et c’est ce que j’aime par-dessus tout : celle liberté, cet atypisme que j’ai retrouvés dans ce film. Claude Lelouch est né avec la Nouvelle Vague qui ne l’a jamais reconnu sans doute parce que lui-même n’avait « pas supporté que les auteurs de la Nouvelle Vague aient massacré Clouzot, Morgan, Decoin, Gabin », tous ceux qui lui ont fait aimer le cinéma alors qu’il trouvait le cinéma de la Nouvelle Vague « ennuyeux ». Et tous ceux qui M’ont fait aimer le cinéma.
A l’image de ses autres films, sans doute celui-ci agacera-t-il ses détracteurs pour les mêmes raisons que celles pour lesquelles il m’a enchantée. Ses citations sur la vie, la mort, l’amour, l’amitié : – « Un ami c’est quelqu’un qui te connait très bien et qui t’aime quand même », -« Qu’est-ce que vous préférez le plus au monde, à part votre appareil photo ? Le juste milieu. L’équilibre. Vous savez comme ces types qui viennent de traverser le Grand Canyon sur un fil. » C’est d’ailleurs ce qui pourrait définir le cinéma de Lelouch. Et ce film. La vie aussi. Et ce qui les rend si singuliers, palpitants et attachants. Cette impression d’être sur un fil, sur le fil, au bord du précipice. Comme toujours chez Claude Lelouch, la musique est judicieusement choisie entre le sublime jazz d’Ella Fitzgerald et Louis Armstrong, la chanson « Les eaux de mars » de Georges Moustaki, ou encore les « Quatre saisons » de Vivaldi repris par les compositeurs du film, le fidèle Francis Lai et Christian Gaubert. Et puis il y a les acteurs. Ces acteurs que la caméra de Lelouch aime, scrute, sublime, magnifie, révèle, caresse presque. D’abord, Johnny Hallyday qui n’a pas besoin d’en faire des tonnes pour être ce personnage. Son visage et sa prestance racontent déjà une histoire. Il n’a pas besoin d’en faire ou dire beaucoup pour imposer son personnage grâce à sa forte personnalité, un mélange de douceur, de douleur, de force, de fragilité, de liberté, d’humanité, de rudesse et de tendresse. Et pour l’avoir vu (et revu) sur scène, que ce rôle lui ait été attribué me semble une évidence tant il est et joue sur scène et sait capter et captiver l’attention d’un regard. Leconte dans « L’homme du train » (à mon avis le meilleur film avec Johnny Hallyday) avait déjà compris cet énorme potentiel. Johnny Hallyday avait d’ailleurs déjà tourné sous la direction de Claude Lelouch en 1972 pour « L’Aventure c’est l’Aventure » où il jouait son propre rôle aux côtés de Lino Ventura et Jacques Brel. Ce rôle de Kaminsky semble avoir été écrit pour lui et pourtant il n’était initialement pas pressenti pour jouer le rôle principal de « Salaud, on t’aime ». Le plus sidérant est que Lelouch a dû l’imposer: « Aucune chaîne de télévision ne voulait faire un film avec Johnny et moi, aucune assurance n’a voulu nous suivre, les coproducteurs, les distributeurs, tout le monde s’est montré frileux. » Il y a eu Annie Girardot dans « Les Misérables », Jean-Paul Belmondo dans « Itinéraire d’une enfant gâté » Tant d’autres… Il y aura désormais Johnny Hallyday dans « Salaud, on t’aime ». De fortes personnalités qui, plus que d’incarner des rôles, les imprègnent et les révèlent. Les réveillent même. A ses côtés, il y a Sandrine Bonnaire avec qui il forme un couple évident. Solaire Sandrine Bonnaire avec son sourire lumineux et empathique et dont on comprend qu’il en tombe immédiatement amoureux.
Et puis les 4 « saisons » dont la photographie reflète judicieusement les caractères au premier rang desquelles Jenna Thiam (Hiver Kaminsky), révélation du film à qui sont dévolues les plus belles partitions. Le temps d’un dialogue dans une voiture qui pourrait constituer à elle seule un court-métrage, Lelouch nous montre quel directeur d’acteurs et quel conteur d’histoire il est. Les « seconds » rôles ne sont pas en reste : Isabelle de Hertogh, Rufus, Agnès Soral, Valérie Kaprisky, Jacky Ido, Antoine Duléry… Enfin, dernier personnage ici (et non des moindres !): la nature, sublime et sublimée elle aussi, à laquelle ce film est aussi un véritable hymne et qui varie subtilement au gré des saisons.
« Chaque nouvelle invention modifie l’écriture cinématographique. Mes gros plans c’est ma dictature, et les plans larges c’est ma démocratie, et pas de plan moyen. » avait-il dit lors du débat succédant à la projection du documentaire « D’un film à l’autre ». Ce nouveau film ne déroge pas à la règle. Une scène de repas est ainsi particulièrement réussie me faisant songer à celles qu’affectionnait Claude Sautet qui lui aussi aimait tant ces scènes mais aussi, comme Lelouch, raconter la vie. Notre vie. Ce film comme chaque film de Lelouch comporte quelques scènes d’anthologie. Celle pendant laquelle les deux amis Kaminsky/Johnny et Selman/ Eddy refont « Rio Bravo » est un régal. Mais aussi, à l’opposé, ce brusque basculement du film (que je ne vous révélerai évidemment pas) qui m’a bouleversée. Il n’y a que lui pour oser. De même qu’il n’y a que lui pour oser appeler les 4 filles d’un personnage Printemps, Eté, Automne et Hiver. Et ce sont cette liberté presque irrévérencieuse, cette audace, qui me ravissent. Dans la vie. Au cinéma. Dans le cinéma de Lelouch qui en est la quintessence. La quintessence des deux. Lelouch, dans ce nouveau film coécrit avec Valérie Perrin, raconte la vie, avec tout ce qu’elle comporte de beauté tragique ou de belle cruauté, de douleurs ineffables aussi, ses paradoxes qui la rendent si fragile et précieuse. En quelques plans, ou même en un plan d’une silhouette, il exprime la douleur indicible de l’absence. Mais c’est aussi et avant tout un film magnifique sur l’amitié et ses mensonges parfois nécessaires, sur le le pardon aussi…sans oublier ces « hasards et coïncidences » qu’affectionne le cinéaste. Ce hasard qui « a du talent » à l’image de celui qui en a fait un de ses thèmes de prédilection. Malgré son titre, peut-être son film le plus tendre, aussi. Je ne sais pas si le cinéma comme « le bonheur, c’est mieux que la vie » mais en tout cas Claude Lelouch fait partie de ceux dont les films nous la font voir en gros plans majestueux, parfois sans fards, avec une redoutablement sublime vérité, et qui nous la font aimer ardemment. Et ce nouveau film porté par des acteurs solaires, un montage ingénieux, une musique judicieuse, une photographie émouvante ne déroge par à la règle. Le juste milieu entre légèreté et gravité. Les fragments de vérité et les fragments de mensonges. La vie et le cinéma.
Le festival avait débuté avec le film qui a été couronné lors du dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville et qui a cependant été choisi pour le Festival de La Baule, par ses organisateurs, avant le Festival de Deauville : « Whiplash » de Damien Chazelle.
Critique de WHIPLASH de Damien Chazelle
WHIPLASH », deuxième film de Damien Chazelle, avant même le Festival du Cinéma Américain de Deauville avait déjà été remarqué à la Quinzaine des Réalisateurs 2014. Interprété magistralement par Miles Teller et J.K. Simmons, le premier interprétant Andrew, un jeune élève du Conservatoire de dix-neuf ans qui rêve de devenir l’un des meilleurs batteurs de jazz de sa génération et l’autre, son professeur Terence Fletcher, qui dirige le meilleur orchestre de l’établissement, « Whiplash » a été tourné en 19 jours. Le film n’en est pas moins remarquable dans la précision et l’exigence à l’image de la musique qu’il exalte et sublime.
Andrew Nieman. A une lettre près, (Niemand) personne en Allemand. Et Andrew semble avoir une seule obsession, devenir quelqu’un par la musique. Assouvir sa soif de réussite tout comme le personnage interprété par J.K Simmons souhaite assouvir sa soif d’autorité. Une confrontation explosive entre deux desseins, deux ambitions irrépressibles, deux folies. L’objet rêvé pour le manipulateur machiavélique qui sous le fallacieux prétexte que « la fin justifie les moyens » use et abuse de sa force et son pouvoir pour obtenir le résultat qu’il souhaite mais surtout asseoir son emprise. J.K Simmons donne corps et froideur d’âme à ce personnage tyrannique et irascible qui sait se montrer mielleux pour atteindre son objectif.
La réalisation s’empare du rythme fougueux, fiévreux, animal de la musique, grisante et grisée par la folie du rythme et de l’ambition, dévastatrice, et joue judicieusement et avec manichéisme sur les couleurs sombres, jusque dans les vêtements: Fletcher habillé en noir comme s’il s’agissait d’un costume de scène à l’exception du moment où il donne l’impression de se mettre à nu et de baisser la garde, Andrew habillé de blanc quand il incarne encore l’innocence puis de noir à son tour et omniprésence du rouge (du sang, de la viande, du tshirt d’un des « adversaires » d’Andrew) et des gros plans lorsque l’étau se resserre, lorsque le duel devient un combat impitoyable, suffocant. Les rires sur l’humiliation et sur les ruses et sentences de dictateur (qu’est finalement le professeur) étaient finalement plus dérangeants que le film lui-même, le public étant d’une certaine manière manipulée à son tour, se laissant fasciner par ce personnage tyrannique. Prêt à tout pour réussir, Andrew poussera l’ambition à son paroxysme, au bord du précipice, jusqu’à l’oubli, des autres, de la dignité, aux frontières de la folie.
Le face à face final est un véritable combat de boxe (et filmé comme tel) où l’immoralité sortira gagnante : la dictature et l’autorité permettent à l’homme de se surpasser… La scène n’en est pas moins magnifiquement filmée transcendée par le jeu enfiévré et exalté des deux combattants.
Bien que batteur depuis ses quinze ans, et ayant pris des cours trois jours par semaine pendant quatre heures pour parfaire sa technique et ne faisant « que » 70% des prestations du film, Miles Teller est impressionnant dans l’énergie, la détermination, la folie, la maîtrise, la précision. En conférence de presse, à Deauville, Damien Chazelle a raconté s’être inspiré de son expérience personnelle pour écrire et réaliser « Whiplash », ayant appris par le passé la batterie avec un professeur tyrannique, ce qui l’a conduit à emprunter une autre voie : celle du cinéma. Une décision sans aucun doute judicieuse même si j’espère qu’il continuera à allier cinéma et musique dans ses prochains films, son amour de la musique transparaissant, transpirant même dans chaque plan du film.
Egalement en compétition, le film qui a valu à son interprète principal, le prix d’interprétation du dernier Festival de Cannes, « Mr. TURNER » de Mike Leigh.
Critique de « Mr. Turner » de Mike Leigh
Ici, Timothy Spall interprète le peintre Turner. Sans doute certains trouveront-ils qu’il cabotine ou que son jeu est maniéré, sans doute des intimes du peintre Turner qui savent mieux que quiconque qu’il ne se comportait pas ainsi, lequel, rappelons-le, est décédé en 1851. Simplement Timothy Spall a-t-il décidé d’esquisser, de composer un personnage tout comme, pour esquisser le portrait de Turner, Mike Leigh a dessiné une suite de saynètes/toiles d’une beauté renversante, éblouissante, captivante malgré la longueur du film, recourant à une lenteur finalement judicieuse pour nous faire apprécier cet artiste comme un tableau qui n’offre pas d’emblée toutes ses richesses au regard mais se dévoile peu à peu, à l’image de cet éléphant à peine visible au premier regard sur cette toile de Turner. Le film et le personnage se construisent de paradoxes : entre l’extrême sensibilité que cet homme met dans son art et la rudesse de ses manières, entre les tourments qu’il exprime dans ses toiles et ceux qu’il ne parvient pas à exprimer autrement, réussissant à peindre les tempêtes qui s’agitent sur les océans et dans son crane mais jamais à les expliciter. Mike Leigh s’est concentré sur les dernières années de l’existence du peintre britannique qui fut un artiste reconnu, membre apprécié quoique dissipé de la Royal Academy of Arts, vivant entouré de son père (qui fut aussi son assistant), et de sa dévouée (c’est un euphémisme) gouvernante (fantastique Dorothy Atkinson). Un tableau d’autant plus intéressant que, au-delà de sa saisissante beauté picturale, le parallèle est évident entre l’artiste peintre et l’artiste cinéaste, en particulier lorsque celui-ci subit les sarcasmes de l’establishment. Toute relation avec la réalité serait évidemment purement fortuite. Mike Leigh nous éclaire sur le travail de Turner tout en ne cherchant pas à rendre sympathique cet homme sombre et parfois même repoussant et glacial ou en tout cas incapable de s’exprimer autrement qu’au travers de ses toiles ou par des borborygmes « inhumains ». Ce film nous laisse avec le souvenir de peintures et de plans qui se confondent, en tout cas d’une beauté à couper le souffle, et le souvenir de ce premier plan étincelant avec ce soleil prometteur, ce moulin, ces deux paysannes qui marchent en parlant flamand tandis que seul et/ou isolé (Turner fait lui-même la distinction entre la solitude et l’isolement, sans doute ressent-il la première sans être victime du second), en marge de la toile/de l’écran le peintre s’adonne à son art, comme un miroir de celui qui le portraiture pour le cinéma (des « Ménines » de Velasquez version 21ème siècle, finalement). Un film et un personnages à la fois âpres, rudes et sublimes d’une belle exigence dans les nuances des âmes autant que dans celles des teintes et des peintures.
Désormais, chaque semaine, je vous proposerai une adresse d'hôtel et/ou de restaurant que je vous recommande. Comme ce sera prochainement le Festival du Film Britannique de Dinard en direct duquel vous pourrez me retrouver, je vous propose aujourd'hui de découvrir l'hôtel Le Nouveau Monde à Saint-Malo et son restaurant les 7 Mers. En complément, vous retrouverez également quelques adresses à Dinard et Saint-Malo.
Un film avec Catherine Deneuve est en soi déjà toujours une belle promesse, une promesse d’autant plus alléchante quand le film est réalisé par Emmanuelle Bercot dont j’avais découvert le cinéma avec « Clément », présenté à Cannes en 2001, dans le cadre de la Section Un Certain Regard, alors récompensé du Prix de la jeunesse dont je faisais justement partie cette année-là, l’histoire poignante et délicate (et délicatement traitée) de l’amour d’un adolescent pour une femme d’âge plus mûr (d’ailleurs interprétée avec beaucoup de justesse par Emmanuelle Bercot qui a obtenu cette année le prix d'interprétation à Cannes pour son magnifique rôle dans "Mon roi" de Maïwenn après avoir présenté sa nouvelle réalisation "La tête haute", en ouverture du festival). Une histoire intense dont chaque plan témoignait, transpirait de la ferveur amoureuse qui unissait les deux protagonistes. Puis, il y a eu « Backstage », et l’excellent scénario de « Polisse » dont elle était coscénariste.
L’idée du road movie avec Catherine Deneuve m’a tout d’abord fait penser au magistral « Je veux voir » de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige dans lequel le dernier regard de Catherine Deneuve à la fois décontenancé et ébloui puis passionné, troublé, troublant est un des plus beaux plans qu’il me soit arrivé de voir au cinéma contenant une multitude de possibles et toute la richesse de jeu de l’actrice. « Elle s’en va » est un road movie centré certes aussi sur Catherine Deneuve mais très différent et né du désir « viscéral » de la filmer (elle n’est sans doute pas la seule mais nous comprenons rapidement pourquoi l’actrice a accepté ici) comme l’a précisé la réalisatrice avant la projection.
L’actrice incarne ici Bettie (et non Betty comme celle de Chabrol), restauratrice à Concarneau, veuve (je vous laisse découvrir comment…), vivant avec sa mère (Claude Gensac !) qui la traite encore comme une adolescente. L’amant de Bettie vient de quitter sa femme… pour une autre qu’elle. Sa mère envahissante, son chagrin d’amour, son restaurant au bord de la faillite vont la faire quitter son restaurant, en plein service du midi, pour aller « faire un tour » en voiture, puis pour acheter des cigarettes. Le tour du pâté de maisons se transforme bientôt en échappée belle. Elle va alors partir sur les routes de France, et rencontrer toute une galerie de personnages dans une France qui pourrait être celle des « sous-préfectures » du « Journal de France » de Depardon. Et surtout, son voyage va la mener sur une voie inattendue…et nous aussi tant ce film est une surprise constante.
Après un premier plan sur Catherine Deneuve, au bord de la mer, éblouissante dans la lumière du soleil, et dont on se demande si elle va se « jeter à l’eau » (oui, d’ailleurs, d’une certaine manière), se succèdent des plans montrant des commerces fermées et des rues vides d’une ville de province, un chien à la fenêtre, une poésie décalée du quotidien aux accents de Depardon. Puis Bettie apparaît dans son restaurant. Elle s’affaire, tourbillonne, la caméra ne la lâche pas…comme sa mère, sans cesse après elle. Bettie va ensuite quitter le restaurant pour ne plus y revenir. Sa mère va la lâcher, la caméra aussi, de temps en temps : Emmanuelle Bercot la filme sous tous les angles et dans tous les sens ( sa nuque, sa chevelure lumineuse, même ses pieds, en plongée, en contre-plongée, de dos, de face, et même à l’envers) mais alterne aussi dans des plans plus larges qui la placent dans des situations inattendues dans de « drôle[s] d’endroit[s] pour une rencontre », y compris une aire d’autoroute comme dans le film éponyme.
Si l’admiration de la réalisatrice pour l’actrice transpire dans chaque plan, en revanche « Elle s’en va » n’est pas un film nostalgique sur le « mythe » Deneuve mais au contraire ancré dans son âge, le présent, sa féminité, la réalité. Emmanuelle Bercot n’a pas signé un hommage empesé mais au contraire un hymne à l’actrice et à la vie. Avec son jogging rouge dans « Potiche », elle avait prouvé (à ceux qui en doutaient encore) qu’elle pouvait tout oser, et surtout jouer avec son image d’icône. « Elle s’en va » comme aurait pu le faire craindre son titre (le titre anglais est « On my way ») ne signifie ainsi ni une révérence de l’actrice au cinéma (au contraire, ce film montre qu’elle a encore plein de choses à jouer et qu’elle peut encore nous surprendre) ni un film révérencieux, mais au contraire le film d’une femme libre sur une autre femme libre. Porter une perruque improbable, se montrer dure puis attendrissante et s’entendre dire qu’elle a dû « être belle quand elle était jeune » (dans une scène qui aurait pu être glauque et triste mais que la subtilité de l’écriture et de l’interprétation rendent attendrissante )…mais plus tard qu’elle sera « toujours belle même dans la tombe. » : elle semble prendre un malin plaisir à jouer avec son image.
Elle incarne ici un personnage qui est une fille avant d’être une mère et une grand-mère, et surtout une femme libre, une éternelle amoureuse. Au cours de son périple, elle va notamment rencontrer un vieil agriculteur (scène absolument irrésistible tout comme sa rencontre d’une nuit, belle découverte que Paul Hamy qui incarne l’heureux élu). Sa confrontation avec cette galerie de personnages incarnés par des non professionnels pourrait à chaque fois donner lieu à un court-métrage tant ce sont de savoureux moments de cinéma, mais une histoire et un portrait se construisent bel et bien au fil de la route. Le film va ensuite prendre une autre tournure lorsque son petit-fils l’accompagnera dans son périple. En découvrant la vie des autres, et en croyant fuir la sienne, elle va au contraire lui trouver un nouveau chemin, un nouveau sens, être libérée du poids du passé.
Si le film est essentiellement interprété par des non professionnels (qui apportent là aussi un naturel et un décalage judicieux), nous croisons aussi Mylène Demongeot (trop rare), le peintre Gérard Garouste et la chanteuse Camille (d’ailleurs l’interprète d’une chanson qui s’intitule « Elle s’en va » mais qui n’est pas présente dans le film) dans le rôle de la fille cyclothymique de Bettie et enfin Nemo Schiffman, irréprochable dans le rôle du petit-fils. Ajoutez à cela une remarquable BO et vous obtiendrez un des meilleurs films de l’année 2013.
Présenté en compétition officielle de la Berlinale 2013 et en compétition du Champs-Elysées Film Festival 20013, « Elle s’en va » a permis à Catherine Deneuve de recevoir le prix coup de cœur du Festival de Cabourg 2013.
« Elle s’en va » est d’abord un magnifique portrait de femme sublimant l’actrice qui l’incarne en la montrant paradoxalement plus naturelle que jamais, sans artifices, énergique et lumineuse, terriblement vivante surtout. C’est aussi une bouffée d’air frais et d’optimisme qui montre que soixante ans ou plus peut être l’âge de tous les possibles, celui d’un nouveau départ. En plus d’être tendre (parfois caustique mais jamais cynique ou cruel grâce à la subtilité de l’écriture d’Emmanuelle Bercot et le jeu nuancé de Catherine Deneuve), drôle et émouvant, « Elle s’en va » montre que , à tout âge, tout peut se (re)construire, y compris une famille et un nouvel amour. « Elle s’en va » est de ces films dont vous ressortez émus et le sourire aux lèvres avec l’envie d’embrasser la vie . Un bonheur ! Et un bonheur rare. Le film sort en salles le 18 septembre. Ne le manquez pas.
L’existence de Benjamin Button (Brad Pitt) débute à la Nouvelle Orléans à l’âge auquel elle s’achève pour certains : à 80 ans. Il nait avec le corps d’un vieillard rabougri et il rajeunit progressivement sans que rien ne puisse arrêter l’impitoyable course du temps. Sa mère meurt en lui donnant la vie. Son père (Jason Flemyng), effrayé par cet être étrange, le dépose sur les marches d’une maison de retraite (ce n’est évidemment pas anodin) où il sera recueilli par la charmante Queenie (Taraji P.Henson), il grandira au contact des autres pensionnaires.
Son histoire est lue dans une chambre d’hôpital par une fille (Julia Ormond) à sa mère Daisy (Cate Blanchett), une vieille dame à l’agonie qui possède le journal intime de Benjamin. Cette vieille dame est la femme dont Benjamin est tombé amoureux dès qu’il l’a vue, alors qu’elle n’était qu’une petite fille, la petite fille d’une des pensionnaires de la maison de retraite.
Tandis qu’à l’extérieur de l’hôpital l’ouragan Katrina gronde, la lecture déroule le cours de cette étrange vie à rebours, de 1918 à nos jours…
Adaptée d’une nouvelle de Scott Fitzgerald écrite en 1922, « L’étrange histoire de Benjamin Button » (elle-même inspirée d’une pensée de Mark Twain : « La vie serait bien plus heureuse si nous naissions à 80 ans et nous approchions graduellement de nos 18 ans ») est avant tout une idée prodigieuse, une métaphore magistrale sur la course-évidemment perdue d'avance- contre le temps, contre la mort, une brillante allégorie sur l’effroyable écoulement de temps. En cela, la très alléchante bande-annonce est à la fois fidèle et trompeuse. Fidèle en ce qu’elle reflète le sujet du film. Trompeuse en ce qu’elle n’en reflète que partiellement l’atmosphère, violemment mélancolique.
Plus que quiconque, Benjamin se sait condamné par l’inéluctable compte à rebours mais aussi condamné à profiter intensément de chaque instant. Son existence est jalonnée de rencontres insolites, touchantes, marquantes (parmi lesquelles celle avec le troublant personnage incarné par la talentueuse Tilda Swinton) inéluctablement tragiques car prisonnières de l’emprise du temps.
Le film aurait pu être outrancièrement mélodramatique mais l’écueil est brillamment évité : toutes les morts surviennent hors-champ. Benjamin grandit et rajeunit pourtant entouré par la mort comme si un autre cyclone balayait son entourage. David Fincher n’a pas réalisé de ces films caricaturalement hollywoodiens qui usent et abusent du gros plan suréclairé et de la musique à outrance. Le film est essentiellement en clair-obscur, la musique, judicieuse, d’Alexandre Desplat souligne sans surligner et laisse le plus souvent place au tic-tac récurrent, obsédant, omniprésent, terrifiant de l’horloge, symbole de ce temps que rien ne peut arrêter, même une horloge qui fonctionne à rebours, métaphore qui résonne d’autant plus dans une industrie hollywoodienne où rien ne semble arrêter la course effrénée et souvent ridicule au jeunisme.
Malgré son sujet qui relève du conte (finalement plus philosophique que fantastique) costumes, décors, époques savamment reconstituées, tout concourt au réalisme (option finalement aussi courageuse que judicieuse), de même que les réactions ou plutôt la relative absence de réactions à la particularité de Benjamin contre laquelle personne, pas même lui-même, ne cherche à lutter. En cela, c’est un hymne à la différence, de surcroît parce que Queenie qui l’adopte, est une jeune femme noire qui adopte donc un enfant blanc né dans des circonstances très étranges, à une époque où le racisme régnait.
« L’étrange histoire de Benjamin Button » est aussi et avant tout une magnifique histoire d’amour entre Benjamin et Daisy, une histoire qui défie les apparences, la raison, le temps et même la mort. L’histoire de deux destins qui se croisent, que les fils, tortueux, impitoyables et sublimes, du destin finissent toujours pas réunir, malgré le fracas du temps, de leurs temps, s’écoulant irrémédiablement dans deux directions opposées.
C’est encore une formidable prouesse technique (qui a nécessité 150 millions de dollars et 150 jours de tournage) qui l’est d’autant plus qu’elle n’est jamais là pour épater mais pour servir admirablement l’histoire. Ainsi, il fut un temps question de Robert Redford pour incarner Benjamin Button vieux. C’est finalement Brad Pitt qui interprète Benjamin Button tout au long de sa vie. L’impact dramatique et visuel à le voir ainsi rajeunir sublimement jusqu’à incarner la jeunesse dans toute sa ténébreuse splendeur, puis dramatiquement à redevenir un enfant ayant tout oublié, n’en est que plus fort. Sa nomination aux Oscars en tant que meilleur acteur est amplement méritée (le film est nommé 13 fois) et doit davantage à sa performance d’acteur qu’au maquillage, prouvant après « Babel » et « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » (cliquez sur le lien ci-contre pour voir ma vidéo de la conférence de presse au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2007 ainsi que la présentation du film) la très vaste palette de son jeu mais aussi l’intelligence de ses choix d’acteur. Face à lui Cate Blanchett incarne parfaitement cette femme finalement presque plus irréelle que lui, qui irradie, danse avec la vie, la dévore et la savoure.
Certes, le film comporte quelques longueurs (L’épisode de la guerre était-il vraiment nécessaire ?) sans pour autant être jamais ennuyeux, tout concourant à servir son thème principal et à rappeler le temps qui s’écoule tragiquement. Le temps de la séance (2H44) épouse ainsi judicieusement le thème du film incitant à ne pas vouloir aller à tout prix contre le temps et à apprendre à l’apprivoiser, à laisser le temps au temps, profiter de chaque rencontre et chaque instant sans pour autant vouloir tout obtenir, réussir, immédiatement.
Ce film est comme ces personnes (et comme son personnage principal) qui ne vous sont pas immédiatement sympathiques parce qu’elles ne cherchent pas à plaire à tout prix et par tous les moyens mais qui, quand vous les découvrez, progressivement et vraiment, vous procurent une impression, émotion même, qui n’en sont que plus profondes et intenses. Le charme est alors plus durable que celui, volatile, d’une beauté éphémère et incandescente.
« L’étrange histoire de Benjamin Button », malgré la singularité de son protagoniste, est un film à portée universelle sur la perte d’être chers, la cruelle et inexorable fuite du temps, l’amour inconditionnel et intemporel.
Au-delà de sa mélancolie, c’est aussi un magnifique hymne à la vie, dont chaque plan (une danse dans la nuit, un lever de soleil, une bouchée ou une gorgée dont ils se délectent…) chaque réplique incitent à « savourer » chaque instant, à croire en l’avenir, malgré tout, parce qu’ « on ne peut jamais savoir ce que l’avenir nous réserve ».
Ce n’est peut-être pas le chef d’œuvre auquel je m’attendais, mais à l’image de l’existence il n’a peut-être que plus de mérite et ne recèle que plus de beauté à sortir des sentiers battus et à charmer plus insidieusement, en cela c’est un beau et grand film qui porte et/ou hante bien après l’ouragan. Un film mélancolique , et donc, malgré tout sombre, tendre aussi, un hymne à la vie dont on ne ressort en tout cas pas indemne tant il bouscule en soi (en moi en tout cas) tout ce qui constitue l’essence même de l’existence, de son sens et de son temps, inéluctablement destructeur et fatal.
Ce sera déjà (et seulement ) la 7ème édition du Festival Lumière, un festival qui, en 7 ans, a réussi à s’imposer comme un événement cinématographique incontournable pour les cinéphiles de France et d’ailleurs.
Comme je vous le disais dans mon compte rendu de l’édition 2014 que vous pouvez retrouver ici, ce festival est unique, singulier, rare, festif ( peu nombreux sont les festivals qui se souviennent ainsi de la racine du substantif qui les désigne), convivial (l’accueil, invariablement affable dans toutes les salles du festival), cinéphile, généreux, populaire (« un festival de cinéma pour tous » indique l’affiche du festival, ce qu’il est incontestablement), passionnant. Et son nom, au-delà de la référence aux célèbres frères, lui va à merveille. Cinq jours sur la planète cinéphile dont, l’an passé, je suis revenue enthousiaste et enchantée, ensorcelée par cette lumineuse atmosphère. Le programme était tellement riche et varié que les choix furent cornéliens et de véritables tortures. Un film de Capra ou un film d’Almodovar? Une master class d’Isabella Rossellini ou un film de Sautet? Un ciné-concert ou un film d’Ida Lupino? Il était impossible de choisir! Les choix risquent d’être encore plus cornéliens cette année pour cette 7ème édition qui aura lieu du 12 au 18 octobre et dont la programmation s’annonce au moins aussi riche que celle de l’an passé.
Pour ma part, entre le prix Lumière décerné à Martin Scorsese (je me réjouis déjà de le voir tourner sa version de « La sortie de l’Usine Lumière », retrouvez mon récit de la version 2014, ici, avec Pedro Almodovar, Paolo Sorrentino et Xavier Dolan) et la projection de plusieurs de mes films préférés comme les films de Duvivier, « Docteur Jivago », « Casablanca » sans oublier les inénarrables séances présentées par le passionné et érudit Bertrand Tavernier (sa coprésentation des films Lumière avec Thierry Frémaux lors du Festival de Cannes 2015 reste pour moi le meilleur moment de cette édition) ou encore le show Lumière sans oublier les ciné-concerts (quel souvenir que la projection du film de Murnau l’an passé, « Le dernier des hommes »), je ne sais déjà plus où donner de la tête…
-la première réjouissante annonce concerne le prix Lumière qui, cette année, sera décerné à Martin Scorsese, qui succède ainsi à Pedro Almodovar, un choix incontestable que de décerner ce prestigieux prix (qu’ont reçu Clint Eastwood, Milos Forman, Gérard Depardieu, Ken Loach, Quentin Tarantino, Pedro Almodvar) à l’un des cinéastes les plus cinéphiles qui, en plus des nombreux chefs d’œuvre qu’il a réalisés outre sa palme d’or de 1976 « Taxi driver », apportant ainsi lui-même sa pierre à l’édifice, contribue aussi à la restauration de films notamment par le truchement de « The World Cinema Foundation » (quel inoubliable moment que sa présentation de la copie restaurée du « Guépard » de Visconti à Cannes!). Plusieurs films en copies restaurées seront ainsi présentés Lyon. Ce sera le premier voyage de Martin Scorsese à Lyon : « Ce que signifie le festival Lumière est très important, a-t-il déclaré. Et il représente beaucoup pour moi. Je suis fier d’y être invité et de recevoir le Prix Lumière. » Le Prix Lumière lui sera remis le vendredi 16 octobre au Centre de Congrès – salle 3000 de Lyon, en présence du public français et de nombreux invités venus du monde entier. Voilà déjà une excellente raison que de venir au festival…
-A l’occasion du festival, vous pourrez aussi découvrir le SHOW LUMIÈRE, mardi 29 septembre à 20h00 à l’Auditorium de Lyon. Après la projection à Cannes 2015, dans la grande salle du Palais, devant un public international de 2000 spectateurs (dont j’ai eu la chance de faire partie, sans aucun doute, mon meilleur moment de ce Festival de Cannes 2015, un grand moment de cinéphilie et de plaisir) qui a fait un triomphe aux films, une soirée exceptionnelle aura lieu à l’Auditorium de Lyon avec la projection inédite de Lumière, le film, en version restaurée 4K.
-Autre grand moment de ce festival : La Passion de Jeanne d’Arc, le chef-d’œuvre de Dreyer en ciné-concert à l’Auditorium de Lyon, le Dimanche 18 octobre à 11h avec, à l’orgue, Karol Mossakowski.
-Vous pourrez également redécouvrir Toy Story, mercredi 14 octobre à 14h30 à la Halle Tony Garnier. En exclusivité pour le festival, les studios Pixar ont réalisé une superbe copie numérique de leur chef d’œuvre, qui permettra aux petits et aux grands de le redécouvrir dans les meilleures.
- dans le cadre des « grandes projections de Lumière 2015 », la projection d’un des plus romanesques films de l’Histoire du cinéma, « Docteur Jivago » de David Lean, inoubliable pas seulement pour sa musique célèbre dans le monde entier, et d’un autre chef d’œuvre romantique dont la musique a fait le tour du monde « Out of Africa » de Sydney Pollack. A (re)voir absolument!
-le Festival Lumière 2015 rendra également hommage à l’acteur, scénariste, metteur en scène Jean Yanne mais aussi à Alexandre Desplat, le compositeur maintes fois récompensé notamment aux Oscars 2013 pour « Argo », un hommage sera également rendu à Akira Kurosawa avec la projection de films restaurés et rares mais aussi à une étoile filante du cinéma russe, Larissa Shepitko dont 3 films seront ainsi projetés,
-Nicolas Winding Refn, sera ainsi invité de Lumière 2015 pour parler de ses passions de cinéma avec, également, la sortie de « L’art du Regard », le livre de Nicolas Winding Refn chez Acte Sud, pendant le festival,
-Sophia Loren sera l’invitée d’honneur du festival,
-Le Festival fêtera les 120 ans de Gaumont avec des projections spéciales,
-Bertrand Tavernier poursuivra cette année son voyage dans le cinéma français avec les années 30 aux années 50, des séances que son érudition, son amour fou du cinéma, la passion communicative avec laquelle il le transmet, rendent toujours absolument mémorables,
-7 grands classiques de Julien Duvivier seront projetés parmi lesquels « Pépé le Moko », « « La belle équipe », « La bandera », « Carnet de bal ». Je vous les recommande tout particulièrement.
-les amateurs de films de genre se délecteront de « La nuit de la peur » à la halle Tony Garnier avec The Thing, La nuit des Morts-Vivants, Insidious…
-Lumière 2015 fêtera aussi les 100 ans du Technicolor et rendra aussi hommage au nitrate
-Le marché du film classique: pendant trois jours, les professionnels du cinéma (producteurs, distributeurs, exploitants, diffuseurs TV et VOD, éditeurs DVD-Blu-ray, ayants-droit, institutionnels…) sont invités à débattre et échanger sur l’état présent et sur l’avenir de l’exploitation du cinéma classique, ses défis et ses perspectives dans un environnement en pleine mutation. Un espace Marché, des tables rondes, des projections, des déjeuners et des rencontres. L’endroit idéal et désormais incontournable afin de nouer des relations d’affaire et mener à bien des échanges économiques.
En plus de cette incroyable programme qui sera complété fin août et sur lequel je reviendrai plus en détails, lors de la conférence de presse de ce 18 juin, Thierry Frémaux a rappelé que le festival Lumière travaille activement et depuis longtemps à un auto-financement accru et que cette année il s’autofinance à 55% avec des ressources propres.
Ce Festival présente l’avantage d’être accessible à tous et de permettre à chacun une véritable immersion cinéphilique. Rendez-vous sur la page « Accréditations » du site officiel du festival (une mine d’informations à consulter) pour en savoir plus. Suivez également le festival sur twitter (@FestLumiere) pour être régulièrement informés de sa riche actualité.
BONUS: critique d’un des nombreux chefs d’œuvre de Scorsese: SHUTTER ISLAND
Cela faisait longtemps. Longtemps que j’entendais parler de cette adaptation tant attendue du best seller de 2003 de Dennis Lehane (que je n’ai pas lu et qui est également l’auteur de best-sellers ayant donné lieu à d’excellentes adaptations cinématographiques comme « Mystic river » de Clint Eastwood et, dans une moindre mesure, « Gone baby gone » de Ben Affleck). Longtemps que je n’avais pas ressenti un tel choc cinématographique. Longtemps qu’un film ne m’avait pas autant hantée des heures après l’avoir vu… Un grand film, c’est en effet comme un coup de foudre. Une évidence. Une évidence qui fait que les mots à la fois manquent et se bousculent. Je vais essayer de trouver les plus justes pour vous faire partager mon enthousiasme sans trop en dévoiler.
Avant toute chose, il faut que je vous présente « Shutter island ». Shutter island est une île au large de Boston sur laquelle se trouve un hôpital psychiatrique où sont internés de dangereux criminels. Une île séparée en trois bâtiments : un pour les femmes, un pour les hommes et un pour les criminels les plus dangereux, enfin quatre si on compte son phare qui détient la clef de l’énigme. En 1954, l’une des patientes, Rachel Solando, a mystérieusement disparu… alors que sa cellule était fermée de l’extérieur, laissant pour seul indice une suite de lettres et de chiffres. Le marshal Teddy Daniels (Leonardo DiCaprio) et son coéquipier Chuck Aule (Mark Ruffalo) sont envoyés sur place pour résoudre cette énigme… Alors qu’une forte tempête s’abat sur l’île isolée, une plongée dans un univers étrange, sombre, angoissant s’annonce alors pour Teddy qui devra aussi affronter ses propres démons.
Rarement un film aura autant et si subtilement fait se confondre la fond et la forme, le ressenti du personnage principal et celui du spectateur. Dès le premier plan, lorsque Teddy, malade, rencontre son coéquipier sur un ferry brinquebalant et sous un ciel orageux, Scorsese nous embarque dans l’enfermement, la folie, un monde mental qui tangue constamment, flou, brouillé. Tout est déjà contenu dans cette première scène : cette rencontre qui sonne étrangement, le cadre qui enferme les deux coéquipiers et ne laisse voir personne d’autre sur le ferry, cette cravate dissonante, le mal de mer d’un Teddy crispé, le ciel menaçant, les paroles tournées vers un douloureux passé.
Puis, c’est l’arrivée sur l’île et toute la paranoïa que Scorsese suggère en un plan : un visage informe, un regard insistant… En quelques plans subjectifs, Scorsese nous « met » dans la tête de Teddy, nous incite à épouser son point de vue, à ne voir et croire que ce que lui voit et croit. Nous voilà enfermés dans le cerveau de Teddy lui-même enfermé sur « Shutter island ». Avec lui, nous nous enfonçons dans un univers de plus en plus menaçant, sombre, effrayant, déroutant. L’étrangeté des décors gothiques, l’instabilité du climat coïncident avec cette fragilité psychique. Tout devient imprévisible, instable, fugace, incertain.
Commence alors la quête de vérité pour Teddy alors que surgissent des images du passé : des images de sa femme défunte et des images de l’horreur du camp de concentration de Dachau dont Teddy est un des « libérateurs », images qui se rejoignent et se confondent parfois. L’hôpital, autre univers concentrationnaire rappelle alors les camps, avec ses êtres moribonds, décharnés, ses barbelés…, d’autant plus qu’il est dirigé par l’Allemand Dr Naehring. La guerre froide pendant laquelle se déroule l’intrigue, période paranoïaque par excellence, renforce de climat de suspicion. L’action est par ailleurs concentrée sur quatre jours, exacerbant encore l’intensité de chaque seconde, le sentiment d’urgence et de menace.
Chaque seconde, chaque plan font ainsi sens. Aucun qui ne soit superflu. Même ces images des camps dont l’esthétisation à outrance m’a d’abord choquée mais qui en réalité sont le reflet de l’esprit de Teddy qui enjolive l’intolérable réalité. Même (surtout) cette image envoûtante d’une beauté poétique et morbide qui fait pleuvoir les cendres.
A travers la perception de la réalité par Teddy, c’est la nôtre qui est mise à mal. Les repères entre la réalité et l’illusion sont brouillées. A l’image de ce que Teddy voit sur Shutter island où la frontière est si floue entre l’une et l’autre, nous interrogeons et mettons sans cesse en doute ce qui nous est donné à voir, partant nous aussi en quête de vérité. Le monde de Teddy et le nôtre se confondent : un monde de cinéma, d’images trompeuses et troublantes qui ne permet pas de dissocier vérité et mensonge, réalité et illusion, un monde de manipulation mentale et visuelle.
Pour incarner cet homme complexe que le traumatisme de ses blessures cauchemardesques et indélébiles et surtout la culpabilité étouffent, rongent, ravagent, Leonardo DiCaprio, habité par son rôle qui, en un regard, nous plonge dans un abîme où alternent et se mêlent même parfois angoisse, doutes, suspicion, folie, désarroi (interprétation tellement différente de celle des « Noces rebelles » mais tout aussi magistrale qui témoigne de la diversité de son jeu). La subtilité de son jeu fait qu’on y croit, qu’on le croit ; il est incontestablement pour beaucoup dans cette réussite. De même que les autres rôles, grâce à la duplicité des interprétations (dans les deux sens du terme): Mark Ruffalo, Ben Kingsley, Michelle Williams, Emily Mortimer, Patricia Clarkson, Max von Sydow…
Le maître Scorsese n’a pas son pareil pour créer une atmosphère oppressante, claustrophobique, pour déstabiliser les certitudes. Une œuvre pessimiste d’une maîtrise formelle et scénaristique impressionnante, jalonnée de fulgurances poétiques, dont chaque plan, jusqu’au dernier, joue avec sa et notre perception de la réalité. Un thriller psychologique palpitant et vertigineux. Une réflexion malicieuse sur la culpabilité, le traumatisme (au sens éthymologique, vcous comprendrez en voyant le film) et la perception de la réalité dont le film tout entier témoigne de l’implacable incertitude. Ne cherchez pas la clef. Laissez-vous entraîner. « Shutter island », je vous le garantis, vous emmènera bien plus loin que dans cette enquête policière, bien plus loin que les apparences.
Un film multiple à l’image des trois films que Scorsese avait demandé à ses acteurs de voir avant le tournage: « Laura » d’Otto Preminger, « La griffe du passé » de Jacques Tourneur, « Sueurs froides » d’Alfred Hitchcock. Un film noir. Un film effrayant. Un thriller. En s’inspirant de plusieurs genres, en empruntant à ces différents genres, Martin Scorsese a créé le sien et une nouvelle fois apposé la marque de son style inimitable.
Un film dont on ressort avec une seule envie : le revoir aussitôt. Un film brillant. Du très grand Scorsese. Du très grand cinéma. A voir et encore plus à revoir. Immédiatement !
Ce soir, à 20H50, sur Arte, ne manquez sous aucun prétexte le magnifique "Mademoiselle Chambon" de Stéphane Brizé avec Vincent Lindon (qui cette année a obtenu le prix d'interprétation à Cannes pour "La loi du marché"du même Stéphane Brizé) et Sandrine Kiberlain, un des meilleurs films de l'année 2009. Retrouvez ma critique ci-dessous:
Cela pourrait se résumer en une phrase : Jean (Vincent Lindon), maçon, bon mari et père de famille, croise la route de la maîtresse d'école de son fils, Mademoiselle Chambon (Sandrine Kiberlain) ; leurs sentiments réciproques vont s'imposer à eux. Enfin non, justement, cela ne se résume pas en une phrase parce que tout ce qui importe ici réside ailleurs que dans les mots, même si ce film est inspiré de ceux du roman d'Eric Holder.
Les mots sont impuissants à exprimer cette indicible évidence. Celle d'un regard qui affronte, esquive, tremble, vacille imperceptiblement. Celle d'une lèvre dont un rictus trahit un trouble ou une blessure. Celle d'une rencontre improbable mais impérieuse. Entre un homme qui ne sait pas manier les mots (la preuve, c'est son fils qui lui apprend ce qu'est le complément d'objet direct) et vit du travail de ses mains et une femme dont c'est le métier que de manier les mots, les apprendre. Lui construit des maisons, elle déménage sans cesse. Lui est ancré dans la terre, elle est évanescente. Il a un prénom, elle est avant tout mademoiselle. Lui a un lien douloureux et charnel avec son père, ses parents à elle ne lui parlent que par téléphone interposé et pour lui faire l'éloge de sa sœur. Et pourtant, et justement : l'évidence. La musique va alors devenir le langage qui va cristalliser leurs émotions, et les sanglots longs des violons (pas de l'automne, comme ceux de Verlaine, mais ici du printemps, avec une langueur plus mélancolique que monotone) exprimer la violence de leurs irrépressibles sentiments.
Comme dans le magnifique « Je ne suis pas là pour être aimé », on retrouve cette tendre cruauté et cette description de la province, glaciale et intemporelle. Ces douloureux silences. Cette sensualité dans les gestes chorégraphiés, déterminés et maladroits. Cette révolte contre la lancinance de l'existence. Et ce choix face au destin. Cruel. Courageux ou lâche. (Magnifique scène de la gare dont la tension exprime le combat entre ces deux notions, la vérité étant finalement, sans doute, au-delà, et par un astucieux montage, Stéphane Brizé en exprime toute l'ambivalence, sans jamais juger ses personnages...). On retrouve aussi cet humour caustique et cette mélancolie grave, notamment dans la scène des pompes funèbres qui résume toute la tendresse et la douleur sourdes d'une existence et qui fait écho à celle de la maison de retraite dans « Je ne suis pas là pour être aimé. »
Mais ce film ne serait pas ce petit bijou de délicatesse sans l'incroyable présence de ses acteurs principaux, Vincent Lindon ( déjà magistral notamment dans "Welcome, "Pater", "Pour elle" ) d'abord, encore une fois phénoménal, aussi crédible en maçon ici qu'en avocat ailleurs. Son mélange de force et de fragilité, de certitudes et de fêlures, sa façon maladroite et presque animale de marcher, de manier les mots, avec parcimonie, sa manière gauche de tourner les pages ou la manière dont son dos même se courbe et s'impose, dont son regard évite ou affronte : tout en lui nous faisant oublier l'acteur pour nous mettre face à l'évidence de ce personnage. Et puis Sandrine Kiberlain, rayonnante, lumineuse, mais blessée qui parvient à faire passer l'émotion sans jamais la forcer. Aure Atika, qui interprète ici l'épouse de Vincent Lindon, est, quant à elle, absolument méconnaissable, d'une justesse irréprochable et d'une sobriété remarquable. Elle parvient à faire exister son personnage, dans l'ombre pourtant. Sans doute faut-il aussi une direction d'acteurs d'une précision, d'une sensibilité rares pour arriver à une telle impression d'évidence et de perfection ( la preuve, les seconds rôles sont d'ailleurs tout aussi parfaits).
Une histoire simple sur des gens simples que Stéphane Brizé (avec la complicité de Florence Vignon, déjà co-scénariste du très beau « Le bleu des villes ») compose avec dignité dans un film épuré, sensible qui fait de ses personnages des héros du quotidien emprisonnés dans un fier et douloureux silence (résumé par le dernier plan d'une belle luminosité derrière les barreaux d'une fenêtre ). Un film qui, encore une fois, rappelle le cinéma de Claude Sautet (notamment par l'utilisation du violon et de la musique comme éléments cristallisateurs qui rappellent mon film fétiche « Un cœur en hiver » mais aussi par la sublimation d'une « histoire simple ») qui, tout en « faisant aimer la vie » et la poésie des silences, en souligne toute la quotidienne et silencieuse beauté, cruelle et dévastatrice.